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Mais moi, grace au destin, qui n'ai ni feu, ni lieu, Je me loge où je puis, & comme il plaist à Dieu,

REMARQUES.

lectures. Il croit que Cocagne
vient de Gogaille: Pais de Go-
gaille, & par corruption, Pais
de Cocaigne. Selon lui, Gogaille
vient de Gogue, qui eft une ef-
pèce de Saupiquet, ou de Farce.
Ménage n'a rien dit de ce mot.
BROSS.

VERS 125 Mais moi
qui n'ai ni feu ni lien.] Quand
l'Auteur compofa cette Satire,
il êtoit logé dans la Cour du
Palais, chés fon Frère aîné, Jé-
rôme Boileau. Sa chambre êtoit
au-deffus du grenier, dans une
efpèce de guérite au cinquiéme
étage. Gilles Boileau, leur Frère,

ou bien :

logeoit auffi dans la même maifon; & quand il en fortit, on donna fa chambre à nôtre Auteur. Cette chambre êtoit pratiquée à côté d'un grenier au quatrième étage; & M. Defpréaux s'applaudiflant de fon lo gement nouveau, difoit: Je fuis defcendu au grenier,

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Au refte l'Auteur vouloit mettre au nombre des incommodités de Paris la grande affluence de peuple qui fait que l'on y eft toujours extrêmement ferré, & il auroit terminé fa defcription par çe Vers: Cherchons une autre Ville où nous puissions tenir.

Et cherchons une ville où l'on puisse tenir.
Mais il ne voulut pas emploïer
ce Vers à caufe de l'équivoque,
qui s'y rencontre; tenir dans

une Ville,fignifiant auffi se défendre contre les ennemis l'affiégent,

qui

Tome I.

La

A feptiéme Satire fut faite à la fin de 1663.immé diatement après la première & la fixième. L'Auteur y délibère avec fa Mufe, s'il doit continuer à compofer des Satires; &, malgré les inconvéniens, il fe détermine à fuivre fon génie. Horace a traité le même fujet dans la I. Satire de fon II. Livre. M. Despréaux n'en a pris fimplement que l'idée.

Jean de La Frefnaie-Vauquelin, Gentilhomme de Normandie, Seigneur de La Frefnaie au Sauvage, de Saffi, de Boeffey, des Yvetaux, des Aulnez & d'Arri; Confeiller du Roi, & Préfident au Baillage & Siége Préfidial de Caen; Père du célèbre Nicolas Vauquelin des Yveteaux,qui fut Précepteur de Louis XIII. eft le premier, de qui nous aïons,en nôtre Langue, des Satires dans le goût de celles des Satiriques Latins, qu'il fe propofa d'imiter. S'il n'a pas toute la force, tout le feu, tout le plaifant de Regnier, il a plus de jufteffe. Il imagine moins, mais il penfe d'avantage. Sa Verfification, fon Langage & fon Stile, ont les défauts de fon tems. Ses Satires & fes Epîtres rampent quelquefois, parce qu'il outre la fimplicité, qu'il croit appartenir à ce genre de Poëfie. A fon exemple, Regnier &M. Defpréaux ont pris tout ce qu'il leur convenoit dans Horace, dans Perfe & dans Juvénal. Il a luimême profité beaucoup auffi des Satires de l'Ariofte. Les fiennes fe trouvent dans le Volume, qu'il fit imprimer, vers la fin de fa vie en 1612. à Caen, chés Charles Macé, fous ce titre : Les Poëfies diverfes du Sieur de la Frefnaie-Vauquelin. C'est un in-8°. La II. Satire du I. Livre, adreffée à Monfeigneur de Chiverny, Chancelier de France, eft imitée d'Horace ; &le Poëte s'entretient avec le Chancelier, de même qu'Horace fait avec Trébatius, fur les dangers, aufquels il s'expofe en s'appliquant à la Satire.

Voiés la Remarque fur le Vers 30. de la IX. Satire, au fujet du Stile de cet ancien Poëte François, aujour d'hui très-peu connu, mais qui mérite de l'être.

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MUSE, changeons de ftile, & quittons la Satire.

C'est un méchant métier que celui de médire.
A l'Auteur qui l'embraffe il eft toûjours fatal.

'Le mal qu'on dit d'autrui, ne produit que du mal.
5 Maint Poëte, aveuglé d'une telle manie,
En courant à l'honneur, trouve l'ignominie,
Et tel mot, pour avoir réjoui le Lecteur,
A coûté bien fouvent des larmes à l'Auteur.

Un éloge ennuyeux, un froid panégyrique,' 10 Peut pourir à fon aife au fond d'une boutique, Ne craint point du Public les jugemens divers, Et n'a pour ennemis que la poudre & les vers.

REMARQUES.

IMITATION. Vers 1. Mu- la Satire.] MARTIAL, Livre II. fe, changeons de file, & quittons Epigr. XXII.

Quid mihi vobifcum eft, ô Phæbe, novemque Sorores ?

Ecce nocet Vati Mufa jocofa fuo.

Mais un Auteur malin, qui rit, & qui fait rire,
Qu'on blâme en le lifant, & pourtant qu'on veut lire ;
15 Dans fes plaifans accés qui fe croit tout permis,
De fes propres rieurs fe fait des ennemis.

Un difcours trop fincere aisément nous outrage,
Chacun dans ce miroir pense voir fon visage:
Et Tel en vous lifant, admire chaque trait,

20 Qui dans le fond de l'ame, & vous craint & vous hait.
Mufe, c'eft donc envain que la main vous demange,
S'il faut rimer ici, rimons quelque loüange,

25

Et cherchons un Heros parmi cet univers,
Digne de noftre encens, & digne de nos vers.
Mais à ce grand effort envain je vous anime:
Je ne puis pour loüer rencontrer une rime.

Dés que j'y veux rêver, ma veine eft aux abois.

J'ay beau frotter mon front, j'ay beau mordre mes doigts,
Je ne puis arracher du creux de ma cervelle,

30 Que des vers plus forcez que ceux de la Pucelle :
Je pense estre à la gefne, & pour un tel dessein,
La plume & le papier refiftent à ma main.
Mais quand il faut railler, j'ai ce que je fouhaite.
Alors, certes alors je me connois Poëte :
35 Phebus, dés que je parle, eft preft à m'exaucer.
Mes mots viennent fans peine, & courent se placer.
Faut-il peindre un fripon, fameux dans cette Ville ?
Ma main, fans que j'y rêve, écrira Raumaville.

REMARQUES.

VERS 30. Que des Vers plus forcez que ceux de la Pucelle.] Poëme heroïque de Chapelain,

dont tous les Vers femblent faits en dépit de Minerve. D E S P.

Voïés Difcours au Roi, v. 2f.

Faut-il d'un Sot parfait montrer l'original ?
40 Ma plume au bout du vers d'abord trouve Sofal.
Je fens que mon efprit travaille de genie.
Faut-il d'un froid Rimeur dépeindre la manie ?

REMARQUES.

d'abord trouvè

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دو

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VERS 40. dans la Maifon de Ville.... Sofal.] Il s'agit ici d'Henri Sau- Comme il êtoit d'un naturel val, Auteur d'un Livre imprimé chagrin, il ne put fupporter long-tems après la mort, fous ce refus; & ce qui augmence titre : Hifloire & Recherches des toit fon chagrin, c'est qu'il Antiquités de la Ville de Paris prétendoit avoir rendu à M. par M. Henri Sauval, Avocat au Colbert un grand fervice, dont Parlement. Paris 1724. 3. vol. il croïoit n'avoir pas êté bien in fol. Cet Avocat avoit travaillé récompenfé. Les Moines de faint fur d'affés bons Mémoires; mais Germain des Prez demandoient il gâta tout par fon ftile chargé,, au Roi de grofles fommes d'ard'expreffions empoulées & de,, gent pour de certaines places figures extravagantes. Il avoit ,,qui avoient êté à eux. M.Colbert mis dans cette Hiftoire un Cha- leur avoit fait offrir une fompitre des lieux de débauche, qui,, me confidérable, qu'ils refu êtoient autrefois dans Paris. M. sèrent d'accepter. Sauval, qui Defpréaux fe fouvenoit d'une ,, avoit vu dans le Tréfor des phrafe de ce chapitre, par la- Chartes une Pièce en trèsquelle on jugera du ftile de SAU- bonne forme, qui contenoit VAL. Ces fales Impudiques, ces in- le paiement qu'on avoit fait fames Débauchées allèrent cher- pour cela aux Moines, alla fui-même en donner avis à M. Colbert.... Il fe plaignoit que M. Colbert ne lui avoit envoïé ,, pour un avis de cette importance, que cent louis, qu'il n'avoit point voulu recevoir... Vous voïez par tout ce que je vous ai rapporté, qu'un homme moins chagrin, & moins intereffé que M. Sawval, auroit donné au Public cet Ou ,, vrage, qui faifoit honneur à

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cher un afile dans la rue Brife-mi-
the ; de-là elles contemplèrent en
fureté les tempêtes & les orages qui
s'élevoient continuellement dans la
rue Chapon. Les Editeurs ont eu
foin de reformer ce ftile. M.
Richard Simon, dans fes Lettres
choifies, Tome III. Ed. de 1698.
Let, dernière, nous apprend pour-
quoi cet Ouvrage ne fut pas im-
primé du vivant de l'Auteur.
"
L'Ouvrage, tel qu'il êtoit, au-
roit vu le jour, dit-il, fi M.,,l'Auteur.,,
"" Colbert avoit voulu faire don-

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دو

,, ner à l'Auteur une penfion de mille écus, & je ne fai quelle ,, Charge honoraire feulement

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On en a détaché un Difcours intitulé Amours des Rois de France fous plufieurs Races, qui a êté imprimé féparément.

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