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Dans le Monde il n'eft rien de beau que l'Equité.
Sans elle la Valeur, la Force, la Bonté,

Et toutes les Vertus, dont s'éblouït la Terre,
faux brillans, & que morceaux de verre.

Ne font

que

75 Un injufte Guerrier, terreur de l'Univers,
Qui fans fujet courant chez cent Peuples divers,

REMARQUES.

Reaux, pour nous apprendre que le nom de M. de S. Evremond ne fe trouve ici que parce que dans la Difpute de la Préférence des Anciens & des Modernes, il avoit pris le parti des derniers. M. Des-Maizeaux, admirateur outré des Ouvrages de fon Ami, s'accroche à ce qu'il peut pour détruire l'impreffion, que doit faire le Jugement que porte de la Morale de cet Ami un Poëte, partifan fincère de la véritable Vertu & de la Morale la plus févère. C'eft à ce titre que M. Defpréaux condamnoit les Maximes répandues dans les Ecrits d'un Ecrivain, dont il difoit, comme il eft rapporté dans le Boleana: "Qu'est-ce qu'un S. Evremond, ,, que les Sots ofent comparer à ,, Montagne ? Les écarts de l'un ,, valent mieux que tout le con,, cert & l'arrangement de l'au,, tre, qui n'eft qu'un charlatan de ruelles; qui fe panade dans fes termes étudiés, & fes ma,, ximes prétendues philofophi,, ques. Paffons-lui ce qu'il a écrit fur la Guerre, dont il ne fe démêle pas mal. Mais pour ,, le refte, c'eft un faux Aristar,, que qui veut juger de tout comme Perrin Dandin, quoi , qu'il prenne fouvent l'ombre

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,, pour le corps. Admirez pour. ,, tant la folie d'un certain Public particulier, qui a longtems êté ébloùi de fes décifions. Pour moi, j'eftime plus un feul Chapitre d'Aulugelle, ,, que tous les Mifcellanea de cet Auteur Au refte, S. Evremond, dans fes principes, & comme homme de Cour, pouvoit impunément appeller PETRONE Un des plus honnêtes Hommes du Monde. Perfonne ne fe trompe à la valeur de ces Expreffions; & M. Du Monteil pouvoit la deflus s'épargner tout détail.

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Profitons cependant de ce qu'il ya d'uniquement utile dans fa très-longue Note. C'eft mal prou. ver que M. de S. Evremond regardoit PETRONE comme fon Héros en fait de Morale que de nous ren voïer aux Réflexions fur la Doctrine d'Epicure, imprimées parmi les Ouvrages de S. Euremond. Elles font de Sarrafin ; & fe trouvent à la tête de fes Nouvelles Oeuvres, qui parurent à Paris en 1674. en 2. Vol. in-12.

IMIT. Vers 74. Ne font que faux brillans, & que morceaux de verre. ] On trouve cette Penfée dans les Fragmens de Sublius Syrus:

Fortuna vitrea eft, tum cùm fplendet, frangitur.

VIRS 75. Un injufte Guerrier, &c.] Alexandre. DIS?,

S'en va tout ravager jufqu'aux rives du Gange,

N'eft qu'un plus grand Voleur que Du Terte & Saint Ange.
Du premier des Cefars on vante les exploits ;

80 Mais dans quel Tribunal, jugé fuivant les loix
Euft-il pû difculper son injuste manie?
Qu'on livre fon pareil en France à La Reynie,

REMARQUES.

VERS 78. N'est qu'un plus grand Voleur, &c.] Ce Vers & les trois précédens font allusion à la réponfe,qu'un Pirate fit à Alexandre, qui lui reprochoit fa condition, Je fuis un Pirate, dit-il, parce que je n'ai qu'un vaiffeau; filavois une armée navale, je ferois un Conquérant. APOPHT, des Anciens. SENEQUE appelle ces fortes de Conquérans injuftes, magnos & furiofos latrones. S. AuGUSTIN dit auffi: Quid enim funt regna remota juflitid, nifi magna latrocinia?

Ibid. Que du Terte & Saint Ange.] Deux fameux Voleurs de grand chemin. DE SP.

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d'Orleans, Nôtre Auteur l'avoit connu.

CHANG. Vers 82. Qu'on livre fon pareil, &c.] Dans l'Edition pofthume de 1713. on lit: Qu'on trouve fon pareil. Ce qui vraifemblablement eft une faute d'impreffion; n'êtant pas à préfumer que M. Despréaux ait êté capable de mettre une mauvaife Expreffion à la place d'une bonne.

Ibid. à la Reynie. ] Celebre Lieutenant Général de Police à Paris. DES P.

Gabriel Nicolas de la Reynie êtoit né à Limoges en 1625. Il fut pourvu de la Charge de Maître des Requêtes en 1661. Six ans après, le Roi voulant établir un bon ordre dans la ville de Paris, ôta la Police au Lientenant Civil, & créa une Charge de Lieutenant de Police dont M. de la Reynie fut pourvû le 1. jour de l'année 1667. En 1680. le Roi récompenfa fes fervices dans cette Charge d'un Brevet de Confeiller d'Etat ordinaire. Il mourut le 14. de Juin 1709. âgé de 84. ans. Il avoit êté un des Commiffaires de la Chambre ardente, établie à l'Arfenal pour la recherche des perfonnes accufées de Sortilège ou de Poifon. 2

Du Terte êtoit un Joueur de profeffion, qui êtoit reçu dans la pluspart des Maisons diftinguées de Paris. Il fit un vol au milieu du Cours de la Reine. On le prit, & il fut condamné à être rompu vif. Ce qui rendit fon fupplice remarquable, c'eft que fon corps demeura expofé fur la roue pendant plus d'un mois à la porte du Cours. Saint Ange eut la même destinée. Il êtoit, dit-on, Fils d'un Maître d'Armes, qui avoit eu l'honneur de montrer au Roi; & il avoit êté Capitaine dans le Regiment de Languedoc des Troupes de Gafton de France Duc

Dans trois jours nous verrons le Phénix des Guerriers Laiffer fur l'échaffaut fa tefte & fes lauriers.

85 C'est d'un Roy que l'on tient cette maxime augufte, Que jamais on n'eft grand qu'autant que l'on eft jufte. Raffemblez à la fois Mithridate & Sylla,

Joignez-y Tamerlan, Genferic, Attila ;

Tous ces fiers Conquerans, Rois, Princes, Capitaines, 90 Sont moins grands à mes yeux que ce Bourgeois d'Athenes, Qui fceut, pour tous exploits, doux, moderé, frugal, Toûjours vers la Juftice aller d'un pas égal.

Oui la Justice en nous eft la Vertu qui brille.
Il faut de fes couleurs qu'ici bas tout s'habille.
95 Dans un Mortel cheri, tout injufte qu'il eft,
C'eft quelque air d'équité qui seduit & qui plaist.
A cet unique appas l'ame eft vraîment sensible :
Mesme aux yeux de l'Injufte un Injufte eft horrible;

REMARQUES.

difoit-il,

,, tus; pour autant "
,, que la Proüeffe ne vaut rien,

elle n'eft conjointe avec la ,, Juftice, & que fi tous les hommes eftoient juftes, alors ,, on n'auroit que faire de la

VERS 84. -fa tefte & fes lauriers. ] JULES CE'SAR êtoit chauve, & cachoit ce défaut au tant qu'il pouvoit. C'eft pourquoi, parmi les honneurs que le Sénat & le Peuple lui déférèrent, il reçut & conferva plus Proüeffe,,. Et à ceux qui divolontiers le privilége de porter foient le Grand Roi le veut toûjours une Couronne de lau- aini: "Et en quoi, difoit-il, riers. C'eft à quoi ce Vers paroît,, eft-il plus grand que moi, s'il faire allufion.

VERS 85. C'est d'un Roy, &c.] Agefilas, Roi de Sparte. DESP. Selon Plutarque traduit par Amiot, ce Roi avoit tousjours ,, accouftumé de dire en fes privez devis, que Juftice eftoit la premiere de toutes les Ver

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n'eft plus jufte,,? Le même Agefilas êtant preffé de tenir une promeffe injufte: fi la chofe n'eft pas julle, dit-il, je ne l'ai pas promife. § Par le Grand Roi on entendoit le Roi de Perse.

VERS 90. -ce Bourgeois d'A thenes. ] Socrate, DES P

Et tel, qui n'admet point la Probité chez lui; too Souvent à la rigueur l'exige chez autrui.

Difons plus: Il n'eft point d'ame livrée au vice,
Où l'on ne trouve encor des traces de Justice.
Chacun de l'Equité ne fait pas fon flambeau.

Tout n'eft pas Caumartin, Bignon, ni Dagueffeau ;
105 Mais jufqu'en ces Païs, où tout vit de pillage,
Chez l'Arabe & le Scythe Elle eft de quelque ufage;
Et du butin acquis en violant les loix,

C'eft Elle entre eux qui fait le partage & le choix.

REMARQUES.

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VERS 104. Tout n'eft pas Caumartin, Bignon, ni Dagueffeau. ] URBAIN-LOUIS le Févre de Caumartin, Confeiller d'Etat, Intendant des Finances mort fous Doien du Confeil, le 2. Septembre 1720. âgé de 67. ans. Jean-Paul Bignon, Abbé de S. Quentin Doïen de l'Eglife Collégiale de faint Germain l'Auxerrois, l'un des Quarante de l'Académie Françoife, & Ancien Président des deux Académies Roïales des Sciences & des Infcriptions, Bibliothécaire du Roi, & Doien des Confeillers d'Etat, mourut dans fa Maifon de l'Iflebelle fous Mantes, le 14. Mars 1743. dans fa 81. année.

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Henri François Dagueffeau, Avocat Général, enfuite Procureur Général au Parlement de Paris; fait Chancellier de France le 2. Février 1717.

IMIT. Vers 108. C'eft Elle entre eux qui fait le partage & le choix, CICERON au Livre II. des Offices, ch. 11. Juftitia tanta wis eft, ut nec illi quidem, qui ma

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Mais allons voir le Vrai jufqu'en fa fource-même.
116 Un Devot aux yeux creux & d'abstinence blême,
S'il n'a point le cœur jufte, eft affreux devant Dieu.
L'Evangile au Chrétien ne dit en aucun lieu,
Sois devot: Elle dit, Sois doux, fimple, équitable.
Car d'un Devot fouvent au Chrétien véritable
115 La diftance eft deux fois plus longue, à mon avis,
Que du Pôle Antarctique au Deftroit de Davis.
Encor par ce Devot ne croi pas que j'entende
Tartuffe, ou Molinos, & sa mystique Bande.
J'entens un faux Chrétien mal instruit, mal guidé,
120 Et qui de l'Evangile envain perfuadé,

REMARQUES.

VERS 113. Elle dit, &c.] L'Auteur fait ici le mot Evangile, du genre féminin, quoique ce mot foit ordinairement de l'autre genre. Il lui auroit êté facile de changer cet endroit en mettant : Sois dévot: Il nous dit, au lieu de Elle nous dit. BROS

SETTE.

Evangile, comine Horloge &
plufieurs autres mots, a long-
tems êté des deux genres; &
même beaucoup de gens en par-

L'Evangile au Chreflien
Sois devot. Il lui dit,
Avec Il nous dit, il faudroit;
Soiés doux, &c.

On ne devine pas les raifons,
qui, dans l'Edition de Paris 1735.
ont fait adopter la fauffe correc-
tion de M. Eroffette. On y lit:
Il nous dit, au lieu de Elle dit.
On doit aux Auteurs du premier
ordre, de ne jamais altérer leur
Texte. Il eft utile d'avertir de
leurs fautes.

VERS 116. Que du Pôle Antardique au Defiroit de Davis. ] Def

lant, les font aujourd'hui fémi
nins, quoique l'Ufage général
les faffe mafculins. M. Defpréaux
n'eft pas repréhenfible d'avoir
ufé d'une liberté, qui fubfiftoit
certainement encore dans le
tems qu'il compofa cette Satire.
Suppofé cependant qu'il eût cru
devoir changer cet endroit, il
n'auroit pas mis: Il nous dit,
comme M. Broffette le propofe;
mais, Il lui dit; c'eft ce que
la
fuite de la phrafe demande.
ne dit en aucun lieu,
Sois doux, &c.
troit fous le Pôle Arctique près
de la nouvelle Zemble. DES
PRE'AUX.

Le Détroit de Davis mouille la partie du Groenland, qui fut découverte en 1985. par Jean Davis, Anglois.

VERS 118. Tartuffe, ou Moli nos, & fa myflique Bande. ] Les Hypocrites, défignés par Tartuffe ; & les Quiétifies défignés par Miguel Molinos leur Chef. Voies Satire X. Vers 622.

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