Page images
PDF
EPUB

MANUSCRIT AUTOGRAPHE, p. 7.`

EDITIONS.

Car il ne sert de rien de dire qu'il Car il ne sert de rien de dire est incertain si on gagnera et qu'il qu'il est incertain si on gagnera et est certain qu'on hasarde, et que qu'il est certain qu'on hasarde, et l'infinie distance qui est entre la que l'infinie distance, qui est entre certitude qu'on s'expose et l'incer- la certitude de ce qu'on expose et titude de ce qu'on gagnera égale l'incertitude de ce que l'on gagnele bien fini qu'on expose certaine- ra, égale le bien fini qu'on expose ment à l'infini qui est incertain. certainement à l'infini qui est inCela n'est pas ainsi; tout joueur certain. Cela n'est pas ainsi : tout hasarde avec certitude pour gagner joueur hasarde avec certitude pour avec incertitude. Et néanmoins il gagner avec incertitude. Et néanhasarde certainement le fini pour moins il hasarde certainement le gagner incertainement le fini, sans fini, pour gagner incertainement le pécher contre la raison. Il n'y a pas fini, sans pécher contre la raison. infinité de distance entre cette cer- Il n'y a pas infinité de distance entitude de ce qu'on s'expose et l'in- tre cette certitude de ce qu'on expose certitude du gain; cela est faux. Il et l'incertitude du gain; cela est y a à la vérité infinité entre la cer- faux. Il y a à la vérité infinité titude de gagner et la certitude de entre la certitude de gagner et la perdre; mais l'incertitude de gagner certitude de perdre; mais l'incerest proportionnée à la certitude de titude de gagner est proportionnée ce qu'on hasarde, selon la propor- à la certitude de ce qu'on hasarde, tion des hasards de gain et de per- selon la proportion des hasards de te; et de là vient que s'il y a au- gain et de perte: et de là vient que tant de hasards d'un côté que de s'il y a autant de hasards d'un côté l'autre, le parti est à jouer égal que de l'autre, le parti est à jouer contre égal; et alors la certitude de égal contre égal; et alors la certice qu'on s'expose est égale à l'in- tude de ce qu'on expose est égale à certitude du gain: tant s'en faut l'incertitude du gain: tant s'en faut qu'elle en soit infiniment distante! qu'elle en soit infiniment distaute! Et ainsi notre proposition est dans Et ainsi notre proposition est dans une force infinie, quand il y a le une force infinie, quand il n'y a fini à hasarder à un jeu où il y a que le fini à hasarder à un jeu où il pareils hasards de gain que de y a de pareils hasards de gain que perte, et l'infini à gagner. Cela est de perte, et l'infini à gagner. Cela démonstratif; et si les hommes est démonstratif; et si les hommes sont capables de quelque vérité, sont capables de quelques vérités, celle-là l'est. ils le doivent être de celle-là.

(P. 4, à la marge.)

Je le confesse, je l'avoue. Mais Je le confesse, je l'avoue, mais encore n'y auroit-il point de moyen

[blocks in formation]

Il est vrai; mais apprenez au moins votre impuissance à croire', puisque la raison vous y porte, et que néanmoins vous ne le pouvez. Travaillez donc non pas à vous convaincre par l'augmentation des preuvres de Dieu, mais par la diminution de vos passions. Vous voulez aller à la foi, et vous n'en savez pas le chemin; vous voulez vous guérir de l'infidélité, et vous en demandez les remèdes. Apprenez (les) de ceux qui ont été liés comme vous, et qui parient maintenant tout leur bien. Ce sont gens qui savent un chemin que vous voudriez suivre, et guéris d'uu mal dont vous voulez guérir. Suivez la manière par où ils ont commencé: c'est en faisant tout comme s'ils croyoient, en prenant de l'eau bénite, en faisant dire des messes, etc. Naturellement même cela vous fera

1. La première manière de Pascal se voi encore dans le manuscrit :

Mais aprenez au mos que votre impuissance à croire ne vient que du défaut de vos passions. Trav...

ÉDITIONS.

de voir un peu clair? Oui, par le moyen de l'Écriture, et par toutes les autres preuves de la religion, qui sont infinies.

(Suivent dans P.-R. 3 paragraphes, tirés de différents endroits du Msc., et un 4e: « Quel mal vous arrivera-t-il en prenant ce parti....>> qui doit venir plus tard, et que Pascal a lui-même intitulé: Fin de ce discours.)

(P.-R., ibid.)

Vous dites que vous êtes fait de telle sorte que vous ne sauriez croire. Apprenez au moins votre impuissance à croire, puisque la raison vous y porte, et que néanmoins vous ne le pouvez. Travaillez donc à vous convaincre, non pas par l'augmentation des preuves de Dieu, mais par la diminution de vos passions. Vous voulez aller à la foi, et vous n'en savez pas le chemin; vous voulez vous guérir de l'infidélité, et vous en demandez les remèdes: apprenez-les de ceux qui ont été tels que vous et qui n'ont présentement aucun doute. Ils savent ce chemin que vous voudriez suivre, et ils sont guéris d'un mal dont vous voulez guérir. Suivez la manière par où ils ont commencé; imitez leurs actions extérieures, si vous ne pouvez encore entrer dans leurs dispositions intérieures; quit

MANUSCRIT AUTOGRAPHE, p. 4.

croire et vous abêtira. Mais c'est ce que je crains. Et pourquoi? qu'avez-vous à perdre ?

Mais pour vous montrer que cela y mène, c'est que cela diminue les passions qui sont vos grands obstacles, etc. (P. 7.)

Or, quel mal vous arrivera-t-il en prenant ce parti? Vous serez fidèle, honnête, humble, reconnoissant, bienfaisant, ami1 sincère, véritable. A la vérité vous ne serez point dans les plaisirs empestés, dans la gloire, dans les délices; mais n'en aurez-vous point d'autres? Je vous dis que vous y gagnerez en cette vie; et qu'à chaque pas que vous ferez dans ce chemin, vous verrez tant de certitude de gain, et tant de néant de ce que vous hasardez, que vous connoitrez à la fin que vous avez parié pour une chose certaine, infinie, pour laquelle vous n'avez rien donné.

(P. 4, à la marge.)

ÉDITIONS.

tez ces vains amusements qui vous occupent tout entier.

(P.-R. donne ici deux paragraphes étrangers à ce morceau: « J'aurois bientôt quitté ces plai sirs. »)

Quel mal vous arrivera-t-il en prenant ce parti? Vous serez fidèle, honnête, humble, reconnoissant, bienfaisant, sincère, véritable. A la vérité vous ne serez point dans les plaisirs empestés, dans la gloire, dans les délices. Mais n'en aurezvous point d'autres? Je vous dis que vous gagnerez en cette vie; et qu'à chaque pas que vous ferez dans ce chemin, vous verrez tant de certitude de gain, et tant de néant dans ce que vous hasardez, que vous connoitrez à la fin que vous avez parié pour une chose certaine et infinie, et que vous n'avez rien donné pour l'obtenir.

O ce discours me transporte, me ravit, etc.

Si ce discours vous plaît et vous semble fort, sachez qu'il est fait par un homme qui s'est mis à genoux auparavant et après, pour prier cet Être infini et sans parties, auquel il soumet tout le sien, de se soumettre auss le votre pour votre propre bien et pour sa gloire, et qu'ainsi la force s'accorde avec cette bassesse.

1. Dans le manuscrit et dans l'une des copies, il y a une virgule apres ami.

DISPROPORTION DE L'HOMME'.

MANUSCRIT AUTOGRAPHE, P. 347-361.

Pages bien suivies et très travaillées.

(P. 347.)

Voilà où nous mènent les connoissances naturelles. Si celles-là ne sont véritables, il n'y a point de vérité dans l'homme; si elles le sont, il y trouve un grand sujet d'humiliation, forcé à s'abaisser d'une ou d'autre manière; et, puisqu'il ne peut subsister sans les croire, je souhaite, avant que d'entrer dans de plus grandes recherches de la nature, qu'il la considère une fois sérieusement et à loisir, qu'il se regarde aussi soi-même et juge s'il a quelque proportion avec elle par la comparaison qu'il fera de ces deux objets. (Cet alinéa est barré dans le Msc.)

Que l'homme contemple donc la nature entière dans sa haute et pleine majesté; qu'il éloigne sa vue des objets bas qui l'environnent; qu'il regarde cette éclatante lumière mise comme une lampe éternelle pour éclairer l'univers; que la terre lui paroisse comme un

ÉDITIONS.

(Port-Royal, ch. xx. Connoissance générale de l'homme.)

La première chose qui s'offre à l'homme quand il se regarde, c'est son corps, c'est-à-dire une certaine portion de matière qui lui est propre. Mais pour comprendre ce qu'elle est, il faut qu'il la compare avec tout ce qui est au-dessus de lui et tout ce qui est au-dessous, afin de reconnoitre ses justes bornes.

Qu'il ne s'arrête donc pas à regarder simplement les objets qui l'environnent; qu'il contemple la nature entière dans sa haute et pleine majesté; qu'il considère cette éclatante lumière, mise comme une lampe éternelle pour éclairer l'univers; que la terre lui paroisse

1. Voyez l'examen détaillé de ce morceau, Rapport, p. 188-196.

MANUSCRIT AUTOGRAPHE,

P. 347-361.

point au prix du vaste tour que cet astre décrit, et qu'il s'étonne de ce que ce vaste tour lui-même n'est qu'un point très-délicat à l'égard de celui que les astres qui roulent dans le firmament embrassent. Mais si notre vue s'arrête là, que l'imagination passe outre elle se lassera plutôt de concevoir que la nature de fournir. Tout le monde visible n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein1 de la nature. Nulle idée n'en approche; nous avons beau enfler nos conceptions au delà des espaces imaginables, nous n'enfantons que des atomes au prix de la réalité des choses c'est une sphère infinie dont le centre est partout, la circonférence nulle part. Enfin c'est le plus grand caractère sensible de la toute-puissance de Dieu que notre imagination se perde dans cette pensée. (P. 348.)

Que l'homme étant revenu à soi, considère ce qu'il est au prix de ce qui est; qu'il se regarde comme égaré dans ce canton détourné de la nature, et que, de ce petit cachot où il se trouve logé, j'entends l'univers, il apprenne à estimer la

ÉDITIONS.

comme un point au prix du vaste tour que cet astre décrit, et qu'il s'étonne de ce que ce vaste tour lui-mème n'est qu'un point trèsdélicat à l'égard de celui que les astres qui roulent dans le firmament embrassent. Mais si notre vue s'arrête là, que l'imagination passe outre elle se lassera plutôt de concevoir que la nature de fournir. Tout ce que nous voyons du monde n'est qu'un trait imperceptible dans l'ample sein de la nature; nulle idée n'approche de l'étendue de ses espaces; nous avons beau enfler nos conceptions, nous n'enfantons que des atomes au prix de la réalité des choses: c'est une sphère infinie dont le centre est partout, la circonférence nulle part. Enfin c'est un des plus grands caractères sensibles de la toutepuissance de Dieu que notre imagination se perde dans cette pensée.

Que l'homme, étant revenu à soi, considère ce qu'il est au prix de ce qui est; qu'il se regarde comme égaré dans ce canton détourné de la nature, et que, de ce que lui paroîtra ce petit cachot où il se trouve logé, c'est-à-dire ce monde visible,

1. Pascal avait mis d'abord, Dans l'amplitude et immensité de la nature.

1. Pascal avait mis d'abord. Dans l'immense étendue des choses. » Ce petit morceau est plein de ratures, et porte la trace d'un grand travail.

« PreviousContinue »