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Clément; fur l'impofteur qui a pris le nom d'Hermas fur l'impofteur Abdias, l'impofteur Marcel, l'impofteur Egésippe; fur la fuppofition de miférables vers attribués aux fibylles. Et après cette foule de menfonges vient une foule d'interminables difputes.

Le mahométifme plus raifonnable en apparence & moins impur, annoncé par un feul prophète prétendu, enfeignant un feul Dieu, configné dans un feul livre authentique; fe divife pourtant en deux fectes qui fe combattent avec le fer, & en plus de douze qui s'injurient avec la plume.

L'antique religion des brachmanes fouffre depuis long-temps un grand schisme. Les uns tiennent pour le Charthabhad, les autres pour l'Othorabhad. Les uns croient la chute des animaux céleftes à la place defquels DIEU forma l'homme, fable qui paffa enfuite en Syrie & même chez les Juifs du temps d'Hérode. Les autres enfeignent une cofmogonie contraire.

Le judaïsme, le fabisme, la religion de Zoroastre rampent dans la pouffière. Le culte de Tyr & de Carthage eft tombé avec ces puissantes villes. La religion des Miltiades & des Périclès, celle des Paul Emile & des Catons, ne font plus; celle d'Odin eft anéantie; les mystères & les monftres d'Egypte ont difparu; la langue même d'Ofiris, devenue celle des Ptolomées, eft ignorée de leurs defcendans le théifme feul est refté debout parmi tant de viciffitudes, & dans le fracas de tant de ruines, immuable comme le Dieu qui en eft l'auteur & l'objet éternel.

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Bénédictions fur la tolérance.

SOYEZ béni à jamais, Sire. Vous avez établi chez vous la liberté de confcience. DIEU & les hommes. vous en ont récompenfé. Vos peuples multiplient, vos richeffes augmentent, vos Etats profpèrent, vos voifins vous imitent; cette grande partie du monde devient plus heureuse.

Puiffent tous les gouvernemens prendre pour modèle cette admirable loi de la Penfilvanie, dictée par le pacifique Pen, & fignée par le roi d'Angleterre Charles 11, le 4 mars 1681!

que

tous

"La liberté de confcience étant un droit ,, les hommes ont reçu de la nature avec l'existence, "il eft fermement établi que perfonne ne fera jamais " forcé d'affifter à aucun exercice public de religion. ,, Au contraire, il eft donné plein pouvoir à chacun de faire librement exercice public ou privé de fa " religion, fans qu'on le puiffe troubler en rien, " pourvu qu'il faffe profeffion de croire un Dieu. " éternel, tout-puiffant, formateur & confervateur " de l'univers. ""

Par cette loi, le théifme a été confacré comme le centre où toutes les lignes vont aboutir, comme le feul principe nécessaire. Auffi qu'eft-il arrivé? la colonie pour laquelle cette loi fut faite n'était alors compofée que de cinq cents têtes, elle eft aujourd'hui de trois cents mille. Nos fuabes, nos falsbourgeois, nos palatins, plufieurs autres colons de notre baffe Allemagne, des fuédois, des holfteinois, ont couru en foule à Philadelphie, Elle est devenue une des plus belles &

des plus heureufes villes de la terre, & la métropole de dix villes confidérables. Plus de vingt religions font autorisées dans cette province floriffante fous la protection du théifine leur père, qui ne détourne point les yeux de fes enfans, tout oppofés qu'ils font entr'eux, pourvu qu'ils fe reconnaiffent pour frères. Tout y eft en paix, tout y vit dans une heureufe fimplicité; pendant que l'avarice, l'ambition, l'hypocrifie oppriment encore les confciences dans tant de provinces de notre Europe tant il eft vrai que le théifme eft doux, & que la fuperftition eft barbare.

Que toute religion rend témoignage au théisme.

TOUTE religion rend malgré elle hommage au théifme, quand même elle le perfécute. Ce font des eaux corrompues partagées en canaux dans des terrains fangeux, mais la fource eft pure. Le mahométan dit: Je ne fuis ni juif ni chrétien, je remonte à Abraham; il n'était point idolâtre, il adorait un feul Dieu. Interrogez Abraham, il vous dira qu'il était de la religion de Noé qui adorait un feul Dieu. Que Noe parle, il confeffera qu'il était de la religion de Seth; & Seth ne pourra dire autre chose finon qu'il était de la religion d'Adam qui adorait un feul Dieu.

Le juif & le chrétien font forcés, comme nous l'avons vu, de remonter à la même origine. Il faut qu'ils avouent que, fuivant leurs propres livres, le théifme a régné fur la terre jufqu'au déluge pendant 1656 ans felon la Vulgate; pendant 2262 ans felon les Septante; pendant 2309 ans felon les Samaritains; & qu'ainfi, à s'en tenir au plus faible nombre, le

theisme a été la feule religion divine pendant 2513 années, jufqu'au temps où les Juifs difent que DIEU leur donna une loi particulière dans un désert.

Enfin, fi le calcul du père Pétau était vrai; fi felon cet étrange philofophe qui a fait, comme on l'a dit, tant d'enfans à coup de plume, il y avait fix cents vingttrois milliars fix cents douze millions d'hommes fur la terre, defcendans d'un feul fils de Noé; fi les deux autres frères en avaient produit chacun autant; fi par conféquent la terre fut peuplée de plus de dix-neuf cents milliars de fidelles, en l'an 285 après le déluge, & cela vers le temps de la naiffance d'Abraham felon Petau; & fi les hommes en ce temps-là n'avaient pas corrompu leurs voies; il s'enfuit évidemment qu'il y eut alors environ dix-neuf cents milliars de théiftes, de plus qu'il n'y a aujourd'hui d'hommes fur la terre.

Remontrance à toutes les religions.

POURQUOI donc vous élevez-vous aujourd'hui avec tant d'acharnement contre le théifme, Religions nées de fon fein; vous qui n'avez de refpectable que l'empreinte de fes traits défigurés par vos fuperftitions & par vos fables; vous, filles parricides, qui voulez détruire votre père? quelle eft la caufe de vos continuelles fureurs? Craignez-vous que les théiftes ne vous traitent comme vous avez traité le paganifme, qu'ils ne vous enlèvent vos temples, vos revenus, vos honneurs? raffurez-vous, vos craintes font chimériques. Les théiftes n'ont point de fanatifme, ils ne peuvent donc faire de mal; ils ne forment point un corps, ils

n'ont point de vues ambitieuses; répandus fur la furface de la terre, ils ne l'ont jamais troublée; l'antre le plus infect des moines les plus imbécilles peut cent fois plus fur la populace que tous les théiftes du monde; ils ne s'affemblent point, ils ne prêchent point, ils ne font point de cabales. Loin d'en vouloir aux revenus des temples, ils fouhaitent que les églifes, les mofquées, les pagodes de tant de villages, aient toutes une fubfistance honnête; que ; que les curés, les mollas, les brames, les talapoins, les bonzes, les lamas de campagne foient plus à leur aife, pour avoir plus de foin des enfans nouveaux-nés, pour mieux fecourir les malades, pour porter plus décemment les morts à la terre ou au bûcher; ils gémiffent que ceux qui travaillent le plus foient le moins récompenfés.

Peut-être font-ils furpris de voir des hommes voués par leurs fermens à l'humilité & à la pauvreté, revêtus du titre de prince, nageans dans l'opulence, & entourés d'un fafte qui indigne les citoyens. Peut-être ont-ils été révoltés en fecret, lorfqu'un prêtre d'un certain pays a impofé des lois aux monarques, & des tributs à leurs peuples. Ils défireraient pour le bon ordre, pour l'équité naturelle, que chaque Etat fût abfolument indépendant; mais ils fe bornent à des fouhaits, & ils n'ont jamais prétendu ramener la justice par la

violence.

Tels font les théiftes; ils font les frères ainés du genrehumain, & ils chériffent leurs frères. Ne les haïffez donc pas; fupportez ceux qui vous fupportent; ne faites point de mal à ceux qui ne vous en ont jamais fait; ne violez point l'antique précepte de toutes les religions du monde, qui eft celui d'aimer DIEU & les hommes.

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