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velles armes qu'elle s'est données, exterminer, dans l'Asie méridionale, les bêtes féroces qui y sont si terribles. Par l'Inde, enfin, nous pouvons constater que les biens de la vie civilisée, tels que le respect de la propriété et un gouvernement juste, peuvent se transmettre, sous les auspices et par les soins de l'Europe, des régions tempérées aux populations des terres brûlantes.

Des pays immenses doués d'une grande fertilité virtuelle, mais jusqu'à notre siècle étrangers aux notions qui composent la civilisation occidentale, pourront, par l'intermédiaire de celle-ci et à l'aide de ses moyens, être appelés à contribuer, par un apport considérable, au bien-être du genre humain en général, et développer le leur propre, en étendant indéfiniment leurs industries et en agrandissant leur puissance productive.

Quelques lambeaux de ces pays, tels que les îles de l'archipel des Antilles, étaient parvenus, antérieurement au dix-neuvième siècle, à verser sur le marché général un approvisionnement de denrées très-utiles, le sucre, le café, le cacao. Mais c'était au moyen d'une institution économique et sociale contre laquelle la conscience du genre humain est soulevée aujourd'hui et qui s'écroule de toute part, l'esclavage. Sur une telle base, il était difficile d'édifier une industrie perfectionnée, impossible de constituer une société qui fût d'accord avec les lois de la morale, et dont tous les membres fussent admis aux avantages de la vie civilisée.

Toutes les tentatives qui se font et se feront désormais offrent et continueront d'offrir, si elles veulent réussir, des bases plus satisfaisantes, au triple point de vue de la morale publique et privée, de la diffusion des connaissances et de l'avancement industriel. Elles s'inspireront, autant que possible, des données de la société européenne, telle qu'elle est aujourd'hui, et c'est pour cette raison qu'elles procureront un accroissement à la puissance productive des hommes.

Un exemple en est offert par les Antilles, où l'on voit simultanément la race noire passant de l'esclavage à la liberté, les lois civiles de l'Europe sur la famille se substituer à la promiscuité, des écoles s'ouvrir, et le matériel de la fabrication du sucre de betterave, transmis par la France, rendre possible de nouveau la fabrication du sucre de canne qui menaçait de s'éteindre.

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SECTION II

Des moyens de faciliter les relations entre les diverses parties du globe terrestre.

CHAPITRE I.

GRANDES VOIES DE COMMUNICATIONS A ÉTABLIR.

L'Exposition Universelle de 1867, par la tendance et le caractère qui l'ont distinguée, a soulevé tout naturellement la question suivante: Quelles sont les mesures, les entreprises et les créations les plus propres à développer la production générale sur la surface de la planète, à y préparer la distribution la plus avantageuse des matières premières et des produits, et à y provoquer la meilleure division du travail ?

Parmi les articles de ce programme, les plus tangibles, assurément, sont les voies de communication, destinées à amoindrir les distances et à franchir les obstacles qui s'opposent aux relations des peuples. A ce titre, on peut indiquer, avec l'espoir d'obtenir l'assentiment universel, quelques travaux dont une partie déjà est en cours d'exécution.

Je signalerai ainsi :

1° Le canal qui couperait l'isthme ou étroite chaussée de 2,400 kilomètres de long, qui joint les deux Amériques, de façon à permettre aux navires qui, de l'un des deux océans, l'Atlantique et le Pacifique, veulent passer dans l'autre, de continuer leur chemin. Un canal de ce genre devrait être à grande section, afin de recevoir les plus beaux navires du commerce et les plus forts paquebots. Il a été considéré comme une nécessité dès le temps de la conquéte espagnole dans le nouveau monde, projeté à nouveau après l'indépendance des colonies hispano-américaines (1), et recom

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(4) On trouvera l'historique des desseins qui ont été formés à cet égard, depuis le renversement de la domination espagnole, dans un récent ouvrage de M. Félix Belly. Cet ouvrage, intitulé: A travers l'Amérique centrale. Le Nicaragua et le Canal interocéanique (Paris, librairie de la Suisse romande, 2 volumes in-8°), est fort intéressant. « J'ai consacré, dit l'auteur dans sa préface, dix ans de ma vie et vingt mille lieues de voyages et d'explorations à la solution du problème de l'isthme américain posé depuis Fernand Cortez. J'ai signé des traités applaudis. J'ai ouvert à la véritable influence française, au rayonnement pacifique de nos idées et de nos intérêts, des régions aussi belles que l'Inde, qui devraient être les portes d'or de la civilisation. J'avais préparé ainsi, pour la génération présente, une gloire plus pure, plus légitime et plus féconde que toutes les conquêtes de la force; et j'ai cru un moment, tant les manifestations de l'opinion s'étaient montrées unanimes, que cette gloire sans égale nous était acquise et que l'heure de la fusion des deux mondes allait sonner. »

mandé, il y a plus de vingt ans, par l'empereur des Français, alors que, par l'étude des grandes questions d'intérêt européen ou universel, il se préparait aux plus hautes destinées. Ce canal, dont l'étude a été commencée vingt fois sans être jamais menée à bonne fin, est un des ouvrages urgents à accomplir pour le facile parcours de la planète, pour le bon agencement agricole, manufacturier et commercial du monde. Par la perception d'un péage modéré, il est à croire qu'il rendrait de grands bénéfices. Il semble difficile que les citoyens des États-Unis ne se résolvent, d'ici à peu, à ouvrir cette communication et qu'ils ne constituent pas une puissante compagnie à cet effet. On a remarqué que, dans l'audience solennelle donnée il y a peu de semaines (juin 1868), par le président des États-Unis, à l'ambassadeur extraordinaire envoyé, pour la première fois, par l'empereur de la Chine aux peuples de l'occident, le premier magistrat de la grande république américaine, exprimant l'opinion réfléchie de son cabinet, a signalé le canal de jonction des deux océans comme une œuvre essentielle à entreprendre, et l'a recommandé aux efforts de l'ambassadeur du Céleste-Empire afin qu'il la signalât à tous les gouvernements auxquels il va successivement se présenter (1).

(1) Voici en quels termes le président a terminé sa réponse au discours de l'ambassadeur :

« Mais il restera encore une autre œuvre, de toutes la plus

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