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CHAPITRE V

ADJECTIFS DÉTERMINATIFS

150. Il y a cinq sortes d'adjectifs déterminatifs : les adjectifs démonstratifs, les adjectifs possessifs, les adjectifs conjonctifs, les adjectifs numéraux, les adjectifs indéfinis.

151.

DES ADJECTIFS DÉMONSTRATIFS

On appelle adjectifs démonstratifs ceux qui déterminent les noms en y ajoutant une idée d'indication, de démonstration. Ces adjectifs servent donc pour montrer les personnes ou les choses dont on parle. Quand je dis ce livre, cette table, je montre un livre, une table.

152.

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Les adjectifs démonstratifs sont :

Ce et cet, devant un nom masculin singulier.
Cette, devant un nom féminin singulier.
Ces, devant tous les noms pluriels.

Grammaire historique.

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- Les anciens adjectifs démonstratifs : icelui, icelle, iceux, icelles, indiquant la proximité des objets, s'employaient encore au dix-septième siècle en style de procédure et dans le langage familier.

Ex.: Témoin trois procureurs dont icelui Citron

A déchiré la robe.

Icelui Citron signifie; ce chien-ci, Citron.

153.

DES ADJECTIFS POSSESSIFS

On appelle adjectifs possessifs ceux qui déterminent les noms en y ajoutant une idée accessoire de possession. Ils font connaître le possesseur de l'objet représenté par le substantif qu'ils déterminent.

Ex.: Mon livre, votre cheval, son chapeau.

154. Les adjectifs possessifs sont :

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155. Remarque historique. L'ancienne langue française n'employait jamais mon, ton, son, pour ma, tu, sa. Elle disait en élidant l'a: m'ame, pour ma ame; l'espée, pour ta épée; s'humeur, pour sa humeur. Ce ne fut qu'au quatorzième siècle que l'on substitua généralement mon, ton, son à ma, ta, sa devant une voyelle ou un h muet. C'est un véritable solécisme, mais sur lequel il n'y a plus à revenir aujourd'hui.

L'ancienne façon de parler cessant d'être comprise, donna naissance à ma mie pour m'amie, c'est-à-dire mon amie et à mamour pour m'amour, c'est-à-dire mon amour.

Leur, adjectif possessif, signifie littéralement d'eux, d'elles; aussi l'écrivait-on autrefois sans s devant un nom pluriel. On le trouve encore orthographié de la sorte au seizième siècle. Brantôme et Malherbe écrivent toujours leur amitiés, leur guerres, etc.

SUPPRESSION DES ADJECTIFS POSSESSIFS

156. On remplace l'adjectif possessif mon, ton, son, etc., par l'article le, la, les, quand le sens indique clairement quel est l'individu possesseur.

Par exemple, au lieu de dire : j'ai mal à ma tête, on dit: j'ai mal à la tête.

Néanmoins on ne remplace pas mon, ton, son, etc., par le, la, les, lorsqu'on veut exprimer d'une manière formelle l'habitude, la périodicité. Ex.: Mon rhumatisme me fait souffrir; ma fièvre m'a repris.

157.

EMPLOI DE son, sa, ses ET DE en.

En parlant des choses, on emploie son, sa, ses, leur, leurs, lorsque l'individu possesseur et l'objet possédé sont dans la même proposition.

Ex. Paris a ses maisons très hautes.

Mais lorsque l'individu possesseur et l'objet possédé sont dans deux propositions différentes, on emploie généralement l'article avec le pronom en.

Ex.

Paris est une ville magnifique, on en admire les

monuments.

Paris est une ville magnifique, les maisons en sont très hautes.

Remarque.

La règle précédente n'est pas d'une rigueur absolue; elle est parfois enfreinte par les meilleurs écrivains.

NOMBRE DU SUBSTANTIF DÉTERMINÉ PAR leur.

158.

On met au singulier le substantif déterminé par leur quand le sens de la phrase indique clairement que ce

substantif ne représente qu'un seul objet possédé en

commun.

Ex.: Mon père et ma mère ont vendu leur mobilier.

Au contraire, on met au pluriel leur et le substantif qu'il détermine, quand, d'après le sens du discours, ce substantif doit représenter nécessairement plusieurs objets possédés. Ex. Que de gens regrettent d'avoir quitté leurs villages pour aller habiter les villes!

159.

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DES ADJECTIFS CONJONCTIFS

On appelle adjectifs conjonctifs ceux qui servent à lier ensemble deux propositions. Les adjectifs conjonctifs sont: quel, quelle, quels, quelles et lequel, laquelle, lesquels, lesquelles.

Ex. Je reconnais vous devoir une somme de mille francs, laquelle somme je m'engage à vous rembourser l'année prochaine.

160. à compter.

DES ADJECTIFS NUMÉRAUX

On appelle adjectifs numéraux ceux qui servent

Ils déterminent la quantité ou le rang des objets dont on s'occupe.

De là, deux sortes d'adjectifs numéraux : les adjectifs numéraux cardinaux et les adjectifs numéraux ordinaux.

ADJECTIFS CARDINAUX

161. Les adjectifs cardinaux servent à fixer le nombre des personnes ou des choses dont on parle.

Ex.: Deux hommes, sept chevaux, quarante francs.

162. A l'exception de un, féminin une, tous les adjectifs cardinaux sont en français invariables quant au genre. A l'exception de vingt et de cent, ils s'écrivent toujours de la même manière : Voici mes quatre fils.

163. Grammaire historique. De soixante à cent la langue française abandonne la numération décimale pour suivre la numération vigésimale* qu'elle a empruntée aux Gaulois. Ces peuples, en effet, ne comptaient pas par dizaines mais par vingtaines: ils disaient deux vingts, trois vingts, quatre vingts, cinq vingts, six vingts, etc., au lieu de quarante, soixante, octante, cent, cent vingt, etc. De soixante à cent nous avons imité leur procédé de numération. Ex.: soixante-treize, quatre-vingt-dix-neuf. En outre,

six vingts, sept vingts, huit vingts sont encore actuellement usités dans le langage de certaines professions.

L'expression quinze-vingts désigne encore aujourd'hui un hôpi- 11

tal de Paris, bâti originairement pour trois cents chevaliers à qui les Sarrasins* avaient crevé les yeux.

ORTHOGRAPHE DE vingt, cent ET mille.

164. Vingt et cent, employés au pluriel, c'est-à-dire précédés d'un adjectif multiplicateur, prennent un s quand ils ne sont suivis d'aucun autre nombre.

Ex.: Quatre-vingts francs, trois cents chevaux.

Au contraire, vingt et cent, quoique au pluriel, sont invariables quand ils sont suivis d'un autre nombre. Ex. Quatre-vingt-dix francs.

Trois cent douze chevaux.

165. Mil, mille. D'après l'étymologie, mil est un singulier qui dérive du latin mille, signifiant un millier, un seul mille; au contraire, mille est un pluriel dérivant du latin millia signifiant plusieurs mille.

Il résulte de là que l'on devrait toujours écrire mil dans les nombres qui ne contiennent pas plus d'un mille, et que l'on devrait toujours écrire mille dans les nombres qui sont composés de plusieurs mille.

Mais il n'en est pas ainsi : toutes les fois qu'il ne s'agit pas de la date des années, on écrit constamment mille, qu'il y ait ou non plusieurs mille.

Ex Mille soldats, trois mille hommes.

Lorsqu'il s'agit de la date des années, on écrit mil au singulier et mille au pluriel, ce qui est une orthographe conforme à l'étymologie.

Ex. En mil huit cent trente.

L'an deux mille quatre cent quarante.

REMARQUES. I. Les grammairiens recommandent d'écrire l'an mille sous prétexte que, dans cette expression, mille n'est pas suivi d'un autre nombre. Ils commettent une grave erreur due à ce qu'ils se sont mépris sur l'origine de la forme mil.

II. La forme mille étant par elle-même un pluriel différant du singulier par son orthographe, on comprend qu'on ne lui ajoute jamais d's, ce que les grammairiens expriment en disant que mille est toujours invariable.

III. Mille signifiant mesure itinéraire en usage dans différents pays étrangers, est substantif et comme tel prend la marque du pluriel.

Ex.: Le chemin de fer de Liverpool* à Manchester* est long de trente milles*.

166.

ADJECTIFS ORDINAUX

On appelle adjectifs ordinaux ceux qui servent à faire connaître le rang ou l'ordre des personnes ou des choses dont on parle.

Ex.: Le premier homme, le sixième mois.

167. Les adjectifs ordinaux sont des deux genres, puisqu'ils se terminent par un e muet. Ils sont susceptibles, comme tous les autres adjectifs, de prendre la marque du pluriel.

168.

Grammaire historique. Les dix premiers adjectifs ordinaux étaient autrefois exprimés par prim, prin ou prime, second; tiers, fém. tierce; quart, fém. quarte; quint, fém. quinte; sexte, octave, none, dime. On trouve encore prime dans l'expression de prime abord, dans primesaut et dans le composé printemps (formé de prin signifiant premier et de temps). On disait toujours autrefois le printemps de l'été, c'est-à-dire le premier temps avant l'été. On emploie substantivement prime, tierce, sexte et none pour désigner des offices de l'Église qui se célèbrent la première heure du jour, à la troisième, à la sixième et à la neuvième.

·Tiers et quart sont restés adjectifs dans les expressions liers état, tiers ordre, tiers parti, fièvre tierce, fièvre quarte, en main tierce, etc. Les masculins tiers et quart, les féminins tierce, quarte, quinle, octave sont en outre employés substantivement: le tiers d'une quantité, un intervalle de quinte, l'octave d'une fête. Quint s'adjoint au nom des souverains qui sont les cinquièmes de ce nom : Charles-Quint; Sixte-Quint.

ADJECTIFS CARDINAUX MIS POUR DES ADJECTIFS

169.

ORDINAUX

Par gallicisme*, on emploie souvent les adjectifs cardinaux à la place des adjectifs ordinaux. Cette substitution a lieu principalement dans la supputation des heures d'une même journée, des jours d'un même mois et des années courantes.

Ex.: Venez à six heures, c'est-à-dire à la sixième heure. Le quatre mai, c'est-à-dire le quatrième jour de mai. L'an mil huit cent trente, c'est-à-dire l'an mil huit cent trentième.

Elle est encore en usage dans les noms des souverains, dans l'indication de la page d'un livre, du numéro d'une rue, etc.

Ex.: Louis douze, pour Louis douzième.

Page quatorze, pour page quatorzième.

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