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l'aveu de l'assassinat de Maters; il ajouta qu'elle l'avait prié d'avertir le juge d'instruction de son désir de révéler la vérité et toutes les circonstances du crime.

Cette déposition fut néanmoins suivie des dénégations réitérées de la femme et de la sœur de Charles Claus dans un second interrogatoire, à la suite duquel on les confronta avec Isabelle Roels, la première persista à déclarer son mari innocent du crime qui lui était imputé; elle donna un démenti à tous les propos que lui avaient prêtés Isabelle Roels, Thècle van de Poele et les autres femmes entendues dans l'instruction. Les réponses de Grisilde Claus qui, d'après le guichetier Gortebeek, avait avoué le crime, étaient à peu près les mêmes que celles de la femme de Charles Claus: elle contesta, au contraire, l'existence du crime, et quoique le juge instructeur lui fit voir qu'elle courait risque d'être considérée comme complice de l'assassinat, elle soutint ses dénégations. Elle ajouta à ses déclarations cette circonstance dont plus tard on tira parti contre Charles Claus : « Lorsque mon frère, disait-elle, donnait ses habits au sergent-major, ma mère qui était déjà couchée, s'écria: Charles, Charles, que faites-vous? Mon frère répondit: Cela ne vous regarde pas. » Dans la suite de l'instruction on appliqua les paroles de la mère Claus à l'assassinat du sergentmajor Maters, et comme nous le verrons plus loin, celle-ci fut interrogée à cet égard par l'autorité judiciaire.

L'interrogatoire des deux femmes impliquées dans la cause, fut suivi de leur confrontation avec Isabelle Roels: celle-ci répéta à peu près dans les mêmes termes ses précédentes déclarations: elle ajouta que lorsque les frères Claus étaient sortis emportant le cadavre du sergent-major, Amelbergue Michiels, épouse de Charles, les avait suivis et n'était rentrée que quelques minutes avant eux; qu'elles, Isabelle Roels et Amelbergue Michiels, avaient été contraintes de prêter le serment de ne jamais rien révéler concernant l'assassinat.

Les deux prévenues soutinrent avec fermeté que tout, absolument tout, était faux dans la déclaration d'Isabelle Roels.

Le 8 mai 1819, Charles Claus, qui était arrêté depuis le 22 avril précédent, fut interrogé il avoua la visite que le sergent-major Maters lui avait faite dans la soirée du 23 mai 1817; donna de longs détails sur les habillements que ce sous-officier lui avait empruntés; convint des paroles que sa mère avait proférées en ce moment; mais il nia qu'Isabelle Roels eut été présente à la visite de Maters et déclara fausses toutes les accusations que cette fille avait lancées contre lui, à propos du prétendu assassinat du sergent-major.

Après tous les renseignements si précis que l'autorité judiciaire avait reçus, on conçoit que les dénégations de Charles Claus furent accueillies avec beaucoup de défaveur; et pendant que, confiant dans son innocence, il attendit sous les verroux sa complète justification, ses ennemis, acharnés à le perdre, ourdirent une trame abominable, qu'ils menèrent avec une audace incroyable, trompant la justice, mettant ses investigations en défaut, faisant taire les sentiments les plus naturels de l'homme, et accumulant contre les frères Claus des présomptions si nombreuses et si graves que les plus habiles s'y seraient trompés.

A. N.

(Pour être continué.)

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Histoire de Flandre, par M. KERVYN DE LETTENHOVE. Tome 1er. Époque féodale, (792-1128). Bruxelles, chez Van Dale.

La publication de l'ouvrage de M. Kervyn de Lettenhove avait été précédée et de ce vague murmure de satisfaction anticipée qui fait les délices des auteurs en attendant que la critique fasse disparaître les illusions, et de ces annonces flatteuses faites dans un public trop souvent disposé à sacrifier à de faux dieux. Nous méfiant de ces pronostics dont l'amitié et non le mérite fait ordinairement les frais, nous avous attendu M. Kervyn à l'œuvre; nous avons cherché dans son travail la réalisation des promesses qui étaient arrivées jusqu'à nous, et nous le disons avec plaisir, notre méfiance a fait place à une complète satisfaction: la réputation qui avait précédé la publication de l'Histoire de Flandre n'était ni usurpée, ni exagérée par son ouvrage, M. Kervyu ́s'est placé de prime-abord aux rangs des meilleurs écrivains du pays.

Un style vif et brillant, une belle narration, semée d'observations judicieuses, le talent d'être constamment lui-même, une étude profonde des auteurs et des chroniqueurs les plus estimés, des preuves multiples de longues et laborieuses recherches, au bout desquelles se sont placées des sources inconnues, tels sont les principaux mérites de l'ouvrage de M. Kervyn.

Son Introduction est un morceau capital : l'influence des institutions dans la mission historique de la Flandre forme l'objet de quelques pages écrites avec beaucoup de soin et de talent. Viennent ensuite d'excellentes études sur l'histoire de la Flandre pendant les temps antérieurs au 9e siècle. L'auteur y passe rapidement en revue les Galls, les Kymris, les Romains, l'invasion des barbares, les conquêtes des Franks, les établissements des Saxons, la naissance et le progrès du Christianisme, et il arrive ainsi à l'histoire de Flandre proprement dite.

Le volume que nous avons sous les yeux, comprend les livres 1 à 5, et l'histoire depuis l'origine de nos ancêtres jusqu'au Normand Guillaume, dernier comte de l'ère féodale.

Tous ceux qui ont la le premier volume du travail de M. Kervyn, et ils sont nombreux, attendent avec impatience la publication du deuxième.

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Gand,

Le Conseil de Flandre. Discours prononcé à l'audience de rentrée de la cour d'appel de Gand, le 19 octobre 1846, à l'occasion de l'inauguration du nouveau Palais de Justice, par M. GANSER, procureur-général. 1846, chez Annoot-Braeckman. Imprimé par ordre de la cour d'appel. Retracer dans une cinquantaine de pages les principaux faits de l'histoire du

Conseil de Flandre, passer en revue les formes et les procédés de la justice depuis le 14° siècle jusqu'à nos jours, évoquer l'ombre de tous ces célèbres magistrats que la Flandre cite avec orgueil, voilà la tâche que M. le procureurgénéral Ganser a accomplie avec autant de talent que de bonheur. Son discours causa, lors de sa prononciation, à l'auditoire une agréable satisfaction, on suivait avec intérêt le savant magistrat dans les laborieuses recherches qu'il avait faites pour arriver à former un aperçu aussi neuf qu'habile; et aujourd'hui qu'on en a le texte sous les yeux, on le lit encore avec plaisir. M. Ganser a su si bien enchaîner son récit, il place dans un cadre resserré tant de faits curienx, que son discours forme une histoire complète de l'administration de la justice pendant six siècles.

Après la description de l'origine et des vicissitudes du Conseil de Flandre, après avoir dit quels étaient aux diverses époques ses droits, de quelle manière il les exerçait, M. le procureur-général donne, à la fin de chaque paragraphe, une courte notice biographique des magistrats dont l'histoire nous a conservé les noms. C'est ainsi que nous voyons apparaître au 14° siècle, Pierre van der Zypen, tour à tour premier président du Conseil, conseiller du prince et soldat; au 15, Pierre Craenendonck, Josse de Beyssel, Pierre de Baenst, Jean Pieters et Philippe Wielant, un des homnies les plus distingués de son époque comme jurisconsulte et comme historien; Thomas Plaines et Jean Sauvage, qu'Erasme de Rotterdam appelle vir eruditissimus et omnium litteratorum patronus; au 16o, Denis Hardewyn, Antoine Colve, Jacques de Blaser, Adolphe van Meetkerke, Adrien van der Burcht, Guillaume de Pamele et le président Damant; au 17o, Pierre Helias d'Huddeghem, Cornhuse, Antoine de Vulder, Baudouin van der Piete, Jacques Stalins, Conrad van der Brugghen, Van den Hane, Knobbaert, Nicolas Bourgoigne; au 18°, Luc van der Vynckt, François Helias d'Huddeghem, Charles vicomte de Patin, Jean Dierix, etc.

A ces noms, que des travaux éminents rendent dignes de la reconnaissance du pays, vient se joindre encore la liste des magistrats du dernier siècle, sur Jaquelle on lit les noms des d'Hane, des Borluut, des Dellafaille, des Papeians, des Helias, des Coppens, des Massez, des Roomans, des de Pelichy, des Moerman, des Mesdach, des Camberlyn, des Pycke, des de Gheus, des Pulinx, des Pieters. Tous ces hommes remarquables à différents titres ont dignement soutenu la renommée de la magistrature flamande.

L'aperçu que nous venons de donner du discours de M. le procureur-général Ganser, dit assez le grand intérêt qu'en offrent toutes les pages.

Enquête sur le travail et la condition physique et morale des ouvriers employés dans les manufactures de coton à Gand, par MM. les docteurs J. MARESKA et HEYMAN. Gand, 1846, chez F. et E. Gyselynck, 1 vol. in-8°.

Cet ouvrage important est le résultat d'une étude des plus consciencieuses faite sur les lieux par MM. Mareska et Heyman. Tout ce qui se rapporte à la situation morale et physique des ouvriers employés dans les nombreuses fabriques de coton à Gand y est passé en revue, et les conclusions auxquelles les observations des honorables auteurs ont donné lieu, se distinguent par une solidité et une netteté incontestables. Nous nous bornerons à ce peu de mots,

la Rédaction de la Revue ayant résolu de faire du travail de MM. J. Mareska et Heyman l'objet d'un article spécial.

Louvain, 1816,

Pages détachées. Odes et Poëmes, par M. BENOIT QUINET. chez Van Linthout et Van den Zande. 1 vol. in-8°. Nous remarquons dans ce recueil de très-belles pièces et qui dénotent que l'auteur a fait une profonde étude des anciens; partout il y a de l'esprit et du cœur, des vers très-bien nuancés et des descriptions pleines de vie et de vérité; mais aussi nous y trouvons quelques métaphores obscures et quelques ornements parasites, mais ce sont des défauts que l'auteur saura facilement faire disparaître.

La Prière civique, par le même. Louvain, 1844, chez Van Linthout et Van den Zaude, 1 vol. in-8°.

Ce poëme respire un ardent amour de la patrie, l'auteur y chante le trône et l'autel avec des accents mâles et dignes du poëte: point de basses flatteries ou d'hypocrites expressions, partout transpire le noble ton de la conviction. Quant à la forme, nous pourrions émettre les mêmes observations que nous avons écrites plus haut, mais ces légères incorrections sont amplement rachetées par le mérite de l'ensemble de l'ouvrage.

De tegenwoordigheid van God op alle plaetsen. Het ongeluk der wereld, par M. H. BOUDON, grand-diacre d'Evreux.- St-Nicolas, 1846, chez MM. Edom et De Cock. Deux volumes séparés in-18.

Ces deux opuscules religieux contiennent d'excellentes méditations, que les âmes pieuses liront avec fruit. La traduction flamande en est très-bien faite et Je style est fort soigné.

Éphémérides brugeoises, ou Relation chronologique des événements qui se sont passés dans la ville de Bruges depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, par M. J. GAILLARD. Bruges, 1846, chez l'auteur, 4re livraison, ouvrage orné de 170 blasons coloriés.

L'ouvrage de M. Gaillard présente non seulement par lui-même un vif intérét, mais il a encore son importance pour l'histoire de la Flandre. L'auteur l'a divisé en trois parties; la première comprend l'histoire de Bruges, de ses institutions et de ses monuments; la seconde, l'exposé chronologique de tout ce qui touche à l'histoire civile et politique de cette ville; la troisième, la biographie de tous les Brugeois célèbres. La première livraison qui comprend les dix premiers chapitres, est très-satisfaisante; nous pourrons mieux juger du mérite de l'ouvrage quand il aura paru en entier.

REVUE POLITIQUE.

La discussion que la gauche a soulevée à propos de la réponse au discours du Trône, l'a menée plus loin qu'elle ne voulait : c'était un combat de tirailleurs qu'elle prétendait engager, et grâce à son imprudence, à sa maladresse, elle s'est vue bientôt forcée d'accepter une bataille en rase campagne. Sa défaite était dès-lors certaine, et 52 voix contre 34 ont proclamé le triomphe du parti conservateur. L'importance morale de cet échec est encore plus grande que l'importance numérique. L'opposition a non seulement vu se séparer d'elle des hommes qu'elle croyait définitivement rangés sous sa bannière, mais elle a eu en outre à essuyer le feu meurtrier parti d'une position isolée qu'elle cajolait et convoitait depuis quelques mois. Ajoutons que le cabinet a obtenu 8 voix de plus que lors de son avènement.

Au train dont vont les choses, nous espérons être délivrés des discussions politiques pour la présente session. La législature a déjà voté plusieurs budgets, donné sa sanction à une loi allouant des fonds destinés à secourir les Flandres, et adopté quelques projets de moindre importance. La Chambre paraît tenir beaucoup au positif; nous l'engageons à persévérer dans cette voie.

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La suppression de la république de Cracovie et son incorporation dans l'empire autrichien pouvaient faire croire que les relations amicales entre la France et l'Angleterre se seraient renouées, que ces deux puissances constitutionnelles se seraient donné la main pour protester énergiquement contre ce violent attentat au droit des gens; mais rien de semblable n'a cu lieu la France certes n'aurait pas demandé mieux que de retablir les relations amicales; mais lord Palmerston a trouvé plus convenable de garder la position d'isolement qu'il a prise à propos des mariages espagnols, et chacun a protesté séparement et avec plus ou moins d'énergie contre la suppression de Cracovie. Si une circonstance

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