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coin de la véracité, peuvent et doivent rendre de grands services, si l'on veut bien, dans les hautes régions du pouvoir, leur accorder l'attention dont ils sont dignes.

L'auteur, selon nous, aurait peut-être mieux fait d'aborder avec plus de gravité un sujet aussi sérieux que celui de l'instruction dans les corps de troupes, mais il y a tant de verve, tant d'esprit et d'à-propos dans ses deux articles; ils sont presqu'en tous points si vrais, que nous n'avons point le courage de nous plaindre d'une causticité amusante, très capable d'ailleurs de faire perdre au sujet qu'il traitent, sa monotonie naturelle.

Cependant, nous ne saurions laisser sans réponse quelques lignes du premier de ces deux articles, lignes qui sembleraient prouver que M. de Vaumartoise parle de choses qu'il connait peu, ou qu'il connait mal. La légèreté qu'il y affecte nous a inspiré le désir de le mieux éclairer.

Ainsi il dit:

« Qui empêche, d'ailleurs, qu'en hiver, alors que tous les « officiers de la carte de France sont revenus goûter à Paris a les douceurs de la civilisation, on ne triple, on ne décuple le « nombre des correcteurs, de manière à renvoyer les notes « au mois d'avril, etc., etc.... »

En lisant ces mots, ne semble-t-il pas que l'officier d'étatmajor, employé à la carte de France, une fois rentré à Paris, pendant tout l'hiver, n'a plus qu'à se croiser les bras ?... à se promener le jour, et à profiter le soir des théâtres, des concerts et des bals?... Ne dirait-on pas que toutes ses occupations doivent se borner alors à goûter les douceurs de la vie parisienne?... Pourquoi M. de Vaumartoise n'a-t-il pas, tandis

qu'il y était, profité de la circonstance pour octroyer à tous messieurs les officiers de la carte, un doux brevet de Farniente!

M. de Vaumartoise se trompe, et se trompe gravement, nous lui conseillons, lorsqu'il aura à parler des officiers d'état-major, de prendre de meilleurs renseignements qu'il ne l'a fait. Il verra alors qu'il serait impossible de transformer comme il le désire et le propose, les officiers de la carte en correcteurs de mémoires. Il apprendra que ces messieurs, rentrés au dépôt de la guerre, ont autre chose à faire qu'à inscrire des notes sur de médiocres rapports, fabriqués à la håte. Il saura, que pour mettre au net les reconnaissances de l'été, pour raccorder les travaux avec les travaux voisins, pour les mener à bonne fin, il est nécessaire qu'ils sachent entremêler les quelques douceurs de la vie parisienne, de beaucoup de travaux arides, difficiles et consciencieux.

Si M. de Vaumartoise doute de ce que nous lui disons, qu'il prenne la peine de passer dans les salles du dépôt de la guerre, de onze heures du matin à quatre heures du soir, à dater du 1er décembre et jusqu'au 1er avril, chaque année.

Nous sommes persuadés, qu'à la suite de petites visites à la rue de l'Université, il modifiera sa manière de voir et ses idées sur les travaux des officiers de la carte de France. Nous le prions, au reste, de lire attentivement notre article du mois de juin, inséré au Journal des Armes spéciales.

Nous demanderons la permission de faire encore une observation à M. de Vaumartoise.

Dans son second article il dit : « Je voudrais que l'on fit

a plus encore que de bien faire l'école, c'est-à-dire qu'on la « fit à tout le monde. »

Eh bien! nous croyons que cela est très facile dans les régiments d'infanterie, mais très difficile, impossible même, dans les régiments de cavalerie, tant que l'on n'aura pas modifié la rigidité ridicule du service intérieur pour les corps. de troupes à cheval. Quand nous parlons du service intérieur, nous n'entendons pas que l'on modifie l'ordonnance sur ce service, mais bien ce qui se fait dans les trois-quarts des régiments de cavalerie, où les chefs de corps, lein d'exécuter les instructions à la lettre, prennent à tàche d'augmenter le service, de façon à le rendre plus que pénible pour les hommes.

Le cheval occupe, pour ses deux pansages, pour ses cinq repas, pour la distribution du fourrage, pour les promenades au pas, pour la sortie de l'écurie pendant les soirées d'été pour la litière à mettre dehors, à rentrer, à étendre ou à relever, les cinq sixième de la journée du cavalier. Quel goût voulez-vous, après cela, qu'un homme, écrasé par les travaux qu'on lui impose, puisse prendre à l'étude ?...

Mais nous nous laissons éloigner de notre sujet, le corps royal d'état-major, revenons-y.

Il y aurait un moyen, un bon, un excellent moyen de trouver dans le corps royal, non-seulement des correcteurs pour les mémoires des officiers de troupes, mais aussi des moniteurs et des professeurs pour ces messieurs. Ce serait d'exiger de tous les aides-de-camp, des lieutenants-généraux et maréchaux-de camp, dans les divisions et subdivisions de l'intérieur, de professer l'hiver des cours oraux, et l'été de mener

les uns après les autres, sur le terrain, pour les reconnaissances militaires, les officiers des régiments en garnison dans les départements de la France.

Certes, le temps ne manquerait pas à MM. les aides-de-camp pour remplir cette double tâche. Cela ne pourrait nuire en rien à leur travail de bureau des divisions ou des subdivisions, attendu qu'avec une heure par jour il leur est facile de terminer leur besogne, besogne dans laquelle ils sont en outre aidés presque tous, par des secrétaires ou des sous officiers.

Les officiers des corps de troupes trouveraient dans l'adoption de ce projet un grand profit pour leurs études, celui d'avoir des guides sûrs pour leurs travaux, et les officiers d'état-major, aides-de-camp des généraux retireraient de leur côté l'inappréciable avantage de ne pas se rouiller sous le rapport de l'instruction, ce qui ne laisse pas que d'arriver à la plupart d'entre eux.

Voilà une idée dont nous laissons le développement à la plume caustique et élégante de M. de Vaumartoise.

Nous avons encore à nous occuper, pour terminer l'analyse de notre première catégorie (1), des officiers d'état-major professeurs ou adjoints aux professeurs dans les écoles militaires; des officiers employés à tout autre titre à l'école d'état-major; de ceux mis à la disposition des affaires étrangères; enfin de ceux employés à la topographie en Afrique et en Morée.

Depuis quelques années on a adopté le système fort judicieux de n'admettre comme professeurs ou adjoints dans les

(1) Voir notre article du 26 avril au Journal des Armes spéciales.

écoles militaires que des officiers ayant subi des examens devant la commission d'état-major.

Nous ne pouvons qu'approuver cette excellente méthode; elle donne à chacun le droit de concours pour la place qu'il cherche à obtenir, coupe court à la faveur, et ne laisse auprès de notre studieuse jeunesse que des hommes aimant l'étude et instruits.

En outre, elle entretient parmi des officiers sortis depuis longtemps déjà de ces mêmes écoles le goût du travail.

La justice du comité chargé de ces examens, le soin qu'il apporte à remplir avec équité son mandat sont tels, que l'officier méritant peut d'avance être tranquille. Aucune intrigue n'est encore venue imposer un candidat de préférence à un autre; si le plus digne n'a pas toujours été admis, c'est parce qu'il n'a pas été le plus heureux dans des examens qui laissent, quoiqu'on fasse, un peu au hasard, ou si l'on veut, au bonheur.

Mais si l'on est décidé à n'admettre dans nos écoles comme professeurs ou adjoints que des officiers de mérite, comment se fait-il qu'on les sèvre si impitoyablement de l'avancement au tour du choix? Est-ce bien logique ? Est-ce bien adroit? Cela n'est-il pas fait, au contraire, pour dégoûter à tout jamais des études sérieuses les hommes les plus amoureux du travail? Ne faut-il pas en effet être vingt fois philosophe pour s'astreindre à des travaux arides, lorsqu'on sait d'avance que ces travaux, ces études, ne mèneront qu'à une impasse sans issue?

On répond quelquefois à cela, en faisant entrer en ligne de compte le traitement assez élevé dont jouissent les professeurs

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