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L'exclamation est une figure par laquelle celui qui parle, élevant tout à coup la voix, fait éclater, au moyen d'interjections, les sentiments les plus vifs: la colère, la joie, la crainte, l'admiration, le regret, le désir, l'ironie, la surprise, la douleur, l'indignation, etc. Elle doit toujours être naturelle et dans le ton du sujet.

Cette figure se rencontre fréquemment chez les écrivains naturalistes.

Chameau! va! cria la grande Virginie.

L'Assommoir, p. 29.

Tiens! saleté!... tu l'as reçu celui-là, ça te calmera le derrière,

S'écrie Gervaise, dans la grande scène de la fessée.

E. ZOLA, L'Assommoir, p. 30.

Dans la Curée, Madame Sidonie exhale, de la manière suivante, le dépit qu'elle

éprouve de n'avoir pu décider Renée à s'entendre avec M. de Saffré, qui attend dans la pièce voisine le moment favorable pour lui prouver la passion qu'il a pour elle :

Eh! va donc grue! tu me payeras ça.

E. ZOLA, la Curée, p. 235.

L'épiphonème consiste dans une espèce de réflexion courte, vive et judicieuse, qui, précédant ou terminant un récit, une description, dont elle dépend, réunit et recueille, pour ainsi dire, tout l'esprit d'une suite de propositions. Elle demande brièveté et à propos.

Elle diffère de la sentence qui est une maxime générale en matière de mœurs, nous apprenant ce qu'il faut faire ou ce qui se passe dans la vie.

Frère, bois à plein verre et baise à pleines lèvres. Mange aussi! manger, boire et baiser, tout est là. Le corps bien satisfait fait la chair bien vivante.

dit M. J. Richepin en tête de la poésie intitulée: Frère il faut vivre; c'est un exemple de sentence.

Gervaise était surtout furieuse en songeant que ces deux bougres d'égoïstes n'auraient seulement pas songé à venir la prendre pour lui payer une goutte. A-t-on jamais vu! une noce de huit jours, et pas une galanterie aux dames! Quand on boit seul, on crève seul, voilà!

E. ZOLA, L'Assommoir, p. 549.

M. E. Zola termine par l'épiphonème suivante son roman le Ventre de Paris:

Quels gredins que les honnêtes gens!

L'imprécation et la commination sont des figures par lesquelles on fait des

menaces contre des objets odieux, fût-ce soi-même. Elles sont, le plus souvent, l'expression de la colère et de la fureur.

Hein! avance un peu, pour voir que je te fasse ton affaire! tu sais, il ne faut pas venir nous embêter, ici... Est-ce que je la connais, moi, cette peau! si elle m'avait attrapée, je lui aurais joliment retroussé ses jupons; vous auriez vu ça. E. ZOLA, L'Assommoir, p. 28.

Oui, oui, je vas te dessaler grande morue!

S'écrie la grande Virginie dans l'Assommoir, page 30.

La prosopopée donne de l'action, de la parole, du sentiment ou de la sensation à tous les êtres, soit animés, soit insensibles, absents ou présents, réels ou imaginaires, aux morts même. C'est une figure fréquemment employée en littérature naturaliste où l'écrivain s'at

tache spécialement à prêter aux objets extérieurs et inanimés des sensations en parfaite harmonie avec celles qu'éprouvent les personnages qu'il met en scène.

La nuit dormait, sans une haleine, pâmée par la grosse chaleur.

E. ZOLA, L'Assommoir, p. 115.

M. E. Zola exprime dans la prosopopée suivante l'effet produit au-dehors par le repas donné chez Coupeau, le jour de la fête de Gervaise:

Positivement, la rue crevait d'indigestion.
Ibid., p. 279.

Voici encore deux magnifiques exemples de prosopopée, tirés de la Curée:

...Et rien ne frappait le public d'une émotion plus religieuse que le sanctuaire, que la Caisse

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