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comptent le premier janvier, nous comptons le onze.

Par le traité de Carlowitz, du 26 janvier 1699, la république de Pologne, l'empereur & les vénitiens avoient fait une paix avantageuse, & impofé des conditions dures à la Porte ottomane. Mais quoique le czar Pierre reftât maître d'Afoph, place importante qui pouvoit donner l'empire de la mer Noire, il n'avoit obtenu qu'une trève de deux ans, & il fe voyoit en danger d'avoir à foutenir feul toutes les forces du grand-feigneur. Il ouvrit donc une nouvelle négociation, & il obtint une trève de trente ans n'ayant alors plus rien à craindre de ce côté, il s'occupa

des projets qu'il formoit fur la mer Baltique.

Le commerce par mer avec la Ruffie ne fe faifoit que par Archangel. Il falloit tourner la Norwège, la Laponie, & entrer dans la mer Blanche qui étoit gelée la plus grande partie de l'année. Si, par conféquent, le czar vouloit s'ouvrir un commerce plus facile, il lui importoit d'avoir des ports fur la mer Baltique: or, il n'en pouvoit pas avoir, s'il ne conquéroit pas des provinces fur les fuédois. Il eft vrai que la conjoncture pa roiffoit favorable; car le jeune roi, qui étoit fur le trône de Suède, donnoit de lui des idées peu favorables. Pierre fit une ligue avec les

rois de Danemarck & de Pologne, & ces trois princes projetèrent d'enlever à la Suède toutes les provinces qu'elle poffédoit au-delà de fon continent.

Il femble

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que le czar voulant civilifer fes peuples, auroit dû se mêler moins dans les querelles de l'Europe. Il eft vrai que pour avoir un commerce plus libre avec l'étranger, il avoit befain d'acquérir des ports fur la mer. Baltique mais avant de penser à ce commerce, il falloit s'occuper des moyens de faire fleurir l'agriculture, & achever de policer fes peuples. Or, une trop grande communication avec l'Europe étoit moins propre à policer les ruffes, qu'à leur faire

prendre les vices des nations policées.

Il avoit encore mal pourvu à fa sûreté en abolisfant jufqu'au nom des ftrélitz. Il devoit prévoir que la nouvelle garde qu'il avoit créée, s'arrogeroit le même pouvoir, & en abuferoit également, & penfer qu'un prince n'eft jamais plus puiffant, que lorfqu'il n'a pas befoin de gardes pour être obéj. C'est done le defpotifme qu'il devoit abolir: il falloit apprendre aux ruffes à fe donner des loix. Le czar n'y a pas pensé.

Il auroit pu obferver dans l'hiftoire les avantages & les vices des différens gouvernemens, & s'eft ainsi qu'il pouvoit chercher à

s'inftruire. Les nations de l'Europe, mal gouvernées & corrompues, ne pouvoient que le jeter dans l'erreur. Leur politeffe & leurs arts n'étoient pas ce qu'il falloit aux ruffes. S'il y eût eu quelque part un pays bien gouverné, il eût été plus court de l'étudier. Le czar eût donc bien fait d'y aller, & les autres princes de l'Europe auroient dû y voyager à fon exemple.

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