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affection, de sa familiarité, les beaux esprits qui se distinguèrent sous son empire.

Le second s'étoit acquis à très-juste titre celui de père et de restaurateur des belles-lettres. Quels modèles à imiter, auroit dit un grand prince! Quels modèles à surpasser, dit Louis le Grand!

En effet, Messieurs, il les surpassa. Je ne puis rien dire sur ce sujet, que l'univers ne doive attester. Louis ne se borna point à répandre ses graces sur les savans, sur les beaux esprits qui se rendirent célèbres dans la vaste étendue de son empire; ses bienfaits allèrent les chercher, les prévenir, les surprendre dans tous les états de l'Europe, au milieu même de ses ennemis. Et pour prouver d'une manière encore plus sensible qu'il regardoit les sciences et les belles-lettres comme un objet digne de toute son estime, il se mit à la tête de ceux qui les cultivoient avec le plus de succès et de gloire pour son état, il se déclara le protecteur de l'académie.

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C'est ici, Messieurs, que la voix et la force me manquent, pour célébrer dignement cette glorieuse époque; mais disons tout en peu de paroles. Louis, en vous élevant au comble de la gloire, ne travailla jamais mieux pour la sienne. Votre reconnoissance n'aura de bornes que celles des siècles: tant qu'ils dureront, cet asyle qu'il a consacré aux Muses et à leurs plus chers nourrissons dans son propre palais, retentira des éloges magnifiques de ce grand monarque. Vous vous en êtes imposé la loi. Quel gage plus infaillible pouviez-vous lui donner de l'immortalité ?

Mais voyez, Messieurs, de quels effets glorieux ce que Louis le Grand a daigné faire pour vous doit être suivi désormais. Tous les grands princes que le Ciel fera naître pour nous gouverner, tous les grands ministres qui seront les dispensateurs de leurs graces, se croiront engagés à vous protéger et à vous chérir. Après l'exemple de Louis, fiez-vous-en à l'émulation.

Noble émulation, dont il n'y a que les grands cœurs qui soient susceptibles, c'est à vous que nous sommes redevables de ce merveilleux assemblage de talens supérieurs, de qualités éminentes, de connoissances profondes et universelles, de royales vertus, que nous admirons de plus en plus dans le prince qui vient de donner à l'univers un spectacle étonnant, que l'histoire de notre monarchie ne fournit point, celui d'une régence heureuse et paisible, qui, par les ressorts secrets et imperceptibles d'une politique aussi nouvelle qu'admirable, a réuni tous les princes, tous les états, toutes les nations en faveur de la France; qui a étouffé les semences de haines, de jalousies et de division; qui, conciliant les intérêts les plus opposés, semble avoir fait, des principales puissances de l'Europe, une seule puissance, un seul état, un seul intérêt; enfin, qui a établi notre repos intérieur et notre union avec nos voisins, sur des fondemens qui paroissent si durables, que nous pouvons nous promettre des jours aussi tranquilles que ceux dont les poètes ont tissu le siècle d'or.

Eh! pourquoi ne nous flatterions-nous pas d'un bonheur si desirable ? Tout nous l'annonce. Philippe pré

pare à notre jeune monarque un règne si parfait, qu'il sera le modèle des règnes à venir.

Nous devons l'attendre, et nous l'attendons en effet, ce règne qui mettra le comble au bonheur de vos peuples, prince aimable, dont la seule présence enlève tous les cœurs, et dont la sagesse prématurée perce au travers des nobles amusemens de votre jeunesse. Déjà l'on voit reluire en vous les beaux effets de l'émulation que vous inspirent les actions immortelles de vos fameux prédécesseurs : les plus grands d'entr'eux vont revivre dans votre personne auguste. Mais, à quelque degré de gloire que vous conduise la juste ambition d'être encore plus grand qu'ils ne l'ont été, vous n'irez jamais plus loin que les vœux ardens que nous formons pour vous, les hautes espérances que vous nous faites concevoir.

et que

RÉPONSE

De M. DE FONTENELLE, Directeur de l'Académie, au Discours prononcé par M. DESTOUCHES, le jour de sa réception.

MONSIEUR,

ON sait assez que l'académie françoise n'affecte point de remplacer un orateur par un orateur, ni un poète par un poète; il lui suffit que des talens succèdent à des talens, et que le même fonds de mérite subsiste dans la compagnie, quoique formé de différens assemblages. Si cependant il se trouve quelquefois plus de conformité dans les successions, c'est un agrément de plus que nous recevons avec plaisir des mains de la fortune. Nous avons perdu M. Campistron, illustre dans le genre dramatique; nous retrouvons en vous un auteur revêtu du même éclat. Tous deux vous avez joui de ces succès si flatteurs du théâtre, où la louange ne passe point lentement de bouche en bouche, mais sort impétueusement de toutes les bouches à la fois, et où souvent même les transports de toute une grande assemblée prennent la place de la louange interdite à la vivacité de l'émotion.

Il est vrai que votre théâtre n'a pas été le même que celui de votre prédécesseur. Il s'étoit donné à la muse tragique; et, quoiqu'il ne soit venu qu'après des hommes qui avoient porté la tragédie au plus haut degré de perfection, et qui avoient été l'honneur de leur siècle à un point qu'ils devoient être aussi le désespoir éternel des siècles suivans, il a été souvent honoré d'un aussi grand nombre d'acclamations, et a recueilli autant de larmes. On voit assez d'ouvrages qui, ayant paru sur le théâtre avec quelqu'éclat, ne s'y maintiennent pas dans la suite des temps, et auxquels le public semble n'avoir fait d'abord un accueil favorable qu'à condition qu'il ne les reverroit plus; mais ceux de M. Campistron se conservent en possession de leurs premiers honneurs: son Alcibiade, son Andronic, son Tiridate, vivent toujours, et à chaque fois qu'ils paroissent, les applaudissemens se renouvellent, et ratifient ceux qu'on avoit donnés à leur naissance. Non, les campagnes où se moissonnent les lauriers, n'ont pas encore été entièrement dépouillées; non, tout ne nous a pas été enlevé par nos admirables ancêtres et à l'égard du théâtre en particulier, pourrions-nous le croire épuisé, dans le temps même où un ouvrage sorti de cette académie, brillant d'une nouvelle sorte de beauté, passe les bornes ordinaires des grands succès et de l'ambition des poètes?

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Pour vous, Monsieur, vous vous êtes renfermé dans le comique, aussi difficile à manier, et peut

Inès de Castro, par M. de la Motte.

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