DE LA LITTÉRATURE FRANÇAISE DEPUIS SES ORIGINES JUSQU'A NOS JOURS PAR J. DEMOGEOT Agrégé à la Faculté des lettres de Paris TROISIÈME ÉDITION PARIS LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET C'e RUE PIERRE-SARRAZIN, N° 14 (Près de l'Ecole de médecine) DE LA PREMIÈRE ÉDITION. Il nous faut d'abord demander grâce pour notre titre : nous l'eussions voulu plus modeste. Lorsque tant d'écrivains qui valent mieux que nous se sont contentés de publier des Essais de critique ou des Études littéraires, il nous sied mal de prétendre écrire une Histoire de la littérature, et cela en un seul volume. Le chroniqueur Froissart se disait historien par naïveté, par ignorance des obligations qu'impose l'histoire; mais Froissart était du moins un charmant conteur, un excellent peintre d'armoiries, comme son père. Nous sommes bien loin de pouvoir alléguer même une pareille excuse; aussi avons-nous subi plutôt que choisi la désignation de ce livre. Le désir de nous placer à l'ombre d'une collaboration honorable, et d'entrer comme partie intégrante dans une grande collection d'histoires, nous a contraint d'accepter le titre d'historien. Pour être admis en si bonne société, nous nous sommes résigné à la nécessité du costume. Du reste notre plan est simple et sans prétentions. Guidé par nos maîtres, les Villemain, les Ampère, les D. Nisard, les Ph. Chasles, dont quelques-uns désavoueront peut-être (c'est notre crainte) celui qui se proclame ici leur disciple, nous avons tâché de joindre le résultat de nos recherches personnelles au souvenir de leurs savantes leçons. Nous pourrions encore invoquer le patronage de plusieurs écrivains distingués dont nous ne connaissons que les ouvrages, mais dont les ouvrages ont été pour nous des guides précieux. Qu'il nous soit permis de nommer seulement M. Henri Martin. Sa belle Histoire de France n'a pas besoin de nos éloges; mais on ne sait peut-être pas assez que les chapitres consacrés à l'histoire des lettres y sont traités (et c'est à nos yeux une louange complète) avec autant de science et d'élévation d'esprit que l'histoire politique. a Presque toutes les époques de notre littérature été éclairées séparément par ces auteurs habile: n'avons eu qu'à nous promener à loisir sur les larges qu'ils avaient construites. Aussi nous a-t-il été facile courir dans toute leur étendue les annales littérair France. Nous avons même çà et là jeté un regard au delà de la frontière, et nous venons raconter impressions de voyage. Pourquoi ne le dirions-nous pás? Nous voudrions public eût autant de plaisir à les lire que nous en trouvé à les rédiger. La grandeur et la variété du l'abondance des matériaux, le nombre et l'original physionomies qui passaient continuellement sou yeux, ont fait de ces études un travail long sans d mais plein d'attrait. Ce n'étaient pas seulement des vains, des artistes de langage plus ou moins habile nous cherchions dans cette longue revue litté c'étaient l'élite des esprits de chaque temps, les r sentants intellectuels de la nation. Toute pensée don époque a vécu, toute idée qui a servi de flambeau à génération, se trouvait nécessairement reproduite nous sous sa forme privilégiée. Nous avions ainsi d nous toute la vie morale de la France dans ses diffé âges. La France elle-même nous apparaissait comme le co commun, comme le cœur de l'Europe. Pas un mo ment de ce grand corps qui ne parte de notre patri n'y aboutisse. Au moyen âge c'est elle qui donne par l'impulsion et jette au dehors ses fécondes pensées. nations voisines les recueillent avec empressemen quelques-unes en font leurs chefs-d'œuvre. Bientôt a commence un reflux non moins admirable: la Fra absorbe et transforme, au XVIe siècle l'Italie, au XVII® 1 pagne, l'Angleterre au XVII, et de nos jours l'Allemag Il semble que pour devenir européenne, toute pen locale doit d'abord passer par la bouche de la France. Envisagée ainsi, l'histoire de la littérature frança était donc l'histoire même de l'homme sur une gra |