ridicules de rendre raison d'une chofe qui n'arrive pas; car il eft faux que ces fractures ne fe reprennent & ne fe rendurciffent point ». En 1593, le bruit courut que les dents étant tombées à un enfant de Siléfie, âgé de fept ans, il lui en étoit venu une d'or, à la place d'une de fes groffes dents. Horftius, Profeffeur en Médecine dans l'Univerfité d'Helmftad, écrivit, en 1595, l'hiftoire de cette dent, & prétendit qu'elle étoit en partie naturelle, en partie miraculeufe, & qu'elle avoit été envoyée par Dieu à cet enfant, pour confoler les Chrétiens affligés par les Turcs. Figurez-vous quelle confolation & quel rapport de cette dent aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d'or ne manquâr pas d'Hiftoriens, Rullandus en écrivit encore l'hiftoire. Deux ans après, Ingolftelerus, autre Savant, écrit contre le fentiment que Rullandus avoit de la dent d'or, & Rullandus fait auffi-tôt une do&te & favante replique. Un autre grand Homme nommé Libarius, ramaffe tout ce qui avoit été dit de la dent, & y ajoute fon fentiment particulier. Il ne manquoit autre chose à tant de beaux Ouvrages, finon qu'il fût vrai que la dent étoit d'or. Quand un orfèvre l'eut examinée, il se trouva que c'étoit une feuille d'or appliquée à la dent. avec beaucoup d'adreffe. Mais on commença à faire des Livres, & puis on confulta l'orfèvre. On croit que Dieu permet tous les jours au démon de rompre fa chaîne pour une bagatelle, pour faire mille cabrioles de nulle valeur ici-bas fur la terre, c'est-à-dire, pour faire remuer de fa place un pot ou un verre, fans y toucher de la main; pour fermer avec bruit le couvercle d'un pot à bière ou à vin; pour faire rouler une boule dans un grenier avec beaucoup d'impétuofité; pour être en fentinelle à une porte, ou à quelque coin de rue, fans rien dire ou faire; pour vider une boutique où on loue les chofes néceffaires à un enterrement, & tout cela pour l'amour de quelque pauvre vieille. Mais fans que le diable s'en mêle, Et quoiqu'on jette tout fur lui, De tous les maux que nous faifons, Parce qu'elle fatte & qu'on l'aime, Il faut dire la vérité, Chacun eft fon diable à foi même. Jérôme Cardan dit, dans fon dixhuiuse Livre de la Subtilité, qu'un Confeiller du Prince fe trouvant une nuit feul dans un fentier le long d'une rivière, & ne fachant pas où étoit le gué pour la paffer, il s'écria: Oh! Auffi-tôt il entendit la même chofe de l'autre côté de l'eau; & fe perfuadant que c'étoit un homme, il lui demanda en italien (qui eft la langue du pays): Unde devo paffar? Par où faut-il que je paffe? Et l'écho lui dit: Paffar, c'eft-à-dire, paffer. Sur quoi ayant demandé Qué? ici; & l'écho ayant répondu la même chofe, il vit que c'étoit un goufre, où l'eau en tournant faifoit un grand bruit. Ce bruit l'ayant épouvanté, il s'écria encore une fois : Devo paffar qué? Fautil que je passe par ici? L'écho répondit: Paffar qué; paffer par ici. Il ne pafla pourtant pas, à caufe de la nuit & du grand bruit que l'eau faifoit. Il retourna fur fes pas, & crut que c'étoit le diable qui vouloit le faire périr. Un Miniftre avoit acheté un chevál, fur lequel il monta pour s'en retourner à fa maison. Ce nouveau cavalier, fe voyant regardé par tous les payfans des lieux par où il paffoit. entendit que l'un difoit à l'autre qu'il n'y auroit rien à redire à ce cheval, s'il n'avoit pas la gourme (dræs eft un mot allemand qui fignifie diable & gourme). Oui, dit un autre, & une très-méchante gourme. Cet homme, s'imaginant que le mot de dres dont |