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C'eft par Toi qu'on va voir les Mufes enrichies
De leur longue difette à jamais affranchies.
GRAND ROI, poursuy toûjours,

affure leur

repos,

160 Sans elles un Heros n'eft pas long-temps Heros.
Bien-toft, quoiqu'il ayt fait, la mort d'une ombre noire
Enveloppe avec lui fon nom & fon histoire.

En vain pour s'exemter de l'oubli du cercueil,
Achille mit vingt fois tout Ilion en deuil.

165 En vain, malgré les vents, aux bords de l'Hefperie
Enée enfin porta fes Dieux & fa Patrie.

Sans le fecours des vers, leurs noms tant publiez
Seroient depuis mille ans avec eux oubliez.

Non, à quelques hauts faits que Ton deftin T'appelle, 170 Sans le fecours foigneux d'une Muse fidelle,

Pour T'immortaliser Tu fais de vains efforts,
Apollon te la doit : ouvre-luy Tes trefors.
En Poëtes fameux rens nos climats fertiles.
Un Augufte aisément peut faire des Virgifes,
375 Que d'illuftres témoins de Ta vaste bonté
Vont pour Toi déposer à la posterité!

REMARQUES.

dons d'abord n'aillent chercher.]
En 1663. le Roi donna des pen-
fions aux Gens de Lettres, dans
Loute l'Europe.

IMIT. Vers 160. Sans elles un

Heros n'eft pas long-temps Heros. &c.] M. Du Monteil avertit, que c'eft ici une Imitation d'Ho. race, qui dit, Liv, IV. Ode IX. Vers 25.

Vixere fortes ante Agamemnona
Multi; fed omnes illacrymabiles
Urgentur, ignotique longa

Nocte, carent quia vate facro,

IMIT. Vers 174. Un Augufte

donne à un Mécenas le même

aifément peut faire des Virgiles.] pouvoir que l'on attribuë ici à MARTIAL, Liv, VIII. Epigr. 56, un Augufle,

Sint Mecanates, non deerunt, Flacce, Marones

Pour moi, qui fur Ton nom déja brûlant d'écrire, Sens au bout de ma plume expirer la Satire, Je n'ofe de mes vers vanter ici le prix. 180 Toutefois, fi quelqu'un de mes foibles écrits Des ans injurieux peut éviter l'outrage, Peut-eftre pour Ta gloire aura-t-il fon usage. Et comme Tes exploits étonnant les Lecteurs, Seront à peine creus fur la foy des Auteurs ; 185 Si quelque Efprit malin les veut traiter de fables, On dira quelque jour, pour les rendre croyables; Boileau qui dans fes vers pleins de fincerité, Jadis à tout fon fiecle a dit la verité ;

Qui mit à tout blâmer fon étude & fa gloire, 190 A pourtant de ce Roi parlé comme l'Histoire.

VERS 177.

REMARQUES.

Pour moi qui fur Ton nom déja brilant d'écrire,&c.] On a comparé cet endroit avec un autre de l'Epitre VIII, s'agit de décider, qui l'emporte des

deux. L'Auteur en a jugé luimême, &, ce me femble, avec beaucoup de jufteffe. Voïés la Remarque fur le Vers 65. de l'Epitre VIII.

L

'Auteur ne composa sa seconde Epître, que pour conferver la Fâble de l'Huiftre & des Plaideurs, qu'il avoit retranchée de la fin de l'Epître précédente. L'Abbé Des Roches, auquel il adreffe celle-ci, fe nommoit, Jean-François-Armand Fumée. Il étoit fils de François Fumée, Seigneur des Roches, & def çendoit d'Adam Fumée, premier Médecin de Charles VII. L'Abbé Des Roches mourut en 1711. âgé d'environ 75. ans. C'est à lui que Gabriel Guéret a dédié fon Parnaffe Reformé.

EPIST RE II.

A M. L'ABBE' DES ROCHES.

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AQUOI bon réveiller mes Mufes endormies,
Pour tracer aux Auteurs des regles ennemies ?
Penfes-tu qu'aucun d'eux veuille fubir mes loix
Ni fuivre une raison qui parle par ma voix ?
5 O le plaifant Docteur, qui, fur les pas d'Horace,
Vient prefcher, diront-ils, la reforme au Parnasse!

REMARQUES.

VERS 1. A quoi bon réveiller, &c.] Les fix premiers Vers font connoître que l'Auteur travailloit alors à fon Art Poëtique. IMIT, Vers 5. O le plaifant Doc

teur, &c.] A l'occafion de ce Vers & des deux qui le fuivent, il eft à remarquer que M. Def préaux s'eft imité lui-même. Il avoit dit dans l'Ep. I. Vers 21.

Eft-ce là cet Auteur l'effroi de la Pucelle,

Qui devoit des bons vers nous tracer le modele

Ce Cenfeur, diront-ils qui nous reformoit tous ?

Quoi? ce Critique affreux n'en fait pas plus que nous ?

Saint-Geniez, en finiffant fon Euterpe déja citée plus d'une fois,

Nos écrits font mauvais, les fiens valent-ils mieux ?

J'entens déja d'ici Liniere furieux,

Qui m'appelle au combat, fans prendre un plus long terme.
10 De l'encre, du papier, dit-il : qu'on nous enferme.`
Voyons qui de nous deux plus aifé dans ses vers,
Aura plûtoft rempli la page & le revers?

Moy donc qui fuis peu fait à ce genre d'escrime,
Je le laiffe tout feul verfer rime fur rime,

15 Et fouvent de dépit contre moy s'exercant,
Punir de mes defauts le papier innocent.

Mais toy qui ne crains point qu'un Rimeur te noirciffe,
Que fais-tu cependant feul en ton Benefice?

Attens-tu qu'un Fermier payant, quoy qu'un peu tard,
20 De ton bien pour le moins daigne te faire part?
Vas-tu, grand deffenfeur des droits de ton Eglife,
De tes Moines mutins reprimer l'entreprise?

REMARQUES.

avoit emploïé la même pensée, fur lequel nôtre Auteur a beau mais avec un tour différent & coup enchéri.

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-ego cùm culpem fludium hoc, aliofque Poëtas Exagitem, feclique frequens incommoda clamem: Cùm fit Scriptorum reprenfa licentia verbis Tanta meis, cùm librorum faftidia pre me Tanta feram, in numero tamen ut fim molior ifto. VERS 8. J'entens déja d'ici Liniere furieux.] Le Poëte Linière avoit beaucoup de facilité à faire des Vers médiocres. Nôtre Auteur l'avoit pourtant nommé honorablement dans la Satire IX. Vers 236. Mais Linière s'avifa de faire une Critique trèsoffenfante de l'Epitre IV. qui avoit êté faite avant celle-ci.

Pour toute vangeance, M. Def préaux mit le nom de ce Poëte en cet endroit, & dans quelques autres de fes Ouvrages. Voïés Epit. VII. V. 89. Art Peet. Chant II. Vers 194.

IMIT. Ibid, J'ertens déja d'ici
Liniere furieux. 1 HORACE a dit
de même, Livre I. Satire IV.
Vers 24.

Crifpinus minimo me provocat: accipe, fi vis,
Accipe jam tabulas, detur nobis locus, hora 2
Caledes: videamus uter plus fcribere poffit.

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