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ment manuelle. Les fleurs de rhétorique, les traits | l'art chirurgical.
d'esprit, semés dans un livre, en constituent les en-
jolivements; ce qui ne l'empêche pas d'avoir pour
enjolivures des vignettes et des culs-de-lampe.
ÉLARGISSEMENT, ÉLARGISSURE. Ils rappel-
lent tous deux l'action d'élargir.

Le premier exprime cette action et son résultat abstrait, l'augmentation de la largeur; le second désigne son résultat concret ou ce qu'on a ajouté pour élargir.

Secondement, on se sert d'élargissement en parlant d'objets considérables, comme un chemin, un canal, une rivière, et d'élargissure quand il s'agit de petits objets qui se façonnent à la main, comme un vêtement et un meuble.

Enfin, élargissement est seul employé au figuré il signifie délivrance de prison.

EMBOÎTEMENT, EMBOITURE. Ils rappellent tous deux l'état qui résulte de l'action d'emboîter, d'enchâsser une chose dans une autre.

Mais emboîture seul suppose que cet état est produit par le travail de l'homme; c'est particulièrement un terme de menuiserie. Si on dit l'emboîture comme on dit l'emboîtement des os, la première expression n'est ni aussi propre ni aussi relevée que la seconde. « Ce qu'il y a de plus remarquable dans les os, c'est les divers emboîtements des uns dans les autres.» Boss.

De plus, emboitement désigne simplement le fait ou l'état des os emboîtės; emboiture y ajoute l'idée de complication, d'assemblage et d'agen

cement.

TERMINAISONS ION ET URE.

Mixtion, mixture. Fraction, fracture. Projection, projecture. Scission, scissure. Position, posture.

La désinence ion marque l'action, la manifestation plus encore que la désinence ment, et elle est moins susceptible de s'objectiver, de se prendre dans le sens de résultat, d'effet ou d'état, c'est-à-dire dans le sens qui est proprement celui de la terminaison ure. Aussi les substantifs en ure ont-ils beaucoup moins de synonymes de même radical parmi les substantifs en ion que parmi les substantifs en ment; et, quand ils en ont, ils en different par les mêmes caractères, mais plus tranchés, par lesquels ils diffèrent de leurs synonymes en ment.

Mixtion, mixture, deux termes de pharmacie qui donnent l'idée d'un médicament obtenu par un mélange, pourraient d'abord sembler synonymes; mais ils ne le sont guère plus que création et créature, nutrition et nourriture, par exemple. La mixtion est le mélange des drogues, et la mixture le médicament qui en résulte. On obtient telle mixture par la mixtion de telles ou telles drogues. Quand on va chez le pharmacien acheter une mixture, il faut souvent attendre qu'il fasse la mixtion.

Fraction est noble et ne s'emploie que dans certaines phrases consacrées, comme en parlant de l'hostie et du pain que rompit Jésus-Christ en présence des pèlerins d'Emmaüs; fracture est de tous les styles, et se dit particulièrement dans

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science, et projecture un terme d'art. Scission se dit au figuré, et scissure au propre. - Il en est de même de position relativement à posture.

TERMINAISON AGE.

Nue, nuage. Marais, marécage. Ombre, ombrage. Herbe, herbage. Pâture, pâturage. Rive, rivage. Coquille, coquillage. Langue, langage. Bande, bandage. Tricot, tricotage. Cahot, cahotage. Caquet, caquetage. Baragouin, baragouinage. Part, partage. Débâcle, débâclage. Labour, labourage. Cœur, courage. OEuvre, ouvrage.

Quoique cette désinence tire probablement son origine du latin agere, agir, faire, elle est toute française, ainsi que la désinence ment. Dans agus, agium, qui terminent quelques substantifs latins, la syllabe ag fait partie du radical: exemples, magus, mage, et præsagium, de præ sagus, présage. C'est à notre imitation, de l'aveu même de Romani, que les Italiens ont fait leurs noms en aggio, coraggio, oltraggio, omaggio, passaggio, vantaggio, formaggio, erbaggio, etc. Quant à la valeur de cette particule, il faut, pour arriver à la connaître, observer que les substantifs qui finissent en age sont, ou bien à base nominale, ou bien à base verbale. Dans le premier cas, ils signifient, comme les noms en ure, et même plus particulièrement encore, un ensemble, une réunion, une chose plusieurs fois répétée. De là vient que la terminaison age est celle de la plupart de nos noms collectifs, feuillage, branchage, plumage, vitrage, entourage, etc., lesquels équivalent presque à des substantifs ordinaires au pluriel.

Lorsque les substantifs ainsi terminés sont à base verbale, ils rappellent, non pas en général, l'action d'un sujet, comme ion et ment, mais plutôt, comme ure, le résultat de l'industrie, le produit d'un art, une forme donnée, l'opération d'un ouvrier, sa peine, son salaire, etc., ou les qualités de la chose en conséquence d'un travail manuel. Une circonstance à remarquer, c'est que cette désinence, aussi commune pour le moins que la désinence ure en termes d'arts et métiers, se trouve à la fin de substantifs qui sont tous masculins; c'est sans doute parce qu'ils représentent les choses comme façonnées, comme ayant reçu de la main de l'ouvrier quelque chose qui les détermine, les borne et les spécialise.

Du reste, ces deux nuances ne sont pas tellement propres, la première aux substantifs à base nominale, la seconde aux substantifs à base verbale, qu'elles ne se rencontrent quelquefois toutes deux dans un même substantif de l'un ou de l'autre genre. Nous allons montrer d'abord comment elles se modifient, et comment elles donnent une physionomie particulière aux substantifs terminés en age, quand ils sont comparés avec des substantifs de même radical et sans terminaisons significatives.

NUE, NUAGE. Amas de vapeurs élevées dans l'air.

Nuage, suivant Beauzée, est plus propre à caractériser un amas de vapeurs fort condensées :

sité, si bien qu'il signifie toutes sortes d'herbes ou un nombre considérable de plantes de différentes espèces. Herbage équivaut à herbes, comme chevelure à cheveux.

le nuage est en quelque sorte la nue qui se concentre, qui se multiplie, qui se répète, une réunion de plusieurs nues. Aussi, selon l'avis des synonymistes Beauzée, Roubaud et Condillac, est-ce sur l'idée d'opacité et d'obscurité qui en Ensuite, quoique herbage ne soit pas à base résulte que nous nous arrêtons principalement verbale, il rappelle quelquefois une action, lorsque nous prononçons le mot nuage. Un nuage | une destination assignée par l'homme on apde traits, un nuage de poussière; avoir un nuage sur les yeux. « Un beau jour sans nuage. » FÉN. « En Suède, la lumière de la lune n'est obscurcie par aucun nuage. » VOLT. « Alors l'atmosphère est obscurcie par les nuages d'une épaisse fumée.» BUFF. L'aiguille aimantée peut seule nous conduire, lorsque tous les astres sont voilés par les nuages, les brouillards et les brumes. » ID. « Au dernier jour, un nuage dérobera J. C. à vos yeux.» Boss.-On appelle nuages les doutes, les incertitudes et les ignorances de l'esprit humain. « Les apôtres ne comprenaient rien à ce discours, tant étaient épais les nuages qui enveloppaient leurs esprits. Boss. Plus la philosophie péripatéticienne a été enseignée, plus elle est devenue obscure un nuage de commentateurs s'est placé entre Aristote et nous. » COND.

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D

Quant à la nue, ce qui la distingue, conformément sans doute à l'étymologie, c'est son élévation. Porter, élever une personne ou une action jusqu'aux nues. Le sommet d'une montagne se perd dans les nues. Les enfants de Noé voulaient porter la tour de Babel jusqu'aux nues (Boss.). Toutes les fois qu'on se veut guinder au-dessus des nues, on s'y perd. » Boss.

MARAIS, MARÉCAGE. Espaces de terrains couverts d'eaux qui n'ont pas d'écoulement.

Marécage exprime un espace plus étendu : c'est tout un pays où il y a des marais. « La bécasse fouille dans la terre molle des petits marais et des environs des sources. » BUFF. « L'Amérique est couverte de marécages immenses qui rendent l'air très-malsain. » VOLT. « Le buffle réussirait dans nos provinces où il se trouve des marais et des marécages. BUFF. On dessèche un marais; on chasse dans les marécages. Un pays peut n'être qu'un grand marécage : tel est celui qu'occupent les marais Pontins.

OMBRE, OMBRAGE. Trace obscure que fait un corps qui intercepte les rayons de la lumière.

On se promène à l'ombre d'un parasol; on se couche sous l'ombrage d'un hêtre. L'ombre peut être produite par un corps simple ou de peu d'étendue sur un cadran, on juge de l'heure par l'ombre de l'aiguille. L'ombrage suppose toujours quelque étendue, et résulte de l'ensemble ou de la réunion des branches et des feuilles des arbres; ce qui fait dire à Condillac que le mot ombrage emporte tout à la fois l'idée d'ombre, cellé d'arbres et celle d'un certain espace. On est à l'ombre dans une grotte, derrière un mur; on n'est sous l'ombrage que dans un bosquet ou sous un arbre. La terre est opaque, elle fait ombre. » BUFF. Les arbres diminuent par leur ombrage la chaleur du soleil. » ID.

HERBE, HERBAGE. Plantes qui servent à nourrir les animaux. Un lapin vit d'herbe ou d'herbage. Herbe a rapport à la nature des plantes, et hertage emporte une idée de collection, de diver

pelle herbages les herbes des prés où l'on met les animaux pour les engraisser, et plus particulièrement encore les prés mêmes qui ont cett destination et qu'on ne fauche jamais; ou bie encore, les herbes spécialement cultivées et apprêtées pour la nourriture de l'homme. « Les Italiens vivent beaucoup d'herbages. » J. J. « Quelqu'un des savoureux herbages qui croissent dans nos jardins, certains laitages de nos montagnes, voilà ce qui couvre et orne la table. » ID. On distinguera de même lait de laitage. Celui qui vit de lait se nourrit du lait tel qu'il est fourni par les animaux; celui qui vit de laitage se nourrit de toutes sortes de mets, fromage, beurre, crème, etc., dont le lait est la base, et préparés par la main des hommes.

PÂTURE, PÂTURAGE. Lieu où paissent les bestiaux.

Il y a de l'herbe dans la pâture, mais en petite quantité; les pâturages en sont tout couverts. On dit, une vaine pâture, et de gras pâturages. «Pour obtenir de beaux bœufs, il faudrait faire un règlement par lequel on abolirait les vaines pâtures, en permettant les enclos. » BUFF. « Le bœuf devient d'une taille prodigieuse dans les contrées où le pâturage est riche et toujours renaissant. » ID. Pâture, dit Roubaud, signifie un terrain inculte et entièrement négligé qui ne peut donner qu'une herbe rare, courte et pauvre. » Ce qui implique une seconde différence, savoir que dans la pâture croît naturellement la nourriture des animaux qui paissent, au lieu que les pâturages sont des lieux que l'homme cultive et prépare pour y faire paître les bestiaux.

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RIVE, RIVAGE. Partie de terre qui va ou s'étend en pente douce jusqu'à une eau qu'elle termine ou limite.

« Rive, dit Condillac, signifie seulement le bord que l'eau bat, au lieu que rivage comprend une plus grande étendue de terre. » Et Roubaud: « Le rivage est une rive étendue. La rive n'a point ou n'a guère de largeur; le rivage a une largeur plus ou moins considérable. L'eau, en se débordant, couvre la rive et s'étend sur le rivage. Le rivage a un bord; on n'en attribue point à la rive. »

La rive est simple comme le mot qui l'exprime: elle n'a pas d'étendue ou de largeur. C'est souvent un terme abstrait, purement indicatif : la rive droite, la rive gauche, la rive opposée, la rive orientale ou occidentale. Le rivage, au contraire, suppose une assez grande étendue; aussi a-t-il des bords :

Rivage malheureux! Fallait-il approcher de tes bords dangereux? RAC. C'est une partie de terre où on peut se promener (LABR.), faire voler un char (RAC.), bâtir une ville: « Salente florissait sur le rivage de la mer. FEN.

D'autre part, le sens étymologique de rive n'étant pas altéré comme celui de rivage, par une terminaison significative, et d'ailleurs la rive étant étroite de sa nature, une ligne mathématique, pour ainsi dire, ce mot s'applique plutôt aux rivières et aux ruisseaux, au lieu que rivage s'emploie de préférence en parlant de la mer. « Tous les rois des Amorrhéens qui habitaient la rive occidentale du Jourdain, et tous les rois cananéens qui possédaient les rivages de la grande mer (Méditerranée), ayant appris que le Seigneur avait séché le Jourdain, eurent le cœur dissous. » VOLT.

COQUILLE, COQUILLAGE. Enveloppe dure et calcaire des mollusques testacés, tels que les limaçons et les moules.

La coquille est simple; le coquillage, artistement travaillé, a une forme plus variée. Montaigne aime à voir Scipion « nonchalamment et pué rilement baguenaudant à amasser et choisir des coquilles. » « Ce que nous voyons de plus ingénieux parmi les animaux sont les réservoirs des fourmis, les coquillages des limaçons, etc. » Boss. Coquillage est un terme pittoresque.

chose de constitué, de reconnu, qui a une forme fixe; au lieu que le langage, comme la corporation, est quelque chose qui aspire à être ce qui est marqué par le radical, c'est-à-dire ici une sorte, une façon ou une manière de langue. « Je commence à m'apercevoir que le langage du pays (de Valence) est un langage mêlé d'espagnol et d'italien, deux langues que j'entends assez bien. » RACBANDE, BANDAGE. La bande et le bandage servent à envelopper certaines parties du corps et à les contenir dans un certain état.

La bande est simple, le bandage compliqué et fait avec art; en telle sorte que la bande entre dans la composition du bandage. Bande appartient à la langue commune; bandage est plutôt un terme de l'art chirurgical.

« Les Égyptiens enveloppent le corps (mort) avec des bandes faites de fin lin. » BUFF. << Bacchus avait une couronne d'or composée de pampres et ornée de certaines bandes blanches qui l'environnaient de tous côtés. » ROLL. « Des chaussures anciennes avaient une ou plusieurs semelles au-dessous du pied, et des bandes qui liaient le pied nu par-dessus. » ID. « A peine l'enfant Des coquilles se considèrent par rapport à leur est-il sorti du sein de la mère, qu'il est entouré nombre: elles se comptent. « Je crois voir un en- de linges et de bandages de toute espèce.» BUFF. fant sur le rivage, amassant des coquilles, jus- « A la Chine, quand une fille a passé l'âge de qu'à ce qu'accablé de leur multitude, il finisse trois ans, on lui casse le pied, et on l'enveloppe par tout jeter. » J. J. Des coquillages sont toutes de plusieurs bandages jusqu'à ce qu'il ait pris sortes de coquilles, des coquilles de toute gran- son pli. » ID. « Alexandre, ôtant le bandage et deur, de toute couleur et de toute forme. « Les l'appareil de sa plaie, fit voir sa jambe sans tésauvages se parent de plumes et de coquillages.»moigner la grandeur de son mal. » ROLL. J. J. Une couche de glaise parsemée de coquillages formait le lit des ruisseaux. » ID.

LANGUE, LANGAGE. Système de signes à l'aide desquels on exprime ses pensées et ses sentiments. Le langage est plus compréhensif que la langue: il y a le langage des yeux, celui des gestes ou le langage par signes; le langage se sert de tout pour exprimer les pensées. La langue est le langage oral, elle n'emploie que la parole. « Le langage, dit Condillac, d'accord avec Beauzée sur ce point, est l'art de communiquer ses pensées; le langage des sons articulés se nomme langue. » Le langage comprend, pour ainsi dire, toutes sortes de langues.

Toutefois, dans une acception dérivée, ce mot, à la différence de celui de langue, se prend pour une espèce ou manière de parler, de se servir de la langue votre langage me déplaît; voilà un singulier langage. « Les Bedas ne parlent pas la langue de Ceylan, et leur langage n'a aucun rapport avec toutes les langues des Indes. » BUFF. Ducerceau a mêlé à la langue épurée de son siècle le langage marotique, qui énerve la poésie par sa malheureuse facilité. » VOLT. C'est qu'alors, bien qu'à base purement nominale, langage se rapporte à celui qui parle, à l'ouvrier qui se sert de la langue et à la forme qu'il donne au discours. C'est une nuance que nous avons déjà trouvée aux mots herbage, laitage, pâturage et coquillage, quoique leur base ne soit pas non plus verbale, excepté celle de pâturage.

De cette seconde différence en découle une troisième comme le corps, la langue est quelque

TRICOT, TRICOTAGE. Sorte de tissu fait en mailles.

Tricot n'y ajoute aucune idée accessoire et ne fait considérer la chose que par rapport à ses qualités intrinsèques. Tricotage rappelle l'action de tricoter, l'habileté du tricoteur, et les qualités du tissu qui résultent de la main-d'œuvre. Un tricot est de laine ou de coton, et le tricotage en est lâche ou mal fait. En un mot, le tricot diffère du tricotage de même que le tissu de la tissure.

Pareillement, la grille, outre qu'elle est plus simple ou moins compliquée que le grillage, ne se.rapporte pas comme lui à l'art ou à l'industrie de l'ouvrier qui l'a faite, mais uniquement à sa destination.

Entre treille et treillage la différence est encore plus marquée : la treille est, dans un berceau de ceps de vignes, ce qui est donné ou fourni par la nature, et treillage désigne proprement la partie qui est due à l'art humain, à l'industrie du treillageur. « Les beaux treillages bien sculptés ! » J. J. « Des treillages façonnés en corbeilles et en berceaux. » MARM.

CAHOT, CAHOTAGE. Espèce de saut que fait une voiture en roulant sur un chemin pierreux ou mal uni.

Le cahotage est une suite ou une répétition de cahots; c'est un mouvement fréquent qui se fait par cahots ou qui est causé par les cahots. Le cahot produit une seule secousse, le cahotage en produit de continuelles : l'un fait verser, l'autre fatigue.

En outre, celui-là est pour l'idée, celui-ci pour le fait je n'aime pas le cahot des voitures;

le cahotage de cette voiture m'a brisé. C'est toujours la différence d'aboi à aboiement; d'acte à action, etc.

CAQUET, CAQUETAGE. Babil, grande abondance de paroles inutiles.

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des règlements prescrivent le débâclage à certaines époques, et l'on donne tant aux ouvriers pour cette opération. Le débâclage a tellement pour caractère l'activité, qu'il est toujours le fait volontaire de l'homme; au lieu que la débâcle est souvent involontaire, fatale, inattendue : telle est la débâcle d'une rivière couverte de glace. La différence revient donc à celle de treille et de treil

Dans débâcle le fait est présenté en lui-même : la débâcle permet de se mouvoir librement; dans Caquet est absolu, et caquetage relatif à l'ac-débâclage il est considéré par rapport à l'action : tion de caqueter. Dire qu'un homme n'a que du caquet, c'est le caractériser en lui-même; dire qu'il n'a que du caquetage, c'est faire songer au bruit qu'il fait en parlant, à l'effet qu'il produit sur les autres. On a le caquet bien affilé, on rabat le caquet de quelqu'un; et dans ces locutions caquetage serait impropre, parce qu'il n'exprime rien de constant, d'absolu, parce qu'il est pour le fait et non pour l'idée. - L'idée d'ad-lage. mettre un tiers dans les secrets caquetages de LABOUR, LABOURAGE. Tous deux donnent l'ideur femmes ne t'a pas révoltée. » J. J. « Y a- | dée du remuement de la terre fait pour la rendre t-il de la politesse à étourdir tout le monde d'un vain caquet? ID. « Lorsque les perroquets sont rassasiés, ils font un caquetage continuel et bruyant.» BUFF. « Linnæus compare le ramage du lagopède à un caquet babillard et à un rire moqueur. ID.

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fertile.

Mais le labour se considère absolument, en soi, par rapport à la terre seule et indépendamment de l'action effective de labourer. On donne à une terre un ou deux labours; un labour est léger, superficiel, profond. « La terre de Labrador est ainsi nommée, parce que le labour y est ingrat.» VOLT. « Souvent les grains de fer se montrent par le labour à quelques pouces de profondeur.» BUFF. « Est-il bien prouvé que vingt-cinq mille hommes vigoureux soient plus utiles avec deux sceaux qu'ils ne le seraient au labour? » BEAUM.

Labourage, au contraire, fait penser à l'action de labourer, à l'opération, à la peine, au salaire de l'ouvrier qui laboure, à la saison où on laboure; en un mot, à tout ce qui concerne l'art du labourage et sa pratique. L'art, le temps, les instru

Le baragouin est en quelque sorte une langue: on parle baragouin. Baragouinage en désigne l'ex-ments du labourage; s'occuper de labourage; surpression. Toute langue étrangère est un baragouin pour qui ne la connaît pas; notre propre langue peut devenir un baragouinage dans la bouche de celui qui, en parlant, confond ou embrouille les mots. Le baragouin, c'est le fond, c'est la chose; | le baragouinage, c'est le fait de sa manifestation: on ne comprend rien au baragouin d'un homme dont on écoute le baragouinage, ou dont le baragouinage étourdit, fatigue, impatiente.

PART, PARTAGE. Portion d'un tout qui échoit ¿quelqu'un.

Partage (partem agere) est le résultat de l'action de partager; il suppose une distribution: on a et on prend part, et non partage, à quelque chose: mais on a, on reçoit en partage, une chose tombe en partage. La part se considère par rapport à la chose, et partage par rapport à l'événement qui la fait échoir à tel ou tel.

veiller, payer le labourage de ses terres. « Le labourage mis en honneur a adouci les peuples farouches. FÉN. « La promenade se dirigea vers le coteau, d'où nous jouîmes du spectacle du labourage. » MARM. « Dans un dialogue qui a pour titre Hiéron, Xénophon montre quel avantage ce serait pour un Etat si le prince était attentif à récompenser ceux qui excelleraient dans le labourage et dans la culture des terres. » ROLL.

COEUR, COURAGE. Disposition de l'âme opposée à la crainte.

Le premier de ces mots sert à caractériser un sujet en soi, intrinsèquement, et le second à le faire connaître extérieurement, comme ouvrier, par ses actions.

C'est ainsi que Girard les distingue : « Le cœur, dit-il, bannit la crainte et la surmonte; il ne permet pas de reculer et tient ferme dans l'occasion: En parlant d'un objet qui me revient, je dirai | le courage est impatient d'attaquer; il ne s'emégalement voilà une belle part, et voilà un barrasse pas de la difficulté, et entreprend harbeau partage; la première expression sera rela-diment. Le cœur soutient dans l'action; le coutive à l'objet, et la seconde au sort, à l'accident rage fait avancer. >> qui me l'assigne exclusivement à tout autre. D'un tout on fait deux, trois, six parts, et chacune devient le partage de quelqu'un.

On a du cœur ou on en manque: on signale son courage, on combat avec courage. « Nos pères croyaient que celui qui ne se venge pas n'a point Part se rapporte davantage, non-seulement à de cœur; ils ne faisaient pas attention que c'était la chose, mais aussi au tout auquel tenait la faire un usage pernicieux du courage que de part, et partage se rapporte, non-seulement au l'employer à la destruction du genre humain. fait. mais encore à la personne qui reçoit la part VAUV. L'homme de cœur se conduit avec courage, distribuée : la témérité est le partage de la jeu-se distingue par des traits de courage.

Desse.

OEUVRE, OUVRAGE. Ce qui résulte d'un travail.

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françaises, et de là vient que les synonymes qu'elles servent à former expriment des actions communes, des opérations manuelles : ce sont des termes la plupart en usage dans les arts et métiers. Cependant ce dernier caractère convient plus particulièrement encore aux mots terminés en age, et c'est par là principalement qu'ils se distinguent de leurs synonymes.

OEuvre est abstrait et formel; ouvrage, con- | tat de cette action. L'une et l'autre sont toutes cret et matériel. OEuvre s'emploie surtout en morale, parce qu'on y considère le mérite intrinsèque des actes, eu égard à l'intention seulement et indépendamment des effets réels, des conséquences extérieures des actions. L'ouvrage est l'œuvre matérialisée ou la matière mise en œuvre; c'est quelque chose de réel, un produit, au lieu que l'ouvre est quelque chose d'idéal, une production. La création est l'œuvre de la Toute-Puissance: le monde sorti des mains du Créateur, dans six jours d'exécution, est son ouvrage. On donnera le nom d'œuvres de Dieu aux œuvres de la grâce, comme on dit, travailler à l'œuvre de son salut, faire de bonnes œuvres; les ouvrages de Dieu sont le monde et toutes les parties de la création. Voltaire dit, en parlant des miracles : « Les œuvres de Dieu ne doivent ressembler en rien aux œuvres des hommes.... Dieu, qui ne descend plus sur la terre, y descendait souvent, au temps des patriarches, pour voir lui-même ses ouvrages. » On se met à l'œuvre quand on se met à travailler; on se met à l'ouvrage quand on commence à donner, par son travail, des formes à la matière. Les sciences et la littérature sont les œuvres de l'esprit, et on appellera ouvrages de l'esprit les traités de logique, de mathématiques, les poëmes, les discours, etc., ou bien les livres qui les contiennent.

En un mot, œuvre signifie absolument, en soi, ce qui est fait; ouvrage donne l'idée de telle matière ayant reçu d'un ouvrier, dans l'espace, ou, tout au moins, dans le temps, telle forme ou telle façon. On dit bien d'une manière entièrement générale à l'œuvre on connaît l'ouvrier; mais si on spécifie, si on descend aux réalités, si on se représente quelque chose comme sorti des mains d'un ouvrier, comme subsistant, il faudra se servir du mot ouvrage.

On dit bien aussi, en parlant des productions de l'esprit, mais au pluriel et d'une manière tout idéale, tout abstraite, œuvres mêlées, œuvres complètes, œuvres posthumes, œuvres morales; mais, dès qu'on spécifie, l'esprit se représente une chose comme un résultat, comme le produit de l'action d'ouvrer, et alors il faut préférer le mot ouvrage. Il y a dans les OEuvres de Boileau un petit ouvrage bien précieux.

Vous trouverez quantité de locutions et de proverbes où entre le mot œuvre et où celui d'ouvrage ne conviendrait pas; c'est, encore une fois, que le premier est absolu, idéal, général, abstrait; tandis que le second, concret et particulier, ne se dit que d'un objet travaillé ou façonné, d'une certaine matière qui a reçu d'un ouvrier une certaine forme.

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Ainsi lavement et lavage signifient également l'action de laver; mais en ce sens lavement a plus de noblesse et ne s'emploie que dans des locutions qui appartiennent au langage de l'Eglise : le lavement des pieds, le lavement des autels. « Le lavement du baptême est la figure de la régéné[ration spirituelle. » P. R. - De même arrosement est plus noble qu'arrosage et se prend plus volontiers dans le sens figuré. « L'aridité dans les âmes regarde la privation de la grâce et de l'arrosement céleste, où l'âme tombe par son péché. » Boss. Blanchiment et blanchissage expriment tous deux l'action de blanchir et le résultat de cette action. Mais le premier se dit en parlant de choses moins communes et moins basses, et, par exemple, des pièces de toiles qui sortent des mains du tisserand, de la monnaie d'argent et de la cire: non pas que ces choses soient sales comme celles qu'on met au blanchissage; c'est une préparation qu'on leur fait subir pour qu'elles perdent une couleur qu'elles ne doivent point avoir. - Rapatriage est encore plus commun, plus familier que rapatriment. Sosie dit à Cléanthis dans l'Amphitryon de Molière :

Hé bien! tu vois, Cléanthis, ce ménage.
Veux-tu qu'à leur exemple ici
Nous fassions entre nous un peu de paix aussi,
Quelque petit rapatriage? MOL.

De même babillement appartient au langage de la médecine, au lieu que babillage est un mot familier et de la conversation.

Ensuite, le substantif en ment exprime plutôt encore une action qu'un résultat; pour le substantif en age, c'est le contraire. — Frottement et frottage rappellent l'idée exprimée par le verbe frotter. Mais, outre que frottage est seul un terme de métier et désigne seul ce que fait un frotteur, il exprime moins l'action elle-même que son résultat, c'est-à-dire, l'ouvrage du frotteur, ce pour quoi on le paye. C'est, au contraire, l'action que désigne frottement: on électrise un corps par le frottement. - Il en est de même des mots équarrissement et équarrissage, dont le premier appartient au langage commun et le second est un terme technique de charpenterie; l'un signifie plutôt l'action, l'autre le résultat une poutre qui a subi l'équarrissement a tant de pieds d'équarrissage.

Enfin, à la terminaison age s'attache toujours une idée d'ensemble, de totalité, d'action plus étendue. Ainsi l'arrosement se dit en parlant d'une seule plante ou d'une chambre; l'arrosage est l'arrosement en grand, ou l'action d'arroser des terres, des prairies entières au moyen d'eau qu'on fait venir d'une rivière ou d'un ruisseau. Une plante a besoin d'arrosement, et une prairie d'arrosage (ACAD.). On dit l'arrosement d'un oi

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