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Quitté, pour le bouffon, l'agréable & le fin,
Et fans honte à Terence allié Tabarin.

Dans ce fac ridicule où Scapin s'envelope,
450 Je ne reconnois plus l'Autheur du Mifanthrope.

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330

REMARQUES.

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fur le Vers 399. cette obferva- trop ami du Peuple ait fait fou
tion. "Les Fourberies de Scapin vent grimacer fes figures; s'il a
font une Farce, & le Milan- eu tort de quitter quelquefois
,,thrope une Comédie. Dans la l'agréable & le fin pour le bouffon
Farce, MOLIERE s'eft prêté au & d'allier fans honte Tabarin à
,, mauvais goût de fon fiècle; Terence; comment peut-il être
dans la Comédie, il a fuivi fon vrai, que De tous les Au-
Cet Auteur n'a
,, propre goût
,,teurs modernes, Molière êtoit
pas voulu faire attention, que ,, celui que M. Defpréaux efti-
les Farces font de véritables Co- moit & admiroit le plus :
médies. Son obfervation d'ail- ,, qu'il le trouvoit plus parfait
leurs eft fauffe: Molière a fu,, en fon genre.
que Corneille
dans tous fes Ouvrages fe livrer & Racine dans le leur Dans
à fon propre goût, & fe prêter une ODE, fur les Progrès de la
en même tems au goût de fon Comédie fous le Regne de Louis
fiècle. C'eft ce que doit faire XIV. inférée dans le Mercure
tout Ecrivain > & principale de Septembre de cette année
ment tout Poete Comique. C'eft (1744) je trouve une Stance,
faute d'avoir fait cette réfle- la meilleure peut-être de tout
xion, que nôtre Auteur traite l'Ouvrage, par laquelle il me
ici Molière fi févèrement, qu'il paroît que l'Auteur refute d'une
eft aflés difficile d'accorder fa manière fenfée les reproches,que
cenfure avec ce que M. Broffette M. Defpréaux fait au plus par.
dit dans une Note fur le Vers fait de tous les Poëtes Comiques
394. S'il eft vrai que Molière, La voici.

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Qu'on eut acquis de gloire & ravi le Parterre
Si de traits enjoüés armant la verité,

Aux Dandins de la Grèce on avoit fait la guerre,
Et ri d'un Sot de qualité !

Quel Mime eut mieux atteint l'art fortuné de plaire,
Qu'un Malade expirant d'un mal imaginaire]
Aux jeux des Romains expofe?

Eh! Rome auroit peut-être applaudi sans scrupule
Au bizarre Scapin, dont le fac ridicule
Sur notre Scéne eft méprisé.

Ce fac eft toûjours eftimé de la
forte de Spectateurs, pour qui
Auteur l'a mis fur la Scène; & je
les en ai yus rire à gorge déploïée.

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Eft-il néceffaire, que je dife avec M. Broffette : Ce n'eft pas

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Scapin qui s'enveloppe dans un fac. C'eft le vieux Géronte à

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:

Le Comique, ennemi des foupirs & des pleurs,
N'admet point en fes vers de tragiques douleurs
Mais fon employ n'est pas d'aller dans une place,
De mots fales & bas charmer la populace.

Il faut que fes Acteurs badinent noblement :
Que fon nœud bien formé fe dénouë aisément :

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REMARQUES.

qui Scapin perfuade de s'y en,,veloper. Mais cela eft dit figurément dans le Vers 399. parce ,, que Scapin eft le Heros de la Pièce, Au fujet de Tabarin voiés Chant I. Vers 86.

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VERS 401. Le Comique, ennemi, &c.] Que penfer d'une Décifion auffi hafardée, que celle que ce Vers & le fuivant contiennent. S'imaginera-t-on que M. Despréaux n'ait pas connu toute l'étendue du domaine de la Comédie? S'imaginera-t'on encore que, fachant qu'elle eft & doit être la peinture de la vie morale des Hommes, il ait ignoré qu'elle a droit fur toutes

Plus enclins à blåmer rire tous feuls du trait d'efprit, qui leur a fait qualifier de Comique attendriffant, de Comique Larmoïant, de Tragique Bourgeois, les heureux Effais d'un nouveau genre de Comédie ; & fouhaitons qu'on puifle bientôt nous donner dans le même genre des chefs-d'œuvre, où nous n'aïons point à demander plus d'intelligence du Mécanisme Dramati que, plus d'exactitude de Langage, & plus de correction & d'égalité dans la Verfification. VERS 405. Il faut que fes Acters badinent noblement.] Ce Pré

>

les paffions humaines, fur tous les effets qu'elles produifent, & que, par une conféquence néceflaire elle peut & doit même, felon la nature des fujets qu'elle traite, admettre ce qu'il appelle ici de Tragiques douleurs, Qu'on parte de ce qu'eft la Comédie en elle-même, &, fans beaucoup de chemin, on aura bientôt trouvé dans les conféquences de ce principe, de quoi fe convaincre du faux de tous les raifonnemens, par lefquels on a prétendu nous forcer à révoquer des applaudiffemens légitimement donnés. Laiflons certains Auteurs, connus pour être que fçavans à bien faire,

que

cepte pêche par trop de généralité. Certains Perfonnages de la Comédie ne doivent badiner noblement. Mais un Homme de Collége, un Marchand, un Ar tifan, un Valet, une Soubrète, une Servante, un Païfan, doivent badiner chacun d'une manière conforme aux lumières au goût, aux mœurs de leur êtat. Et tout cela ne les conduira certainement pas à badiner noblement. On ne doit pas, dans la Comédie, être moins attentif à peindre le caractère propre à chaque êtat, à chaque profes

Que l'Action marchant où la raifon la guide,
Ne fe perde jamais dans une Scene vuide ;

Que fon ftile humble & doux fe releve à propos,
410 Que fes difcours par tout fertiles en bons mots,
Soient pleins de paffions finement maniées ;
Et les fcenes toûjours l'une à l'autre liées.

REMARQUES.

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fion, qu'à rendre celui de cha- tre Auteur a comprife implicite-
que âge. C'eft une Règle que nô- ment dans ces deux Vers:

Etudiez la Cour, & connoissez la ville:
L'une & l'autre est toujours en modeles fertiles ;

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mais elle demandoit qu'il en-
trât dans un certain détail. Il le
pouvoit aifément. Horace avoit
fraïé la route comme on le
peut voir ici dans les Remarques
fur le Vers 113. & fur le Vers
359. Il faut néceffairement
quoique M. Defpréaux dife en cet
endroit, admettre la diftinction
du haut & du bas Comique, & ce
dernier, règlé par le bon fens,
& renfermé dans les bornes de
la bienféance, ne déplaira ja-
mais aux honnêtes gens.

Telle aimable en fon air,

Dans l'un & l'autre endroit, il
traduit l'humilem flilum des La-
tins; mais en pareille matière,
bumble, ne fignifie pas la même
chofe qu'humilis. C'eft fimple,
qu'il faut ordinairement pour
rendre le mot Latin; & dans
certains cas, il faut fe fervir du
terme de bas, dont Desmarêts
femble avoir ignoré la véritable
fignification.

VIRS 411.

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-paffions finement

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n'est plus froid qu'un écrit Où l'efprit brille aux dépens de l'esprit?

Aux dépens du bon fens gardez de plaifanter.
Jamais de la Nature il ne faut s'écarter.
415 Contemplez de quel air un Pere dans Terence
Vient d'un fils amoureux gourmander l'imprudence:
De quel air cet Amant écoute fes leçons,

Et court chez fa Maiftreffe oublier ces chansons. Ce n'eft pas un portrait, une image semblable; 420 C'est un Amant, un Fils, un Pere veritable.

J'aime fur le Theatre un agreable Auteur, Qui, fans fe diffamer aux yeux du Spectateur, Plaist par la Raifon feule, & jamais ne la choque. Mais pour un faux Plaifant, à groffiere équivoque, 425 Qui pour me divertir, n'a que la saleté ;

Qu'il s'en aille, s'il veut, fur deux treteaux monté,

REMARQUES.

VERS 415.
-un Pere dans Te-
rence. ] Voyez Simon dans l'An-
drienne, & Demée dans les Adel-
phes. DES P.

VERS 424. Mais pour un faux
Plaisant à groffiere équivoque. ]
MONT-FLEURI le jeune, Auteur
de la Femme juge & partie, &
de quelques autres Comédies fem-
blables. Quand nôtre Auteur ré-
cita cet endroit à M. Colbert
ce Miniftre s'écria; Voilà Poif
fon, voilà Poiffon. Il ne pouvoit
fouffrir ce Comédien, depuis
qu'un jour, faifant le rôle d'un
Bourgeois, il avoit paru fur le
Theatre en pourpoint & en
manteau noir, avec un collet de
point, & un chapeau uni; en-
fin avec un habillement confor-
me en tout à celui de M. Col-
bert, qui par malheur, êtoit

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préfent, & qui crût que Poison vouloit le jouer quoique cela fût arrivé fans deffein. Poisson, qui s'en apperçut changea quelque chofe à fon habillement dans le refte de la Pièce; mais cela ne fatisfit point M. Colbert. BROSS.

Le Poiffon, que nous avons aujourd'hui au Théatre eft le petit-fils de celui dont il s'agit dans cette Remarque. En a-t-il hérité les talens, ou fommesnous plus difficiles que nos Pères?

VERS 426. fur deux treteaux monté. ] A la manière des Charlatans, qui jouoient leurs Farces à découvert & en plein air au milieu du Pont-neuf. Autrefois c'êtoit près de la Porte de Nefle, dans la Place où l'on

Amulant le Pont-neuf de fes fornettes fades,
Aux Laquais affemblez joüer fes Mascarades.

REMARQUES.

a bâti depuis le College Mazarin. M. Defpréaux difoit des mauvaises Pièces de Theatre qu'elles n'êtoient bonnes qu'à jouer en plein air. BROSS.

C'est dommage que dans les cing derniers Vers nôtre Auteur ne faffe que paraphraser la même pensée, qu'il a deja rimée vingt Vers plus haut.

Mais fon employ n'est pas d'aller dans une place,
De mots fales & bas charmer la populace

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