Page images
PDF
EPUB

Il faut que chaque chofe y foit mife en fon lieu ;
Que le début, la fin, répondent au milieu ;
Que d'un art delicat les pieces afforties
180 N'y forment qu'un feul tout de diverfes parties :
Que jamais du fujet le difcours s'écartant,
N'aille chercher trop loin quelque mot éclatant.
Craignez-vous pour vos vers la cenfure publique
Soyez-vous à vous-mefme un severe Critique.
185 L'Ignorance toûjours eft prefte à s'admirer.
Faites-vous des Amis prompts à vous cenfurer.

REMARQUES.

IMIT. Vers 178. Que le dé- HORACE but, la fin, répondent au milieu.] 352.

Art Poëtique

,

Vers

Primo ne medium, medio ne difcrepet imum. IMIT. Vers 180. N'y forment HORACE au même endroit, qu'un feul tout de diverfes parties.] Vers 23.

Denique, fit quodvis fimplex dumtaxat, & unum.

LA FRESNAIE-VAUQUELIN n'a pas entendu ce Vers comme nous l'entendons ordinairement de la néceffité de faire enforte, que toutes les parties d'un Ouvrage fe répondent fi bien, qu'el. les ne forment qu'un feul tout

aflés fimple pour que l'ensem-
ble en foit apperçu d'un coup
d'œil. Il l'explique de la nécef-
fité de fe foutenir dans le ton
convenable à chaque nature
d'Ouvrage. Art Poetique, Livre
premier.

Si tu fais un Sonnet ou fi tu fais une Ode,
Il faut qu'un mefme fil au sujet s'accommode :
Et plein de jugement un tel ordre tenir,
Que hautain commençant haut tu puisses finir.

Pour dire en bref il faut qu'à toymesme semblable,
Ton vers foit tousjours mefme en foymefme agreable,
Si bien que ton Poëme egal & pareil foit.

Ce fens, quoiqu'abfolument il une fuite , que l'interpréta-
ne foit pas là bien rendu, tion ordinaire fait évanouir,
pourroit bien être celui d'Ho- C'eft ce qu'il eft aifé de véri-
race. Du moins met il dans l'en- fier.
droit dont eft tiré le Vers,
qu'on a rapporté plus haut,

IMIT. Vers 18. L'Ignorance toûjours eft prefle à s'admirer. 1

Qu'ils foient de vos écrits les confidéns finceres,
Et de tous vos défauts les zelez adverfaires.
Dépouillez devant eux l'arrogance d'Auteur
190 Mais fçachez de l'Ami difcerner le Flatteur.

REMARQUES.

HORACE a dit dans l'Epît. II. du II. Liv. Vers 106.
Ridentur mala qui componunt carmina: verùm
Gaudent fcribentes, & fe venerantur & ultro
Si taceas, laudant, quidquid fcripfere, beati,
At qui legitimum cupiet feciffe poëma,
Cum tabulis animum cenforis fumet honefti.

[ocr errors]

IMIT. Vers 190.- feachez font imités des principaux traits de l'Ami difcerner le Flatteur. ] Ce de cer endroit d'HORACE, Art Vers & les huit qui le fuivent, Poët. Vers 420.

Affentatores jubet ad lucrum ire Poeta,

Dives agris, dives pofitis in fœnore nummis, &c.

Nous fommes dans un tèms, où
ees deux Vers trouveroient aifé.

ment leur application. Horace continue, Vers 424. & 436. Mirabor, fi fciet inter

Nofcere mendacem verumque beatus amicum.
Tu feu donaris, feu quid donare velis cui
Nolito ad verfus tibi faltos ducere plenum
Latitia, clamabit enim: Pulchrè, benè, rectè :
Pallefcet fuper his etiam flillabit amicis
Ex oculis rorem : faliet, tundet pede terram.
Ut, qui conducti plorant in funere, dicunt,
Et faciunt propè plura dolentibus ex animo, fic
Derifor verò plus laudatore movetur, &c.
-fi carmina condes

Nunquam te fallant animi fub vulpe latentes.
Tout cet endroit eft paraphra-
fe par La Frefnaie-Vauquelin dans
fon Art Poetique, Livre III. Je

me contenterai de rapporter ce
qui répond aux derniers des Vers
Latins.

faifant des Vers tu te dois donner garde
D'un efprit qui fe mafque en fa façon mignarde,
De la peau d'un Renard: aujourd'huy rarement
On trouve des amis de libre jugement.
La réflexion qui termine ces
Vers, eft ajoutée à l'original, &
montre que M.Defpréauxn'eft pas
le premier en France, qui fe foit
plaint de l'extrême raretédes vrais

Critiques. Parmi ceux qui veut-
lent aujourd'hui pafler pour tels,
en eft-il un feul, qui donne lieu
de croire, qu'il est de libre juge-
ment?

Tel

[ocr errors]

Tel vous semble applaudir, qui vous raille & vous jouë.
Aimez qu'on vous confeille, & non pas qu'on vous louë.
Un Flatteur auffi-toft cherche à fe récrier.

Chaque Vers qu'il entend le fait extafier.

195 Tout eft charmant, divin, aucun mot ne le blesse.
Il trépigne de joye, il pleure de tendresse,
Il vous comble par tout d'éloges fastueux.
La verité n'a point cet air impetueux.

Un fage Ami toûjours rigoureux, inflexible,
200 Sur vos fautes jamais ne vous laiffe paisible.
Il ne pardonne point les endroits negligez.
Il renvoye en leur lieu les vers mal arrangez.
Il reprime des mots l'ambitieufe emphaze.
Ici le fens le choque, & plus loin c'est la phraze.
205 Vostre construction femble un peu s'obscurcir
Ce terme eft équivoque, il le faut éclaircir.
C'eft ainfi que vous parle un Ami veritable.

:

Mais fouvent fur fes vers un Auteur intraitable

A les proteger tous fe croit intereffé,

210 Et d'abord prend en main le droit de l'offenfé.

REMARQUES.

IMIT. Vers 199. Un sage Ami, &c.] HORACE, Art Poët. V、 49*
Vir bonus & prudéns versus reprehendet inertes:

Culpabit duros: incomptis allinet atrum
Tranfverfo calamo fignum: ambitiosa recidet
Ornamenta: parum claris lucem dare coget:
Arguet ambiguè dictum : mutanda notabit.

Le même Poëte dit, Epitre II. Livre II. Vers 111. & 121

Audebit, quacumque parum splendoris habebunt,

Et fine pondere erunt, & honore indigna ferentur,
Verba movere loco, quamvis invita recedant, &c.
Luxuriantia compefcet: nimis afpera fano
Lavabit culin: virtute carentia tollet.

Tome II.

C

De ce vers, direz-vous, l'expreffion eft baffe.
Ah! Monfieur, pour ce vers je vous demande grace,
Répondra-t-il d'abord. Ce mot me femble froid.
Je le retrancherois. C'eft le plus bel endroit.
215 Ce tour ne me plaift pas. Tout le monde l'admire.
Ainfi toûjours conftant à ne fe point dédire ;
Qu'un mot dans fon ouvrage ait paru vous bleffer;
C'eft un titre chez lui pour ne point l'effacer.
Cependant, à l'entendre, il cherit la Critique.
220 Vous avez fur fes vers un pouvoir defpotique.

Mais tout ce beau discours, dont il vient vous flatter
N'eft rien qu'un piege adroit pour vous les reciter.
Auffi-toft il vous quitte, & content de sa Muse,
S'en va chercher ailleurs quelque Fat qu'il abuse.
225 Car fouvent il en trouve. Ainfi qu'en fots Auteurs
Noftre fiecle eft fertile en fots Admirateurs.

Et fans ceux que fournit la Ville & la Province,
Il en eft chez le Duc, il en eft chez le Prince.
L'Ouvrage le plus plat a chez les Courtisans,
230 De tout temps rencontré de zelez Partisans ;
Et, pour finir enfin par un trait de Satire,
Un Sot trouve tousjours un plus Sot qui l'admire.

REMARQUES.

[merged small][ocr errors][merged small]

CHANT I I.

TELLE qu'une Bergere, au plus beau jour de feste, De fuperbes Rubis ne charge point sa teste,

Et fans méler à l'or l'éclat des Diamans,

Cueille en un champ voisin ses plus beaux ornemens. Telle, aimable en fon air, mais humble dans fon ftile Doit éclater fans pompe une élegante Idylle :

REMARQUES.

دو

[ocr errors]

tes de Comparaisons on fous entend toûjours eft, ou quel, qu'autre équivalent; enforte ,, que quand on dit. Telle

...

VERS 1. & 2. &c. & 6. Telle qu'une Bergere &c. De fuperbes Rubis ne charge point fa tefte, &c. Telle aimable en fon air, &c. Doit éclater fans pompe une élegante qu'une Bergere, c'eft comme fi Idylle, M. Du Monteil rapporte l'on difoit.... Telle qu'est une fur ces Vers la Critique qu'on en a Bergere Il s'enfuit que pour faite dans le Journal des Sçavans, rendre la phrafe correcte, il faut Février 1723. On leur reproche que le Subitantif foit fuivi d'un une faute confiderable de langage, relatif, Telle qu'eft une Bergère, en ce que la phrafe n'eft fuf- qui, &c. "Quel langage feroit ceptible d'aucune conftruction. celui-ci : Telle qu'eft une Ber"Pour mieux faire fentir la fau-,, gère, ne charge point fa tête de fu ,, te, dit-on, il n'y a qu'à fe perbes rubis Ou reflouvenir, que dans ces for- la phrafe entière, eft-ce une

[ocr errors]
[ocr errors]

pour avoir

« PreviousContinue »