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Celle-ci sonne une heure, et celle-là midi.
On serait à moins étourdi.

Laquelle avait raison?

C'était un vrai problème,

Et notre faiseur de système

Ne savait que résoudre en un doute pareil.

Quelqu'un lui dit, et je le dis de même
A ceux qui vont partout demander un conseil,
Consulter bien des gens est une erreur extrême:
Dans un cas important faut-il vous décider ?
Vingt conseils différens, bien loin de vous aider,
Augmentent votre incertitude.

Un avis s'il est bon suffit pour vous guider :
Mais il faut le trouver; mettez-y votre étude.

102.

Sleeplessness the Kings-Evil.

Un roi tourmenté d'insomnie

(On m'a dit que ce mal était le mal des rois)

Vit à la chasse un villageois

Etendu dans une prairie,
Qui reposait si doucement,

Et dormait si profondément,

Que du triste monarque il excita l'envie.
Au même endroit un hermite passait,

Homme sage, et qu'alors partout on respectait,
Faisant peu de sermons, ne prêchant que d'exemple;
De toutes les vertus son cœur était le temple.
Le roi l'arrête, et lui dit : Homme saint,

De grâce, dites-moi pourquoi ce misérable,
Que le malheur poursuit, que la fortune accable,

Malgré les maux qu'il souffre et malgré ceux qu'il craint, Dort comme un bienheureux, et bien mieux qu'un monarque?

De la paix de son cœur c'est l'infaillible marque,
Répond l'hermite. Sire, un pauvre villageois
Ne condamne personne, et ne fait point de lois;
Jamais l'ambition ne trouble sa pensée:

Des fautes qu'il commet seul coupable et puni,

Ses chagrins sont l'impôt, la taille, la corvée :
Il travaille pour vous, et vous veillez pour lui.
De plaisirs et de maux ce consolant partage
D'un Dieu juste et clément est l'immortel ouvrage.
Vous avez tous les biens, ils ont tous les travaux;
Vous avez les remords, ils ont le doux repos.
Rois qui nous gouvernez, portez mieux vos couronnes;
Que les honnêtes gens soient vos seuls favoris;
Et pour mieux dormir dans vos lits,
Dormez un peu moins sur vos trônes.
Ainsi parla l'hermite, et le roi furieux
Le fit punir, et n'en dormit pas mieux.

103. Whip not the Dog for the fault of his Master. Couché nonchalamment à l'ombre d'un ormeau, Coridon négligeait le soin de son troupeau, L'abandonnait, tandis qu'au bord d'une fontaine Il chantait ses amours au son du chalumeau. Cependant dom Coursier fourrage dans la plaine; Messer Aliboron se roule dans l'aveine;

Dame brebis, le bœuf, tous, suivant leur penchant,
Grugeaient, s'ébattaient... Gare! arrive maître Jean,
Fermier du champ.

Point de quartier; il frappe, assomme, tue.
Sauve qui peut, chacun fuit, s'évertue

De son mieux: le cheval, aussi prompt que le vent,
Vole; l'âne, peu diligent,

Pour la première fois court, échappe au martyre;
Essoufflé, le bœuf tombe, et la brebis expire
Sous les coups redoublés du barbare manant.
La brebis! l'inhumain !...Arrête, misérable!
Disait-elle en mourant: eh! pourquoi m'égorger?
De tes blés ravagés suis-je donc responsable ?
Epargne le troupeau; va punir le coupable;
C'est le berger.

104. The Workman is known by his Work. Quelques rayons de miel sans maître se trouvèrent : Des frêlons les réclamèrent;

Des abeilles s'opposant,

Devant certaine guêpe on traduisit la cause.
Il étoit malaisé de décider la chose :

Les témoins déposoient qu'autour de ces rayons
Des animaux ailés, bourdonnant, un peu longs,
De couleur fort tannée, et tels que les abeilles,
Avoient long-temps paru. Mais quoi dans les frêlons
Ces enseignes étoient pareilles.

La guêpe, ne sachant que dire à ces raisons,
Fit enquête nouvelle, et, pour plus de lumière,
Entendit une fourmilière.

Le point n'en put être éclairci.

De grâce, à quoi bon tout ceci ?
Dit une abeille fort prudente.

Depuis tantôt six mois que la cause est pendante,
Nous voici comme aux premiers jours.
Pendant cela le miel se gâte........

Travaillons, les frêlons et nous :

On verra, qui sait faire avec un suc si doux,
Des cellules si bien bâties.

Le refus des frêlons fit voir

Que cet arrêt surpassoit leur savoir;
Et la guêpe adjugea le miel à leurs parties.

105. Modesty graces every other Virtue. Lorsque Jupiter prit le soin

D'assigner aux Vertus leur rang auprès de l'homme,
Celle qui méritait la pomme,

La Modestie, était demeurée en un coin :
Elle fut oubliée; on ne la voyait point.

O vous que la grâce accompagne,

Lui dit le dieu, les rangs sont déjà pris ;
Mais des autres Vertus vous serez la compagne :
Vous en rehausserez le prix.

106. Novelty soon grows old.

Aux lieux où règne la Folie
Un jour la Nouveauté parut.
Aussitôt chacun accourut;

Chacun disait: Qu'elle est jolie !

Ah! madame la Nouveanté,
Demeurez dans notre patrie;
Plus que l'esprit et la beauté
Vous y fûtes toujours chérie,

Lors la déesse à tous ces fous
Répondit: Messieurs, j'y demeure;
Et leur donna le rendez-vous
Le lendemain à la mème heure.

Le jour vint. Elle se montra
Aussi brillante que la veille :
Le premier qui la rencontra
S'écria: Dieux, comme elle est vieille!

107. Peace makes Plain Fare a Luxury.
Certain rat de campagne, en son modeste gîte,
De certain rat de ville eut un jour la visite.
Ils étaient vieux amis ; quel plaisir de se voir!
Le maître du logis veut, selon son pouvoir,

Régaler l'étranger: il vivait de ménage,

Mais donnait de bon cœur, comme on donne au village.
Il va chercher au fond de son garde-manger

Du lard qu'il n'avait pas achevé de ronger;
Des noix, des raisins secs. Le citadin à table
Mange du bout des dents, trouve tout détestable.
"Pouvez-vous bien, dit-il, végéter tristement
Dans un trou de campagne, enterré tout vivant!
Croyez-moi, laissez-là cet ennuyeux azile,
Venez voir de quel air nous vivons à la ville;
Hélas! nous ne faisons que passer ici bas :
Les rats, petits et grands, marchent tous au trépas.
Ils meurent tout entiers, et leur philosophie

Doit être de jouir d'une si courte vie,

D'y chercher le plaisir qui s'en passe est bien fou."
L'autre, persuadé, saute hors de son trou:
Vers la ville à l'instant ils trottent côte à côte.
İls arrivent de nuit, la muraille était haute;
La porte était fermée, heureusement nos gens

Entrent sans être vus; sous le seuil se glissant,
Dans un riche logis nos voyageurs descendent;
A la salle à manger promptement ils se rendent:
Sur un buffet ouvert, trente plats desservis,
Du souper de la veille étalaient les débris.
L'habitant de la ville, aimable et plein de grâce,
Introduit son ami, fait les honneurs, le place;
Et puis, pour le servir, sur le buffet trottant,
Apporte chaque mets qu'il goûte en l'apportant.
Le campagnard, charmé de sa nouvelle aisance,
Ne songeait qu'au plaisir et qu'à faire bombance,
Lorsqu'un grand bruit de porte épouvante nos rats;
Ils étaient au buffet, ils se jettent en bas,
Courent, mourant de peur, tout autour de la salle :
Pas un trou....De vingt chats une bande infernale
Par de longs miaulemens redouble leur effroi.
-Oh! oh! ce n'est pas là ce qu'il me faut à moi,
Dit le bon campagnard; mon humble solitude
Me garantit du bruit et de l'inquiétude;

Là je n'ai rien à craindre, et si j'y mange peu,
J'y mange en paix, du moins, et j'y retourne...Adieu.

103. Elevation is Exposure.

Deux mulets cheminoient, l'un d'avoine chargé,
L'autre portant l'argent de la gabelle.

Celui-ci, glorieux d'une charge si belle,
N'eût voulu pour beaucoup en être soulagé.
Il marchait d'un pas relevé,

Et faisait sonner sa sonnette;
Quand l'ennemi se présentant,
Comme il en voulait à l'argent,
Sur le mulet du fisc une troupe se jette,
Le saisit au frein et l'arrête.

Le mulet, en se défendant,

Se sent percer de coups; il gémit, il soupire:
Est-ce donc la, dit-il, ce qu'on m'avait promis?

Ce mulet qui me suit du danger se retire,
Et moi, j'y tombe, et je péris!

Ami, lui dit son camarade,

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