Page images
PDF
EPUB

Je poursuis encor mon chemin,
Et je m'imagine qu'enfin
La scène changera peut-être.
Point. J'aperçois un capucin :
Le capucin riait d'un carme;
Le carme d'un abbé poupin ;
Cet abbé poupin d'un gendarme,
Ce gendarme...

... riait à l'approche

D'un fat en habit de satin,
Lequel était, pour le certain,
Un magistrat de la basoche;
Et celui-ci, d'un air malin,
Envisageait un bon humain
Qui, je pense, arrivait du coche,
Vrai gentilhomme Limousin
Tenant son mouchoir d'une main,
Et de l'autre serrant sa poche.
Du monde entier voilà le train ;
Chacun y rit de son voisin,
Le preuve en est assez complète.
Las d'observer, j'allai m'asseoir,
Et je demandai la gazette ;
Un petit homme, en habit noir,
Vint me dire: "Monsieur, bonsoir,

J'ai bien ri de votre lorgnette."

Pons (de Verdun).

18

XLIV

CONTRE MARTIN

"Les gens d'esprit ! ah! ne m'en parlez pas,” Disait Martin, d'un ton de suffisance;

Ils ont, eux seuls, perdu la France.... -“Que ne la sauviez-vous?" lui répondit Thomas.

Albéric Deville.

18

XLV

SUR UN PARASITE

-Depuis sa fâcheuse aventure,
Voyez-vous encor monseigneur ?
- Si je le vois! connaissez mieux mon cœur ;
Vous me faites vraiment injure ;

Si je le vois! Trêve à de tels discours!
Je n'abandonne pas mes amis dans la peine :
Je ne dînais chez lui qu'une fois par semaine,
J'y dîne à présent tous les jours.

Id.

XLVI

PREDICATEUR COURTISAN

Certain prédicateur prêchait devant le roi : 66 Sire, dit-il, une commune loi

[ocr errors]

Nous condamne à mourir tous, tous... Mais il

remarque

Un mouvement d'effroi dans les yeux du monarque, Et reprend aussitôt, d'un ton de voix plus doux : Sire, je vous le dis, nous mourrons presque

66

tous ! "

Madame E. P.

XLVII

CONTRE UN ANCIEN SÉNATEUR

Quand vous voulez singer les héros de l'histoire,
Ayez au moins bonne mémoire ;
N'imitez pas ce sénateur

Qui, fier de conserver ses emplois, sa richesse,
Et de François premier imitant la grandeur,
Mandait à sa moitié: "Dieu soit loué, comtesse,
Nous ne perdons rien, fors l'honneur!”
Fabien Pillet. 18-

XLVIII

LE ROI D'YVETOT

Il était un roi d'Yvetot

Peu connu dans l'histoire,
Se levant tard, se couchant tôt,
Dormant fort bien sans gloire,
Et couronné par Jeanneton
D'un simple bonnet de coton,
Dit-on.

Oh oh oh! oh! ah! ah! ah ah !
Quel bon petit roi c'était là !

La, la.

Il faisait ses quatre repas
Dans son palais de chaume,

Et sur un âne, pas à pas,
Parcourait son royaume.
Joyeux, simple et croyant le bien,
Pour toute garde il n'avait rien

Qu'un chien.

Oh! oh! oh! oh! ah! ah! ah! ah! Quel bon petit roi c'était là !

La, la.

Il n'avait de goût onéreux

Qu'une soif un peu vive;

Mais, en rendant son peuple heureux,

Il faut bien qu'un roi vive.

Lui-même, à table et sans suppôt,
Sur chaque muid levait un pot
D'impôt.

Oh oh oh! oh! ah! ah! ah! ah!
Quel bon petit roi c'était là!
La, la.

Il n'agrandit point ses États,
Fut un voisin commode,
Et, modèle des potentats,
Prit le plaisir pour code.
Ce n'est que lorsqu'il expira
Que le peuple, qui l'enterra,
Pleura.

Oh! oh! oh! oh! ah! ah! ah! ah!
Quel bon petit roi c'était là !

La, la.

On conserve encor le portrait
De ce digne et bon prince;
C'est l'enseigne d'un cabaret
Fameux dans la province.
Les jours de fête, bien souvent,
La foule s'écrie en buvant

Devant :

Oh! oh! oh! oh! ah! ah! ah! ah!

Quel bon petit roi c'était là !

La, la.

Béranger. 18

« PreviousContinue »