Page images
PDF
EPUB

Voyez chez l'aveugle déesse
L'heureux Gercourt gagner au jeu ;
Courir de même à la richesse,
Voilà, je gage, votre vœu :

Vous ne sauriez voir sans envie
Devant lui ce monceau d'écus. . . .
Regardez-les bien, je vous prie ;
Bientôt vous ne les verrez plus!

Au milieu d'une cour nombreuse
Remarquez l'opulent Mondor:
Il sait qu'une faillite... heureuse
Peut le rendre plus riche encor :
De ses créanciers en furie
Qu'importent les cris superflus?
Regardez-le bien, je vous prie ;
Bientôt vous ne le verrez plus.

Suivez Damis, qu'aucun obstacle
En route ne peut arrêter ;
Courez, courez voir au spectacle
Le drame qu'il vient d'enfanter;
Vous le trouverez, je parie,

Charmant, divin... Mais au surplus
Regardez-le bien, je vous prie ;
Bientôt vous ne le verrez plus.

Le monde est un plus grand théâtre, Où l'on voit de plus grands acteurs Étonner la foule idolâtre

Par cent prestiges séducteurs:

À la fin de la comédie,

Tous les rangs seront confondus :
Regardez-les bien, je vous prie;
Bientôt vous ne les verrez plus.

Mes chers amis, ce ton sévère
N'est pas celui de la chanson;
De bon vin remplissez mon verre
Pour me remettre à l'unisson;
Versez champagne ou malvoisie. . . .
Et par mon refrain je conclus:
Regardez-le bien, je vous prie;
Bientôt vous ne le verrez plus.

Armand Gouffé. 18–

XXXI

SUR LA CONSULTATION DES AVOCATS AU SUJET DU CONCILE D'EMBRUN

Du fameux concile d'Embrun,
Que faut-il que l'on pense?
Tous les évêques en commun
En ont pris la défense;
Mais c'est bien affaire aux prélats!
Écoutons plutôt sur ce cas

Les avocats, les avocats,

Les avocats, les avocats de France !

Jadis, pour affermir la foi,

Les Pères en concile
Du Saint-Esprit suivoient la loi,
Consultoient l'Évangile.

Ce n'est plus la bonne façon,
L'Esprit-Saint doit prendre le ton
Des avocats, des avocats,

Des avocats, des avocats de France!

Quand d'un fatal schisme autrefois,
L'Église menacée,

Par le concours de trois cents voix,
Combattoit à Nicée;

Pour terminer tous ces débats,
Ne fit-on pas juger le cas

Aux avocats, aux avocats,

Aux avocats, aux avocats de France?

Que de troubles ne vit-on pas
Au concile d'Éphèse?

Il fallut livrer vingt combats
Pour proscrire une thèse.
Mais falloit-il tant de fracas ?
Pourquoi ne consultoit-on pas
Les avocats, les avocats,
Les avocats, les avocats de France?

Des conciles dans tous les temps
On sait assez les formes,

Leurs canons et leurs règlements
Font des livres énormes.

Mais qu'est-il besoin de canons?

Pour moi, je m'en tiens aux factums
Des avocats, des avocats,

Des avocats, des avocats de France!

Saint Augustin et saint Thomas
Ont dit de bonnes choses;
Mais c'est au corps des avocats
À leur prêter les gloses.
Honneur aux docteurs, aux prélats !
Mais qu'on ne les compare pas

Aux avocats, aux avocats,

Aux avocats, aux avocats de France!

Du troupeau soyez les pasteurs,
Dit Jésus aux apôtres,
Mais vous n'êtes pas seuls docteurs,
Mon Église en a d'autres.

Ne liez et ne déliez,

Qu'avant tout vous ne consultiez

Les avocats, les avocats,

Les avocats, les avocats de France!

Grands avocats, zélés docteurs
De l'Église nouvelle,

Des conciles vrais directeurs,

Ranimez votre zèle !

En paradis, n'en doutez pas,

Saint Pierre vous tendra les bras!

Grands avocats, grands avocats,

Grands avocats, grands avocats de France!

Avec de si fidèles chiens,
Troupeau, soyez tranquille,
Ils mordent vos gardiens

Dans l'accès de leur bile;
Dieu sait comme fuiront les loups,
Entendant aboyer pour vous
Les avocats, les avocats,

Les avocats, les avocats de France!

Ne prenez pas ceci pour vous,
Avocats que j'estime,

De vous confondre avec des fous,
Je me ferois un crime;

Je ne connois que les Aubry

Et trente avocats de Paris,

Pour avocats, pour avocats,

Pour avocats, pour avocats de France!

Anon. 1728

XXXII

ÉPITAPHE D'UN ANGLAIS

Ci-gît Jean Rosbif, écuyer,
Qui se pendit pour se désennuyer.

Destouches.

17

XXXIII

D'UN ANTIQUAIRE

Ci-gît un antiquaire acariâtre et brusque :

Ah! qu'il est bien couché dans cette cruche

étrusque !

Diderot. 17

« PreviousContinue »