ROMANCE CHEVALERESQUE
Partant pour la Syrie, Le jeune et beau Dunois Venait prier Marie De bénir ses exploits. Faites, reine immortelle, Lui dit-il en partant, Que j'aime la plus belle, Et sois le plus vaillant.
Il trace sur la pierre Le serment de l'honneur, Et va suivre à la guerre Le comte son seigneur. Au noble vœu fidèle, Il dit, en combattant : Amour à la plus belle! Honneur au plus vaillant !
"Je te dois la victoire, Dunois," dit le seigneur. "Puisque tu fais ma gloire, Je ferai ton bonheur. De ma fille Isabelle Sois l'époux à l'instant, Car elle est la plus belle, Et toi le plus vaillant.”
À l'autel de Marie,
Ils contractent tous deux
Cette union chérie,
Qui seule rend heureux.
Chacun dans la chapelle Disait, en les voyant : Amour à la plus belle !
Honneur au plus vaillant !
La Reine Hortense
SOUVENIRS D'UN VIEUX MILITAIRE
Te souviens-tu, disait un capitaine Au vétéran qui mendiait son pain, Te souviens-tu qu'autrefois dans la plaine Tu détournas un sabre de mon sein? Sous les drapeaux d'un mère chérie, Tous deux jadis nous avons combattu ; Je m'en souviens, car je te dois la vie : Mais, toi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu?
Te souviens-tu de ces jours trop rapides, Où le Français acquit tant de renom? Te souviens-tu que sur les Pyramides, Chacun de nous osa graver son nom? Malgré les vents, malgré la terre et l'onde, On vit flotter, après l'avoir vaincu,
Notre étendard sur le berceau du monde : Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
Te souviens-tu que les preux d'Italie Ont vainement combattu contre nous ? Te souviens-tu que les preux d'Ibérie Devant nos chefs ont plié les genoux ?
Te souviens-tu qu'aux champs de l'Allemagne Nos bataillons, arrivant impromptu,
En quatre jours ont fait une campagne : Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu?
Te souviens-tu de ces plaines glacées Où le Français, abordant en vainqueur, Vit sur son front les neiges amassées Glacer son corps sans refroidir son cœur ? Souvent alors au milieu des alarmes, Nos pleurs coulaient, mais notre œil abattu Brillait encor lorsqu'on volait aux armes : Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
Te souviens-tu qu'un jour notre patrie Vivante encor descendit au cercueil, Et que l'on vit, dans Lutèce flétrie Des étrangers marcher avec orgueil ? Grave en ton cœur ce jour pour le maudire, Et quand Bellone enfin aura paru, Qu'un chef jamais n'ait besoin de te dire : Dis-moi, soldat, dis-moi, t'en souviens-tu ?
Te souviens-tu... Mais ici ma voix tremble, Car je n'ai plus de noble souvenir ; Viens-t'en l'ami, nous pleurerons ensemble En attendant un meilleur avenir.
Mais si la mort, planant sur ma chaumière, Me rappelait au repos qui m'est dû, Tu fermeras doucement ma paupière, En me disant: Soldat, t'en souviens-tu ?
Émile Debraux. 1819
Comme l'mari d'notre mère Doit toujours s'app'ler papa, Je vous dirai que mon père
Un certain jour me happa;
Puis, me m'nant jusqu'au bas de la rampe
M'dit ces mots qui m'mir'nt tout sans d'ssus d'ssous : J'te dirai ma foi
Qui gnia plus pour toi
Rien chez nous ;
V'là cinq sous, Et décampe.
En avant,
Fanfan la Tulipe,
Oui mill' nom d'un' pipe
Puisqu'il est d'fait qu'un jeune homme Quand il a cinq sous vaillant,
Peut aller d'Paris à Rome,
Je partis en sautillant.
L'premier jour je trottais comme un ange, Mais l'lend'main
Je mourais quasi d'faim.
Un r'cruteur passa
Qui me proposa.
Pas d'orgueil,
J'm'en bats l'œil,
Faut que j'mange!
En avant, etc.
Quand j'entendis la mitraille, Comm' je r'grettais mes foyers! Mais quand j'vis à la bataille Marcher nos vieux grenadiers;
Un instant, nous somm's toujours ensemble, Ventrebleu, me dis-je alors tout bas! Allons, mon enfant,
Mon petit Fanfan, Vite au pas, Qu'on n'dis'pas Que tu trembles. En avant, etc.
En vrai soldat de la garde, Quand les feux étaient cessés, Sans r'garder à la cocarde J'tendais la main aux blessés. D'insulter des homm's vivant encore
Quand j'voyais des lâch's se faire un jeu, Quoi! mill' ventrebleu !
Devant moi, morbleu !. J'souffrirais
Qu'un Français S'deshonore !
En avant, etc.
Vingt ans soldat vaill’que vaille, Quoiqu'au d'voir toujours soumis, Un' fois hors du champ d'bataille J'nai jamais connu d'enn'mis. Des vaincus la touchante prière M'fit toujours
Voler à leur secours.
P't'et c'que j'fais pour eux,
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