grand fleuve qui retient encore, coulant dans la plaine, cette force violente et impétueuse qu'il avait acquise aux montagnes d'où il tire son origine; ainsi cette vertu céleste, qui est contenue dans les écrits de saint Paul, même dans cette simplicité de style, conserve toute la vigueur qu'elle apporte du ciel, d'où elle descend. « C'est par cette vertu divine que la simplicité de l'Apôtre a assujetti toutes choses. Elle a renversé les idoles, établi la croix de Jésus, persuadé à un million d'hommes de mourir pour en défendre la gloire : enfin, dans ses admirables épîtres, elle a expliqué de si grands secrets, qu'on a vu les plus sublimes esprits, après s'être exercés long-temps dans les plus hautes spéculations où pouvait aller la philosophie, descendre de cette vaine hauteur où ils se croyaient élevés, pour apprendre à bégayer humblement dans l'école de Jésus-Christ, sous la discipline de Paul... >> BEAUX-ARTS ET LITTÉRATURE. LIVRE PREMIER. BEAUX-ARTS. CHAPITRE PREMIER. MUSIQUE. DE L'INFLUENCE DU CHRISTIANISME DANS LA MUSIQUE. FRÈRES de la poésie, les beaux-arts vont être maintenant l'objet de nos études : attachés aux pas de la religion chrétienne, ils la reconnurent pour leur mère aussitôt qu'elle parut au monde; ils lui prêtèrent leurs charmes terrestres, elle leur donna sa divinité; la musique nota ses chants, la peinture la représenta dans ses douloureux triomphes, la sculpture se plut à rêver avec elle sur les tombeaux, et l'architecture lui bâtit des temples sublimes et mystérieux comme sa pensée. Platon a merveilleusement défini la nature de la musique : : « On ne doit pas, dit-il, « juger de la musique par le plaisir, ni rechercher celle qui n'aurait d'autre objet que le plaisir, mais celle qui contient en soi la ressemblance du beau. » En effet, la musique, considérée comme art, est une imitation de la nature; sa perfection est donc de représenter la plus belle nature possible. Or le plaisir est une chose d'opinion, qui varie selon les temps, les mœurs et les peuples, et qui ne peut être le beau, puisque le beau est un, et existe absolument. De là toute institution qui sert à purifier l'ame, à en écarter le trouble et les dissonnances, à y faire naître la vertu, est, par cette qualité même, propice à la plus belle musique, ou à l'imitation la plus parfaite du beau. Mais si cette institution est en outre de nature religieuse, elle possède alors les deux conditions essentielles à l'harmonie, le beau et le mystérieux. Le chant nous vient des anges, et la source des concerts est dans le ciel. C'est la religion qui fait gémir, au milieu de la nuit, la vestale sous 'ses 'domes tranquilles, c'est la religion qui chante si doucement au bord du lit de l'infortuné. Jérémie lui dut ses lamentations, et David ses pénitences sublimes. Plus fière sous l'ancienne alliance, elle ne peignit que des douleurs de monarques et de prophètes; plus modeste, et non moins royale sous la nouvelle loi, ses soupirs conviennent également aux puissants et aux faibles, parce qu'elle a trouvé dans Jésus-Christ l'humilité unie à la grandeur. Ajoutons que la religion chrétienne est essentiellement mélodieuse, par la seule raison qu'elle aime la solitude. Ce n'est pas qu'elle soit ennemie du monde, elle s'y montre au contraire très-aimable; mais cette céleste Philomèle préfère les retraites |