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Richer n'a pas, comme le croit M. Rouger, tiré ses détails de Grégoire de Tours qu'il ne connaissait probablement pas, mais de certains ouvrages qui se publiaient dès les temps mérovingiens comme guides au saint tombeau. Ces ouvrages reproduisaient les passages de Sulpice Sévère et les inscriptions que l'on pouvait lire dans la basilique.

C'est d'après ces éléments que Richer a sans doute travaillé. Il n'a rien emprunté à l'histoire des Francs, et la meilleure preuve qu'on en puisse fournir, c'est qu'il porte, comme Sulpice Sévère, le nombre des fenêtres à LXX et non a LII, chiffre exact indiqué par Grégoire de Tours. En résumé l'æuvre de Richer s'est bornée à la translation en vers médiocres des détails qu'il avait pu lire dans les ouvrages précités. Mais, il est probable qu'il n'était jamais venu à Tours, car il ignore et la basilique d'Hervé, et le nom de Châteauneuf, et les æuvres remarquables qui en ont fait mention.

Après cette remarquable étude, M. l'abbé Quincarlet lit divers passages extraits de l'ouvrage publié par notre collègue M. Delaville le Roulx, sur les comptes municipaux de la ville de Tours. M. de Busserolles, vice-président, donne ensuite lecture d'une note sur les moyens de torture employés autrefois en Touraine par la justice, pour contraindre les accusés à avouer leurs crimes ct à faire connaître leurs complices. On donnait à ces tourments gradués le nom de question ordinaire et extraordinaire.

Après avoir indiqué le genre de torture en usage au parlement de Paris, duquel dépendaient les tribunaux de Touraine, M. de Busserolles s'attache spécialement à décrire l'instrument de supplice en usage à Tours et que l'on appelait les brodequins. Cet instrument se composait de deux ais percés de trous, par lesquels on passait des cordes solidement attachées, de façon à empêcher tout écartement. Les jambes de l'accusé étaient placées entre les deux planches, et l'on enfonçait à coups de maillet des coins entre celles-ci et les cordes. Après chaque coup de maillet une question était posée au patient par le lieutenant criminel chargé de l'interrogatoire. Si l'accusé faisait les aveux ou les révélations que l'on attendait de lui, la torture cessait immédiatement.

Dans le cas contraire, le magistrat pouvait la pousser jusqu'à huit coins. La question ordinaire se composait de quatre coins, la question extraordinaire de huit. Cette dernière était presque toujours appliquée aux condamnés à mort une ou deux heures avant leur exécution. On comprend quelles souffrances épouvantables les malheureux soumis au supplice des brodequins devaient endurer. Ils sortaient de là les jambes affreusement meurtries, souvent broyées. Cruelle dérision ! l'appartement où se passaient ces terribles scènes s'appelait chambre des rosiers ou des roses.

A ces indications, M. de Busserolle, ajoute des détails sur la forme des interrogatoires et sur diverses circonstances qui accompagnaient l'application de la question. Ces détails seront reproduits dans le Dictionnaire géographique et historique d'Indre-et-Loire, à l'article concernant la ville de Tours Tribunaux).

En terminant, M. de Busserolle, dit que, malgré les protestations incessantes et indignées des populations contre la torture, cet usage barbare se continua jusqu'au règne de Louis XVI. C'est à ce roi que revient l'honneur de l'avoir fait disparaîtrc.

M. l'abbé Juteau président, lit ensuite une notice nécrologique sur notre regretté collègue, M. Millet, seerétaire général. La Société tout entière s'associe dans un sentiment unanime de sympathie, aux paroles émues de M. le Président et aux regrets si mérités qu'elles expriment.

M. Chauvigné est ensuite présenté comme membre correspondant. L'ordre du jour étant épuisé, la séance est levée.

Le Secrétaire général,

Ch. GUÉRIN.

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Le sanctuaire de Saint-Martin à Tours s'est enrichi depuis quelques années de deux marbres antiques, dans lesquels une étude attentive, au point de vue historique et archéologique, m'a permis de reconnaître des fragments de la dalle de marbre qui fut envoyée à Tours au ve siècle par saint Eufróne d'Autun pour couvrir le tombeau du glorieux thaumaturge.

La solution de toutes les questions qui se rattachent à ces marbres est d'un grand intérêt pour le diocèse de Tours et pour la vénérable basilique dont on travaille à relever les ruines. C'est sous cet aspect restreint et tout local que j'avais d'abord envisagé ce grave et pieux problème. Mais depuis trois ans que je vis à Rome au milieu des tombeaux des martyrs et des confesseurs, il m'a semblé que la question s'agrandissait et se généralisait.

Le tombeau de saint Martin, en effet, par l'importance exceptionnelle du précieux dépôt qu'il contenait, a dů se modeler, pour la forme extérieure, sur les tombeaux illustres que le monde entier venait vénérer à Rome. Et d'un autre côté, par son immense notoriété, par le pèlerinage universel dont il était le foyer, il a dû servir de type en France et même plus loin aux monuments que la piété des fidèles éleva sur les dépouilles des apôtres et des saints de chaque contrée. Il importe donc de connaître minutieusement tout ce qui concerne ce sépulcre de saint Martin, qui

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