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Des mœurs.

LES mœurs des théiftes font néceffairement pures; puifqu'ils ont toujours le DIEU de la juftice & de la pureté devant les yeux, le DIEU qui ne defcend point fur la terre pour ordonner qu'on vole les Egyptiens, pour commander à Ofée de prendre une concubine à prix d'argent & de coucher avec une femme adultère. (4)

Auffi ne nous voit-on pas vendre nos femmes comme Abraham. Nous ne nous enivrons point comme Noé, & nos fils n'infultent pas au membre refpectable qui les a fait naître. Nos filles ne couchent point avec leurs pères, comme les filles de Loth & comme la fille du pape Alexandre VI. Nous ne violons point nos fœurs, comme Ammon viola fa four Thamar; nous n'avons point parmi nous de prêtres qui nous applaniffent la voie du crime en ofant nous abfoudre de la part de DIEU de toutes les iniquités que fa loi éternelle condamne. Plus nous méprifons les fuperftitions qui nous environnent, plus nous nous impofons la douce néceffité d'être juftes & humains. Nous regardons tous les hommes avec des yeux fraternels; nous les fecourons indiftin&tement; nous tendons des mains. favorables aux fuperftitieux qui nous outragent.

Si quelqu'un parmi nous s'écarte de notre loi divine, s'il eft injufte & perfide envers fes amis, ingrat envers fes bienfaiteurs; fi fon orgueil inconftant & féroce contrifte fes frères, nous le déclarons indigne du faint nom de théile; nous le rejetons de notre (4) Ofee, chap. I.

fociété;

fociété; mais fans lui vouloir de mal, & toujours prêts à lui faire du bien; perfuadés qu'il faut pardonner, & qu'il eft beau de faire des ingrats.

Si quelqu'un de nos frères voulait apporter le moindre trouble dans le gouvernement, il ne ferait plus notre frère. Ce ne furent certainement pas des théiftes qui excitèrent autrefois les révoltes de Naples, qui ont trempé récemment dans la confpiration de Madrid, qui allumèrent les guerres de la fronde & des Guifes en France, celle de trente ans dans notre Allemagne &c. &c. &c. Nous fommes fidelles à nos princes, nous payons tous les impôts fans murmures. Les rois doivent nous regarder comme les meilleurs citoyens & les meilleurs fujets. Séparés du vil peuple qui n'obéit qu'à la force & qui ne raifonne jamais, plus féparés encore des théologiens qui raifonnent fi mal, nous fommes les foutiens des trônes que les difputes eccléfiaftiques ont ébranlés pendant tant de fiècles.

Utiles à l'Etat, nous ne fommes point dangereux à l'Eglife; nous imitons JESUS qui allait au temple.

De la doctrine des théiftes.

ADORATEURS d'un Dieu, amis des hommes, compatiffans aux fuperftitions même que nous réprouvons, nous refpectons toute fociété, nous n'infultons aucune fecte; nous ne parlons jamais avec dérifion, avec mépris de JESUS qu'on appelle le CHRIST; au contraire nous le regardons comme un homme diftingué entre les hommes par fon zèle, par Philofophie &c. Tome I.

A a

fa vertu, par fon amour de l'égalité fraternelle; nous le plaignons comme un réformateur peut-être un peu inconsidéré, qui fut la victime des fanatiques perfécuteurs.

Nous révérons en lui un théifte ifraélite, ainfi que nous louons Socrate qui fut un theifte athénien. Socrate adorait un Dieu & l'appelait du nom de père, comme le dit fon évangélifte Platon. JESUS appela toujours DIEU du nom de père, & la formule de prière qu'il enfeigna commence par ces mots fi communs dans Platon, Notre père. Ni Socrate ni JESUS n'écrivirent jamais rien; ni l'un ni l'autre n'inftitua une religion nouvelle. Certe, fi JESUS avait voulu faire une religion, il l'aurait écrite. S'il eft dit que JESUS envoya fes difciples pour baptifer, il fe conforma à l'usage. Le baptême était d'une très-haute antiquité chez les Juifs; c'était une cérémonie facrée, empruntée des Egyptiens & des Indiens, ainfi que prefque tous les rites judaïques. On baptifait tous les profėlytes chez les Hébreux. Les mâles recevaient le baptême après la circoncifion. Les femmes profelytes étaient baptifées; cette cérémonie ne pouvait fe faire qu'en préfence de trois anciens au moins; fans quoi la régénération était nulle. Ceux qui parmi les Ifraélites afpiraient à une plus haute perfection, fe fefaient baptifer dans le Jourdain. JESUS lui-même fe fit baptifer par Jean, quoiqu'aucun de fes apòtres ne fut jamais baptifé.

Si JESUS envoya fes difciples pour chaffer les diables, il y avait déjà très-long-temps que les Juifs croyaient guérir des poffédés & chaffer des diables. JESUS même l'avoue dans le livre qui porte le nom

de Matthieu. (r) Il convient que les enfans même chaffaient les diables.

JESUS à la vérité obferva toutes les inftitutions judaïques; mais par toutes fes invectives contre les prêtres de fon temps, par les injures atroces qu'il difait aux pharifiens, & qui lui attirèrent fon fupplice, il paraît qu'il fefait auffi peu de cas des fuperftitions judaïques que Socrate des fuperftitions athéniennes.

JESUS n'inftitua rien qui eût le moindre rapport aux dogmes chrétiens; il ne prononça jamais le mot de chrétien quelques-uns de fes difciples ne prirent ce furnom que plus de trente ans après sa

mort.

L'idée d'ofer faire d'un juif le créateur du ciel & de la terre, n'entra certainement jamais dans la tête de JESUS. Si l'on s'en rapporte aux évangiles, il était plus éloigné de cette étrange prétention que la terre ne l'eft du ciel. Il dit expreffément avant d'être fupplicié: Je vais à mon père qui eft votre père, à mon DIEU qui efl votre DIEU. (s)

Jamais Paul, tout ardent enthoufiafte qu'il était, n'a parlé de JESUS que comme d'un homme choifi par DIEU même pour ramener les hommes à la juftice.

Et JESUS, ni aucun de ses apôtres, n'a dit qu'il eût deux natures & une perfonne avec deux volontés; que fa mère fût mère de DIEU, que fon efprit fût la troifième perfonne de DIEU, & que cet efprit procédât du Père & du Fils. Si l'on trouve un feul de ces dogmes dans les quatre évangiles, qu'on nous le montre: (r) Matthieu, chap. XII.

(s) Jean, chap. XX.

qu'on ôte tout ce qui lui eft étranger, tout ce qu'on lui a attribué en divers temps au milieu des difputes les plus fcandaleufes, & des conciles qui s'anathématifèrent les uns les autres avec tant de fureur, que refte-t-il en lui? un adorateur de DIEU qui a prêché la vertu, un ennemi des pharifiens, un jufte, un théifte; nous ofons dire que nous fommes les feuls qui foient de fa religion, laquelle embraffe tout l'univers dans tous les temps, & qui par conféquent eft la feule véritable.

Que toutes les religions doivent refpecter le théisme.

APRÈS avoir jugé par la raison entre la fainte & éternelle religion du théifme, & les autres religions fi nouvelles, fi inconftantes, fi variables dans leurs dogmes contradictoires, si abandonnées aux fuperstitions; qu'on les juge par l'hiftoire & par les faits, on verra dans le feul chriftianifme plus de deux cents fectes différentes qui crient toutes: Mortels, achetez chez moi, je fuis la feule qui vend la vérité, les autres n'étalent que l'impofiure.

Depuis Conftantin, on le fait affez, c'eft une guerre perpétuelle entre les chrétiens; tantôt bornée aux fophifmes, aux fourberies, aux cabales, à la haine; & tantôt fignalée par les carnages.

Le chriftianifme tel qu'il eft, & tel qu'il n'aurait pas dû être, se fonda fur les plus honteufes fraudes; fur cinquante évangiles apocryphes; fur les conftitutions apoftoliques reconnues pour fuppofées; fur des fauffes lettres de JESUS, de Pilate, de Tibère de Séneque, de Paul; fur les ridicules récognitions de

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