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sacrer tous les habitants, et incruste 70000 têtes dans les murs de plusieurs tours qu'il élève cómme trophées de ses exploits. (1).

En 1390 il pénètre dans le Kaptchak, remporte sur le Khan Toktamisch une sanglante victoire et ramène une foule de captifs. En 1392 et 1393 il achève la conquête de la Perse et ravage la Georgie.

En 1395 il dévaste tout le Kaptchak, pénètre jusqu'à Moscou et revient eu saccageant de nouveau la Georgie.

Ce fut au retour de cette belle expédition, dont il rapportait un immense butin, mais qui lui avait fait éprouver des pertes considérables en hommes et en chevaux, qu'il résolut la conquête de l'Inde. Il ne parvint à entraîner avec lui, dans ce pays, ses émirs récalcitrants qu'en leur rappelant que le Coran ordonnait de combattre les infidèles (2). Il partit à la tête de 92000 hommes de cavalerie et arriva, en avril 1398, au pied de la chaîne de l'Hindou-Khouch dont il traversa les neiges et les précipices au milieu d'immenses dangers, qui eussent arrêté un homme moins intrépide et surtout d'un caractère moins inflexible. Le 11 octobre 1398 il passa l'Indus, et le 13 janvier 1379 battit, dans les plaines de Fyrouz-Abad auprès de Dehli, le sultan Mahmoud-Nassir-ed-Dyn qui régnait sur l'Hindoustan. Ce fut la première fois que les troupes de Tamerlan eurent à combattre des éléphants, et il fallut toute son habileté pour les aguerrir contre ces animaux qui étaient au nombre de 120 dans l'armée indienne (3). Après la bataille, Tamerlan s'empara de Dehli dont il fit massacrer presque tous les habitants; déjà, avant l'action, il avait fait massacrer 100000 prisonniers qui gênaient ses opérations. Il soumit encore quelques princes indiens dont les pos

(4) Déjà précédemment, dans une forteresse qui ne renfermait que des rebelles, il avait fait entasser les prisonniers, tout vivants, les uns sur les autres, avec des briques et du mortier les corps de ces malheureux avaient ainsi servi à bâtir plusieurs tours. LANGLES, Vie de Timour, en tête de sa traduction des Instituts politiques et militaires de Tamerlan, Paris, 1787, in-8°.

(2) Dictionnaire de la conversation et de la lecture, 1839, tome L, page 356, article de M. H. Audiffret.

(3) ARMANDI, Histoire militaire des éléphants, 1843, page 446.

sessions étaient situées sur les bords du Gange, et revint faire une entrée triomphale à Samarkand, où il décréta la construction d'une grande mosquée pour remercier le ciel de lui avoir permis d'exterminer les adorateurs du feu, et d'obtenir ainsi les mérites de la guerre sainte.

Après quelques mois de repos, il ordonna une expédition de sept années dans l'Asie occidentale : malgré ses soixante-trois ans et de nombreuses campagnes, il était encore vigoureux et intrépide. Il envahit la Georgie, la mit pour la troisième fois à feu et à sang pour en extirper le Christianisme, et commença sa lutte contre Bajazet Ier, sultan des Ottomans. Le 22 août 1400 il défit en bataille rangée le fils de Bajazet, s'empara de Siwas, dont il fit enterrer vifs les 4000 défenseurs, d'Alep, devant laquelle il éleva de gigantesques pyramides de têtes d'hommes, et de Damas où il n'entra qu'en violant sa parole: il emporta ensuite Bagdad d'assaut, détruisit, en pieux sectateur d'Ali, cette ville de fond en comble, et en fit impitoyablement égorger les habitants, Un an après (28 juillet 1401), il se mesura, pendant trois jours et deux nuits, dans les plaines d'Ancyre contre Bajazet en personne qui venait bravement à la tête de 400000 hommes en attaquer 800000 enthousiasmés de leurs victoires mais le sultan des Ottomans ne fut pas heureux ; vaincu et fait prisonnier il alla mourir en Pisidie.

Aussitôt la victoire d'Ancyre qui sauva l'Europe des entreprises de Bajazet; Tamerlan s'empara de Smyrne, malgré l'énergique défense des chevaliers de Saint-Jeau de Jérusalem, et devint maître de toute l'Asie mineure. Les mamlouks d'Égypte se soumirent volontairement à lui il fit rebâtir Bagdad, puis rentra en Georgie pour se baigner dans le sang et détruire sept cents villages.

Rentré à Samarkand, il l'embellit des plus beaux monum ents,y déploya un luxe inouï pour célébrer les noces de six de ses petits-fils, et, après deux mois de repos, fit d'immenses préparatifs pour son expédition de Chine: mais il mourut, dès le début de cette expédition, à Otrar, le 18 février 1405.

Tamerlan posséda toute la portion de l'Asie comprise du Volga au golfe Persique et du Gange à Damas: l'Orient et l'Occident ont

retenti de sa gloire ; il fut l'un des plus puissants potentats du monde, grâce au succès de ses armes. Mais ses conquêtes n'eurent point de durée, partagées surtout entre ses nombreux enfants (1), dont aucun n'avait assez de génie pour le remplacer.

Au point de vue militaire Tamerlan n'est pas sans mérite bien supérieur à Gengis-Khan, il avait introduit une bonne discipline dans ses troupes et avait perfectionné la tactique de ses armées : sa nombreuse cavalerie était habituée à des évolutions rapides : il connaissait l'usage des réserves, et employa, après sa conquête de l'Inde, les éléphants plutôt comme trophée que comme instruments, parce qu'il avait reconnu que ces masses vivantes nuisaient autant à l'armée qui les possédait qu'aux ennemis.

Il était personnellement doué d'un grand courage dont il fit surtout preuve dans les luttes qui signalèrent les débuts de sa carrière comme le témoignent deux blessures reçues alors et qui l'avaient rendu boiteux et manchot. Ses peuples avaient foi en ce courage comme en sa réputation de sainteté, et, en rapportant que tombé dans une embuscade, il battit 4000 hommes avec 200 cavaliers, un de ses historiens, son contemporain, s'écrie: « Il se comporta avec tant de bravoure qu'il n'y a que le secours du ciel qui puisse en faire paraître de semblable en aucun homme (2). »

Comme homme de guerre, Tamerlan est au-dessous d'Alexandrele-Grand qui subjugua les mêmes contrées toutes ses expéditions. ne sont en effet que des invasions. Mais il est sans rivaux pour ses cruautés, et l'on ne peut songer sans frémir à ses massacres de populations entières dans les villes prises d'assaut, à ses immenses boucheries de prisonniers, aux Guèbres écorchés vifs, et à ses colossales pyramides de têtes d'hommes !

(4) Il laissa trente-six fils, petits-fils ou arrière petits-fils; et dix-sept filles, petites-filles ou arrières petites-filles.

(2) Cherif-Eddin-ALI, Histoire de Tamerlan, traduite par Petis de la Croix, tome I, page 267. L'original de cet ouvrage fut achevé en 1424, et dédié à Ibrahim. petit-fils de Tamerlan, et souverain du Farsistan.

CHAPITRE VII.

GUSTAVE-ADOLPHE.

(1594-1632.)

Gustave-Adolphe monta sur le trône à seize ans, et, malgré son jeune âge, fut déclaré majeur par les Etats. Il commença par acheter la paix du roi de Norwège Christian IV, et dirigea ses forces contre la Russie: cette guerre réussit et procura à la Suède des agrandissements à l'ouest. Vint ensuite la guerre contre le roi de Pologne Sigismond, qui haïssait Gustave-Adolphe comme il avait hal son père Charles IX, et qui refusa constamment la paix, quoique son adversaire se fut emparé de la Livonie et de la Pologne prussienne. Cette lutte dura huit ans et servit à former les troupes suédoises avec lesquelles Gustave-Adolphe s'immortalisa en Allemagne.

Ce fut comme protecteur de la ligue formée contre l'Empereur par les Etats protestants de l'Allemagne que Gustave-Adolphe s'immisça dans les affaires de ce pays. Stralsund ayant été assiégée par le duc de Friedland (Wallenstein), et Christian IV, roi de Dane

marck et de Norwège, étant trop épuisé par les luttes précédentes pour la ravitailler plus longtemps, elle se jeta dans les bras du roi de Suède, « le dernier espoir des libertés germaniques, » et le généralisisme de l'Empereur, après y avoir perdu 12,000 hommes, fut obligé de lever le siége.

L'Édit de restitution de 1629 acheva d'indisposer toute l'Allemagne protestante contre l'empereur Ferdinand, pendant que Richelieu poussait Gustave-Adolphe à attaquer l'Empire qu'il privait de son principal appui en faisant destituer Wallenstein par l'entremise du rusé P. Joseph. Le comte de Tilly fut alors déclaré généralisime de l'armée impériale et de celle de la ligue catholique.

Gustave-Adolphe débarqua le 24 juin sur les côtes de Poméranie, et prit bientôt possession de Stettin. Il s'avança alors dans la Poméranie, et, favorisé par les habitants indignés de la conduite que les troupes impériales avaient tenue à leur égard, il y fit de rapides progrès. Continuant la campagne en hiver, il s'empara de toutes les places de la Pomeranie, et des places de Ribnitz et de Damgard qui lui ouvrirent l'entrée du duché de Mecklembourg: il poursuivit ensuite les impériaux dans le Brandebourg, mais, l'électeur lui ayant refusé le passage par la place de Kustrin, il rentra en Pomeranie pour en achever la conquête. Ce fut alors que Tilly vint mettre le siège devant Magdebourg.

Le 13 janvier 1631 la France signa un traité d'alliance avec Gustave-Adolphe, et, le 6 février suivant, les princes protestants allemands, réunis à Leipzig, prirent le parti de demander collectivement à Ferdinand de révoquer l'Edit de restitution.

Tilly continuait pendant ce temps le siège de Magdebourg : la ville se défendait avec opiniâtreté: Gustave-Adolphe lui envoya un officier expérimenté, Thierry de Falkenberg, puis voulut marcher à son secours, mais il ne put traverser la Saxe qui gardait la neutralité. Tilly s'empara de Magdebourg, la livra au pillage le plus affreux, puis la brûla, n'y laissant au milieu des cendres, que deux églises et quelques cabanes. Cet acte de barbarie fit frémir de joie

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