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tage et le gouvernement a pris les mesures les plus propres à le leur conserver. L'armée est tenue sur un pied respectable: elle augmente ses rangs; elle est régulièrement soldée et habillée, et le gouvernement met toute sa sollicitude à sa conservation. Dans toutes les villes, les citoyens qui n'occupent point de fonctions civiles s'incorporent dans la garde nationale. Les arsenaux sont bien fournis de tous les objets de guerre, les villes s'agrandissent, les chemins sont réparés et entretenus; des ponts ont été élevés dans des lieux où ils étaient indispensables; les manufactures établies s'améliorent, et de jour en jour nous apercevons de nouveaux progrès dans toutes les branches de la prospérité nationale. Nos mœurs ont tellement changé pour le mieux, qu'il serait difficile de reconnaître le même peuple dans celui des premières années de l'indépendance et dans celui du temps présent. Il n'y a qu'une seule chose dans laquelle il ne change pas; c'est son caractère altier, belliqueux et persévérant dans ses plus nobles résolutions. Si des colons s'obstinent à nier ces faits, consultez les négocians français qui commercent avec Haïti, et leurs récits fourniront des données pour prédire qu'à une époque, très-rapprochée peut-être, Haïti jadis appêlée la reine des Antilles, deviendra, pour cet archipel régénéré, le centre de la civilisation, des lumières et de la liberté. »

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Voilà le peuple d'Haïti, qui a dit jamais les Français ne rentreront en maîtres à Haïti; mais qui éprouvant le besoin du commerce, nous a déclaré qu'il était prêt à adopter toutes les propositions qui pourront être réciproquement avantageuses aux deux gouvernemens.

Voilà le peuple d'Haïti chez lequel il n'est pas un seul cultivateur qui n'ait deux ou trois fusils et des munitions de réserve soigneusement cachés en cas d'invasion étrangère.

Voilà le peuple d'Haïti ; que le gouvernement songe qu'il a encore le choix de la guerre ou de la paix, que demain,

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peut-être, il n'en sera plus ainsi; que les avantages qu'on nous offre auront passé en d'autres mains, et qu'alors la France pourra demander compte du bien qu'on lui aura ravi, et il pensera peut être, qu'au lieu d'envoyer des commissaires à Haïti, chargés de promettre aux républicains des évêques avec la liberté, d'aller, leur rappeler les douceurs de cet ancien bon vieux temps, où, selon l'expression de l'au teur, que je viens de citer, l'on marquait, l'on, fouettait et l'on vendait les pauvres Africains et leurs descendans, on doit leur parler aujourd'hui comme à des peuples à jamais affranchis des liens de la servitude et de la dépendance de la métropole.

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ART. 1. IL ne peut exister d'esclaves sur le territoire de la république : l'esclavage'y est à jamais aboli.

2. Toute dette contractée pour acquisition d'hommes est éteinte pour toujours.

3. Le droit d'asile est sacré et inviolable dans la république, sauf les cas d'exception prévus par la loi.

4. Le gouvernement d'Haïti n'est point héréditaire; il est électif.

5. La république d'Haïti ne formera jamais aucune entreprise dans les vues de faire des conquêtes, ni de troubler la paix et le régime intérieur des états ou des îles étrangères.

6. Les droits de l'homme en société sont la liberté, l'égalité, la sûreté et la propriété.

7. La liberté consiste à pouvoir faire ce qui ne nuit pas aux droits d'autrui.

8. L'égalité consiste en ce que la loi est la même pour tous, soit qu'elle protége, soit qu'elle punisse; l'égalité n'admet aucune distinction de naissance, aucune hérédité de pouvoirs.

9. La sûreté résulte du concours de tous pour assurer les droits de chacun.

10. La propriété est le droit de jouir et de disposer de

ses revenus, de ses biens, du fruit de son travail et de son industrie.

11. La propriété est inviolable et sacrée ; toute personne, soit par elle-même, soit par ses représentans, a la libre disposition de ce qui est reconnu lui appartenir. Quiconque porte atteinte à ce droit se rend criminel envers la loi et envers la personne troublée dans sa propriété.

12.

La loi est la volonté générale exprimée par la majorité des citoyens ou de leurs représentans.

13. Ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché; nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas.

14. La ville du Port-au-Prince est déclarée capitale de la république et le siége du gouvernement.

15. Aucune loi civile ou criminelle ne peut avoir d'effet rétroactif.

16. La souveraineté réside essentiellement dans l'universalité des citoyens; nul individu, nulle réunion partielle de citoyens ne peut se l'attribuer.

17. Nul ne peut, sans une délégation légale, exercer aucune autorité ni remplir aucune fonction publique.

18. Les fonctions publiques ne peuvent devenir la propriété de ceux qui les exercent.

19. La garantie sociale ne peut exister, si la division des pouvoirs n'est pas établie, si leurs limites ne sont pas fixées, et si la responsabilité des fonctionnaires n'est pas

assurée.

20. Tous les devoirs de l'homme et du citoyen dérivent de ces deux principes, gravés par la nature dans tous les cœurs: Ne faites pas à autrui ce que vous ne voudriez pas qu'on vous fit. Faites constamment aux autres tout le bien que vous voudriez en recevoir.

21. Les obligations de chacun envers la société consistent à la défendre, à la servir, à vivre soumis aux lois, et à respecter ceux qui en sont les organes.

22. Nul n'est bon citoyen, s'il n'est bon fils, bon père, bon frère, bon ami, bon époux.

23. Nul n'est homme de bien, s'il n'est franchement et religieusement observateur des lois.

24. Celui qui viole ouvertement les lois, se déclare en état de guerre avec la société.

25. Celui qui, sans enfreindre ouvertement les lois, les

élude par ruse ou par adresse, blesse les intérêts de tous, et se rend indigne de leur bienveillance et de leur estime. 26. C'est sur le maintien des propriétés que reposent la culture des terres, toutes productions, tout moyen de travail et tout l'ordre social.

27. Tout citoyen doit ses services à la patrie et au maintien de la liberté, de l'égalité et de la propriété, toutes les fois que la loi l'appelle à les défendre.

28. La maison de chaque citoyen est un asyle inviolable. Pendant la nuit, nul n'a le droit d'y entrer que dans les cas d'incendie, d'inondation, ou de réclamation de l'intérieur de la maison. Pendant le jour, on peut y entrer pour un objet spécial, déterminé ou par une loi, ou par un ordre émané d'une autorité publique.

29. Aucune visite domiciliaire ne peut avoir lieu qu'en vertu d'une loi ou d'un ordre supérieur, et pour la personne ou l'objet expressément désigné dans l'acte qui ordonne la

visite.

30. Nul ne peut être poursuivi, arrêté ou détenu que dans les cas déterminés par la loi.

31. Nul ne peut être empêché de dire, écrire et publier sa pensée. Les écrits ne pourront être soumis à aucune censure avant leur publication. Nul n'est responsable de ce qu'il a publié, que dans les cas prévus par loi.

32. La responsabilité individuelle est formellement attachée à toutes les fonctions publiques.

33. La constitution garantit l'aliénation des domaines nationaux, ainsi que les concessions accordées par le gouvernement soit comme gratification nationale ou autre

ment.

34. Les fêtes nationales instituées par les lois de la république seront conservées, savoir: celle de l'indépendance d'Haïti, le premier janvier de chaque année; celle de l'agriculture, le premier de mai; celle de la naissance d'ALEXANDRE PETION, président d'Haïti, sera solennisée le deux d'avril, en reconnaissance de ses hautes vertus.

35. Il sera créé et organisé un établissement général de secours publics, pour élever les enfans abandonnés, soulager les pauvres infirmes, et fournir du travail aux pauvres valides qui n'auraient pu s'en procurer.

36. Il sera aussi créé et organisé une institution publique, commune à tous les citoyens, gratuite à l'égard des parties

TOME V.

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