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AVERTISSEMENT

SUR

LA X. SATIRE.

VOICI enfin la * Satire qu'on me demande depuis fi long-temps. Si j'ai tant tardé à la mettre au jour, c'est que j'ai esté bienaise qu'elle ne paruft qu'avec la nouvelle édition qu'on faifoit de mon Livre, où je voulois qu'elle fuft inférée. Plufieurs de mes Amis, à qui je l'ai leuë, en ont parlé dans le monde avec de grands éloges, & ont publié que c'eftoit la meilleure de mes Satires. Ils ne m'ont pas en cela fait plaifir. Je connois le Public. Je fçay que naturellement il se revolte contre les louanges outrées qu'on donne

REMARQUES.

*M. DESPRE AUX avoit formé le deflein de faire une Sat. contre les Femmes long temps avant que de l'exécuter. Mais il avoit en quelque forte abandonné la Poelie, lorfqu'il avoit

êté chargé d'écrire l'Hiftoire du Roi. Ce fut le Poëme de M. Perrault, intitulé : le Siècle de Louis le Grand, & fon Parallèle des Anciens & des Modernes, qui ra,

menèrent M, Delpréaux à la Poge

aux Ouvrages avant qu'ils ayent paru;

& que

la plupart des Lecteurs ne lifent ce qu'on leur a élevé fi haut, qu'avec un deffein formé de le rabbailler.

Je declare donc que je ne veux point profiter de ces difcours avantageux : & non-feulement je laisse au Public fon jugement libre, mais je donne plein pouvoir à tous ceux qui ont tant critiqué mon Ode fur Namur, d'exercer auffi contre ma Satire toute la rigueur de leur Critique. J'efpere qu'ils le feront avec le mefme fuccés: & je puis les affeurer que tous leurs difcours ne m'obligeront point à rompre l'efpece de vœu que jai fait de ne jamais deffendre mes Ouvrages, quand on n'en attaquera que les mots & les fyllabes. Je fçaurai fort bien foûtenir contre ces Cenfeurs, Homere, Horace, Virgile, & tous ces autres grands Perfonnages dont j'admire les écrits: mais pour mes écrits que je n'admire point,

REMARQUES.

fie, pour vanger les Anciens, outragés dans ces deux Ouvrages. Il hit d'abord une ode à la manière de Pindare, afin de juftifier ce Poëte des reproches injultes, que M. Perrault lui avoit

faits en particulier dans fon Pa. rallèle, Tom. I. p. 27. Nôtre Auteur maltraité lui-même dans la fuite de cet Ouvrage, ne voulut pas répondre exprès, convaincu, difoit-il, que les

c'eft à ceux qui les aprouveront à trouver des raifons pour les deffendre. C'eft tout l'avis que j'ai à donner ici au Lecteur.

La bienfeance neanmoins voudroit, ce me femble, que je fille quelque excuse au Beau Sexe, de la liberté que je me fuis donnée de peindre fes vices. Mais au fond, toutes les peintures que je fais dans ma Satire font fi generales, que bien loin d'apprehender que les Femmes s'en offenfent, c'eft fur leur approbation & fur leur curiofité que je fonde la plus grande efperance du fuccés de mon Ouvrage. Une chofe au moins dont je fuis certain qu'elles me loüeront; c'eft d'avoir trouvé moyen, dans une matiere auffi délicate qu'eft celle que j'y traite, de ne pas laiffer échaper un seul mot qui puft le moins du monde bleffer la pudeur. J'efpere donc que j'obtiendrai aisément ma grace, & qu'elles ne feront pas plus choquées des prédications que je fais contre leurs

REMARQUES.

Ecrits, qui ne roulent que fur des Difputes particulières ou perfonnelles, ne font pas de longue durée, & qu'il faut, autant qu'on le peut, choifir des fujets généraux pour plaire au

Public, & fur-tout pour aller à la Poftérité. Il reprit donc fon premier deffein, & compofa fa dixiéme Satire, dans laquelle il fe contenta de faire fentir en paffant le ridicule des Jugemens

defauts dans cette Satire, que des Satires que les Predicateurs font tous les jours en Chaire contre ces mefmes defauts.

REMARQUES.

de M. Perrault. Elle fut achevée en 1693. & parut en 1694. avec le refte de fes Ouvrages, dont il fut fait cette année-là deux Edi

tions confécutives; la première in-4°. & l'autre in 12. Dans toutes les deux, cette Pièce eft intitulée: Dialogue, ou Satire X.

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SATIRE X.

ENFIN bornant le cours de tes galanteries,
Alcippe, il eft donc vrai, dans peu tu te maries,
Sur l'argent, c'est tout dire, on eft deja d'accord.
Ton Beaupere futur vuide fon coffre fort:
5 Et déja le Notaire a, d'un ftile energique,
Griffoné de ton joug l'inftrument autentique.
C'eft bien fait. Il eft tems de fixer tes defirs.
Ainfi que fes chagrins l'Hymen a fes plaifirs.

REMARQUES.

VERS 1. Enfin bornant le cours Il le manda à M. de Maucroix de tes galanteries, &c.] M. Ra. Chanoine de Rheins, leur ami cine n'étoit pas content de ces commun, qui penfa de même deux Vers la conftruction ne & propofa de mettre à la place lui en paroiffoit pas aflés nette. ces deux autres Vers:

Alcippe, il eft donc vrai qu'enfin l'on te marie,
Et que tu prens congé de la galanterie.

Mais M. Defpréaux ne s'en ac-
commoda point, les aïant trou-
vés foibics & profaïques.
VERS 6.

l'inflrument au

tentique. ] INSTRUMENT, en stile de Pratique veut dire, toutes fortes de Contrats. DES PRE'AUX.

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