fuite & de s'exiler de l'Italic; mais Sertorius qui étoit un grand homme de Guerre fe foutint vaillamment en Efpagne, & battit souvent Pompée, qu'il ap pelloit un Ecolier de Sylla. Ce ne font point les fens que mon amour confulte : Il hait des paffions l'impétueux tumulte, Et fon feu que j'attache aux foins de ma grandeur, Dédaigne tout mêlange avec leur folle ardeur. Ce front qui fait trembler les plus braves Guerriers, Ce bras qui femble avoir la victoire en partage. Sertorius de Corneille. Rhadamiste, dont on a parlé ci deffus, ayant appris que fon frere Arfame aimoit Zénobie (celui ci ignoroit que Rhada-' mifte fût fon époux), fait connoître qu'il eft agité par des foupçons injurieux à Zé 2 nobie. C'eft alors que cette Princeffe lui déclare qu'elle eft prête à partir avec lui, & qu'elle ira où il voudra. Prince (a), après cet aveu je ne vous dis plus rien: Vous connoiffez aflez un cœur comme le mien Pour croire que fur lui l'amour ait quelque empite. Mon époux eft vivant, ainsi ma flamme expire. Ceffez donc d'écouter un amour odieux, Et fur-tout gardez-vous de paroître à mes yeux. Pour toi (b), dès que la nuit pourra me le per mettre : Dans tes mains en ces lieux je viendrai me re mettre: Je connois la fureur de tes foupçons jaloux ; Mais j'ai trop de vertu pour craindre mon époux. C'est dans ce dernier vers que réfide le fentiment fublime; il eft inutile d'ajouter ici aucune réflexion pour le faire comprendre. Il y a des chofes qu'il eft plus facile de fentir que d'exprimer. Telle est cette pensée de Zénobie, dont les per (a) Elle parle à Arfame. (b) Rhadamifte. fonnes de bon goût connoîtront toute la beauté. Dans la Tragédie d'Héraclius par Corneille, il est un temps où un faux billet de l'Empereur Maurice jette dans l'erreur les principaux perfonnages de cette piece C'est à cette occafion que Pulchérie croyant que Martian qu'elle aimoit, étoit le véritable Héraclius, & fe trouvoit parlà être fon frere, fait éclater toute la grandeur de fes fentimens en ces termes : Ce grand coup m'a furprise, & ne m'a point trou blée ; Mon ame l'a reçu fans en être accablée ; Et comme tous mes feux n'avoient rien faint, L'honneur les alluma, le devoir les éteint. Je ne vois plus d'amant, où je rencontre un frere: L'un ne peut me toucher, ni l'autre me déplaire; Et je tiendrai toujours mon bonheur infini Si les miens fons vengés & le tyran (a) puni. Héraclius. (a) Phocas, meurtrier de l'Empereur Maurice, pere de Pulchérie. C'eft à l'occafion de cette même erreur, que Martian, fils de Phocas, croit être le vérirable Héraclius; & comme il en prit le nom auffi-tôt, & qu'il fe difoit tel à Phocas, ce tyran le menaçoit de la mort. C'est dans ces circonftances que Martian parle ainfi à Phocas: J'entends donc mon arrêt fans qu'on me le pro nonce : Héraclius mourra comme a vécu Léonce (a). Ibid. (a) Le vrai Martian pafloit pour Léonce, & le vrai Héraclius pour Martian. CHAPITRE CHAPITRE VII Des Scenes célebres. AVANT de rapporter quelques fcenes brillantes de nos Poëtes les plus célebres, on a cru devoir donner une idée du caractere des deux grands hommes qui ont si fort illuftré le Théâtre François; nous commencerons par celui de Corneille. Avant (a) M. de Corneille, la France n'avoit rien vu fur la fcene de fublime ni même, pour ainfi dire, de raifonnable. Ce grand homme, guidé par fon feul génie, étudia les grands Maîtres de l'antiquité qui avoient traité cette matiere; & joignant fes propres réflexions aux connoiffances qu'il puifa chez eux, il fe fraya des routes qu'on avoit ignorées jufqu'alors. Dédaignant fiérement le faux goût de fon fiecle qui regnoit dans les pieces de ceux qui l'avoient précédé,» il fe for»ma une haute idée de la Tragédie, & il comprit de bonne heure que les plus رو (a) Ce qui eft marqué par des guillemets eft pris des réflexions de M. de Fontenelle dans la vie de Corneille. K |