J'ai des jambes, et vous des yeux : Moi, je vais vous porter, vous, vous serez mon guide : Mes jambes, à leur tour, iront où vous voudrez. Qui de nous deux remplit le plus utile emploi, Je marcherai pour vous, vous y verrez pour moi. Les hommes même les plus malheareux, adoucissent leurs maux, en se secourant les uns les autres. FLORIAN. FABLE XLI. LE PERROQUET. Un gros perroquet gris, échappé de sa cage, Et là, prenant le ton de nos faux connaisseurs, Le linot, selon lui, ne savait pas chanter, Et qu'elle eût voulu profiter. Enfin aucun oiseau n'avait l'art de lui plaire : Lassés de tant d'affronts, tous les oiseaux du bois Viennent lui dire un jour : Mais parlez donc, beau sire, Daignez chanter pour nous instruire. Se gratte un peu la tête, et finit par leur dire : - Messieurs, je siffle bien, mais je ne chante pas. Les gens qui aiment à se moquer des autres, sont ordinairement Les ignorants et des sols. FLORIAN. FABLE XLII. LE HÉRON. Un jour sur ses longs pieds allait, je ne sais où, L'onde était transparente ainsi qu'aux plus beaux jours; Avec le brochet son compère. Le héron en eût fait aisément son profit : Tous approchaient du bord, l'oiseau n'avait qu'à prendre. Qu'il eût un peu plus d'appétit : Il vivait de régime, et mangeait à ses heures. Des tanches qui sortaient du fond de ces demeures. Comme le rat du bon Horace : 3 Moi, des tanches! dit-il : moi, héron; que je fasse Du goujon? c'est bien là le diner d'un héron! La faim le prit: il fut tout heureux et tout aise (1) Sorte d'oiseau qui a de longues pattes et un grand bec. (2) Sorte de poisson d'eau douce. (3) Horace est un poète latin. Dans une fable, ce podte raconte qu'un jour un rat, qui habitait dans les champs, invita un autre rat, qui vivait dans une ville voisine, à venir dîner chez lui. Le rat des champs n'avait que de vieux morceaux de lard et quelques grains; le rat de la ville, qui était habitué à ronger les restes des bons ragoûts qu'on servait à la table d'un riche bourgeois, fit la grimace quand il vit le pauvre diner que lui présentait le rat des champs; il ne toucha à ces tristes mets que du bout des dents, et d'un air dédaigneux. (4) Pour des petits poissons. Les plus accommodants, ce sont les plus habiles : Gardez vous de rien dédaigner, Surtout quand vous avez à peu près votre compte. LA FONTAINE. FABLE XLIII. LE VILLAGEOIS ET LE SERPENT. Esope conte qu'un manant, A l'entour de son héritage, Aperçut un serpent sur la neige étendu, N'ayant pas à vivre un quart d'heure. Le réchauffe, le ressuscite. Ingrat, dit le manant, voilà donc mon salaire ! Il est bon d'être charitable : (1) Le paiement. VRAIS ORN Quant aux ingrats, il n'en est point Qui ne meure enfin misérable. Il faut être charitable envers tout le monde, mais avec prudence Les ingrats sont toujours punis LA FONTAINE. FABLE XLIV. convaart LE RENARD ET LA CIGOGNE. Compère le renard se mit un jour en frais, fx/ Et retinta diner commère la cigogne. Le régal fut petit et sans beaucoup d'apprêts Le galant, pour toute besogne, Avait un brouet clair; il vivait chichement.* Pour se venger de cette tromperie, A l'heure dite, il courut au logis De la cigogne son hôtesse; Trouva le diner cuit à point : Bon appétit surtout, renards n'en manquent point En un vase à long col et d'étroite embouchure. Il lui fallut à jeun retourner au logis, Cafacting Honteux comme un renard qu'une poule aurait pris, (1) Bouillie très-claire. (2) De peu. (3) Laper, boire comme les chiens Roudure Trompeurs, c'est pour vous que j'écris : Quand on trompe les autres, on mérite d'être trompé à son tour. LA FONTAINE. FABLE XLV. LE CHIEN COUPABLE. Mon frère, sais-tu la nouvelle ? Le petit agneau noir, puis la prebis sa mère Serait-il vrai ? Très-vrai, mon frère. qui donc se fier grands dieux! C'est ainsi que parlaient deux moutons dans la plaine Mouflar, sur le fait même pris, Et le fermier voulait qu'une prompte justice La procédure en un jour est finie.} A son supplice qui s'apprête Toute la ferme se rendit. compoldi Les agneaux, de Mouflar demandèrent la grâce: |