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finitifs en substantifs, qui sont en quelque sorte des radicaux nus, nous vient du grec, langue essentiellement philosophique et propre à l'abstraction.

USAGE, USER. Ces mots sont synonymes quand ils se prennent pour exprimer le parti qu'on tire des choses. On dit indifféremment de certaines choses dont on vante la bonté, qu'elles sont d'un bon usage et d'un bon user.

Usage emporte l'idée d'une détermination étrangère à user, celle d'une fin, d'une application à quelque chose. Un instrument est d'un bon usage, quand il est bon pour ce à quoi on le fait servir. Une étoffe est d'un bon user, quand on peut en user longtemps. Il y a des étoffes qui

Lorsque les synonymes des noms infinitifs sont objectifs et passifs, comme pensée, ris, parole, marche, les noms infinitifs ayant seuls rapport à l'action, indiquent la manière dont elle se fait, non point dans un cas particulier, comme leurs synonymes, mais habituellement, car ils ne cessent jamais d'être abstraits et généraux. SORTIE, SORTIR. Ces deux mots ne sont sy-deviennent plus belles à l'user, c'est-à-dire, pennonymes que dans les locutions prépositives, à la sortie de et au sortir de, qui signifient toutes deux, au moment où l'on sort de.

dant qu'on en use, qu'on s'en sert. On reconnaît par l'usage (BUFF.), c'est-à-dire en s'en servant pour une fin particulière, la qualité bonne ou mauvaise d'une pierre à rasoir ou d'un remède; on reconnaît un domestique à l'user (DEST.), c'est

Au sortir de est visiblement plus abstrait: on dira bien, au sortir de là, au sortir de l'enfance, au sortir du berceau, et dans aucun de ces exem-à-dire en s'en servant comme d'ordinaire on se ples à la sortie de ne conviendrait, parce que cette sert d'un domestique; ici la destination s'entend locution retient quelque chose de concret et n'ex- de soi-même. prime pas l'époque simplement, d'une manière toute figurée, tout idéale. A la sortie de rappelle l'action de sortir, la représente à l'esprit, ce que ne fait nullement au sortir de: ainsi, on dit bien, à la sortie et non au sortir des juges.

VOLONTÉ, VOULOIR. Faculté ou action de celui qui veut.

Dans les deux sens, la volonté est relative et le vouloir absolu. On trouve, chez les uns, une volonté ferme et inébranlable, chez les autres une volonté faible et vacillante. Le vouloir ne reçoit point de qualifications semblables, parce qu'il n'est ni relatif, ni concret, ni individuel. L'essence du plaisir indélibéré est de produire le vouloir.» FÉN. Considérés comme actes, la volonté se rapporte à la chose qu'on veut, et elle est durable, au lieu qu'au vouloir ne correspond pas un objet qui le rende tel ou tel, il exprime l'acte sans plus telle est ma volonté; c'est Dieu qui nous donne le vouloir et le faire.

COUCHÉE, COUCHER. Un voyageur paye tant à l'hôtellerie pour sa couchée ou pour son coucher. Couchée est descriptif. Il détaille plusieurs circonstances ou impliquées dans coucher ou qui lui sont étrangères. La couchée comprend le souper, le nettoiement de la chaussure, des habits, l'arrangement de la chambre. Le coucher indique purement et simplement l'usage du lit, il ne marque aucune détermination accessoire, pas plus que le manger, le dormir,

etc.

PENSÉE, PENSER. Action de celui qui pense et ce qu'il pense.

L'un est relatif et particulier, l'autre absolu et général : « Le mot pensée, dit Roubaud, ne désigne que l'action de penser, tandis que penser en marque la manière d'être propre et distinctive. » Ces deux mots ont donc entre eux le même rapport que ris et rire. Autrefois on disait penser en poésie, parce que les vers s'en trouvaient bien (LABR.), et c'est en le considérant

Les chrétiens n'ont qu'un Dieu, maître absolu de tout, comme terme poétique que Roubaud le caractéDe qui le seul vouloir fait tout ce qu'il résout.

CORN.

Il faut réprimer les volontés de l'enfant, car il ne doit point avoir de vouloir. La volonté est effective, elle se manifeste au dehors par le moyen des organes, le vouloir consiste uniquement dans l'acte intérieur; c'est pourquoi l'on peut bien arrêter l'une, mais non pas l'autre.

SENSATION, SENTIR. Ces deux mots expriment l'état passif de l'âme en présence des objets.

rise. On l'emploierait plutôt aujourd'hui en mé-
taphysique pour exprimer d'une manière tout
abstraite et tout absolue la pensée : « Qui peut
assurer, dit Voltaire, qu'il est impossible à Dieu
de donner à la matière le sentiment et le penser ?»
Le raisonner tristement s'accrédite. VOLT.
Il peut signifier encore la manière de penser de
toute une classe ou espèce d'hommes, comme on le
voit dans cette phrase de J. J. Rousseau: « Le pen-
ser måle des âmes fortes leur donne un idiome par-
ticulier.» La pensée est relative aux circonstances,
à l'objet sur lequel elle porte, ou elle exprime
une action ou une manière de penser accidentelle
et propre à un seul homme. - On disait autrefois
le mentir pour le mensonge, mais ce n'était que
dans les propositions d'une généralité absolue. « En
vérité le mentir est un maudit vice.» MONTAIGN.

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Le sentir, comme le penser, comme le vouloir, comme le connaître, n'est d'usage qu'en métaphysique, science où l'on considère les actes de l'esprit d'une manière tout abstraite et indépendamment de toutes circonstances. « Le sentir ne dépend pas de nous, mais le vouloir en dépend.» FEN. « Dieu n'entend et ne veut que ce qu'il faut entendre et vouloir; son entendre et son vouloir sont sa nature, qui est toujours excellente. » Boss. Mais la sensation et le sentiment sont variables en force et en intensité, en même temps que relatifs à l'in-mer cette action dans les cas particuliers; rire est dividu qui les éprouve; le sentir reste toujours identique et n'indique pas même, comme les deux autres mots, si le phénomène qu'il exprime a pour cause quelque chose d'extérieur ou d'intérieur.

RIS, RIRE. Ces mots signifient la même chose suivant l'Académie, l'action de rire.

Cependant ris est plus concret et sert à expri

plus abstrait et plus propre à caractériser la chose en elle-même. Que le premier soit concret, le second abstrait et représentatif de la chose en soi, c'est ce que Condillac a bien saisi: «Le ris, dit-il,

ou du sourire. Le sourire est la manière d'exprimer une joie douce, modeste, délicate de l'âme; le souris en est l'expression actuelle et passagère. Ensuite, vous ne concevez pas le souris sans une

est proprement le bruit que fait celui qui rit, le | rire est la manière dont il rit: on entend des ris; le rire est agréable ou désagréable. » Mais nous devons à Roubaud une distinction plus complète et plus détaillée : « Ris, dit-il, n'est qu'un acte, unintention, un motif, un sentiment, une pensée effet individuel. Nous disons le rire, comme nous qui l'anime; vous concevez le sourire comme un disons le boire, le manger, le lever, le coucher; jeu naturel de la figure. » On dit cependant, un or, cette manière de parler désigne le genre, la sourire de pitié, d'indignation, d'approbation; manière, l'habitude de la chose. L'on a le rire mais alors on désigne, non pas un fait ou un cas agréable et l'on fait des ris. Vous qualifiez le rire | particulier, mais toute une espèce d'actions. << Les d'une personne selon sa manière habituelle de arguments de l'amour sont de tendres pleurs et rire; et vous qualifiez ses ris selon la manière un gracieux sourire. » LAF. « Jupiter regarda Védont elle rit actuellement. Chacun a son rire, nus avec complaisance : il lui fit un doux souris. » comme son maintien habituel : la forme du ris FÉN. On a le sourire ou un sourire tel ou tel; on varie comme la contenance, suivant les occa- fait dans l'occasion un souris tel ou tel. Il y a le sions. » sourire de l'amitié (VOLT.), le sourire du dédain (BEAUM.); on reçoit quelqu'un dans un cas particulier avec un souris amical ou dédaigneux.

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VIE, VIVRE. Existence d'une chose animée. La vie est effective: cette expression convient en langage historique, quand il s'agit de réalité : le vivre est idéal; c'est un terme de spéculation qui a sa place dans le raisonnement où on traite des choses en soi, non comme étant ou ayant été, mais abstractivement ou comme ayant tels carac

Le ris est donc le rire se produisant et se montrant dans un cas particulier. Le rire est l'expression du contentement; et le ris d'un homme exprime la joie qu'il éprouve en un moment donné. On dit proprement le rire c'est un genre d'action. « L'enfant a comme nous le rire, les cris, les plaintes. » J. J. « Le rire est ami de l'homme, lui appartient privativement au reste des animaux...; il est le partage des dieux...; il a quelque chose de vif et de sensible. » LAF. « Dis-tères. « Le même passage que vous fîtes de la mort courir de la comédie et du rire en philosophe platonicien. ID. « Etablir un impôt sur les chansons et sur le rire.» VOLT.

à la vie, refaites-le de la vie à la mort. >> MONTAIGN. << La nature apprit à Thalès que le vivre et le mourir étaient indifférents. » ID. On lit dans le même écrivain : « Je sais avoir retiré de l'aumône des enfants, pour m'en servir, qui bientôt après m'ont quitté et ma cuisine et leur livrée, seulement pour se rendre à leur première vie. » Il ve

La joie est passagère, et le rire est trompeur. ID. Mais on dit proprement des ris : ce sont les manifestations, les réalisations du rire. « Les ris et les éclats qu'excitent les bons mots. » BOURD. «Troubler les sacrés mystères par des ris immo-nait de dire: «Regardez la différence du vivre destes et par des éclats. » ID. « A cette vue tous les voleurs éclatèrent en ris immodérés. » LES. «Je renouvelai mes ris à cette saillie. » ID. Vos ris complaisants Tirent de son esprit tous ces traits médisants. MOL.

de mes valets à bras, à la mienne. » — - On distinguera à peu près de même ces deux mots, quand ils signifient la nourriture. Le vivre se dit d'une manière tout abstraite, sans rien particulariser. «J. C. défend à ses disciples de se mettre en peine du vivre et du vêtement. » NIC. La vie, -On dit bien également un rire et un ris; mais au contraire, est le vivre effectif, dans telles cirun rire est une espèce du rire, qu'on caractérise, constances. « Solon voulut que chaque citoyen et un ris est un fait qu'on décrit. Avoir un rire rendît compte de la manière dont il gagnait sa fin et malicieux (LES.): rire d'un rire de méchan-vie.» MONTESQ. Ou bien le vivre, comme le pencete (J. J.), d'un rire de mépris (VOLT.).

On peut avoir un rire et des pleurs de commande.

DEST.

Mais un ris a lieu ou a eu lieu, on le rapporte.

... Mon faquin, qui se voyait priser, Avec un ris moqueur les priait d'excuser. BOIL. Pourquoi ce ris dédaigneux, quand on vous raconte ce que la main de Dieu a fait? » FÉN.

ע

ser, comme le vouloir, est un terme de la poésie
familière et naïve.

Mon vivre n'est qu'un peu de gland. SCARR
Le vieillard, tout cassé, ne pouvait plus qu'à peine
LAF.
Aller querir son vivre.
Le même Lafontaine a dit dans ses Contes le jeû-
ner pour le jeûne :

La sainteté n'est chose si commune
Que le jeuner suffise pour l'avoir.

Enfin, rire est tellement abstrait et si peu propre à indiquer les circonstances accessoires, qu'il Et dans la fable le Savetier et le Financier,

Le suppose pas même, comme ris, que l'action de rire ait lieu avec intention ou sous l'influence de certains sentiments ou mouvements de l'âme particuliers. << Charles XII avait le bas du visage defiguré par un rire fréquent qui ne partait que des lèvres. » VOLT. « Le rire, qui est par le chatouillement des aisselles, n'est point naturel ni doux. CHARR.

SOURIS, SOURIRE, action de rire légèrement. Même différence entre ces deux mots qu'entre les deux qui précèdent. « Le souris, dit Roubaud, est proprement un acte, l'effet particulier de sourire

α

Et le financier se plaignait
Que les soins de la Providence
N'eussent pas au marché fait vendre le dormir,
Comme le manger et le boire.

PAROLE, PARLER. Langage.

Le mot parole est objectif, et, comme tel, il a un sens très-étendu Dieu a donné la parole à l'homme; un orateur a ou demande la parole. Cela n'empêche pas ce mot de se prendre dans un sens plus restreint pour signifier le langage par rapport à la manière dont quelqu'un l'emploie, auquel cas il est synonyme de parler. On

dit également qu'un homme a la parole rude, | quent aux souverains, ces deux mots expriment

et un parler rude: un homme a la parole rude quand la parole, commune à tous, se trouve modifiée chez lui d'une façon qui lui est propre; et il a un parler rude quand il a un genre de parler qui est rude, genre applicable à plusieurs autres. Parole signifie le langage, et parler, un langage. Or, quoique le mot parole soit plus général séparément, il l'est moins que le mot parler, quand tous deux servent à qualifier la manière dont quelqu'un parle. De sorte que, dans le sens particulier, la parole est plus particulière que le parler. Chacun a sa parole, douce, rude, brève; et on distingue différents parlers, un parler rude, un parler doux, un parler picard, normand, provençal, etc.

α

ce que peuvent ceux qui possèdent la qualité dont ils sont les signes. Ils ont ensuite une acception plus restreinte, suivant laquelle ils indiquent une faculté ou disposition dans le sujet, par le moyen de laquelle il est capable d'agir ou de produire un effet.

Mais dans les deux sens, ces mots diffèrent de même : l'un est plus concret, l'autre plus | abstrait.

Comme l'observe justement Roubaud, ces termes correspondent aux deux mots latins potentia et potestas, lesquels signifient, suivant Gardin et Dæderlein, l'un une force de fait, l'autre une force ou faculté de droit, l'un ce que nous pouvons effectivement, l'autre ce qui nous est permis. Ainsi puissance a plus de rapport avec force et se dit bien des agents naturels, la puissance d'une machine; pouvoir exprime une idée plus abstraite, plus idéale, il serait plutôt synonyme d'autorité ou de droit. C'est parce qu'il est abstrait et idéal que pouvoir, à la différence de puissance, signifie le crédit, l'empire, l'ascen

Ensuite, le parler est plus constant, plus habituel et dépend moins des circonstances: un homme a la parole tremblante, faible, la parole d'un homme malade par suite de certains accidents, et dans ces exemples parler ne conviendrait pas. Lorsque nous nous trouvons empêtrés dans un dangereux pas, nous savons bien couvrir notre jeu d'un bon visage et d'une parole assurée. »dant, l'influence toute morale qu'on exerce sur MONTAIGN. « C'était une certaine afféterie qui rendait le parler d'Alcibiade mol et gras. » ID. « Le parler que j'aime, c'est un parler simple et naïf. » ID.

les hommes. « Le pouvoir, dit Condillac, est le droit d'user de la puissance; » et puissance marque les moyens qui sont à la disposition du pouvoir. Le despotisme est une puissance, puisqu'il a des forces; mais ce n'est point un pouvoir, puisqu'il n'a point de droit. Un pouvoir sans puis

D'un autre côté, le parler est plus abstrait que la parole, plus indépendant de tout ce qui n'est pas l'action de parler, c'est un terme purement for-sance est un pouvoir sans force. «La puissance, mel; au lieu que la parole conserve toujours une certaine relation au sens, à l'esprit, aux idées qu'elle représente. C'est pourquoi on dit avoir le parler ou un parler gras (MONTAIGN., S. S.), et non la parole ou une parole grasse; c'est pourquoi Descartes accorde un parler aux perroquets, et leur refuse la parole. La rudesse ou la douceur du parler est une qualité de l'organe seul; la rudesse ou la douceur de la parole tient un peu à

celle du caractère.

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dit encore Condillac, est plus relative à la force et le pouvoir se rapporte plus à la liberté, c'està-dire à un usage raisonnable de la force; et c'est pourquoi l'homme juste use de son pouvoir, l'homme injuste abuse de sa puissance.» Vous pouvez soulever ce fardeau, renverser cet obstacle, vous en avez effectivement la force; voilà la puissance: vous pouvez vous permettre telle action, vous en avez le droit, vous y êtes autorisė; voilà le pouvoir. « Attribuer à Dieu quelque puissance et quelque liberté de faire le mal, c'est lui attribuer le pouvoir de pécher. » FÉN.

Girard et Roubaud donnent à peu près la même distinction, mais le premier la propose d'une manière beaucoup plus nette, quand il considère puissance et pouvoir dans leur sens restreint, dans le sens physique et littéral où ils sont synonymes de faculté. « Le pouvoir, dit-il, vient des secours ou de la liberté d'agir; la puissance vient des forces. L'homme, sans la grâce, n'a pas le pouvoir de faire le bien; la jeunesse manque de savoir pour délibérer et la vieillesse manque de puissance pour exécuter. L'habitude diminue beau

Vous dites dans un récit que la marche des enne-coup le pouvoir de la liberté ; l'âge n'affaiblit que mis a été lente; mais vous caractérisez l'éléphant et la tortue en disant qu'ils ont un marcher lent (LAF.). Le marcher, dans ce dernier sens, est la démarche ou la manière habituelle de marcher de quelqu'un, mais sous le rapport physique seulement et indépendamment des sentiments qui animent cette personne. « Je ne connais pas J. C. à la voix, ni au visage, ni au marcher, ni par le rapport d'aucun de mes sens. >> Boss.

la puissance et non le désir de satisfaire ses passions. Condillac établit la même différence en termes encore plus catégoriques : « Notre puissance consiste, dit-il, dans les forces que nous sommes maîtres d'employer, notre pouvoir dans l'éloignement des obstacles qui pourraient gêner notre liberté. » Et ailleurs : « La puissance de l'âme est plus relative aux facultés nécessaires pour exécuter, le pouvoir est plus relatif aux déPUISSANCE, POUVOIR. Dans leur sens le plus terminations de la volonté.» «Se figurer des conétendu, dans celui, par exemple, où ils s'appli-tradictions entre le pouvoir souverain de la grâce

sur le libre arbitre et la puissance qu'a le libre | desquelles on puisse les distinguer de leurs synoarbitre de résister à la grâce. » PASC.

de ce que la terminaison de ces deux derniers
marque une durée, un exercice continu, habi-
tuel, modification étrangère, comme toute autre,
aux noms infinitifs repentir et souvenir.

SYNONYMIE DES SUBSTANTIFS ORDINAIRES AVEC
DES PARTICIPES PASSÉS PASSIFS PRIS SUBSTAN-

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TIVEMENT.

nymes; ils équivalent donc à des substantifs sans Telle est bien la différence de puissance et de terminaisons significatives, et c'est comme tels que pouvoir, et cette différence résulte bien de ce nous avons traité repentir et souvenir, dont la difque le premier de ces mots est un substantif or-férence d'avec repentance et souvenance provient dinaire à terminaison significative et le second un infinitif pris substantivement. Mais la terminaison de puissance étant significative doit imprimer à ce mot une nuance propre dont nous n'avons encore rien dit. Ance, outre l'action, indique quelque chose de durable, de permanent, tandis que l'infinitif pouvoir marque l'action simplement. D'où il suivrait que pouvoir signiferait spécialement l'acte, et puissance l'état permanent de pouvoir; pouvoir serait distributif, executoire relativement à puissance, il aurait un rapport particulier à l'acte, une idée particulière d'efficacité et le soin de l'exécution. « Affirmer que Dieu n'ait pas le pouvoir d'accorder la pensée à tel être qu'il voudra, c'est borner la puissance du Créateur qui est sans bornes. » VOLT. En conséquence, on a la puissance et on exerce le poucoir de faire une chose. « Quand, étant enfermé, vous voulez rester chez vous, vous exercez le pouvoir que vous avez de demeurer : vous avez cette puissance, mais vous n'avez pas celle de sortir. VOLT. Ce caractère a été longuement développé par Roubaud. Mais, quoique également réel, il a moins d'importance que le premier. Rien n'empêche, néanmoins, de les garder l'un et l'autre.

D

SCIENCE, SAVOIR. Choses apprises et sues.

MOL.

La science est relative, le savoir absolu; on dit la science du navigateur, les sciences naturelles, ies sciences philosophiques. « Quelque éclairé que vous soyez, vous apprendrez du moins, dans les instructions de l'Eglise, que votre savoir n'est rien, si vous ignorez la science du salut. » MASS. Non, le savoir chez moi n'est pas tout retiré; Mais, en un mot, je sais, pour toute ma science, Du faux avec le vrai faire la différence. Saroir se dit absolument par rapport aux travaux de l'esprit, et c'est pourquoi il ne s'emploie qu'au singulier. Ensuite, le savoir n'étant pas spécial comme la science, est moins approfondi par cela même. « Le savoir n'est que la science d'un homme qui n'est pas ignorant. « COND. « Quelques-uns, par une intempérance de savoir, anent mieux savoir beaucoup que de savoir bien, et être faibles et superficiels dans diverses scilaces, que d'être sûrs et profonds dans une seule. LABR. Enfin, comme le savoir suppose des connaissances étendues, mais superficielles sur chaque chose, il a naturellement plus de rapport à la pratique : la science en a davantage à la spéculation. « Ce médecin a acquis un grand satoir par son expérience. » ACAD. Moliere fait voir dans la comédie des Femmes savantes que la science messied aux femmes, qu'elles la doivent laisser aux docteurs.

I. Narration, narré. Exposition, exposé. Énonciation, énoncé. Prononciation, prononcé. Délibération, délibéré. Production, produit. Composition, composé. Dénégation, déni. Contradiction, contredit. Institution, institut. Fusion, fonte. Perdition, perte. Imposition, impôt. Croissance, crue.

§ II. Rôt, rôti. Arrêt, arrêté. Fosse, fossé. Suivant que les substantifs, avec lesquels les participes passés passifs ont des rapports de synonymie, sont ou ne sont pas à terminaisons significatives, les synonymes de cette classe se partagent en deux espèces, qui exigent chacune une règle de distinction particulière. Cet article doit donc se diviser en deux parties. Ensuite, il est à remarquer que dans la première espèce on ne trouve, comme synonymes des participes passés, que des substantifs en ion, à l'exception d'un seul qui est en ance. Ce dernier devra faire l'objet d'un examen à part. La seconde espèce donne lieu à une remarque analogue: parmi les substantifs à terminaison indifférente, qui ont pour synonymes des participes passés, deux, rôt et arrêt, sont eux-mêmes des participes passés; seulement ils s'éloignent un peu plus, par la forme, du verbe primitif et ne s'y rattachent pas aussi directement; mais un troisième, fosse, semble ne devoir pas être soumis à la même règle que les deux précédents, parce qu'il ne tire pas comme eux son origine d'un verbe anté

rieur.

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la

La différence des uns aux autres varie nécessairement suivant la valeur de la terminaison des substantifs proprement dits. Or, ceux-ci se terminant presque tous en ion, tout se réduit à savoir d'abord ce qui distingue les substantifs français ainsi terminés d'avec les substantifs participes dont il s'agit ici. Ion marque l'action, réalisation présente de l'idée exprimée par le verbe; c'est une désinence subjective, c'est-àdire qui montre le sujet faisant l'action. Le parREPENTIR, REPENTANCE; SOUVENIR, SOUVE-ticipe passif signifie un résultat, la chose constiNANCE. Les deux premiers mots signifient regret de ses fautes; les deux derniers, idée que la mémoire conserve de quelque chose.

L'infinitif étant abstrait, les substantifs à forme infinitive n'offrent point de déterminations à l'aide

tuée et faite; c'est une désinence objective, c'est-à-dire qui désigne la chose comme un objet ayant des qualités, mais sans rapport à l'agent qui l'a produite. De là résulte une telle distance entre les noms en ion et les participes correspon

dants, qu'on conçoit à peine la possibilité de leur | chements, ni les modifications; il faut qu'il n'ait synonymie. Cette synonymie n'a lieu en effet que quand le substantif se prend objectivement comme le participe pour exprimer le résultat de l'action, une chose faite, quand, par exemple, production veut dire, comme produit, une chose qui a été produite. Alors subsistent entre les deux mots des différences qui tiennent à la diversité de leur signification primitive.

Les substantifs proprement dits sont relatifs et concrets; les participes, absolus et abstraits. Les uns font connaître la chose extrinsèquement, ils la présentent dans ses particularités, dans ses rapports au temps, aux personnes, aux circonstances, à la manière; les autres la font connaître intrinsèquement, en elle-même, sans considération relative, indépendamment de tout rapport à l'agent et à son mode d'agir, abstraction faite de toutes les circonstances qui ont accompagné l'action. En un mot, quoique le substantif ne signifie pas l'action particulière de faire la chose, mais la chose faite, il la rappelle avec toutes ses particularités; tandis que le participe désigne la chose absolument, telle qu'elle est au fond, intrinsèquement, en soi. De sorte que le participe se trouve, à l'égard des substantifs en ion, identiquement dans le même rapport que les substantifs sans terminaison significative, dans le même rapport, par exemple, qu'acte et action, progrès et progression, concept et conception.

NARRATION, NARRÉ. Le sens commun à ces deux mots est l'idée d'un fait raconté, ou de la

relation d'un fait.

rien de personnel, que le narrateur n'y mette rien du sien, que rien n'y soit laissé à son arbitraire. « Il y a dans ce discours d'Eschine un narré aussi long qu'infidèle de l'administration de Démosthène. » LAH. « Autant de mots, autant d'erreurs grossières dans ce narré de La Beaumelle, sur lequel il lui était aisé de s'instruire. » VOLT.

Un simple fait conté naïvement, Ne contenant que la vérité pure, Narré succinct sans frivole ornement, Voilà de quoi désarmer la censure. ID. En littérature, on donne les règles de la narration, parce que dans la narration presque tout est relatif et à la discrétion de l'auteur; on ne donne pas de règles pour le narré, car il dépend entièrement de la nature des faits. Lorsqu'on veut exercer le talent des écoliers par des narrations, on leur dicte pour sujet le narré des faits qu'ils doivent raconter à leur manière.

EXPOSITION, EXPOSÉ. Chose exposée, mise sous les yeux par la parole; récit d'un fait avec ses circonstances.

L'exposition admet plus de détails, elle laisse à l'auteur quelque invention et une manière propre; l'exposé est plus abstrait, ce n'est point une explication détaillée, mais un récit dans lequel les faits sont présentés d'une manière nue et simple. Un acte d'accusation contient l'exposé des faits qui ont provoqué les poursuites, et dont l'avocat donne ensuite l'exposition. Dans l'exposé de la cause, le juge d'instruction ne doit mettre que de l'impartialité; dans l'exposition de la même cause, l'avocat se montre plus ou moins habile.

L'exposition se considère sous le point de vue de la manière, de la forme, de l'art. « Quel sera le meilleur modèle d'exposition dans une tragédie? Celle de Bajazet passe pour un chef-d'œuvre de l'esprit humain. » VOLT. « L'éloquence propre aux historiens consiste dans l'art de préparer les événements, dans leur exposition toujours élégante, tantôt vive et pressée, tantôt étendue et fleurie. » ID. « Exposition lumineuse, animée, attachante. » LAH. - Dans l'exposé, on ne regarde que le contenu ou le fond des idées : un exposé fidèle ou infidèle (LAH.), faux (Boss., LAH.), absurde (LAH.), très-court (ID.). « Il résulte de cet exposé trois vérités incontestables. » J. J. « Il fallait cet exposé pour entendre ce qui va être raconté. » S. S.

La narration se rapporte à celui qui fait le récit, et à la manière dont il le fait; elle indique de sa part des détails, de l'invention pour les circonstances accessoires, une manière à lui propre. Le narré ne se rapporte qu'aux choses narrées, au fond du récit; il le présente de la façon la plus simple, la plus brève, la plus abstraite, la plus absolue, indépendamment de tous les détails de forme et de tous les ornements qui ne tendent qu'à faire valoir le narrateur ou sa cause c'est le récit pur et simple du fait, sans rapport à la manière. On donnera plutôt à narra- | tion les épithètes qui s'appliquent à l'auteur, à son style et à l'arrangement de son récit; à narré, celles qui conviennent au fait une narration intéressante plaît par la manière fleurie, élégante, bien ménagée dont les faits sont racontés; un narré intéressant plaît par ces faits eux-mêmes. ÉNONCIATION, ÉNONCÉ. Ce qu'on énonce, exLa narration se qualifie comme une œuvre litté-pression d'une idée, d'une proposition. raire, poétique, ou oratoire; ce qu'on y consi- L'énonciation est relative; elle se rapporte à la dère le plus, ce n'est pas le fond, mais la forme manière dont on énonce, ou dont on s'énonce; ou la manière; les incidents y dépendent du nar- c'est la chose énoncée de telle façon, par telles rateur, qui peut à son gré les modifier. « Avoir personnes, dans telles circonstances de temps, de le talent de la narration. » LAH. « Le cardinal lieu ou autres. L'énoncé est absolu; il consiste Dubois avait des pointes de vivacité et des narra- dans la formule courte et claire, dans les termes tions amusantes. » S. S. « Les Grecs sont plus qui portent les idées à l'esprit; c'est la chose éloquents dans leur narration que curieux dans énoncée, abstraction faite de tout rapport et de leurs recherches. » Boss. « Bocace est le premier tout détail de circonstances. « Les lettres de modèle en prose pour le naturel de la narra- Voisin n'étaient que l'énoncé court de ce qu'il tion. » VOLT. Le narré se qualifie comme l'œuvre ordonnait en maître. » S. S. « Il n'y a pas là la d'un historien ou d'un témoin; il doit être d'une moindre trace de figure ni de recherche : c'est le fidélité rigoureuse; il ne comporte ni les retran- simple énoncé d'un fait. » LAH. On emploie bien

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