Le Vulgaire éblouï de leur faux agrément, La faveur du Public excitant leur audace, 110 Leur nombre impetueux inonda le Parnasse. Le Madrigal d'abord en fut enveloppé. Le Sonnet orgueilleux lui-mefme en fut frappé. 115 Un Heros fur la Sçene eut foin de s'en parer, Et fans Pointe un Amant n'ofa plus foûpirer. On vid tous les Bergers, dans leurs plaintes nouvelles, Fideles à la Pointe encor plus qu'à leurs Belles. Chaque mot eut toûjours deux vifages divers. 120 La profe la receut auffi-bien que les vers. REMARQUES. que le Bon Mot faffe fon impref VERS 113. La Tragédie, &c.] Jean Mairet naquit à Befan- putation, & fut pendant longtems fi fort gouté, que la Sophonisbe de Corneille ne le fit pas oublier. Mairet fe vante luimême dans une Epitre Dédicatoire, que, quoiqu'il n'eut encore que vingt-fix ans, il êtoit cependant le plus ancien des Auteurs de Théatre de fon tems. Ce Poëte avoit certainement un génie capable d'aller loin, s'il eut emploïé l'étude & les réflexions à le mûrir. Il y a des beautés dans tous fes Ouvrages; mais elles font offufquées par la multitude des défauts, & particulièrement par la négligence de fes Vers, & la dureté de fa diction. Il fut toujours fidèle à la pointe, & fa Sophonisbe n'en eft pas exempte, quoique d'ailleurs écrite aflés raifonnablement pour ce tems-là. L'Avocat au Palais en heriffa fon ftile, Par grace lui laiffa l'entrée en l'Epigramme: REMARQUES. VERS 122. Et le Docteur en shaire, &c.] Le petit P. André, Auguftin. DES P. Ce Prédicateur êtoit Parifien, & d'une Famille confidérable dans la Robe, dont le nom eft Foulenger. Il affaifonnoit fes Sermons de plaifanteries, pour foutenir l'attention de fes Auditeurs. On prétend qu'on en a pris occafion de lui attribuer beaucoup de traits qui ne font pas de lui. M. Mafcaron Evêque de Tulles, que l'on compte encore aujourd'hui parmi nos Orateurs facrés, femoit auffi tant de Pointes dans fes Difcours, que les rieurs les nommoient des Recueils d'Epigram fine ple par de méchantes Pointes, & par des Jeux de Mots qu'on a appellés Turlupinades. Ses imitateurs ont êté nommés Turlupins. Il êtoit le Plaifant de la Farce dans la Troupe des Comédiens de l'Hôtel de Bourgogne, du tems que Bellerose en êtoit le Chef. Pendant quelque tems on a vû regner en France le goût des Turlupinades & la Cour même fembloit être la fource de cette corruption; mais Molière vangea le bon Goût & la Raifon pas les fanglantes railleries qu'il fit des Turlupins & des Tur lupinades. Le Marquis de la Critique de l'Ecole des Femmes, elt un de ces Turlupins. Les peintures de Molière & les traits Satiriques de nôtre Auteur n'ont pas empêché que, ces dernières années,ce mauvais goût n'ait repris naiffance dans le même lieu. 135 Et d'un fens détourné n'abuse avec fuccez : Tout Poëme eft brillant de fa propre beauté. $40 Le Rondeau né Gaulois a la naïveté. La Ballade affervie à fes vieilles maximes, REMARQUES. VERS 140. & 141, Le Rondeau, &c. La Ballade, &c.] Comme Ronfard avoit donné le ton à fon fiècle, & qu'il avoit abandonné tous nos vieux genres de Poëfie, pour ne travailler que dans le -ta Mufe ne foit jamais enbefongnée M. Defpréaux n'a vraisemblable- monde aujourd'hui veut avoir de l'efprit, & de l'efprit, qui brille. Ce feroit quelque chofe de très fingulier, qu'une Ballade écrite du bon ton. VERS 143. Le Madrigal, &c.] Ce petit Poëme n'eft dans le fonds, qu'une efpèce d'Epigramme, qui doit finir par un trait un peu moins faillant, que ce qui porte parmi nous ce dernier nom. Ce qui s'appelle proprement Pointe en doit être banni. Nôtre Auteur trace ici le véritable cara tère du Madrigal. 11 eft confacré principa lement à l'Amour & à la Galanterie. Nous avons deux excellens modèles de ce genre de Poësie, Matthieu de Montreuil, 145 & non pas de médire, L'ardeur de fe montrer, REMARQUES. & La Sablière. Le premier plus en VERS 145. & 146. L'ardeur de Se montrer, &non pas de médire, Arma la Verité du vers de la Sa- دو دو trui, Pradon p. 91. ajoute une mau vaife Pointe à ce qui fait le fondement de la Cenfure, qu'on vient de lire." L'ardeur de fe ,, montrer, &c. pour dire, faire ,, parler de foi; voilà une ardeur de fe montrer, qui obfcurcit fa penfée,,. Ces deux beaux Efprits, font ici de mauvaise foi. Par quelle autre espèce de travers feroient-ils tomber fur la perfonne de M. Defpréaux, ce qu'il dit très clairement de la Vérité. Sa pentée eft aufli nette qu'elle eft jufte. C'eft tellement le propre de la Vérité, de vouloir fe montrer , que quoique nous foïons tous menteurs, nôtre premier mouvement, dans les occafions où nous recourons au menfonge, et toujours de dire vrai. Nous ne mentons que par réflexion, quelque rapidement que cela fe fafle. Eh! quel autre but, fuivant les Loix de la Morale la Vérité peut-elle avoir dans fon ardeur de fe montrer, fi non de réprimer les vices qui ne font au fonds, que menfonge; & d'exciter à la vertu, qui n'eft que la Vérité même réduite en pratique? C'est donc pour fon propre intérêt, que la Vérité brûle de fe montrer : c'eft pour la confervation de fes droits & non par la foif de médire, dont elle ne peut être tourmentée que la Vérité fe montre armée du vers de la Satire, VERS 147. Lucile le premier,&c.] Caius Lucilius Chevalier Ro. main, fut l'inventeur de la Sa, tire, en tant qu'elle eft un Poë me, dont la fin eft de reprendre les vices des hommes. Bien que les Grecs aient compofé des Vers & des Ouvrages Satiriques, c'est-à-dire, mordans, il eft Vengea l'humble Vertu, de la Richeffe altiere, 150 Et l'honnefte Homme à pié, du Faquin en litiere. REMARQUES. 55 De ces bois font fortis les Satyres rageux, Attaquoient tout le monde eftant dessus * l'Etage; * le Théa- Car fortant des forefts lafcivement bouquins tre. En la bouche ils n'avoient que des vers de faquins IMIT.Ibid.Lucile le premier,&c.] Horace, Liv. II. Sat. I. V. 62. Primus in hunc operis componere Carmina morem: Ces Vers fe trouvent imités par I. Vers 114. Secuit Lucilius Urbem. JUVENAL à la fin de fa I. Sat. dépeint ce Poëte comme un Cen |