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férant, celles de notre falut? Ne dif-· férez pas, dit le Sage, de vous convertir au Seigneur; ne remettez pas de jour en jour, car fa colére éclatera tout d'un coup. ( Eccli. 5. 8. 9.) Jefus-Chrift ne nous avertit-il pas luimême qu'il viendra comme un voleur? (Apoc. 3. 3.)

XXXIV.

Hante les bons, des méchans ne t'acointe,
Et mêmement en la jeune faifon,
Que l'appetit pour forcer la raison
Arme nos fens d'une brutale pointe.

Hante les bons, des méchans ne t'acointe. Celui qui fe joint aux fuperbes, dit le Sage, deviendra fuperbe. (Eccli. 13. 1.) Parce que les méchans prennent avantage des forces que nous perdons contr'eux pour nous attirer dans leurs piéges; piéges fi certainement dangereux, qu'il eft difficile de les éviter; piéges fi fouvent victorieux des plus puiffans attraits de la vertu, que nous faifons plus de mal en nous séparant de la compagnie des bons que nous ne pouvons même en éviter dans la compagnie des méchans.

X X X V.

Quand au chemin fourchu de ces deux Dames
Tu te verras (comme Alcide femond)
Suis celle-là qui par un âpre mont,
Te guide au ciel, loin des plaisirs infames.

Suis celle-là qui par un âpre mont te guide au ciel. Je ne vois point dans la vie d'Alcide, c'est-à-dire d'Hercule, de chemin fourchu où il ait été arrêté pour choisir entre le bien & le mal, Cependant c'est l'idée commune qu'au fortir de l'enfance ce Héros fut invité à faire ce choix. A l'égard de l'âpre mont qui guide au ciel, c'eft la porte étroite, le chemin difficile & fâcheux, dont il eft parlé dans le Sermon de Jesus-Chrift fur la Montagne. Entrez, dit-il, par la porte étroite, parce que la porte de la perdition eft large, le chemin qui y conduit est spatieux, & il eft fuivi par le grand nombre, (Matth. 7. 13. 14.)

XXXVI.

Ne mets ton pied autravers de la voie
Du pauvre aveugle; & d'un piquant propos
De l'homme mort ne trouble le repos;
Et du malheur d'autrui ne fait ta joie.

De l'homme mort ne trouble le repos. Il femble que le Sage (Eccli. 11. 30.) qui ordonne de différer l'éloge des hommes après leur mort, parce qu'alors ils ne font plus fufceptibles de vanité, pourroit permettre de les blâmer alors, par la même raifon qu'ils font incapables de reffentiment. Cependant c'eft un principe affez reçu, qu'il ne faut point remuer les cendres des morts; c'est-à-dire, mal parler d'eux. On en apporte deux raisons affez folides. La premiére eft qu'il y a de la lâcheté à attaquer des gens qui font hors d'état de fe défendre. La feconde, qu'étant peut-être morts en état de grace, ils nous font toujours unis par les liens de la charité,

XXX VII.

En ton parler fois toujours véritable,
Soit qu'il te faille en témoignage ouir,
Soit que par fois tu veuilles réjouir
D'un gai propos tes hôtes à la table.

Soit que par fois tu veuilles réjouir tes hôtes. On compte pour rien ces menfonges badins, ces fictions réjouiffantes qui font l'agrément des Sociétés. Mais qu'il eft à craindre que ces défauts qu'on regarde comme legers ne deviennent confidérables! Plufieurs gouttes d'eau font échouer un vaiffeau. Plufieurs grains de zizanie fuffoquent le bon grain : & fi nous nous calmons à la vûe de leur legereté, tremblons, tremblons à la vûe de leur nombre.

XXXVILI.

La vérité d'un cube droit fe forme,
Cube contraire au leger mouvement,
Son plan quarré jamais ne se dément
Et en tous fens a toujours même forme.

La vérité d'un cube droit fe forme Perfonne n'ignore le fameux problême

que les Gardes du corps de Darius agitérent entr'eux pendant le fommeil de leur maître. Il s'agiffoit de décider quelle étoit fur la terre la plus forte puiffance, du vin, d'un Roy, de la femme ou de la vérité : & comme ils prévoyoient que les avis feroient partagés, ils convinrent tous de s'en rapporter au jugement du Prince. Le premier qui parla donna la préférence au vin, le fuivant aux Rois & le troifiéme aux femmes. Mais quelqu'immenfe que femble leur pouvoir, ajouta-t-il, il doit ceder à celui de la vérité. Le vin' fait perdre la raifon, & met l'homme au niveau de la bête. Un Roy peut être injufte, & d'autant plus injufte, qu'il eft facile de l'etre impunément. Les femmes ont un grand pouvoir, mais elles ne tirent leur puiffance que de la foibleffe des hommes. Mais aucune de ces ombres ne ternit la gloire de la vérité. Elle eft toujours la meme; elle ne change point, elle ne varie point; plus elle vieillit, plus elle est forte; elle paffe d'âge en âge, & fait la gloire de tous les fiécles. Telle fut la folution du problême, & elle fut approuvée du Roy & de

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