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avoir fait un sacrifice de quarante chameaux, je sortis à la campagne avec des seigneurs arabes, et je vis un homme qui avait ramassé une charge d'épines sèches pour brûler. Je lui demandai pourquoi il n'allait pas chez Hatemtai, où il y avait un grand concours de peuple, pour avoir part au régal qu'il faisait. Qui peut manger son pain du travail de ses mains, me répondit-il, ne veut pas avoir obli-· gation à Hatemtai. Cet homme; ajouta Hatemtai, a le cœur plus noble que moi."

XXXV. Trifling Indulgences form the Basis of destructive Habits.

PLATON, Voyant un jeune homme jouer, lui en fit des reproches très-vifs : "Je ne joue qu'un très-petit jeu, lui répondit le jeune homme.-Eh! comptez-vous pour rien, répliqua le sage, l'habitude du jeu que vous contractez par-là ?”

XXXVI. Selfishness a Cure for Gaming.

:

LE fils d'un riche habitant de la ville de Riom, avait perdu une somme considérable au jeu : Je la paierai, lui dit son père, parce que l'honneur m'est plus cher que l'argent. Cependant, expliquons-nous vous aimez le jeu, mon fils; et moi, les pauvres. J'ai moins donné depuis que je songe à vous pourvoir. J'y renonce; un joueur ne doit pas songer à se marier. Jouez tant qu'il vous plaira, mais à cette condition: je déclare qu'à chaque perte nouvelle, les infortunés recevront de ma part autant d'argent que j'en aurai compté pour acquitter de semblables dettes. Commençons dès aujourd'hui.' La somme fut sur-le-champ portée à l'hôpital. Et le jeune homme se montra désormais plus sage.

XXXVII.

The Remembered are not Dead,

ON demandait à Valérie, dame Romaine, pourquoi, jeune encore, elle refusait de prendre un second époux. Le premier, répondit-elle, n'est mort que pour les autres ; il vit, il vivra toujours pour moi,

XXXVIII. To live by the Death of those we love is to die twice.

ROBERT, l'un des fils de Guillaume-le-Conquérant, ayant été blessé d'une flèche empoisonnée, les médecins lui déclarèrent qu'il ne pouvait guérir qu'en faisant promptement sucer sa blessure. "Mourons donc, dit-il; je ne serai jamais assez cruel et assez injuste pour souffrir que quelqu'un s'expose à mourir pour moi." Cependant Sybille, son épouse, profita du moment où il dormait pour sucer sa plaie ; et, de cette manière, elle perdit la vie en la sauvant à son époux.

XXXIX.

Good Deeds outlive great Tombs. AGESILAS, roi de Lacédémone, près de mourir, demanda, qu'on ne fìt de lui aucune statue ni portrait. 'Si j'ai fait, dit il, quelques belles actions, ce seront les monumens de ma gloire : mais si je n'ai rien fait de remarquable, les portraits et les statues ne rendront pas ma mémoire illustre."

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XL. To do without is to obtain.

Le prince de Conti, frère du grand Condé, quoique accablé d'infirmités, ne se livrait dans sa manière de vivre, à aucune fantaisie, à aucun caprice. En vain la princesse, son épouse, l'invitait-elle à se traiter lui-mème avec moins de sévérité : 'En se livrant à un goût, lui répondait-il, on s'accoutume à se livrer à tous les autres. Il faut savoir, ou ne pas tout désirer, ou se passer souvent de ce qu'on désire.

XLI. The Ocean no Flatterer.

UN jour Canut le Grand, roi d'Angleterre, étoit sur le
Ses courtisans, qui,

bord de la mer avec toute sa cour.

selon la coutume, étoient des flatteurs, lui dirent qu'il étoit le roi des rois, et le maître de la mer et de la terre. Canut, qui avoit de la religion et du bon sens, saisit cette occasion pour se moquer de ces flatteurs, et leur faire voir qu'il avoit trop d'esprit pour être la dupe de leurs sots dis

cours.

Pour cela, il fit apporter une chaise, et s'assit dessus ;

c'étoit le temps du flux de la mer. Canut, parlant à cet élément, lui dit : " La terre où je suis est à moi, et je suis ton maître; je te commande donc de rester où tu es, et de n'avancer pas pour mouiller mes pieds!" Tous ceux qui entendirent ces paroles pensèrent que le roi étoit fou de s'imaginer que la mer alloit lui obéir.

Cependant elle continuoit d'avancer, et enfin vint mouiller les pieds du monarque. Alors Canut, se levant, dit aux flatteurs: "Vous voyez comment je suis le maître de la mer ! apprenez par-là que la puissance des rois est bien peu de chose. Il n'y a, dans la vérité, d'autre roi que Dieu, par qui le ciel, la terre et la mer sont gouvernés."

XLII. Cruelty checked by Firmness.

DANS le temps de la révolte du parlement d'Angleterre contre le roi Charles I., Fairfax général de l'armée du parlement, ayant mis le siége devant Gloucester, place qui tenoit pour le roi, se servit d'un cruel stratagème pour obliger le Baron Capel, qui en étoit gouverneur, à se

rendre à discrétion.

Capel avoit un fils unique, âgé de dix-sept ans, bien fait et plein d'esprit, qui étudioit à Londres. Fairfax le fit amener dans son camp. Il proposa ensuite une entrevue au gouverneur. Capel se rendit au lieu dont on étoit convenu; mais il fut bien étonné de voir son fils, nu jusqu'à la ceinture, les mains liées derrière le dos, au milieu de quatre soldats, deux qui avoient le poignard levé contre lui, et deux qui lui tenoient le pistolet appuyé sur l'es

tomac.

Pendant qu'il regardoit ce triste spectacle, il entendit un des officiers de Fairfax, qui lui dit : "Préparez-vous à vous rendre ou à voir répandre le sang de votre fils." Capel pour toute réponse cria à son fils avec fermeté : "Mon fils, souvenez-vous de ce que vous devez à Dieu et au Roi!" paroles qu'il répéta trois fois.

Il rentra ensuite dans la place, et exhorta les officiers à périr plutôt que de capituler. Fairfax ne put s'empêcher d'admirer une action aussi noble, et, dès que Capel se fut retiré, il fit habiller son fils, et le renvoya à Londres.

XLIII. Honesty is the best Policy.

UNE femme fort pauvre, mais qui avoit la consolation d'avoir une fille aimable, se présenta avec cette jeune personne à l'audience du Cardinal Farnèse. Elle lui exposa

qu'elle étoit sur le point d'être renvoyée avec sa fille d'un petit appartement qu'elles occupoient chez un homme fort riche, parce qu'elles ne pouvoient lui payer cinq sequins qui lui étoient dus.

Le ton d'honnêteté avec lequel elle représentoit son malheur fit aisément comprendre au cardinal qu'elle n'y étoit tombée que parce que la vertu lui étoit plus chère que les richesses. Il écrivit un mandat, et la chargea de le porter à son intendant. Celui-ci, après l'avoir ouvert, compta sur-le-champ cinquante sequins : lui dit cette femme, je ne demandois pas tant, et certainement monseigneur s'est trompé.”

"Monsieur,'

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L'intendant, pour faire cesser la contestation, fut luimême obligé d'aller parler au cardinal. Son éminence, en reprenant son mandat, dit aux deux personnes qui étoient présentes, "Vous avez tous raison, je m'étois trompé, le procédé de madame le prouve :" et au lieu de cinquante sequins, il en écrivit cinq cents, qu'il engagea la vertueuse mère à accepter pour marier sa fille.

XLIV. Love of Country stronger than even Maternal Love.

LORS de l'invasion de Xerxès dans la Grèce, on vit à Sparte combien l'amour de la patrie a d'empire sur les âmes grandes et fortes: hommes, femmes, enfans, vieillards, tous les âges, toutes les conditions se disputèrent la gloire de lui faire les plus grands sacrifices.

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Une mère, armant son fils pour le combat, et lui remettant son bouclier : Rapporte-le, dit-elle, ou qu'on te rapporte dessus." L'usage des Lacédémoniens était de rapporter sur leurs boucliers ceux qui mouraient en combattant vaillamment.

Une autre apprenant qu'un de ses fils était tombé glorieusement sur le champ de bataille, s'écria: "Je ne m'er étonne pas, c'était mon enfant !" Apprenant que son second fils avait sauvé sa vie en fuyant lâchement : 'Il n'était donc pas mon fils!" dit-elle avec indignation.

Une troisième avait cinq fils à l'armée, et attendait des nouvelles de la bataille. Elle en demande en tremblant à un esclave qui venait de l'armée. Vos cinq fils ont été tués, lui dit-il.-Vil esclave, reprit-elle, est-ce là ce que je te demande ?-Nous avons gagné la victoire, répliqua l'esclave. La mère court au temple, et rend

grâces aux dieux.

Une quatrième voyant, au siège d'une ville, son fils aîné tomber mort au poste qu'elle lui avait assigné : "Qu'on appelle son frère pour le remplacer," s'écria-telle aussitôt.

XLV. Laconics.

LES Lacédémoniens étaient singulièrement avares de paroles, et le laconisme a pris son nom de la brièveté de leurs discours. Un député d'Abdère ayant parlé trèslong-temps en présence du roi Agis II, lui demanda ce qu'il dirait de sa part à ses concitoyens ? "Dis-leur, répondit le monarque, que pendant ton discours, j'ai gardé le silence."

Un autre ambassadeur, après une harangue d'une longueur insupportable, fit à ce prince une question semblable : Dis à tes concitoyens, répondit-il, que nous avons eu beaucoup de peine, toi à finir, moi à t'entendre.

Un officier français, qui avait rendu trop facilement un poste important, voulut s'excuser des reproches que lui en faisait son général : "le poste, lui dit-il, était indéfendable. Ce mot n'est pas français," lui répondit seulement le général.

Un Lacédémonien avait fait peindre une mouche sur son bouclier : "Cet ornement est trop faible, lui dit quelqu'un, pour être aperçu de l'ennemi.-Oh! répondit-il, je lui montrerai cette mouche de si près, qu'il la trouvera plus grosse encore qu'elle n'est réellement."

On reprenait un autre Spartiate, de ce qu'étant boiteux, il osait s'armer contre l'ennemi : "Mon dessein est de combattre, non de fuir," répondit-il.

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