N'est-ce pas, mes amis, sans leur tendre la main, Alfred était témoin de leurs larmes amères : - Maman, vois donc, dit-il, comme ils sont là tous deux, Ils sont bien malheureux! Oh! oui, bien malheureux, Lui répondit sa mère, attentive et touchée. Sur eux pendant qu'Alfred a la vue attachée, Enfants, vous qui pleurez pour un bruit, pour une ombre Un papillon qui fuit votre main tyrannique, Or, vers le petit pauvre, Alfred porte ses pas; Pourquoi, dit-il, tous deux, restez-vous dans la neige? Vous n'avez donc point, vous, de maman, comme moi, Qui vous donne du pain, du feu ? qui vous protége? Oh! nous en avons une aussi, monsieur. Vous laisse-t-elle aller sans elle ou votre bonne, Pourquoi Les pieds nus sur la terre?... Elle n'est donc pas bonne, Votre maman, à vous! Si fait; elle avait faim, -- Elle nous a donné ce qu'elle avait de pain; Et voilà deux grands jours, hélas ! qu'elle est couchée Elle nous embrassa, disant : Pauvres petits! Et nous sommes yenus nous coucher sur la pierre, voilà que bientôt mon frère va mourir ! Car le froid, car la faim nous ont tant fait souffrir! Vous n'avez donc pas, vous, reprit Alfred, un père Alfred, pleurant aussi, ne songea plus au livre, Et moi je dis heureux est l'enfant charitable " S'il ne peut rien de plus, sait faire aumône encor! Pour que dans votre bourse, amis, quelque argent tombe, Travaillez donc aussi, soyez sages et bons, Et l'infortuné qui succombe Puisera l'existence et la paix dans vos dons; Et le vieillard qui prie, et dont la tête est nue, Sourira, car c'est vous qui sècherez ses pleurs ; Et celles qu'on rencontre à genoux sur la route, " Et leurs petits, surtout ceux qui n'ont plus de pères, Leurs tout petits enfants ne diront plus: « J'ai faim! Anges, car vous êtes leurs frères, Et le Ciel vous a faits pour leur tendre la main. LÉON GUÉRIN. L'ÉCOLIER. Un tout petit enfant s'en allait à l'école. Abeille, lui dit-il, voulez-vous me parler? 1 " . Et je vais commencer mon doux rayon de miel. Avant une heure encor nous en aurons d'écloses. Vite, vite à la ruche: on ne rit pas toujours; C'est pour faire le miel qu'on nous rend les beaux jours. • Elle fuit et se perd sur la route embaumée. Le frais lilas sortait d'un vieux mur entr'ouvert: Il saluait l'aurore, et l'aurore charmée Se montrait sans nuage, et riait de l'hiver. Une hirondelle passe : elle effleure la joue " " Je t'ai vue à l'automne; oh! bonjour, hirondelle; Viens! tu portais bonheur à ma maison, et moi Je voudrais du bonheur. Veux-tu m'en donner, toi? " Jouons. 314 Je le voudrais, répond la voyageuse, Car je respire à peine, et je me sens joyeuse. Mais j'ai beaucoup d'amis qui doutent du printemps; Ils rèveraient ma mort, si je tardais longtemps; Non, je ne puis jouer. Pour finir leur souffrance, J'emporte un brin de mousse en signe d'espérance. Nous allons relever nos palais dégarnis : " L'herbe croit, c'est l'instant des plaisirs et des nids. Je vais chercher mes sœurs, là-bas sur le chemin Il faut en profiter. Je me sauve!... à demain... ■ Rêve et compte ses pas pour tromper son ennui; Un dogue l'observait du fond de sa demeure. Bon dogue, voulez-vous que je m'approche un peu ? Dit l'écolier plaintif. Je n'aime pas mon livre. Voyez ! ma main est rouge; il en est cause. Au jeu Sans aller à l'école, où l'on tremble toujours. Je m'en plains tous les soirs et j'y vais tous les jours; » J'en suis très-mécontent. Je n'aime aucune affaire. Le sort des chiens me plaît, car ils n'ont rien à faire.. Ecolier, voyez-vous un laboureur aux champs? Eh bien! ce laboureur, dit Stentor, c'est mon maître. » Il est très-vigilant; je le suis plus peut-être. " Il dort la nuit et moi j'écarte les méchants. J'éveille aussi ce bœuf, qui, d'un pas lent, mais ferme, » Va creuser les sillons quand je garde la ferme. » Pour vous-même on travaille; et grâce à vos brebis, Votre mère, en chantant, vous file des habits. » Par le travail tout plaît, tout s'unit, tout s'arrange. Allez donc à l'école; allez, mon petit ange. Les chiens ne lisent pas, mais la chaine est pour eux; L'ignorance toujours mène à la servitude. nous défend l'étudo; Enfant, vous serez homme, et vous serez heureux : . Les chiens vous serviront. L'enfant l'écouta dire, Et même il le baisa. Son livre était moins lourd. En quittant le bon dogue, il pense, il marche, il court. A l'école, un peu tard, il arrive galment, Et dans le mois des fruits lisait couramment. Mme DESBORDES-VALMORE. LE MOULIN DE SANS-SOUCI. Sur le riant côteau par le prince choisi, Hélas! est-ce une loi sur notre pauvre terre Il nous faut ton moulin; que veux-tu qu'on t'er donne Rien du tout; car j'entends ne le vendre à personne; Il vous faut, est fort bon... mon moulin est à moi, - Tout aussi bien, au moins, que la Prusse est au roi. 1) Frédéric, troisième roi de Prusse, surnommé le Grand-Fré deric, à cause de ses victoires. Il monta sur le trône en 1740 el mourut en 1786. |