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de l'eau, quels que soient la taille ou le mode d'ébourgeonnement.

La germination.

La multiplication de la vigne par la voie de semis est à peu près impossible en grande culture. Nous savons que chaque baie ou graine de raisin contient de trois à cinq pepins osseux; beaucoup n'ayant pas été fécondés ne contiennent pas d'amande. Pour accélérer la germination, on fera bien de faire tremper la graine dans un vase contenant de l'acide sulfurique, connu dans le commerce sous le nom d'huile de vitriol, d'acide nitrique ou esprit de sel, bien étendu d'eau. Nous connaissons tous une foule de matières qui ont la propriété de retenir l'oxygène, la chaux, le plâtre, le chlore, etc. A la chaleur de 12 à 20 degrés, l'amande se gonfle, la radicule brise son enveloppe et s'implante en terre, tandis que la plumule élève sa tête au-dessus du sol, maintenue encore dans son enveloppe, garantissant sa fragilité. Les insectes de toutes sortes, sans cette espèce d'armure, feraient de ce tendre végétal un frugal repas. La graine, après avoir absorbé l'humidité environnante, se gonfle, les enveloppes se distendent, les feuilles cachées sous l'enveloppe protectrice se nourrissent de l'amidon que contient l'amande; au bout de quelques jours, elle s'en débarrasse: c'est dès lors que commence la végétation.

Les pepins de la vigne perdent presque tous, en une année, leurs facultés germinatives, lorsqu'ils sont exposés à l'air libre. Pourtant j'ai vu des marcs de raisins ayant été soumis à la distillation et conséquemment ayant été pendant un temps plus ou

moins long en contact avec l'eau bouillante, entassés depuis plusieurs années; après avoir été remués, les graines sont sorties de leur engourdissement et ont levé par milliers, si ce n'est par millions.

La chaleur vivifiante du mois de mai est la plus active pour la germination. Néanmoins, le temps nécessaire à cette opération, ou pour mieux dire à ce travail de la nature, est très-variable. Il dépend du lieu où la graine a été placée, de la chaleur atmosphérique, ainsi que de l'humidité et de la chaleur réunies. Par un temps orageux et chargé d'électricité, les pepins lèvent en quelques jours. Lorsque la température est basse, la germination est très-lente, ou elle ne s'effectue pas du tout. On ne peut hâter la germination des pepins de vignes, comme on le fait pour les pêchers, pruniers, amandiers, en cassant la coque et en plantant les amandes débarrassées de leurs écorces.

L'eau est indispensable à la germination. Il est facile de faire lever des pepins de raisins sur une éponge, un morceau de flanelle imbibée d'eau, dans un lieu obscur. La chaleur est indispensable; sans elle, la graine se gâterait sans germer. Cependant le froid ne détruit pas les facultés germinatives des pepins de raisins. Il les suspend et en arrête seulement le développement. On accélère la levée des pepins en les semant sur des couches chaudes aux mois de mars, avril ou mai.

Il est bien entendu que ces graines ont été mises l'hiver à l'abri du froid, dans un lieu frais et placées dans du sable humide, afin de rendre plus tendre l'enveloppe osseuse qui recouvre l'amande.

De la connaissance des cépages.

Lorsque l'on plante une vigne, il faut être bien fixé sur les cépages que l'on veut multiplier, et surtout ne s'adresser pour obtenir du plant qu'à des personnes honnêtes et dont on est sûr. J'ai été moimême trompé et j'engage les planteurs à faire attention. Les vignerons vous disent et vous répètent qu'ils connaissent les espèces au bois. C'est un conte. Il est facile, à la vérité, de distinguer: 1o les noirs des blancs, car le bois, au moment de la taille, est rouge dans les variétés à raisins blancs; 2o les gouais se reconnaissent à leur bois jaune, mais, lorsqu'ils sont mélangés avec des blancs bons (aubin, jaune), c'est impossible de les reconnaître ; 3o la blanche feuille (meunier, fernège) se distingue par son bois brun légèrement blanchi par raies, ainsi que par les yeux qui sont entourés d'un duvet blanc cotonneux préservant les bourres du froid; 4o les gamais ont le bois ordinairement moins rempli de moelle que le petit-noir ou le vert-noir.

Voici comment fait le vigneron pour s'y reconnaître 1o il voit à la vendange les espèces et taille en conséquence; 2o il a pour guide (si c'est un nouveau vigneron) la taille de son prédécesseur; s'il se trompe, c'est le patron qui en souffre.

Des variétés de raisins que l'on doit planter par rapport au vin que l'on veut obtenir.

Les cépages fins produisent des vins délicats; les gamais, des vins bien inférieurs. Si dans le vignoble où l'on possède des vignes, il n'y a que des gamais, ce serait folie de ne planter que des pineaux, le vin

ne se vendrait pas un sou de plus. Ce serait différent si on voulait produire pour la consommation de la maison.

Il faut exclure des vignes (à raisins à vin) toutes les variétés de chasselas, blanc, noir, ambré : elles produisent des vins peu alcooliques ressemblant à de l'eau. Les raisins blancs en trop grande quantité produisent un vin de couleur douteuse, tirant sur le brun, sans ton, toujours prêt à devenir huileux et ne se conservant pas. Cependant, en Alsace, on cultive en grand le chasselas comme raisin à vin. Exclure des cuves les raisins d'Amérique à goût de cassis, ainsi que les muscats à goût prononcé.

En résumé, il faut voir dans le pays les cépages réussissant le mieux et planter les mêmes. Le grand choix des variétés n'est pas nécessaire. Il faut laisser cela aux ampélographes amateurs.

C'est à tort que l'on pense donner plus de couleur au vin en plantant des teinturiers. Ce raisin acide. et âpre ne vaut rien.

On parvient à colorer le vin par une bonne fermentation, par le cylindrage des raisins, et principalement en plaçant le vin dans de bons fùts bien encavés.

Quoique tous les produits trouvent des acheteurs, pour l'honneur de sa personne et de son vignoble, ainsi que pour son intérêt, il faut, par le choix des cépages, chercher à obtenir de bons vins. A moins que l'on ne veuille faire comme à Surennes dans ce grand bourg, il ne se consomme pas de vin du cru, on le trouve trop mauvais; on y boit du vin du midi.

Voulez-vous du vin de première qualité, plantez des pineaux, auxerrois, du blanc bon, du petit-noir. Voulez-vous du vin de deuxième qualité, plantez de la blanche feuille, du vert-noir, des gouais.

Voulez-vous du vin de troisième qualité, plantez des gamais.

Lorsque l'exposition est chaude, la terre fertile, on ne doit pas craindre de planter des gamais. Le gamais Bevy, Saint-Laurent, le gamais des gamais, sont les plus productifs et par conséquent ceux produisant le moins bon vin. La lyonnaise, l'éricey d'Arching, l'éricey de la montée, sont les meilleures espèces. Il faut dire que les ériceys, quoique bons cépages, laissent tomber leurs raisins lorsqu'ils sont trop chargés.

Il me semble que je me suis assez étendu sur ce sujet, ainsi que sur le sol qui convient à chaque variété.

Ce travail préliminaire ne sera jamais trop médité par les personnes ne connaissant qu'imparfaitement la culture de la vigne. J'ai cherché à le rendre aussi clair que possible en évitant les redites.

Choix du terrain pour planter la vigne.

Préparation du sol.

Avant de planter une vigne, il faut connaître la qualité du terrain dont on dispose, la nature du sol, la situation dans la plaine ou sur le versant d'une montagne, savoir si le sol est humide, argileux, compacte ou marneux.

Le défoncement est le travail par lequel on rend un terrain meuble à une certaine profondeur. Pour la vigne, il faut bien se garder de défoncer trop profondément, surtout lorsque le sol n'est pas de bonne qualité.

Des personnes ne connaissant pas la culture de la vigne par expérience, des théoriciens vous diront:

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