En blamant fes Ecrits, ai-je d'un ftile affreux Ma Muse, en l'attaquant, charitable & difcrette Qu'il foit doux, complaifant, officieux, fincere ; Enfin, quel chagrin cela lui produit-il ? Mes vers ont-ils caufé la dureté de fa Mufe & pétri¬ fié fon génie? Lorfqu'un Livre s'étale au Palais, que le premier venu a droit de le cenfurer, que le Libraire en orne fon deuxième pilier, le peu de goût du Critique le fera-t-il tomber? (33) Un Miniftre celebre cabale inutilement contre le Cid, le peuple entier a pour Chimene les yeux de fon Amant. (34) Les Sentimens de l'Académie af foibliffent vainement l'irrégularité de l'Intrigue, & la Poëfie de cette piece, tout Paris demeure REMARQUES. (33) Un Miniftre celebre &c. ] Le Cardinal de Richelien, qui fit critiquer le Cid par l'Académie, pat Scuderi, Mairet & d'autres. (34) Les Sentimens de l'Académie ] Sa Critique a pour titre: Sentimens de Académie fur le Cid. Cet Ouvrage, qui paffe pour ce qu'il y a de mieux dans fon genre, fut rédigé par Chapelain. conftant à fon admiration. Cependant auffi - toft que le Pere de la Pucelle met quelque nouvel Écrit au jour, fes Lecteurs lui font auffi à charge que (35) Liniere. En vain a-t-il efté flaté par mille éloges, fon volume ne paroift pas plutoft qu'il efface l'encens qu'il a reçû. De cette maniere, au lieu de me condamner, lorfque la Ville entiere le fiffle, qu'il en accuse cette influence rebutante de fes vers Allemands en François. Mais oublions fon Poëme & n'en disons plus rien. Quel tort lui fais-je enfin ? ai-je par un écrit Le Public revolté s'obstine à l'admirer. Mais lorfque Chapelain met une Oeuvre en lumiere REMARQUES. (35) Liniere.] Ce Poëte écrivit contre le Poëme de La Pucelle. La Note de la Copie ajoute qu'il eft Auteur de Portraits en Vers & en Profe, qui ont fait grand bruit à la Cour On a dit, il y a long temps, que la Médifance traîne des fuites fort perilleufes aprés elle, qu'elle divertit force perfonnes, & qu'elle ne plaift pas à beaucoup d'autres. Son venin eft dangereux. Dans fes temeritez, la crainte a fort fouvent excité du trouble à Regnier. Abandonnez ces divertiffemens inutiles dont l'éclat furprend. A des occupations plus amies employez vôtre lire, & cedez à Feuillet ces Prédications outrées qui ne touchent qui que ce foit. La Satire, dit-on, est un métier faneste, Qui plaift à quelques gens, & choque tout le reste. Mais fur quel fujet s'exercera donc dorenavant ma Mufe? Courrai-je, transporté de l'enthoufiafme de Pindare répeter avec Malherbe aprés Théophile; irai-je raffemblant plufieurs de leurs centons enfemble, Chanter d'un grave ton dans une Ode fuperbe, Faire trembler Memphis &c. Chaufferai-je le Cothurne pour marcher au milieu d'une Troupe ruftique? Enflerai-je la fimplicité de l'Eglogue pour animer fes chalumeaux; & deffus mon papier rêvant au pied des arbres, mettrai-je dans la bouche d'Echo une langue qu'elle n'a pas? Le cœur glacé, le jugement fain, faudra-t-il fur un nom inventé imaginer une paffion ridicule; ne lui pas épargner les épithetes les plus flatteufes; & rempli des meilleurs morceaux, expirer par métaphore? Je cede aux fades Amans l'affectation de cette langue, l'entretien d'une volupté igno pante. Eh! fur quoi faut-il donc que s'exercent mes Vers? Faire trembler Memphis, ou paflir le Croiffant : L'Ironie abondante en portraits donne feule du fel à la fcience & à la plaifanterie, & par une Verfification que le bon fens embellit, elle fçait defabufer les hommes du fiecle des erreurs qui s'y gliffent. Le thrône n'eft pas à l'abri de fes pourfuites. Elle ne redoute rien, & fouvent aidée d'une penfée vive, elle prend le parti de la Raifon attaquée par un butor. Voilà de quelle forte le premier Satirique Romain, Lucilius, foûtenu de Lelius, joüoit Lupus, Metellus & les autres Cotins de fon temps; & c'eft ainfi qu'Horace prodiguant fes bons mots parla avec liberté d'Alpinus & des Pelletiers Romains. C'eft la Satire, qui guidant mes études, me fit hair dés l'âge de quinze ans un mauvais Livre; & qui conduifant mes pas fur le Parnaffe, encouragea ma témerité & m'ouvrit l'efprit. C'eft pour la Satire feule que j'ai pris la plume. La Satire en leçons, en nouveautez fertile, Va jufques fous le dais faire paslir le vice, Et fouvent fans rien craindre, à l'aide d'un bon mot, C'est ainfi que Lucile, appuyé de Lélie C'est pour elle en un mot que j'ai fait vœu d'écrire. Cependant, s'il eft néceffaire, je me dementirai fur ce que j'ai avancé, & pour appaiser enfin ce monde de mécontens, je diftinguerai les Noms qui effarouchent tant d'Auteurs. D'abord que vous m'impofez filence, je vais parler fur un autre ton. Je le dis donc une bonne fois avec franchife. Quinault fait mieux un Opéra que Virgile. Le Soleil n'eft pas plus éclatant que la réputation de(36) Bour REMARQUES. (36) Beurfault, ] L'Auteur mit enfuite Pradon. |