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ESSAI PHILOSOPHIQUE

SUR

LA FORMATION

DE LA

LANGUE FRANÇAISE

K.846

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INTRODUCTION

L'homme ne se résigne qu'avec peine au sentiment de son impuissance. Les faits qui ne tombent point sous l'appréciation grossière de ses sens, il les nie; les causes qu'il ne comprend pas, il les appelle des hasards. La philosophie de l'histoire est une science d'hier que, trompés sans doute par un respect passionné pour les grands hommes, des historiens distingués nient encore avec opiniâtreté; mais le bon sens des masses répond enfin à leur incrédulité dogmatique en s'inclinant devant la Providence. Il sent que, tout fortuits qu'ils soient en apparence, les faits s'enchaînent dans une suite non interrompue de conséquences, que dominent toujours des lois nécessaires. Les idiomes seuls échappent encore par d'impénétrables obscurités à cette religieuse intelligence de l'histoire. On se refuse à voir dans des flexions sans valeur essentielle, et dans une foule de mots destinés à marquer des rapports purement grammaticaux, quelque idée logique, qui légitime leur rôle dans les langues : on les regarde comme imaginés par un caprice individuel auquel d'inexplicables hasards ont donné l'autorité d'une volonté générale. C'est faute de pouvoir remonter assez haut dans l'histoire de la parole, et de savoir reconnaître, sous des formes corrompues, d'anciens mots dont l'idée ne fut oubliée qu'après avoir amené des conventions naturelles.

A l'origine des langues, quand l'habitude d'entendre des mots

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