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gnes fur eux évènemens tout naturels & ordinaires dans ces fortes d'attaques, auxquels les prêtres, intéreffés à faire va loir le pouvoir de leur Dieu, auront donné un air de prodige & de miracle, & que la crédulité des peuples, fort portés à donner dans le merveilleux, aura reçus & crus fans examen.

Rien cependant n'empêche de croire qu'ici les chofes font arrivées comme l'hiftoire les rapporte. L'entreprise de Brennus étoit certainement une impiété facrilége, injurieuse à la religion & à la Divinité même. Il parloit & agiffoit de la forte, non par conviction de la fauffeté de ces Dieux, (il ne penfoit pas mieux fur cet article que les Grecs) mais par mépris pour la Divinité en général. "L'idée de la Divinité est gravée dans le cœur de tous les hommes. Dans tous les fiécles, dans tous les pays, on a toujours cru devoir lui rendre certains hommages. Les Paiens fe font trompés dans l'application de ce principe; mais ils en ont tous reconnu la néceffité. Or Dieu, par bonté pour les hommes, a pu de tems en tems faire éclater fa vengeance, même parmi les Paiens, contre ceux qui témoignoient un mépris ouvert de la Divinité, afin de conserver en eux, par des coups éclatans de fa colère, ces traits primitifs & fondamentaux de la religion, jufqu'à ce qu'il lui plût de les en inftruire pleinement, dans les tems marqués, par le miniftère du Médiateur, à qui il étoit réservé d'apprendre aux hommes le culte pur & fincère que le véritable & l'unique Dieu exigeoit d'eux. Nous

Nous voyons de même que Dieu, afin de conferver parmi les hommes le respect pour fa Providence & fon attention particulière fur toutes leurs actions, a eu foin de punir avec éclat de tems en tems, même parmi le Paiens, les parjures & les crimes noirs & crians. C'est par là que la créance d'un point fi capital, & qui eft le premier lien de l'homme avec Dieu, s'eft maintenu malgré les ténèbres du Paganis me, & malgré la diffolution de mœurs.

Pour revenir aux Gaulois, Léonor & Liv. lib. Lutaire, qui avoient fait bande à part, & 38. m. 16. s'étoient établis fur la Propontide, defcendirent vers l'Hellefpont, furprirent Lyfimachia, & fe rendirent maîtres de toutes la Querfonnèfe de Thrace. Là ils fe brouillèrent, & les deux Chefs fe féparèrent. Lutaire continua fa marche le long de P'Hellefpont; & Léonor avec le plus grand nombre retourna vers Byzance.

Celui-ci ayant enfuite paffé le Bofphore, & l'autre l'Hellefpont, ils fe rencontrèrent en Afie, firent un accord, & rejoignirent leurs forces. Tous deux enfemble entrèrent au fervice de Micoméde Roi de Bithynie, qui, après avoir réduit Zipétes fon frère avec leur affiftance, & être rentré par là dans la poffeffion de tous les Etats de fon père, leur affigna pour leur demeu. re la partie de l'Afie Mineure, qu'on appella, à caufe d'eux, Gallo-Gréce, ou Galatie. C'est à leurs defcendans qu'eft écrite l'Epitre Canonique de S. Paul aux Galates. Saint Jérome, plus de fix cens ans après le tems dont je parle, dit qu'ils parN 3 loient

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cap. 61.

loient encore la même langue qu'il avoit oui parler à Trèves.

Le refte de ceux qui demeurèrent dans la Thrace, eurent guerre dans la fuite avec Antigone Gonatas, qui regnoit en Macédoine. Ils y périrent prefque tous. Le peu qui en échapa, ou pafferent en Afie, & rejoignirent leurs compatriotes en Galatie, ou fe difperfèrent ailleurs, où l'on n'a plus entendu parler d'eux. Voilà comment fe termina la terrible inondation de ces Barbares, qui avoit menacé la Macédoine & toute la Grèce d'une entière deftruction.

Après la mort de Softhène, qui avoit battu les Gaulois, & regné quelque tems en. Macédoine, Antiochus fils de Séleucus: Nicator, & Antigone Gonatas fils de Démétrius Poliorcéte, prétendirent à cette Memnon. Couronne. Leurs pères en avoient été apud Phot. Rois l'un après l'autre. Antigone, qui, de puis la fatale expédition de fon père en Afie, avoit regné dix ans en Gréce, fe trouvant plus à portée que l'autre, en prit poffeffion le premier. Ils levèrent tous deux de grandes armées, & formèrent de puiffantes alliances, l'un pour fe maintenir dans fa conquête, & l'autre pour la lui en lever. Nicoméde, Roi de Bithynie, ayant pris dans cette occafion le parti d'Anugone, Antiochus ne voulut pas, en allant en Macédoine, laiffer derrière lui un ennemi fi puiffant. Au lieu donc de paffer PHellefpont, il vint tout d'un coup fondre fur la Bithynie, qui devint par la le théatre de la guerre. Les forces y étoient

:

fi égales, que l'un n'ofa attaquer l'autre. On fut quelque tems de cette manière dans l'inaction. Pendant cet intervalle on en vint à un traité, par lequel Antigone époufa Phila, fille de Stratonice & de Sé. leucus, & Antiochus lui céda fes préten tions fur la Macédoine. De cette forte il en demeura paifible poffeffeur, & la laiffa à fa poftérité, qui en jouit pendant plufieurs générations, jusques à Perfée le der nier de cette race, qui fut vaincu par Paul Emile & dépouillé de fes Etats, dont les Romains firent une Province de l'Empire peu d'années après.

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Antiochus s'étant ainsi débarraffé de cet
te guerre, marcha contre les Gaulois. De
puís que Nicoméde leur cut accordé des
terres, comme on l'a dit ci-deffus, ils fai-
foient continuellement des courfes de tous
les côtés, & incommodoient extrêmement
leurs voilins. Ils les défit dans une fanglan-
te bataille, & délivra le pays de leur op
preffion. Cette action lui fit donner le ti-
tre de Soter, qui fignifie Sauveur.

§. VI. Ptolémée Philadelpbe fait traduire en
Grec les Livres Saints que les Juifs con-
fervoient avec grand foin, pour en orner
fa Bibliothéque. C'est ce qu'on appelle la
verfion des Septante.

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Av. J. C.

275.

LE TUMULTE des guerres que la diver- AN. M. fité d'intérêts excitoit entre les fucceffeurs

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277.

d'Alexandre dans toute l'étendue de leur Av· J. C、 domaine, n'empêchoit point Ptolémée Philadelphe de donner tous les foins à la

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bel

belle bibliothéque qu'il formoit à Alexandrie, & où il faifoit ramaffer de tous les endroits du monde les livres les plus rares & les plus curieux. Ayant appris que les Juifs en avoient un qui contenoit les Loix de Moife, & l'hiftoire de ce peuple, il forma le deffein de le faire traduire d'hébreu en grec pour en enrichir fa bibliothéque. Il falloit, pour cela, s'adreffer au Grand-Prêtre de la nation; mais il s'y trouvoit une grande difficulté. Il y avoit actuellement dans l'Egypte un nombre trèsconfidérable de Juifs réduits en esclavage par Ptolémée Soter dans les invafions qui s'étoient faites de fon tems en Judće. On représenta au Roi qu'il n'y avoit pas d'apparence de tirer des Juifs une copie ou une traduction fidèle de leur Loi, pendant qu'il retiendroit un fi grand nombre de leurs compatriotes dans l'efclavage. Prolémée, qui étoit extrêmement généreux, & qui avoit fort à cœur l'aggrandiffement de fa bibliothéque, n'hésita pas un moment. Il publia une ordonnance pour faire affranchir tous les Juifs efclaves dans fes Etats, portant ordre à fon tréfor de payer Dix li- vingt dragmes par tête à leurs maîtres pour leur rançon. La fomme qui y fut employée, Quatre se monta à quatre cens talens; ce qui fait Gens mille. voir qu'il y en eut fix-vingts mille de ra

vres.

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chetés. Le Roi ordonna enfuite de mettre auffi en liberté les enfans qui leur étoient nés dans l'esclavage, avec leurs mères; & cette fomme monta à plus de la moitié de la première.

Après un préallable fi avantageux, Ptolémée

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