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adoptée les nouveaux éditeurs d'Amyot, qui ne mettent la drachme qu'à près de seize sous; car ils estiment les cent drachmes soixantedix-sept livres, au lieu que je les porte à quatre-vingt-dix livres. J'ai conservé, dans ma traduction, les noms grecs des monnaies; et j'ai mis au bas des pages les rapports des sommes avec notre monnaie actuelle.

La valeur des mesures donne lieu encore à des calculs différents. Les Grecs se servent pour la mesure des grains du mot médimne, qu'Amyot traduit par celui de minot, et M. Dacier par celui de boisseau. Les éditeurs d'Amyot trouvent ces deux évaluations trop faibles; ils portent la médimne à quatre boisseaux, mesure de Paris, et le minot de Paris n'est que de trois boisseaux, pesant chacun de vingt-une à vingt-deux livres. J'ai suivi leur estimation, qui me paraît plus exacte que celle de M. Dacier. Pour mesurer les liquides, les anciens avaient plusieurs grandeurs : celle qu'on trouve le plus ordinairement employée par Plutarque, c'est le choüs, qu'Amyot et M. Dacier traduisent par le mot générique de mesure, et qui, selon les éditeurs d'Amyot, faisait un peu plus de trois pintes et demie, mesure de Paris.

La différence dans la longueur des stades chez les divers peuples de la Grèce met aussi des inégalités dans l'évaluation des distances. Ces stades variaient depuis cinquante-une toises jusqu'à cent quatorze. Ce qui augmente la difficulté dans Plutarque, c'est que, suivant l'observation de M. Fréret, il n'a pas suivi une pratique constante dans l'évaluation du mille en stades: tantôt il compte huit stades au mille, et tantôt sept stades et demi. (Académie des Inscriptions, tom. XXIV, pag. 556.) Dans la plus petite valeur du stade, il en faut cinquante pour faire une de nos lieues de deux mille cinq cents toises; dans la plus grande valeur, les vingt stades feraient la lieue. La mesure adoptée par M Dacier suppose un stade de cent toises; il en met vingt-cinq pour une lieue. Je me suis fixé à l'évaluation de huit stades au mille, ce qui fait vingt stades pour une lieue : c'est la mesure qui me paraît la plus généralement adoptée.

Je mets à la suite de cette préface une Vie de Plutarque. Le savant Rauld, dans son édition grecque et latine de toutes les œuvres de cet écrivain; Corsini, dans celle qu'il a donnée, en grec et en latin, du Traité sur les Opinions des Philosophes; M. Dacier et les

traducteurs anglais des Vies des grands hommes, m'en ont donné l'exemple: je l'ai suivi d'autant plus volontiers que je me suis fait un plaisir d'écrire la vie d'un auteur si intéressant dans ses ouvrages historiques, d'un philosophe si estimable dans ses Traités de morale, et dont le caractère, les mœurs et les vertus offrent un si beau développement, et ne laissent presque que des éloges à donner. J'ai cru aussi que le public aimerait à connaître les particularités de la vie d'un auteur qui a lui-même écrit celles de tant de grands hommes. La vie d'un philosophe n'est pas moins instructive que ses ouvrages, lorsque sa conduite est, comme celle de Plutarque, toujours d'accord avec ses principes.

Je crois que le lecteur ne sera pas fâché d'avoir sous les yeux le tableau correspondant des mois attiques et des nôtres. C'est celui qu'ont donné les éditeurs d'Amyot; et je le fais précéder de la note que ces savants académiciens y ont jointe, parce qu'elle donne une connaissance exacte de l'année attique, et des changements qu'elle éprouva.

« Anciennement l'année attique était composée de douze mois lunaires, alternativement de 29 et 30 jours, pour la commodité de l'usage, parce que le mois lunaire est de 29 jours et demi. On appelait pleins les mois de 30 jours; creux, les mois de 29 : ce qui se faisait en supprimant le 29o jour, et en passant du 28 au 30, sans compter ni nommer le 29, qui s'appelait par cette raison jour exemptile ou supprimé. Ainsi l'année attique était censée de 360 jours, et les mois de 30 jours chacun. Mais il y en avait effectivement 6 de 29 jours seulement, et l'annéè n'était en réalité que de 354. Cela dura jusqu'à la première année de la 87 olympiade, avec laquelle commença la réforme introduite par Méton dans le calendrier. Depuis cette époque, le jour exemptile fut pris de soixante-trois en soixante-trois, pendant toute la durée de la période de dix-neuf ans qu'il avait imaginée pour faire cadrer l'année lunaire avec l'année solaire, au moyen des mois intercalaires.

>> Dix-neuf années solaires supposées de 365 jours font 6,935 jours, et dix-neuf années lunaires supposées de 354 n'en font que 6,726 : la différence est 209. Sept mois intercalés dans les 3, 5, 8, 11, 13, 16 et 19° années compensaient cette différence. Telle est l'idée sommaire du calendrier de Méton... La correction que Calippe y fit cent deux

ans après ne changea point sa forme. Elle n'eut pour objet que la suppression d'un jour, qui, dans le calcul de Méton, se trouvait redondant tous les soixante-seize ans.

« Indépendamment des jours régulièrement exemptiles dans cette forme d'année, le 2 du mois Boédromion était toujours exemptile, parce que c'était ce jour-là, suivant la fable, que Neptune et Minerve s'étaient disputé l'Attique. C'est pour cela qu'on voit dans Plutarque la date de la bataille de Platée rapportée, tantôt au trois, tantôt au quatre de ce mois, suivant qu'il a égard ou non au jour exemptile.

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« La période de Médon commença la première année de la 87o olympiade, 432 ans avant J.-C. Avant la troisième année de cette même olympiade on intercala un treizième mois. Il s'appelait le second Poseidon, et s'intercalait après le premier; ensuite la première année de la 88 olympiade; puis la quatrième, et ainsi de suite dans l'ordre que nous avons marqué ci-dessus. »

VIE DE PLUTARQUE

PAR D. RICARD.

I. La vie des gens de lettres est surtout dans eurs ouvrages. Leur but et eur occupation sont d'être utiles. - II. Fidélité de Plutarque à remplir cette destination. III. Son origine. Obscurité de la ville de Chéronée. Célébrité qu'il lui a donnée. - IV. Incertitude de l'année de sa naissance. V. Décri général des peuples de la Béotie. Exception de plusieurs grands hommes, et en particulier de Plutarque. -VI. Sa famille, une des plus honnêtes de Chéronée. Vertus et talents de ses parents et de ses frères. -VII. Sa première éducation à Chéronée. Il va la perfectionner à Athènes. Il s'y instruit des opinions de toutes les écoles, et s'attache de préférence aux principes de Platon et de Pythagore. — VIII. Il y a pour maître Ammonius. Il obtient le droit de bourgeoisie à Athènes, et voyage en Égypte.-IX. Son mérite bientôt connu à Chéronée, le fait nommer aux charges publiques. Principes d'après lesquels il s'y conduisait. - X. Quoique revêtu de dignités importantes, il ne dédaignait pas les moindres emplois. Trajan lui confère la dignité consulaire. On doute qu'il ait été le précepteur de ce prince. - XI. Il quitte Athènes pour aller séjourner quelque temps à Rome, où il fait des conférences publiques. Estime et considération dont il jouit. - XII. Conjectures sur le temps qu'il y a passé. XIII. Son mariage avec Timoxène. Mérite singulier de sa femme. - XIV. Nombre et noms de ses enfants. Mort de sa fille Timoxène, à l'âge de deux ans. Son courage à supporter cette perte. Éloge de cet enfant. XV. Sa tendresse pour ses enfants. Sa bonté pour ses esclaves. Sa sensibilité même pour les animaux. XVI. Occasion où il dément ce caractère, par le sang-froid avec lequel il fait châtier en sa présence un de ses esclaves. XVII. Sa fortune et son état à Chéronée. XVIII. Incertitude de l'époque de sa mort, et du temps qu'il a vécu. — XIX. Son caractère moral. Exactitude et douceur de ses principes. XX. Deux occasions où il ne soutient pas l'impartialité qui lui est ordinaire. La première dans son jugement sur Hérodote. XXI. La seconde dans ses Traités contre les stoïciens. Son antipathie pour ces philosophes, et son injustice à leur égard. XXII. Son opposition à la secte d'Épicure, plus juste et mieux fondée. XXIII. On le justifie sur l'accusation d'une excessive crédulité dans les faits qu'il rapporte. XXIV. Sur le reproche de superstition. - XXV. Prétexte de cette inculpation. - XXVI. Ses idées pures et sublimes sur la divinité. XXVII. Elles ne l'ont pas empêché de persévérer jusqu'à sa mort dans le paganisme.-XXVIII. Division de ses ouvrages philosophiques en dix classes, La plus intéressante est celle des écrits de pure morale. — XXIX. Mérite

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de ce genre d'ouvrages. - XXX. Idée sommaire de chacun. --- XXXI. Im

portance de ses traités de politique. — XXXII. Sagesse de ses précept es

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- XXXIII. Les ouvrages de physique et de métaphysique sont la partie la plus faible de cette collection. - XXXIV. Exception pour le Traité de la face qui paraît sur la lune. Jugement des Traités sur les animaux. - XXXV. Ses questions platoniques. Son Timée. Ses écrits contre les épicuriens. XXXVI. Intérêt de ses ouvrages mythologiques, et en particulier du Trait é d'Isis et d'Osiris. — XXXVII. Ses ouvrages de littérature sur les Romains, sur Alexandre et sur les Athéniens, paraissent être le fruit de sa jeunesse. Idée du Traité sur la musique. — XXXVIII. Ses Questions romaines et ses Questions grecques font connaître des usages particuliers des Romains et des Grecs. XXXIX. Ses Mélanges ou ses Propos de table sont le plus instructif et le plus amusant de ses ouvrages. XL. Les parallèles d'histoires grecques et romaines, et les Vies des dix orateurs grecs, qui se trouvent parmi les écrits de Plutarque ne sont pas de lui. Idée de ces deux ouvrages. XLI. Ses écrits en partie historiques et en partie moraux. Le Démon de Socrate et le Traité de l'Amour offrent beaucoup d'intérêt. XLII. Les recueils d'apophthegmes, d'anecdotes et de bons mots ne passent pas généralement pour être de lui. Ses Actions courageuses des femmes.-XLIII. Éloge de ce recueil précieux des ouvrages de Plutarque.

I. L'histoire des hommes de lettres est presque tout entière dans leurs ouvrages. Il en est peu qui aient joué sur la scène du monde un rôle assez important pour que leur vie puisse fournir de ces actions brillantes qui piquent la curiosité du lecteur, et lui inspirent un grand intérêt. Démosthène et Cicéron chez les anciens; parmi nous, le chancelier de l'Hospital, le cardinal de Polignac, et surtout l'illustre Daguesseau, sont du petit nombre de ceux qui, joignant à des emplois distingués le goût des sciences et des lettres, ont trouvé dans le commerce des Muses un délassement honorable aux fonctions pénibles de la législation et de la politique. Les autres, voués par état à des occupations sédentaires et tranquilles, n'offrent dans l'égalité de leur conduite rien de frappant, rien d'extraordinaire. L'imagination n'y est pas émue par le spectacle imposant de victoires et de triomphes, par le récit pompeux d'exploits et de conquêtes; mais aussi le cœur n'y est pas affligé par le tableau de ces désastres affreux, de ces révolutions funestes qui marquent tous les pas des conquérants, et laissent sur la terre, pour des siècles entiers, les traces sanglantes de leur passage. Semblable à un fleuve paisible dont le cours égal et uniforme fertilise tous les lieux qu'il arrose, leur vie coule sans bruit

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