Sans maîtresse et sans envie, Buvant de l'eau pour soutien, Ainsi je mêne la vie D'un joyeux Épicurien.
Ainsi doit être Un petit-Maître : Léger, amusant,
Et sur le ton plaisant ; Railleur aimable, De tout capable. C'est l'homme du jour, Fait pour l'Amour. De la femme qu'il aura Bientôt il se lassera,
On s'attend bien à cela ; Mais chacun a de son côté Même liberté,
Et rien ne sera gâté.
À peine on se voit,
Sous le même toit ;
Chacun, comme étranger,
Pour vivre à sa guise,
Et s'arranger,
Sans qu'on s'en formalise.
Ainsi doit être
Un petit-Maître : Libre en ses desirs, De plaisirs en plaisirs Sans cesse il vole, Toujours frivole;
C'est l'homme du jour,
Fait pour l'Amour.
L'esprit dégagé
De tout préjugé,
Un goût de caprice
Le prendra pour quelque Actrice;
Il la meublera,
Et l'étalera;
Et dans la coulisse,
D'un souper lui parlera. . . . "Viens, c'est à l'écart, Sur le Rempart...." Sa Désobligeante Y conduit l'Infante, Là, parlant d'abord, Soupant après, On donne essor Aux malins traits: L'absent a tort,
Et les bons mots
Sont les plus sots propos. On parle Vers,
Concerts,
Bijoux,
Ragoûts,
Chevaux,
Pagodes,
Modes;
On médit,
On s'attendrit,
On rit ; Grand bruit
Au fruit:
Ensuite, au Bal, on acheve la nuit, Le matin, mis comme un Valet, Pâle et défait,
Monsieur, dans un Cabriolet,
Part comme un trait,
Et pousse deux
Chevaux fougueux,
Qui secouant leurs crins poudreux, Renversent ceux
Qui sont près d'eux ; Et s'échappant, En galoppant,
Dans ce fracas,
Doublent le pas.
Notre moderne Phaëton,
Prenant un ton,
Va chez plusieurs femmes de nom, Leur fait la cour, pour les trahir ; Les aime, comme on doit haïr; Ensuite il envoye un Coureur Chez le Maignan, chez Lempereur, Demander des assortiments, Des rivières de diamants, Pour sa Déesse d'Opéra,
Qui bientôt s'en rira.
Ainsi doit être, etc.
Oh! le bon siècle, mes frères, Que le siècle où nous vivons! On ne craint plus les carrières Pour quelques opinions;
Plus libre que Philoxène, Je déchire le rideau :
Coulez, mes vers, de ma veine; Peuples, voici du nouveau.
La chandelle nous éclaire, Le grand froid nous engourdit, L'eau fraîche nous désaltère, On dort bien dans un bon lit. On fait vendange en Septembre, En Juin viennent les chaleurs, Et quand je suis dans ma chambre, Je ne suis jamais ailleurs.
Rien n'est plus froid que la glace; Pour saler il faut du sel.
Tout fuit, tout s'use et tout passe ; Dieu lui seul est éternel. Le Danube n'est pas l'Oise, Le soir n'est pas le matin, Et le chemin de Pontoise N'est pas celui de Pantin.
Le plus sot n'est qu'une bête ; Le plus sage est le moins fou, Les pieds sont loin de la tête, La tête est bien près du cou. Quand on boit trop on s'enivre ; La sauce fait le poisson; Un pain d'une demi livre Pèse plus d'un quarteron.
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