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-De l'autre monde peut-être, répondit Grandpierre qui maintenant doutait de tout et croyait tout possible. Ça se peut bien, dit la vieille en le regardant avec terreur et en reculant.

- N'ayez pas peur. Je ne suis pas sûr de n'être pas un revenant, c'est vrai; mais je suis sûr que je ne veux pas vous faire de mal; au contraire. Mais, ditesmoi Reconnaîtriez-vous bien Grandpierre, si vous le voyiez?

-Je ne sais pas ; il y a si longtemps de tout cela! - Eh bien! regardez-moi bien.

-

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Resté seul, Grandpierre chercha à fixer ses idées, à recueillir ses souvenirs, à examiner sa personne si changée.

Il courut vers le ruisseau, y trempa sa main, répandit de l'eau sur sa figure, et cette fois il s'éveilla réellement.

Le premier sentiment qu'il éprouva fut une impression de bonheur, un soulagement immense, comme un homme à qui on aurait enlevé de dessus la poitrine un poids énorme et étouffant. Il respira longuement et avec une sorte de volupté.

« Ah! s'écria-t-il, grâce au ciel, tout ceci n'était donc qu'un rêve, tout excepté le remords qui me dévorait et qui me déchire encore.... O si ma mauvaise action pouvait aussi n'être qu'un rêve! »

Mais non; elle n'était que trop réelle. Il fut arrêté et jugé. Heureusement, la Linotte, qui n'avait été que blessée, guérit. Grandpierre privé de sa liberté pendant trois ans, privé aussi d'une partie de sa fortune qui fut donnée comme dédommagement à la Linotte, apprit par son châtiment qu'on ne se livre pas impunément aux accès de l'orgueil et de la fureur, de même qu'il avait dû comprendre par son rêve que la conscience est pour les coupables un bourreau qui peut les tuer en quelques jours, et que le remords nous fait, en une seule nuit, vieillir de cent ans.

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mettant pied à terre, et présentant ces deux épées au roi d'Écosse, qui était aussi descendu de cheval:

« Prenez-en une, lui dit-il, et voyons qui sera vainqueur, du petit homme dont vous vous êtes tant moqué, ou de vous. >>>

Kennett, fort étonné et ne se souciant nullement d'exposer ainsi sa vie, ne lui répondit que par de profondes révérences qu'il lui faisait en reculant.

« Quoi! vous refusez le combat? dit Edgar; votre bravoure ne fait donc du bruit qu'à table? »

Le roi d'Écosse bégaya quelques mauvaises excuses. « Avouez donc, reprit Edgar, que, tout petit que je suis, je ne suis pas indigne de régner; et sachez que c'est par le courage, et non par la taille, qu'il faut mesurer ce que valent les hommes. Ꮓ

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EUSTACHE LESUEUR'.

I

Eustache Lesueur naquit à Paris en 1617. Son père, Cathelin Lesueur, pauvre sculpteur en bois, avait quitté Montdidier, sa ville natale, pour venir habiter Paris,

Encore enfant, Eustache Lesueur couvrait de petites figures ses cahiers d'étude, laissait de tous côtés des traces de ses souvenirs ou de ses observations, et traçait d'une main encore inhabile d'ingénieuses compositions. Du reste, il manifestait moins de goût pour le ciseau du sculpteur que pour le crayon et le pinceau. Quelque regret qu'éprouvât Cathelin Lesueur à voir son fils abandonner la profession de statuaire, il n'hésita pas cependant à favoriser les heureuses dispositions du jeune peintre, et il l'envoya à l'école du célèbre professeur Vouet, où il fit en peu de temps de très-remarquables progrès.

Vouet ne tarda pas à s'apercevoir du mérite du jeune Lesueur et à le distinguer parmi ses nombreux élèves. Persuadé qu'il pourrait lui être d'un grand secours dans l'exécution de ses travaux, il se l'adjoignit pour la décoration des salles de l'hôtel Bullion. Lesueur le secondait avec zèle et talent, lorsqu'il reçut pour son propre compte la commande d'une suite de dessins destinés à servir de modèles aux tapisseries des Gobelins. Quelque regret qu'il eût de quitter son maître (qui ne lui en sut pas effectivement très-bon gré), il ne put cependant pas laisser échapper cette occasion de montrer sa valeur personnelle, et de poser pour ainsi dire la première pierre de sa renommée.

Les sujets qu'il avait à traiter étaient tirés d'un ̧man du quinzième siècle, intitulé: Le Songe de Polyphile. Ce roman, ouvrage d'un, religieux dominicain appelé François Colonna, avait été fort admiré de son temps.

Lesueur tira de ce livre bizarre des compositions qu'il sut rendre aimables et gracieuses, tout en conservant le caractère vague qui convenait aux rêves du moine visionnaire. Un des sujets de cette œuvre eut les honneurs de la gravure.

C'est en 1642 que Lesueur accomplit un des actes les plus importants de sa vie. Il se maria. Il unit son sort à la sœur d'un de ses camarades d'atelier, Geneviève Goussé, jeune fille pleine de piété et de solides vertus; d'une figure intéressante, mais d'une frêle santé. Elle ne

1. Le portrait de Lesueur, placé en tête de ce numéro et la vignette qui orne la dernière page sont empruntés à l'Histoire des peintres, l'une des plus belles publications de notre temps. Paris, librairie de Mme veuve Renouard, 4, rue de Tournon.

possédait rien, Lesueur non plus; les embarras du ménage se firent bientôt sentir.

II

Cette détresse du talent profita souvent à d'heureux acquéreurs. Lesueur enrichit de cette manière un grand nombre de maisons particulières, des palais, des oratoires. Il ornait des thèses de théologie ou de médecine, décorait les livres de beaux frontispices; il dessinait de petits médaillons pour des livres d'heures. On a de lui des vignettes, des encadrements, des gravures qu'il exécutait lui-même d'après ses tableaux et ses dessins.

Pendant quelques années, Lesueur effeuilla ainsi et sema de tous côtés les fleurs de son talent sans profit pour sa gloire et sans grands revenus pour sa bourse. Mais enfin une circonstance providentielle vint le débarrasser de ces commandes sans valeur qui s'abattaient comme des insectes sur son génie, et qui auraient pu en ronger la fleur et le germe en réduisant à néant tant de belles promesses.

Il fut chargé de peindre sur les murs du petit cloître de la Chartreuse de Paris la Vie de saint Bruno, fondateur de l'ordre.

Le père de Lesueur lui avait inspiré des sentiments chrétiens, et donné de saintes habitudes qu'il conserva jusqu'à sa mort. Cette douce piété, sœur et fidèle compagne de son beau génie, qui lui dut ses plus suaves inspirations, l'avait conduit souvent chez le prieur des Chartreux, avec lequel il était intimement lié. Sans doute Lesueur avait encore d'autres amis parmi les religieux, qui ne crurent pouvoir mieux faire que de confier à ce bon et pieux artiste le soin d'élever un nouveau monument à la gloire de leur fondateur. Lesueur, de son côté, accepta avec bonheur la mission d'exécuter une œuvre si bien en harmonie avec les plus vives sympathies de son cœur, et il élut en quelque sorte domicile dans le couvent. Chaque jour, à toute heure en commerce avec ses saints hôtes, il pénétra le sens profond de la vie religieuse, et l'on sait avec quel bonheur il sut l'exprimer. Les vingt-deux tableaux qui composent ce glorieux ensemble furent exécutés en trois ans. Que ses moines sont beaux! qu'ils sont vrais ! qu'ils sont touchants! Quelle onction! quelle bienséance dans les attitudes! charme mélancolique, style énergique et pur, belles lignes de composition: toutes ces qualités sont réunies dans cette œuvre, dont nous sommes fiers à si juste titre, et qui fonda la gloire immortelle de son auteur.

Le travail achevé, les moines ouvrirent leur cloître au public, qui put venir juger cette œuvre.

Elle excita un enthousiasme général qui fit bien des jaloux. Un d'eux s'introduisit une nuit dans le cloître, et, dans sa rage envieuse, macula un de ces tableaux.

Dès ce moment les religieux enfermèrent leur trésor sous des volets qui ne s'ouvrirent plus qu'avec précaution et pour des visiteurs recommandés.

En 1648 fut instituée l'Académie de peinture et de sculpture. Lebrun, quoique habitant Rome, avait été le principal promoteur de cette mesure. Lebrun et Lesueur furent l'un et l'autre nommés, et Lebrun s'empressa de quitter Rome, autant à cause du désir qu'il avait de siéger au milieu de ses nouveaux confrères, que par l'envie qu'il éprouvait de connaitre l'œuvre de Lesueur, dont la renommée était parvenue jusqu'à lui. Lebrun, à la vue de ce chef d'œuvre, sentit un redou

blement d'ardeur qui lui fit chercher l'occasion de faire à son tour une preuve publique de ses talents.

La confrérie des orfévres avait, depuis le milieu du quinzième siècle, la pieuse coutume d'offrir chaque année à Notre-Dame de Paris un mai verdoyant entouré de guirlandes et de rubans, au centre duquel étaient placés de petits tabernacles ornés de ciselures et de peintures, représentant des sujets tirés de l'Ancien et du Nouveau Testament. Depuis l'année 1630, on était convenu avec le chapitre métropolitain de convertir cette offrande en un grand tableau que l'on appelait le tableau du Mai. Lebrun parvint à se faire adjuger la commande du tableau du Mai: c'était le martyre de saint André. Il y déploya toutes les ressources de son talent, et produisit une belle œuvre sans doute, mais qui ne fit pas tout l'effet qu'il en attendait, et devint même pour son rival l'occasion d'un nouveau triomphe. En effet, l'année suivante, ce fut le tour de Lesueur d'être chargé du tableau du Mai. Le sujet était la prédication de saint Paul à Ephèse : c'est une admirable composition, bien supérieure à celle de Lebrun, et qui valut à Lesueur le surnom de Raphaël français.

III

Mais, hélas! nous sommes bien près d'assister aux dernières années de l'existence de Lesueur, à la phase suprême de son talent. Il a trente-trois ans à peine, et il touche à sa dernière heure; il est épuisé par le travail et ses forces l'abandonnent, les forces du corps seulement, car son génie n'a rien perdu de sa vigueur, et ses conceptions ont un caractère encore plus élevé et plus pur. A mesure que sa fin s'approche, il semble que, dans cette belle âme, la piété devienne plus profonde, et que le sentiment de la beauté la spiritualise encore. C'est à cette époque qu'il exécuta, pour l'abbaye de Marmoutiers, sa Messe de saint Martin. Il n'y a peut-être pas d'ouvrage de Lesueur qui communique aux spectateurs une émotion plus vive que cette belle et si simple composition. Au moment de l'élévation, un globe lumineux parait sur la tête du saint; il est impossible de peindre avec plus de vérité et de force l'effet produit sur ceux des assistants qui s'aperçoivent du prodige. Rien de plus ravissant que l'expression d'admiration mêlée de crainte de la jeune fille agenouillée sur les marches de l'autel.

C'est aussi pour les bénédictins de Marmoutiers que Lesueur exécuta un de ses plus beaux tableaux, l'Apparition de sainte Scolastique à saint Benoît. Le langage est impuissant à exprimer les merveilleuses confidences faites à l'âme par cette admirable toile. C'est toute une révélation du monde surnaturel et de ses existences glorieuses.

C'est un des tableaux les plus connus de Lesueur que cette Descente de croix dont chaque figure est une merveille de goût et d'expression! « Où trouver, dit M. Vitet, une émotion plus vraie, un désespoir plus touchant? Et cependant quelle douce pureté surtout dans ces figures de femme! Quel calme dans ces draperies! quelle simplicité de moyens pour un si grand effet! C'est la suavité d'un bas-relief antique vivifiée par le feu intérieur de la foi. »

D

C'est aussi à cette époque et presque au moment de mourir que Lesueur exécuta le Martyre de saint Gervais et saint Protais; et cependant tout y signale encore la puissance du génie et même la vigueur de la main; on

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(15 centimes dans les départements et dans les gares de chemins de fer.)

LA

SEMAINE DES ENFANTS

MAGASIN D'IMAGES ET DE LECTURES AMUSANTES ET INSTRUCTIVES.

PUBLICATION DE CH. LAHURE ET Cie, IMPRIMEURS A PARIS.

On s'abonne à Paris: au Bureau du Journal, rue de Fleurus, 9; à la librairie de MM. L. Hachette et Cie, boulevard Saint-Germain, 77, et chez tous les Libraires. Les abonnements se prennent du 1er de chaque mois. Paris, six mois, 6 fr.; un an, 11 fr. Départements, six mois, 3 fr.; un an, 15 fr. Les manuscrits déposés ne sont pas rendus.

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CONTES, HISTORIETTES, DRAMES: Le charmeur de serpe ts; Le château d'Alcubir. - VARIETES : Morale
de l'enfance (suite); Libéralité d'Alexandre; André Boulle, ébéniste de Louis XIV.

CONTES, HISTORIETTES, DRAMES.

LE CHARMEUR DE SERPENTS.

I. La forêt vierge

Je venais de terminer mes études à Paris avec un

succès qui avait rendu mes parents bien heureux; j'avais été reçu bachelier ès lettres et bachelier ès sciences avec des boules blanches; et comme je n'avais encore que dix-sept ans et que je n'étais pas fixé sur le choix d'une carrière, mes parents voulurent bien m'accorder

une faveur que je sollicitais avec instance celle d'aller passer six mois auprès de mon oncle qui s'était récemment établi dans le sud des États-Unis.

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Envoyez-moi Alfred pour quelques mois, disait-il dans ses lettres; je le sais amoureux de la belle nature et passionné pour l'histoire naturelle; je lui promets instruction, plaisir et bonne provision de santé. »

Je n'étais plus un enfant; et, d'ailleurs, les communications entre l'ancien et le nouveau monde sont devenues extrêmement commodes et faciles. Mes parents, qui habitent aux environs de Paris, me conduisirent au Havre, et là me laissèrent partir seul pour la Nouvelle-Orléans, où je trouvai mon oncle qui m'attendait, selon sa promesse. De là il me conduisit dans son habitation, à quelque distance de l'immense fleuve de Mississipi; il s'était établi, en qualité de médecin, dans une petite ville entourée de riches plantations; il y était très-aimé, très-estimé, et était en train d'amasser dans l'exercice de sa profession une belle for

tune.

Il y a de cela quatre ans : ce pays, aujourd'hui désolé par une guerre cruelle, jouissait alors de la plus profonde tranquillité.

Je n'ai pas intention de raconter ici mes impressions de voyages, ni les détails de mon séjour; je ne veux que raconter une aventure très - extraordinaire qui m'arriva.

Reçu à cause de mon oncle dans les habitations voisines, j'étais témoin de la manière dure et trop souvent cruelle dont on traitait les pauvres esclaves; mon cœur s'émouvait de pitié en leur faveur; quand je voyais qu'on allait les maltraiter je demandais leur grâce, et on me l'accordait presque toujours.

Dans une circonstance, cependant, j'eus bien de la peine à réussir; il s'agissait d'un noir nommé Gabriel, condamné à recevoir cent coups de fouet. Comme j'intercédais en sa faveur avec instance :

Mon jeune ami, me dit le maître de l'habitation, vous ne savez pas pour qui vous me priez. Ce Gabriel est indisciplinable..., et de plus, ajouta-t-il tout bas, on dit qu'il est sorcier. »

A ces mots, je souris.

« Vous savez bien, dis-je, qu'il n'y a pas de sorciers.

-Sans doute, répondit-il un peu confus. Mais d'où vient donc à cet homme le pouvoir extraordinaire qu'il exerce sur les serpents? Nous en avons ici de très-redoutables, entre autres le crotale ou serpent à sonnettes; vous savez que ce serpent est long d'environ deux mètres, que la violence du venin inoculé par sa morsure est telle qu'elle suffit pour faire mourir en peu d'heures, quelquefois en une heure, un taureau, un homme. Eh bien! Gabriel manie ces serpents comme il veut; ils n'osent le mordre; il les tue sans qu'ils osent se défendre.... Mais quoi qu'il en soit, ajouta-t-il en finissant, je saisis avec plaisir cette occasion de vous être agréable; je fais grâce à Gabriel. »

On délia Gabriel en passant près de nous il conserva son air farouche et ne regarda pas son maître, à qui il ne dit rien; mais il me dit à moi, d'une voix

émue :

Merci, monsieur Alfred. »

Trois semaines s'étaient écoulées, et j'avais à peu près oublié cet incident, lorsque je résolus un matin de faire une longue promenade dans une forêt voisine

de notre petite ville, et qui s'étendait jusqu'au Mississipi. La partie la plus voisine du fleuve était régulièrement inondée chaque printemps et devait par conséquent être couverte de plantes aquatiques; le reste de la forêt, sur un terrain plus élevé, devait offrir des végétaux d'une autre sorte. J'espérais donc que cette excursion serait riche pour moi en découvertes botaniques. Après avoir promis à mon oncle d'être de retour avant deux heures, c'était l'heure de son dîner, je me mis en route. La forêt était à une demi-lieue de la ville; avant d'y arriver, on traversait des champs nouvellement défrichés et admirablement cultivés.

J'avais emporté mon fusil; j'avais de la poudre, du plomb et quelques balles, étant bien décidé à en faire usage s'il s'offrait à moi quelque gibier qui en valût la peine.

Mais quand je fus entré dans la forêt (c'était ce qu'on appelle une forêt vierge), je ne songeai plus à chasser, je ne songeai même plus à herboriser, tant j'admirais ces lieux sauvages et pittoresques, tant j'étais frappé de leur calme imposant.

Bientôt je m'enfonçai dans les profondeurs de la forêt.

Je marchais au milieu des énormes troncs des cyprès, dont l'épais feuillage, qui se rejoignait au-dessus de ma tête, interceptait le soleil et la vue du ciel.

Cette solitude, ce silence, cette obscurité, favorisaient mes rêveries; j'errais sous ces voûtes ténébreuses abandonnant mon âme à de douces pensées; je songeais à mon cher pays, que je devais revoir bientôt, à mon père et à ma mère qui en ce moment parlaient peutêtre de moi, à mes camarades d'étude et aux diverses carrières qu'ils allaient embrasser. Et moi, quelle serait la mienne? Mon oncle me pressait de venir habiter auprès de lui. « Mais, non, lui avais-je répondu, quelque belle que soit cette contrée, la France est plus belle à mes yeux. Les carrières, il est vrai, y sont encombrées; mais tout jeune homme qui a une volonté persévérante et une bonne conduite est sûr d'arriver.

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Pendant que je me livrais à ces réflexions, je continuais d'errer sous ces magnifiques dômes de verdure et dans une demi-obscurité; combien de temps? je ne saurais le dire; car je n'avais pris garde ni à la distance, ni à la direction que je suivais.

II. Le serpent à sonnettes.

Je fus tiré de ma rêverie par une lumière plus brillante qui vint frapper mes regards, et un instant après je me vis hors de cet épais bocage. Mes pas, dirigés par le hasard, m'avaient conduit dans une jolie clairière que le soleil échauffait de ses rayons, et dont le terrain était tapissé d'une pelouse émaillée des fleurs les plus brillantes. C'était comme un jardin naturel. La forêt même qui encadrait ce beau parterre était une forêt d'arbres à fleurs. Il s'y trouvait des magnolias de plusieurs espèces; sur quelques-uns d'entre eux les grandes fleurs avaient fait place à des graines coniques d'un rouge éclatant, qui n'étaient guère moins re‹narquables que les fleurs, et qui remplissaient l'atmosphère de leur odeur un peu forte, mais agréable. D'autres beaux arbres croissaient à côté des magnolias, avec lesquels ils confondaient leurs parfums: le caroubier à miel, non moins intéressant avec ses jolies feuilles pointues et ses fruits allongés d'un pourpre brun; le lotus de Virginie, qui laisse échapper des

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