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homme qui, en commençant son commerce d'Ophir, avait d'entrée de jeu vingt-cinq milliards, se fit bâtir quarante mille écuries. Il me semble pourtant que ce n'est pas trop d'écuries ou d'étables pour un homme qui fait servir sur table vingt-deux mille bœufs gras et cent vingt mille moutons pour un seul repas1.

Vous supposez que ces quarante mille écuries ne sont que dans la Vulgate, dont vous faites très-peu de cas. Permettez-moi d'aimer la Vulgate, recommandée par le concile de Trente, et de vous dire que je ne m'en rapporte point du tout à vos Bibles massorètes, qui ont voulu corriger l'ancien texte.

Je conviens que peut-être il y a un peu d'exagération, un peu de contradiction, dans cet ancien texte; cependant ma remarque subsiste, comme dit Dacier.

XX.

Des veaux, des cornes, et des oreilles d'ânes.

Messieurs, il me faut donc vous suivre encore du sérail de votre grand sultan Salomon, si rempli d'or et de femmes, à l'armée de Titus, qui entra le fer et la flamme à la main dans votre petite ville, laquelle n'a jamais pu contenir vingt mille habitants, et dans laquelle il en périt plus de onze cent mille pendant le siége, si l'on croit votre exact et véridique Flavien Josèphe.

Dans cette terrible journée on détruisit, non pas votre second temple, comme vous le dites, mais votre troisième temple, qui était celui d'Hérode. La question importante dont il s'agit est de savoir si Pompée, en passant par chez vous, et en faisant pendre un de vos rois, avait vu, dans ce temple de vingt coudées de long, un animal doré ou bronzé, qui avait deux petites cornes qu'on prit pour des oreilles ; si les soldats de Titus en virent autant; et enfin sur quoi fut fondée l'opinion courante que vous adoriez un âne.

Mon ami a cru que vous étiez de très-mauvais sculpteurs, et que, voulant poser des chérubins sur votre arche, ou sur la représentation de votre arche, vous taillâtes si grossièrement les cornes de vos bouvillons chérubins qu'on les prit pour des oreilles d'ànes: cela est assez vraisemblable.

Vous croyez détruire cette vraisemblance en disant que les Babyloniens de Nabuchodonosor avaient déjà pris votre coffre, votre arche, vos chérubins, et vos ânes, il y avait six cent cinquante-huit ans. Vous prétendez que Titus fut bien attrapé lors

1. Rois, liv. III, chap. vIII. (Note de Voltaire.)

qu'en entrant dans votre petit temple il n'y vit point votre coffre, et qu'il fut privé de l'honneur de le porter en triomphe à Rome.

Vous savez pourtant, monsieur et messieurs, que votre arche d'alliance, construite dans le désert, prise par les Philistins, rendue par deux vaches, placée dans Hershalaïm, y était encore après la captivité en Babylone; l'auteur des Paralipomènes1 le dit expressément. Fuit arca ibi usque ad præsentem diem.

Vos rabbins, je ne l'ignore pas, ont prétendu que cette arche est cachée dans le creux d'un rocher du mont Nebo, où est enterré Moïse, et qu'on ne la découvrira qu'à la fin du monde ; mais cela n'empêche pas qu'on ne la montre à Rome parmi les plus belles et les plus anciennes reliques qui décorent cette sainte ville. Les antiquaires, qui ont la vue d'une finesse extrême, et qui voient ce que les autres hommes ne voient point, remarquent dans l'arc de triomphe érigé à Titus la figure d'un coffre qui est sans doute votre arche. Elle nous appartient de droit : nous vous sommes substitués; vos dépouilles sont nos conquêtes.

Cessez de vouloir, par vos subtilités rabbiniques, ébranler la foi d'un chrétien qui vous plaint, qui vous aime, mais qui, ayant l'honneur d'être l'olivier franc, ne souillera jamais cette gloire en vous accordant la moindre de vos prétentions.

Si vous voulez que je sois de votre avis, messieurs, vous n'avez qu'à vous faire baptiser, je m'offre à être votre parrain. A l'égard de monsieur votre secrétaire, vous pouvez le faire circoncire, je ne m'y opposerai point.

INCURSION SUR NONOTTE,

EX-JÉSUITE.

Messieurs les six juifs, monsieur leur secrétaire, plus vous avez été redoutables à mon ami intime, plus j'ai dû le défendre. Vous étiez déjà assez forts par vous-mêmes; j'ai été surpris que vous ayez cherché des troupes auxiliaires chez les jésuites: est-ce parce qu'ils sont aujourd'hui dispersés comme vous, que vous les appelez à votre secours? Vous combattez sous le bouclier du R. P. Nonotte; vous renvoyez mon ami à ce savant homme; vous le regardez comme un de vos grands capitaines, parce qu'il a servi de goujat, dites-vous, dans une armée levée contre l'Encyclopédie. Permettez-moi donc, messieurs, de vous renvoyer à un des

1. II, cap. v, vers 9.

plus braves guerriers qui aient combattu pour l'Encyclopédie contre le R. P. Nonotte: c'est M. Damilaville, l'un de nos plus savants écrivains ; daignez lire ce qu'il répondit au savant Nonotte, il y a quelques années : je remets sous vos yeux ce petit écrit ; il a déjà été imprimé, mais, comme vous avez donné une nouvelle édi tion de vos œuvres judaïques, je puis aussi en donner une des œuvres chrétiennes de M. Damilaville 1.

A MESSIEURS LES SIX JUIFS.

«< Voilà, messieurs, ce que M. Damilaville, l'un des plus savants hommes de ce siècle, écrivait à frère Nonotte. Je suis bien loin de prendre avec vous une telle liberté : vous n'êtes point de ceux qui vivent de messes et de libelles. Votre nation a commis autrefois de grandes atrocités, comme toutes les autres; ce n'est point à moi d'appesantir aujourd'hui le joug que vous portez. Si du temps de Tibère quelques pharisiens, en qualité de races de vipères, se rendirent coupables d'un crime inexprimable, dont ils ne connaissaient pas les conséquences, nesciunt quid faciunt2, je ne dois point vous haïr, je dois dire seulement felix culpa'. Je vous répète ce que mon ami, qui aimait à répéter, a dit tant de fois Le monde entier n'est qu'une famille, les hommes sont frères; les frères se querellent quelquefois; mais les bons cœurs reviennent aisément. Je suis prêt à vous embrasser, vous et monsieur le secrétaire, dont j'estime la science, le style, et la circonspection dans plus d'un endroit scabreux.

::

« J'ai l'honneur d'être, sans la moindre rancune, et très-chrétiennement,

« Messieurs,

« Votre très-humble et très-obéissant

serviteur,

« LA ROUPILLIÈRE.

« A Perpignan, 15 septembre 1776. »

1. Ici Voltaire avait reproduit les Eclaircissements historiques qu'on a vus tome XXIV, pages 483-520.

2. Non enim sciunt quid faciunt; Luc, xxIII, 34.

3. Expression de saint Augustin, qui se retrouve dans l'une des exclamations d'allégresse chantées par le diacre, le samedi saint, auprès du cierge pascal.

FIN DE UN CHRÉTIEN CONTRE SIX JUIFS.

TABLE

DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE HUITIEME VOLUME

DES MÉLANGES.

FRAGMENT D'UNE LETTRE sur les DICTIONNAIRES SATIRIQUES (1773)
RÉPONSE à cette lettre, par M. de Morza..
DISCOURS DE Mo BE LLEGUIER, ancien avocat, sur le Texte proposé
par l'Université de la ville de Paris, pour le sujet du prix de l'année
1773. AVERTISSEMENT des Éditeurs de l'édition de Kehl
DISCOURS DE Me BELLEGUIER.

De Dieu...

Du gouvernement.

Pages.

1

4

7

9

9

11

LETTRE ANONYME adressée AUX AUTEURS DU JOURNAL ENCYCLO-
PÉDIQUE, au sujet d'une Nouvelle Epitre de Boileau à M. de Vol-
taire (1773). .

COMTE DE MORANGIÉS ET LES VÉRON (1773)..
RÉPONSE A L'ÉCRIT D'UN AVOCAT, intitulé Preuves démonstratives en
fait de justice (1773).

19

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DÉCLARATION DE M. DE VOLTAIRE sur LE PROCÈS ENTRE M. LE

25

33

39

41

47

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LE PHILOSOPHE, par M. DUMARSAIS (1773).
LETTRE SUR LA PRÉTENDUE COMÈTE (1773)
PRÉCIS DU PROCÈS DE M. LE COMTE DE MORANGIÉS CONTRE
LA FAMILLE VÉRON (1773).

LETTRE DE M. DE VOLTAIRE A MM. DE LA NOBLESSE DE GÉVAU-
DAN, qui ont écrit en faveur de M. le comte de Morangiés (1773).
DEUXIÈME LETTRE

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FRAGMENTS HISTORIQUES SUR L'INDE ET SUR LE GÉNÉRAL DE
- AVERTISSEMENT de Beuchot.

ART. I. Tableau historique du commerce de l'Inde.

-

-

II. Commencement des premiers troubles de l'Inde, et des ani-
mosités entre les compagnies française et anglaise.

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III. Sommaire des actions de La Bourdonnaie et de Dupleix
IV. Envoi du comte de Lally dans l'Inde. Quel était ce général;
quels étaient ses services avant cette expédition

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V. État de l'Inde lorsque le général Lally y fut envoyé.

Pages.

ART. VI.

VII.

Des Gentous, et de leurs coutumes les plus remarquables. 105
Des brames. .

107

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X.

XI.

XII.

XIII.

Description sommaire des côtes de la presqu'ile où les
Français et les Anglais ont commercé et fait la guerre. 115
Suite de la connaissance des côtes de l'Inde. . .
Ce qui se passait dans l'Inde avant l'arrivée du général
Lally. Histoire d'Angria; Anglais détruits dans le Bengale. 122
Arrivée du général Lally; ses succès, ses traverses. Con-
duite d'un jésuite nommé Lavaur. .

119

130

XIV.

Le comte de Lally prend Arcate, assiége Madras. Com-
mencement de ses malheurs.

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Malheurs nouveaux de la compagnie des Indes
Aventure extraordinaire dans Surate. Les Anglais y do-

minent...

Prise et destruction de Pondichery

Lally et les autres prisonniers conduits en Angleterre,
relâchés sur leur parole. Procès criminel de Lally
Fin du procès criminel contre Lally. Sa mort.
Destruction de la compagnie française des Indes.
De la science des brachmanes.

138

142

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144

149

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153

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161

163

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De la religion des brachmanes, et surtout de l'adoration
d'un seul Dieu. .

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De l'ancienne mythologie philosophique avérée, et des
principaux dogmes des anciens brachmanes sur l'ori-
gine du mal.

170

-

XXIV.
XXV.

De la métempsycose.

176

D'une Trinité reconnue par les brames. De leur préten-
due idolâtrie..

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XXVIII. Du paradis terrestre des Indiens, et de la conformité

apparente de quelques-uns de leurs contes avec les
vérités de notre sainte Écriture.

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XXXI. De l'histoire des Indiens, jusqu'à Timour ou Tamerlan.. 192
XXXII. De l'histoire indienne depuis Tamerlan jusqu'à M. Holwell. 196
XXXIII. De Babar, qui conquit une partie de l'Inde après Tamer-
lan, au XVIe siècle. D'Acbar, brigand encore plus heu-
reux. Des barbaries exercées chez la nation la plus
humaine de la terre.

200

XXXIV. Suite de l'histoire de l'Inde jusqu'à 1770.

203

XXXV. Portrait d'un peuple singulier dans l'Inde. Nouvelles vic-
toires des Anglais. .

206

XXXVI. Des provinces entre lesquelles l'empire de l'Inde était
partagé vers l'an 1770, et particulièrement de la répu-
blique des Seikes.

208

FRAGMENT SUR LA JUSTICE, A L'OCCASION DU PROCÈS DE M. LE
COMTE DE MORANGIÉS CONTRE LES DU JONQUAY (1773)
FRAGMENT SUR LE PROCÈS CRIMINEL DE MONTBAILLI, roué
et brûlé vif à Saint-Omer, en 1770, pour un prétendu parricide; et

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