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Cependant il advint qu'au sortir des forêts
Ce lion fut pris dans des rets,

Dont ses rugissements ne le purent défaire.
Le Lion et le Rat, F. II, 11.

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Un animal paît dans nos prés,

Beau, grand; j'en ai la vue encor toute ravie.
Est-il plus fort que nous ? dit le loup en riant :
Fais-moi son portrait, je te prie

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Le Renard, le Loup et le Cheval, F. XII, 17.

C'est du séjour des dieux que les abeilles viennent.
Les premières, dit-on, s'en allèrent loger
Au mont Hymette, et se gorger

Des trésors qu'en ce lieu les zéphirs entretiennent.

Le Cierge, F. IX, 12.

Je vois fuir aussitôt toute la nation

Des lapins, qui, sur la bruyère,
L'œil éveillé, l'oreille au guet,

S'égayaient et de thym parfumaient leur banquet.
Le bruit du coup fait que la bande

Les Lapins, F. X, 14.

Le quadrupède écume, et son œil étincelle ;
Il rugit; on se cache, on tremble à l'environ;

Le Lion et le Moucheron, F. II, 9.

Le chêne dit un jour au roseau :
Vous avez bien sujet d'accuser la nature :
Un roitelet pour vous est un pesant fardeau

Le Chêne et le Roseau, F. I, 22.

Nous avons cité, avec la plus grande abondance, mais sans épuiser le sujet, ces mille peintures dont parle M. Lafenestre. Toutes confirment son appréciation : « ses petits tableaux champêtres sont aussi justes par la couleur que par le dessin et le plus souvent ses paysages sont bien supérieurs à des tableaux car il en sort de toutes parts des murmures et des voix (1) ». e) La campagne qui inspire au poète de si charmants tableaux

(1) G. LAFENESTRE, La Fontaine, p. 168.

n'est pas le décor obligatoire de la fable et parfois nous voyons les animaux se détacher sur un fond que l'homme a créé :

L'araignée cependant se campe en un lambris

La Goutte et l'Araignée, F. III, 8.

Lève tes pieds en haut, et tes cornes aussi ;
Mets-les contre le mur : le long de ton échine
Je grimperai premièrement ;

Le Renard et le Bouc, F. III, 5.

Afin qu'il fut plus frais et de meilleur débit,
On lui lia les pieds, on vous le suspendit;

Puis cet homme et son fils le portent comme un lustre
Le Meunier, son Fils et l'Ane, F. III, 1.

Le galant fait le mort, et du haut d'un plancher
Se pend la tête en bas : la bête scélérate

A de certains cordons se tenait par la patte

Le Chat et un vieux Rat. F. III, 18.

Nous avons vu successivement l'homme et l'animal associés au décor.

f) Voici enfin, des exemples où d'un seul coup de pinceau il peint simultanément l'homme, l'animal et le paysage :

L'archer

Voit le long du sillon une perdrix marcher

Le Loup et le Chasseur, F. VIII, 27.

Un vieillard sur son âne aperçut, en passant,

Un pré plein d'herbe et fleurissant ;

Le Vieillard et l'Ane, F. VI, 8.

Vues par l'imagination, ces scènes de genre peuvent à l'occasion servir à illustrer une métaphore :

La Mort avait raison; je voudrais qu'à cet âge
On sortit de la vie ainsi que d'un banquet,
Remerciant son hôte, et qu'on fit son paquet;
Car de combien peut-on retarder le voyage?

F. BOILLOT

La Mort et le Mourant, F. VIII, 1.

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CHAPITRE V

Les Végétaux

Termes généraux.
Leur intérêt dramatique. Les fleurs, les fruits.

Termes dénotant l'espèce. Procédés de description. -—
Les métaphores.

Si nous examinons dans le même détail les sensations visuelles provoquées chez La Fontaine par le monde végétal nous verrons ici aussi sans surprise que leur étendue et leur précision se mesurent aux nécessités de l'intérêt dramatique. Tantôt elles ne sont même pas évoquées, le poète se bornant au minimum possible de représentation objective, employant simplement le terme générique :

Certain arbre

Les Lunettes, C. IV, 12.

Maître Corbeau, sur un arbre perché

Le Corbeau et le Renard, F. I, 2.

Ces arbres iront assez tôt border le noir rivage

Le Philosophe scythe, F. XII, 20.

Le troisième tomba d'un arbre

Que lui-même il voulut enter;

Et pleurés du vieillard, il grava sur leur marbre,
Le Vieillard et les trois jeunes Hommes, F. XI, 8.

Sur la branche d'un arbre était en sentinelle
Un vieux coq adroit et matois.

Le Coq et le Renard, F. II, 15.

Pour nous seuls il (l'arbre) ornait les jardins et les champs.

L'Homme et la Couleuvre, F. X, 1.

s'abstenant même de décrire quand l'intérêt pittoresque de l'affabulation n'y eût rien perdu :

Un seul arbre s'offrit, tel encor que l'orage
Maltraite le pigeon en dépit du feuillage.

Les deux Pigeons, F. IX, 2.

Ces cas sont les plus rares, généralement il nomme l'essence, donnant tout au moins la notion de l'espèce :

Toinette par hasard dormait sur la coudrette

Les Troqueurs, C. IV, 3.

La beauté et le nombre des orangers et des autres plantes qu'on y conserve ne se sauraient exprimer.

Psyché, I.

L'ormeau.

Captivité de Saint-Malc.

Nous sommes attroupés trétous dessous l'ormeau

Je vous prends sans verd.

Il est écrit là-haut qu'au faîte de ce pin,

Ou dans quelque forêt profonde?

Les deux Perroquets, le Roi et son Fils, F. X, 11.

Il se sauve aussitôt et choisit pour asile

Le haut d'un pin.

Ibidem.

Il laisserait debout maint chêne et maint sapin
Dont chacun réputait la vieillesse et les charmes.

La Forêt et le Bûcheron, F. XII, 16.

ceci même quand notre maître des eaux et forêts prend le Pirée pour un homme :

Marmenteau (Bois de)

Epigr. contre Furetière.

La sensation visuelle s'aiguisant nous renseignera sur l'individu qu'un qualificatif ou deux viennent distinguer de ses

semblables. Généralement c'est l'âge vénérable des arbres qui retient l'attention de La Fontaine plutôt que leur beauté :

Arbres qui ont résisté aux attaques de cent hivers.

Ce mont revêtu de chênes aussi vieux que lui,
Et tout plein de rocs,

Psyché, II.

Présentait aux yeux quelque chose d'effroyable,
Mais de charmant.

On abattit un pin pour son antiquité,

Vieux palais d'un hibou, triste et sombre retraite
La Souris et le Chat-Huant, F. XI, 9.

Tronc caverneux.

Ibidem.

Hantaient le tronc pourri d'un pin vieux et sauvage

Le Chat et le Rat, F. VIII, 22.

L'aigle avait ses petits en haut d'un arbre vieux

L'Aigle, la Laie et la Chatte, F. III, 6.

Il fait aussi, il va de soi, allusion à leur fraîcheur et à leur beauté, mais plus rarement :

Quels amas d'arbres toujours verts

Psyché, I.

La beauté et le nombre des orangers et des autres plantes qu'on y conserve ne se sauraient exprimer.

Deux châtaigniers dont l'ombrage

Est majestueux et frais

Se couvrent de leur feuillage

Ainsi qu'un riche dais.

Psyché, I.

Point d'amples descriptions: il saisit d'emblée et magistralement le trait caractéristique, la note et ne pousse pas plus

avant :

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