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esitas publique et privée se fait entendre ens ♬ » funerailles de l'Eglise. » Ce fut là son termer acte politique.

Apres la mort de Henri VII, en 1313, Dante

le chercher l'asile offert par Guido Novello la Paenta dans la ville des anciens exarques, vene. Il y reste pen; c'est là qu'il reviendra Denz. De fâlá a 1315, nous le voyons retiré de aveau chez Uguccione, alors podestat de Lucwar, il y eerst så lettre aux cardinaux, que nous tes de citer. Il y termine la seconde cantica

e->pee, oo il consacre le nom de la Genta, cette belle Pargoletta, pour laquelle il adi vest la rigueur d'Uguccione envers les LucWe, et dont il se reproche devant Béatrice l'atjaarurni passager. A l'intercession de ses amis,

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arre chance de rentrer dans son pays lui ferte, par un religieux; mais des conditions Ties lut sont imposées: il doit fire

norable et présenter lui-même une ofc.paloire dans l'église de Saint-Jean, sesaa utume usitée autrefois pour les cri

ca encore sa noble réponse mérite Je Lafferte: « Est-ce là cette révocation

e qui rappelle Dante Alighieri dans sa papres un exil de près de trois lustres? i le prix des sueurs et de l'incessant Fesprit? Loin de l'homme initié à la me la bassesse étrange d'offrir en oblaie w perwane a la honte! Loin de l'homine # povriut la justice la pensée d'acheter le parargent, et de traiter comme des bienceux qui l'ont outrage! Non, mon père, je strai peint dans ma patrie par ce chemin. qu-ique autre trouvez un moyen qui pas une insuite à mon honneur, à ma - ter je l'accepte, et n'y marcherai point d'un a wad; mais si pour rentrer à Florence il same autre voie, jamais je ne rentrerai à - Qapi done! ne verrai-je point partout wes et les astres? Sous quels cieux ne pourare natempier la vérité? Faut-il pour cela zvisse et paraisse vêtu d'ignominie peuple et la ville de Florence! Non... » tenant du roi Robert, répond à at protestation par une quatrième senTaurine toutes les précédentes; il servait ée coup son maître, qu'un tercet du are da sermone (roi de sermon),

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en cette circonstance la courtoisie vantée en lui par Pétrarque. bord la chute d'Uguccione, renversé par le cam Castruccio Castracani, force Dante à se here are. Il retrouve en 1316 le podes•, proscrit comme lui, dans le pa*ta asement hospitalier du troisième

c. Grande, resté unique héritier de anna. I dede a son hôte Le Paradis, par

portant cette suscription caractérisas puissant et victorieux seigneur • Grand deila Scala, gouverneur, etc., *Man, Fiorentin de naissance, non de

mœurs, souhaite une vie longue et heureuse; etc. »> Ce jeune prince, qu'il désigne par le lévrier sauveur de l'Italic, nommé généralissime des forces gibelines en 1318, devenait le commun espoir et le bras droit de l'Empire, prêt à renaître avec Louis de Bavière. Mais le banni est froissé par des procédés blessants; il s'éloigne, et va plus loin chercher un pain moins amer. Les traditions nous le montrent encore dans la hante et moyenne Italie: chez les comtes Guidi, dont les châteaux l'abritèrent souvent; dans le Frioul, à Udine, chez le guelfe Pagano della Torre, patriarche d'Aquilée, où il séjourne quelques semaines; dans Agubbio, chez Bozon, dont il paye l'hospitalité par un sonnet amical et en instruisant son fils comme précepteur. Vers 1320, dans l'église de Sainte-Hélène, en passant par Vérone, il soutient une thèse sur les deux éléments, la terre et l'eau. Enfin, il retourne à Ravenne, chez Guido V da Polenta. Là il espère goûter quelque repos sous une protection généreuse. Il y appelle sa famille. Deux nouvelles places y sont vides: ses deux plus jeunes fils ont succombé dans la peste de 1308 (1). Les deux ainés, Pierre et Jacques, viennent l'y rejoindre, avec leur sour Béatrice, âgée de dix-huit à dix-neuf ans. Quelques amis l'entourent, quoique la tombe en ait enlevé grand nombre. Il y a ramené de Ferrare son fidèle Giotto, le plus cher d'entre eux depuis la mort de Cavalcante, et dont son hôte patronne les chefsd'œuvre; il essaye de fouder à Ravenne une école littéraire où il revive. Il correspond avec Jean de Virgile, poëte de Bologne, par des églogues latines, où il retrace ses espérances et ses malheurs sous des emblèmes pastoraux, comme le Virgile de Mantone. Il y achève sa Trilogie, et en retouche les trois cantiques, pour leur imprimer le sceau indestructible. La couronne triomphale dont il rêve la récompense dans son ingrate patrie, et dont Guido lui destine l'honneur dans Ravenne, n'attend plus que leur achèvement. Une dernière épreuve, un dernier ennemi devait l'y poursuivre. Il faut bien le nommer: c'est le saintoffice.

Certains ordres monastiques et tous les puissants que Dante avait attaqués se soulevaient contre sa gloire. Les haines religieuses se joignaient aux haines politiques. « Accusalus est hæreseos. » Il fut accusé d'hérésie, comme les anciens philosophes d'impiété; si l'accusation fut étouffée dans l'ombre, les documents ne laissent aucun doute à cet égard. On l'incriminait simultanément devant le pape et devant le tribunal sacré. C'est alors, comme en témoignent les vieilles éditions, qu'il composa le Credo de sa foi, avec les paraphases des Psaumes. Le père Venturi, jésuite, entre autres, dans la première édition de son Commentaire, mentionne deux manuscrits, dont l'un portait en tête : « Ici commence le traité de la foi catholique composé par l'illustre et

(1) Gemma, dont il n'est plus fait mention, doit les avoir suivis de près.

très-fameux docteur Dante Alighieri, en réponse à messire l'inquisiteur de Florence, sur ce que Dante croyait. » Le péril était imminent, car Cecco d'Ascoli, le professeur célèbre dont nous avons parlé, malgré l'appui du roi Robert, fut brûlé six années plus tard, comme hérétique et sorcier, devant tout le peuple assemblé. Heureusement cette nouvelle honte fut épargnée au quatorzième siècle. Après une courte absence pour une mission à Venise, dont Guido Novello le chargea, et au sujet de laquelle Doni fabriqua une lettre reconnue apocryphe, Dante revint malade à Ravenne, où il mourut au bout de quelques jours. Il désira être enseveli sous l'habit des franciscains. Par les soins de Guido, il fut inhumé dans leur église, dont l'auteur du Campo Santo, son ami, décorait les murs; et le laurier qui devait orner son triomphe fut déposé sur son tombeau de marbre. On y inscrivit l'épitaphe latine qui lui est attribuée et qui résume sa carrière :

« J'ai chanté les droits de la monarchie et les mondes supérieurs. J'ai chanté, en les parcourant, le Phiégéton et les lacs impurs, tant que les destins l'ont permis. Mais comme la partie de moi-même, passagère ici-bas, rentra dans de meilleurs domaines, et, plus heureuse, remonta vers son auteur parmi les astres, - je suis enfermé ici, moi Dante, exité du sein de la patrie, moi, qu'engendra Florence, mère sans amour.»

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L'inscription composée par Jean de Virgile, et gravée vis-à-vis, exprimait dans son premier vers une autre consécration unanime :

Theologus Dantes nullius dogmatis expers. Néanmoins, douze années après, le cardinal del Poggetto lança l'interdit contre le traité De la Monarchie, qui servait de charte au parti de Louis de Bavière, et voulut faire exhumer les ossements du banni, comme excommunié. La sagesse pontificale empêcha une telle profanation. Ils y reposent encore, et sa patrie, dont l'amour repentant les a réclamés en vain, lui a fait élever naguère un cenotaphe dans la cathédrale de SantaMaria del Fiore, où sont ensevelis ses grands concitoyens.

Une serie d'anecdotes et de traditions se forma, comme un romancero populaire, autour de la tombe du poete. Nous n'avons point a rapporter ces anecdotes, la plupart connues. Les faits reels dans sa vie comme dans ses poemes se confondent avec les légendes. Nous en dirons autant de ses amours, brodées par quelques biographes, sur les termes mystiques de ses rime. Boccace, qui avait conversé avec ses proches et sescompagnons d'exil, nous a transmis les seuls renseignements traditionnels que nous ayons sur sa personne. Il était de taille moyenne, légèrement courbé vers l'âge mûr. Il avait la démarche noble et grave, l'air bienveillant, le visage allongé, le nez aquilin, les yeux assez grands, la lèvre inferieure un peu saillante, le teint très-brun, la barbe et les cheveux noirs, épais et Crepus la physionomie mélancolique et pensive. Dans toutes ses relations, il se montrait courtois

et réservé; it ne parlait guère, à moins qu'on ne l'interrogeat, et pourtant sa parole prenait au

besoin une irrésistible éloquence. On cite divers traits de ses préoccupations extrêmes au milieu du monde. Mélange du gentilhomme et du bourgeois, il recherchait le drap fin dans ses vêtements; il mangeait et buvait peu, et à des heures réglées. Il aimait passionnément les beauxarts, et se lia plus ou moins avec les artistes renommés de son temps; doué lui-même d'une belle voix, il se plaisait à chanter dans ses heures paisibles ou joyeuses. Ces heures durent être rares. Outre les crises de son premier âge, dont parle La Vita nuova, il fut affecté, dans son exil, d'une maladie de la vue, occasionnée par les veilles. Les portraits que nous ont laissés les peintres ont tous un air de famille, et complètent la description précédente. On y retrouve ce front spacieux et ces sourcils puissamment arqués qui caractérisent le génie, sa face osseuse, assombrie par les passions et les chagrins. Son masque, moulé après sa mort par les soins de Guido, offre son image la plus fidèle. Toate sa vie y semble écrite.-Esprit souple et vaste comme les personnages éminents de l'antiquité et de la renaissance, il cultiva dans sa jeunesse la musique et le dessin avec la poésie. Ensuite il s'attacha aux sciences naturelles, métaphysiques et sociales, ses consolatrices. Philologue habile, comme le prouve son traité De la Langue Vulgaire, il savait à fond les dialectes italiens, provençaux, ainsi que notre langue d'oil. Un passage de son Banquet témoigne qu'il connaissait trop imparfaitement le grec pour lire Homère dans l'original; cependant son sonnet à Bozon, plusieurs mots grecs, he breux ou arabes, insérés ou analysés dans ses ouvrages, et certaines parties de ses connaissances révèlent qu'il se familiarisa plus ou moins avec cette langue comme avec celles d'Orient. 11 s'initia indubitablement à la cabale, sinon par l livre du Zohar, rédigé dans le treizième siècle, du moins par ses maîtres scolastiques et les doctemmême de l'Église, comme Albert le Grand, don il étudia les arcanes. Ses œuvres nous en fournis sent d'irrécusables preuves. Ce n'est pas san motif que Giotto l'a peint, dans la chapelle de Bargello, tenant à la main la grenade des inities

Ouvrages et doctrines de Dante. La biogra phie des hommes d'élite, souverains par le gén ou la puissance, ne consiste pas seulement dar leurs actes, mais dans les manifestations de le pensée, qui les perpétue et vit après leur mor L'enthousiasme qu'excita Dante se manifesta su tout du quatorzième au seizième siècle, par la fo dation des chaires établies dans les principal villes italiennes pour expliquer ses poemes, par les spectacles populaires où on represent sous maintes formes leurs scenes les plus éme vantes. Si son école éphémère dans l'épopée n' point d'éclat, en revanche il inspira la peintu depuis les Giotteschi jusqu'à Michel-Ange; lui doit un art nouveau, appelé l'art dantesy

Les ouvrages de Dante se divisent en deux p ties générales et homogènes, quoique très-c

** 56, 1a La Divina Commedia, son épopée célè

? lesœuvres diverses, lyriques, philosophites et politiques, restées enfouies chez les Italiens e titre d'Opere minori. Elles furent écrites ■ de circonstances agitées ou dans le ban11#gent, arrachées par miracle au pillage et à a. Pusieurs demeurèrent inachevées, et sentent certaines lacunes dans leur dévelopent, quelques incorrections ou variantes dans texte, dont la restitution exacte occupa les redditeurs et scoliastes. Si l'épopée qui riipsa les résume toutes sans contredit à un dere superieur, elles n'en forment pas moins les menes et les corollaires indispensables intelligence, comme pour les détails penis et le système de l'auteur; elles renferent en outre des aperçus d'une haute portée

une enveloppe scolastique et mystique. En brant l'ecorce, on y découvre ces richesses mo

y almirait le Tasse et que d'érudits instgateurs commencent à y apercevoir. Comme ats, sauf un opuscule et quelques fragments, wat encore inconnues de notre public, nous alin specifier, en les classant par ordre de dates, Ible qui les relie entre elles et avec l'œuvre pongale 1). Leur section comprend deux séries: is ouvrages italiens et les traités ou opuscules

na Les premiers sont ceux dont il destinait arture au vulgaire, les seconds ceux qui s'aAat specialement aux classes aristocrats; car tout est déterminé par des principes

fans ses compositions.

everages italiens. La Vie nouvelle (La Vita *, opuscule en prose, mêlé de vers, avec une que explicative, fut écrite par le poète à vingtas ans, muprimée en 1576, et contient, nous l'a

dit, la narration de son amour pour Béatrice. Ce war adolescent, dont les épisodes sont un wore, un regard, une parole, une salutation acarter on refusée, des entrevues muettes dans mple on dans des lieux indéfinis, des visions res dans des nombres astrologiques ou

, se rattache évidemment par des idées astes au symbolisme platonico-chrétien. annonce son intention de poétiser allént en langue vulgaire, comme l'ont fait enas rhapsodes, contrairement à l'usage des atus, et de transfigurer sa dame dans une pas grandiose. La Vita nuova, autoiame etrange, où l'étude psychologique du munt se révèle sous des fictions parfois semantis, n'a point d'antécédent direct, et, par in met cumme par sa nature, forme le proLa Divina Commedia. Praves Rime), comprenant les ballades, ammes wanets et sestines, ont été publiées en

Rime antiche, dans le recueil des . Eles se divisent en trois parties distinctes: adressées par Dante à sa dame, soit dans sa

de crt article a entrepris la première tratane des. Opere minori de Dante, en cours

|

Vitu nuova, soit postérieurement, et qui en complètent la narration; celles qu'il composa dans ses pérégrinations et qui sont adressées à ses idéalités ou aux objets de ses affections terrestres; celles adressées à ses amis, connus ou inconnus, et roulant sur des matières diverses, la plupart relatives aux circonstances politiques et sociales Si le voile énigmatique dont se servaient les fidèles d'amour les obscurcit trop souvent, quelques-unes rivalisent avec les plus belles de Pétrarque. M. de Vitte a récemment ajouté, par d'intelligentes recherches, plusieurs joyaux à leur trésor. Mais tout cela est enterré dans le pêle-mêle où les reproduisent jusqu'à nos jours toutes les éditions italiennes, les illégitimes avec les authentiques, les symboliques avec les littérales. Une classification normale, accompagnée des documents nécessaires, en les éclairant fera mieux apprécier leur valeur littéraire et biographique. Nous en avons donné la division préparatoire avec la traduction dans notre édition des Euvres complètes, 1852.

Le Banquet (Il Convito), traité philosophique sous forme de commentaire, dont on possède les quatre premiers livres, est malheureusement inachevé. Il parut pour la première fois à Florence, en 1490, avec le titre d'Amoroso Convivio. Entièrement distinct par le plan du célèbre Banquet de Platon, il s'en rapproche par le but d'enseignement exotérique et par d'autres analogies. Au point de vue personnel, c'était, nous l'avons dit, une réponse aux accusations dont l'auteur se trouvait l'objet. C'est aussi l'explication de ses poésies, dont il commente trois canzones, traitant d'amour et de vertu, sur quatorze qu'il devait analyser. Il y prend pour guide principal son père en infortune, Boèce, et convie tous les pauvres déshérités à son festin, c'est-àdire à la connaissance de la sagesse et de la vérité. Il y déclare que ces poésies ont un sens réel, un sens moral et un sens allégorique ou spirituel, et que la dame dont il s'éprit, après la mort de la Beatrice, dépeinte dans La Vita nuova, est la très-noble dame dont s'éprit Pythagore, la fille de l'empereur de l'univers, la philosophie, personnifiée dans ses nouvelles canzones. Au point de vue général, c'est en ébauche la véritable Somme scientifique de l'époque. Il y traite alternativement de l'ordre terrestre, de l'ordre civil et de l'ordre céleste; de la triple nature humaine (végétative, animale et sensitive, ou animée, sensible et rationnelle); des correspondances entre les cieux et les sciences (1), des vertus et des quatre âges de la vie. Il y affirme l'immortalité de l'âme, la vileté des richesses corruptrices, et l'égalité des hommes, dont les mérites et les aptitudes font la seule noblesse; car Dieu n'en a pas créé deux espèces, comme des chevaux et des ânes, et l'on peut seulement nommer ånes ou brutes ceux qui ne font pas usage de la raison. A quiconque

(1) Les dix Séphiroths du Zohar et les dix catégories d'Aristote,

soutiendrait des bestialités semblables, s'écriet-il, par un fameux argument métaphorique mal interprété, «< il ne faudrait pas répondre avec la parole, mais avec le couteau ». Ses chapitres sur l'éloquence de la langue nationale et sur l'action providentielle dans l'histoire romaine ont leurs compléments dans les traités De Monarchia et De Vulgari Eloquio. Le Banquet se distingue par ses belles démonstrations, qu'environnent des gloses trop prolixes, par une antique virilité de style et de pensée. On y sent revivre, comme un souffle inspirateur, tous les docteurs polythéistes, catholiques et musulmans, dont il cite sans cesse les noms et les maximes, avec ses maitres privilégiés: Hippocrate, Galien, Ptolémée, Caton, Ovide, Cicéron, Lucain, Sénèque, Juvénal, Stace, Tite-Live, Salomon, saint Augustin, Denis l'Areopagite, saint Benoît, Albert le Grand, saint Thomas, saint François d'Assise, Albumnanassar, Averroès, Alfergan, Avicenne, Algazel.

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II. Ouvrages latins. De la Monarchie universelle (De Monarchia mundi). Ce traité en trois livres sur l'ordre politique est le plus important des œuvres diverses. Son titre est emprunté d'une lettre de saint Irénée. D'abord anonyme et mis à l'index, il ne fut imprimé avec le nom de Dante qu'en 1559, à Bâle. Comme l'expose son début, il aborde une lice alors neuve, qui fut rarement parcourue depuis avec autant de largeur, et il a pour conclusion une fin pratique permanente pour les sociétés, une fin tout actuelle au milieu des événements que nous avons spécifiés. Dante y examine la mission de la monarchie dans les États et dans le monde et la forme politique la plus propre à leur développement régulier. Dans le premier livre, il établit par toutes les raisons morales et mathématiques, selon | Pythagore et selon Aristote, son principal guide, la nécessité de l'unité directrice ou d une monarchie universelle, pour prévenir les conflagrations. It definit, comme nous l'avons indiqué, la magistrature tutelaire, en harmonie avec les constitutions nationales et locales, légitimement appropriées à chaque peuple, à chaque cité. La paix annoncée par le Christ et ses apôtres, la paix universelle, dit-il magnifiquement, voilà donc la perfection, la dernière fin vers laquelle le genre humain sc dirige. On y marche par la justice, la liberté, la rectitude. Les gouvernements droits, c'est-à-dire legitimes, opposés aux gouvernements obliques, sont ceux qui dirigent par ces trois chemins les peuples vers leur but. - Le second livre, pour établir la légitimité de l'empire romain, recherche | et definit le droit dans ses trois bases indélébiles l'ordre divin, l'ordre social, l'ordre naturel. « Chercher la source du droit dans les opérations terrestres, c'est chercher si elles ont en lien par la volonté divine. Le droit dirige le bien commun, et qui dirige le bien commun marche vers le but du droit. La nature, dans son auvre ordonnatrice, règle aussi le droit et le meure à chaque être, selon ses ficultés et

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l'économie génerale. » Ces trois principes ont sanctionné l'impériat romain, élu de Dieu pour avoir triomphe tour à tour par la vertu, par la civilisation et par les armes. Le troisième livre traite la question, alors palpitante, de la suprématie terrestre entre le pape et l'empereur. Tous les arguments reproduits par la déclaration du clerge de France dans l'année 1682 s'y pressent en traits acérés. Le polémiste, avec le style enflammé d'Isaie, proclame incompatibles l'encensoir et le glaive. La direction suprême doit se partager en deux offices, pour éclairer le monde dans sa double voie : le spirituel et le temporel, selon notre double nature et notre double fin, la félicité ici-bas et là haut.

De la Langue Vulgaire, ou mieux, De l'Éloquence en langue vulgaire (De Vulgari Eloquio) (1), traité composé, comme les précédents, durant les pérégrinations de l'exil, et inachevé, comme Le Banquet. Les deux livres qui nous en restent furent publiés pour la première fois à Vicence, l'année 1529, en traduction italienne par le Trissin (anonyme), et dans le texte original, à Paris, l'année 1577, par Corbinelli, d'apres une copie manuscrite. C'est le rudiment de la grande œuvre linguistique et vulgarisatrice accomplie par le poete. En suivant la tradition biblique, dans une voie encore inexplorée, sans maitre, Dante remonte à l'origine du langage, dont le type parfait a été perdu avec l'Éden, et dont la division fatale, analogue à notre seconde dechéance, date de la tour de Babel ou confusion. Depuis lors il suit la dispersion des idiomes avec celle des races en Europe, où il retrouve, par des analogies constitutives, les trois familles sœurs, les langues d'oil, d'oc et de si, c'est-adire la française, la romane et l'italienne. Puis il cherche dans tous les dialectes de son pays la belle langue parfaite, la plus choisie et la plus commune à tous, pour remplacer l'ancienne langue latine; il en reconnait partout les éléments à des degrés divers, nulle part le foyer. Car depuis la dispersion de la cour sicilienne, l'Italie, qui avait son siége à la cour de Frédéric II, n'a plus de centre impérial; mais elle a une communauté, un centre universel, la raison; ta' sera son élément régénérateur. Ainsi tinit premier livre, complet dans son ensemble, ecrit avec une rare verve satirique et pittoresque. Le deuxième livre ébauche, dans son exorde, une poétique générale, dont les compléments se trouvent dans divers passages des ouvrages precités. Adoptant celle d'Horace pour toute la partie de goût, il s'élève à des vues plus hautes : « Pour être grand poëte, il faut trois choses: le don naturel du génie, l'acquisition de la science, la pratique de l'art. » La poësie est une fiction musicale, une appropriation du langage figure

(1) Cet ouvrage, bien que commence avant La Munar. chie, dut etre termine posterieurement. Les Italiens eu contestèrent d'abord l'authenticité, a cause de ses fiques acerbes contre leurs idiomes locaux.

cri

4. Mais ses allegories et ses fables mal un enseignement.Son domaine embrasse

choses: le courage ou l'amour de la conser- et de la justice, le culte du beau, et la rec**, de ou la sagesse. Les sots, eux seuls, versi> sans avoir le sens de leurs images, et les * fient à leur seul génie naturel. La suite eveme livre traite des règles spéciales à la pisque italienne. Il contient, comme le premier, sinements précieux, souvent les seuls, stes dialectes et les troubadours de l'époque,

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A Granicelli, leur père en rimes d'amour, keengo, Guittone d'Arezzo, notre Arn. Daniel 4* Are Bertrand de Born, c'est-à-dire sur l'école tene et l'ecole provençale. Les deux derniers maquent.

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Les pitres et Mélanges comprennent : alocutious politiques et les missives littéparvenues, en très-petit nombre, jusqu'à suments précieux, qui expliquent et cormentis autres ecrits: M. Ch. de Vitte en a pu«Patoue la meilleure édition, avec des éclairments. Dantis Epistola; 1827; 2o les

ques au poète bolonais, Jean de Viris these De Duobus Elementis, aquæ et tor, les paraphrases des Psaumes, du Credo, Potter et de l'Ave Maria. Elles se trouvent, que les Epitres, dans le recueil des Opere

on Fraticelli; Florence, 1810. Plu* nombreuses lettres que l'illustre publimote yinya durant ses ambassades et son exil, dat les bustonens citent des fragments, ont été sem næs, exmme quelques-unes de ses poésies. Pa les ouvrages restés inconnus ou inachevés,

attrige une Histoire des Guelfes et des Colefans re'eût été la véritable histoire de l'Itaature yen âge, et le meilleur commentaire de

24dravre de Dante, La Divina Com4. mrimé, pour la première fois en 1472, "eftion de Fuligno, parut sous le titre de media di Dante Alighieri di Fiorenza. Elle

u're consacré de Divina Commedia ,, dans la vingt-neuvième édition, puVenise et précédée du commentaire de * gos Landino. L'épithète de Divina est ici coal murre elle-même, comme un nom in

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Travre est en effet divine par la maesprit et par la forme : c'est la théodicée Pour l'analyser et la bien faire comdrait evoquer les meurs, les croyanpassions, qui l'ont produite, en un mot awra di fors tout entier. Sous le rapport

, teminents ecrivains l'ont vengée des · Voltaire et de l'oubli de Boileau. On a de ses origines dans les tra litions platoniin ta monde greco-romain et dans les vi1 tezes du catholicisme. Mais est-ce une dart, comme nous l'entendons d'a* ? Nous citerons à ce sujet le juge3. F'un des penseurs les mieux fatea aver le maître florentin : « La Divine

Comédie mérite d'être lue pour trois raisons : c'est l'histoire des temps barbares de l'Italie, la source des plus belles expressions du dialecte toscan, et le modèle de la poésie la plus sublime. A l'époque où les nations commencent à se civiliser, et toutefois conservent encore l'esprit de franchise qu'ont ordinairement les barbares, par défaut de réflexion (la réflexion appliquée au mal est la mère unique du mensonge); alors, dis-je, les poëtes ne chantent que des choses véritables; ainsi, dans la Science nouvelle, nous avons établi qu'Homère est le premier historien du paganisme. Ennius, qui a célébré les guerres Puniques, a été incontestablement le premier historien des Romains; de même notre Dante est le premier ou l'un des premiers historiens de l'italie. Dans La Divine Comédie, une seule chose est du poëte; c'est d'avoir placé les morts selon leur mérite daus l'enfer, dans le purgatoire, ou dans le paradis. Dante est l'Homère ou, si l'on veut, l'Ennius du christianisme. Ses allégories répondent aux réflexions morales que l'on peut faire en lisant un historien, pour profiter des exemples d'autrui. »>

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Le cadre de La Divine Comédie embrasse, par ses allusions et ses personnages, les principaux événements accomplis dans le cycle où Dante a vécu l'extinction de la maison de Souabe, les Vêpres siciliennes, les batailles et les crises de la république florentine, la révolution de la Flandre, l'affranchissement de la Suisse, l'abolition de l'ordre des Templiers, la guerre des hérés es albigeoises et fratricelles, la translation du siége papal à Avignon. Souverainement satirique et réformatrice, la grande trilogie fut en même temps une révolution dans la langue, dans la poésie et dans l'idée œuvre de colère et d'amour, de raison et de foi, de démolition et de reconstruction, tenant à l'Apocalypse et à l'Éthique, autant qu'à l'Enéide et à la Somme de saint Thomas, elle est toujours une dans sa multiplicité comme dans son action; car sous ses allégories, à travers ses mille épisodes, se développe la pensée mère, formellement indiquée par les écrivains encore plus rapprochés de sa source. C'est ce que nous avons cherché à signaler dans l'introduction à notre nouvelle édition française des trois poemes : « Il y a au fond, outre toute une histoire non moins érnouvante que celle des Grecs et des Troyens, toute une cosmologie de l'univers et un système organisateur des sociétés humaines. »> Son propre auteur déclare, dans sa lettre à Can le Grand et dans plusieurs passages explicites, son enseignement évangélique ou social et son caractère polisensamento ( à plusieurs sens). Il a pour aïeux saint Jean, les Pythagoriciens et les psalmistes, autant qu'Homère, les philosophes du Portique et les troubadours, et pour descendants, sous plusieurs rapports, malgré leurs divergences radicales, Montaigne, Rabelais, Campanella. Ce double caractère de synthèse et de prédication, qui reste à y étudier, constitue son cachet le plus distinctif et résume ses écrits antécédents.

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