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(6) M. Colomiés (dans fes Opufcules p. 124. ) qu'il avoit appris du bonhomme Laurent Bochel, qu'Amiot avoit traduit les Vies de Plutarque fur une vieille Verfion Italienne de la Bibliothèque du Roi, & qu'elle êtoit caufe des fautes qu'il avoit » faites ».

II. L'Abbé Cotin n'avoit pas grand bien de fon patrimoine: (7) mais il lui échut tout-à-coup deux ou trois Succeffions, qui le rendirent riche. Il eut des procès à effuïer, & cela l'obligea à donner tout ce qu'il avoit à un de fes Amis à certaines conditions. Ses Parens furent fi fâchés de cette Donation, qu'ils préfentèrent Requête, pour lui faire créer un Curateur; & prétendirent le faire paffer pour fou. L'Abbé, au lieu de comparoître, alla voir fes juges, & les pria d'aller entendre quelqu'une de fes Prédications, qu'il devoit faire pendant le Carême. Ses Juges le firent; & ils furent fi fatisfaits de fes Sermons, & fi indignés de l'injuftice de fes Parens, qu'ils les condamnèrent aux dépens & à une Amende. N'en déplaife à ces Juges de l'Abbé Cotin, leur Jugement fut un peu précipité. Il y a de bons Prédicateurs, qui ne laiffent pas d'avoir de petits grains de folie. On en voit de tems en tems dans toutes les Communions. Un Lecteur, qui voudroit conclure par quelques Difcours bien fenfés, que fait

REMARQUES.

tres, écrites groffièrement, mais avec efprit. On lui trouvoit dans le vifage quelque reffemblance avec les anciennes Médailles de CICE'RON.

(6) M. Colomies ] PAUL Colomiez êtoit Calvinifte, Fils d'un Médecin, & né à la Rochelle. Après fes Etudes il parcourut la France, alla faire enfuite quelque féjour en Hollande, & prit le parti de fe retirer en Angleterre. Il y mourut à Londres le 13. Janvier 1692. Il y a beaucoup à profiter dans la lecture des Ouvrages de ce favant Homme.

(7) mais il lui échut tout-à-coup &c.] Voïés, Lett, de Perr. REM. Tome II. page 305.

Dom Guichote, que Dom Guichote, n'eft pas vifionnaire, s'expoferoit à la rifée publique. On peut dire la même chofe à l'égard de Cyrano de Bergerac. Si ces Juges euffent fait cette réflexion, & que d'un autre côté il euffent entendu difcourir certains Fous des Petites-Maifons, ils ne fuffent pas allés fi vite en befogne. Mais, quoiqu'il en soit de ce Jugement, ce qu'on vient de rapporter marque du moins que l'Abbé Cotin n'êtoit pas un toutà-fait méchant Prédicateur. Cependant Defpréaux ne laiffe pas de dire:

(8) Qu'avant lui Juvenal avoit dit en Latin

Qu'on eft affis à l'aife aux Sermons de Cotin.

Cela eft outré. Il eft probable d'un côté que l'Abbé Cotin n'a pas êté des meilleurs Predicateurs de fon fiècle; mais il eft probable d'un autre qu'il n'a pas êté des moindres. Qu'on dife tout ce que l'on voudra, quand fes Sermons n'auroient fait que le garentir de l'Hôpital des Fous, où fes Parens avoient envie de le faire enfermer, les personnes raisonnables concluront que fes Sermons n'êtoient pas fi méprifables, que fes Ennemis le prétendoient. D'ailleurs on peut dire que ceux que Defpréaux attaquoit, êtoient ordinairement (9) des gens, qui avoient quelque mérite. En effet la plufpart de ceux dont il s'eft moqué dans fes Satires, ont fait des Ouvrages, qui feront toujours eftimés, quoiqu'on y puiffe remarquer quelques défauts.

Defpréaux ne fut pas le feul Auteur distingué, qui

REMARQUES.

(9) Qu'avant lui Juvenal &c.] Sat. IX. Vers 129. Tome I. page 149.

(9) des gens, qui avoient quelque mérite. ] PERRAULT, Cotin, Caffague, en avoient beaucoup. Quinault en avoit infiniment comme Poëte Lirique, quoiqu'il en eut d'ailleurs fort peu,

maltraita l'Abbé Cotin. Molière le fit d'une manière fanglante. (10) La Comédie des Femmes Sçavantes eft une Satire contre lui & contre quelquesunes de fes Amies. Cette Pièce fut d'abord annoncée fous le titre L'Abbé Cotin; & la première fois que l'on la joua,l'Abbé fut réprésenté avec un mafque fi reflemblant, que tout le Parterre le reconnut. C'est une particularité que tout Paris fait. M. Ménage ajoute même, que Molière fit acheter un des habits de cet Abbé pour le faire mettre à celui qui faifoit le Personnage de fon Héros. L'Abbé fe plaignit à la Cour. Alors le titre de la Pièce fut changé dans les Affiches en celui de l'Abbé Tricotin; & quand cette Comédie fut imprimée on fe contenta de mettre M. Tricotin.

(11) M. Baillet ne l'épargne pas dans fes Jugemens des Poëtes (T. V. p. 244). on le verra par le portrait, qu'il en fait en parlant des OEUVRES GALANTES en Vers & en Profe de cet Abbé. « Si » l'on prétend, dit-il, le louer comme un Poëte » des plus galans de ceux qui ont lu & fu par cœur »la Légende des Ruèles, on eft en danger de con» fondre avec lui un célèbre Prédicateur connu >> fous le nom de M. l'Abbé Cotin. & dès qu'on aura » trouvé dans un Abbé Séculier un Sujet capable » d'occuper tout-à-la-fois la Chaire & le Parnaffe, Don fe verra embaraffé par cette alliance extraor» dinaire, qu'il a pu faire, des délices de la Galante» rie avec la févérité des Maximes de la Pénitence,

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REMARQUES.

(10) La Comédie des Femmes Sçavantes &c.] Voïés l'Extrait du Carpentariana, N. III. ci-devant, pag. 128. & pag. 134. le N. IV. de l'Extrait du Ménagiana.

(11) M. Baillet] ADRIEN Baillet, né à la Neuville en Hez, Village du Diocèfe de Beauvais, le 13. Juin 1649. mourut à Paris le 21. Janvier 1706, âgé de 17. ans & quelques mois. On trouve fa Vie à la tête de la dernière Edition de fes Jugemens des Sçavans,

» du renoncement à foi-même & des autres Vertus » Evangéliques ». La raillerie eft piquante: mais il n'y a perfonne qui puiffe raifonnablement la blâmer. Un Eccléfiaitique fort abfolument de fon caractère, & fait la chofe du monde la plus abfurde & la plus contradictoire, lorfqu'il s'amufe à compofer des Pièces galantes. Cependant depuis Heliodore Evêque de Trica en Theffalie, qui fit le Roman des Amours de Théagène & de Cariclée, il y a eu une infinité de gens d'Eglife de tout ordre, qui font tombés dans cette monftrueufe irrégularité. M. Mé nage nous en donne une lifte affés longue dans (12) l'un de fes Ouvrages. Lui,qui êtoit une espèce d'Eccléfiaftique, car il êtoit Penfionnaire fur des Bénéfices, fe trouvoit dans le cas. Il avoit fait plufieurs Vers galans; & il avoit dreffé cette lifte, pour s'excufer par l'exemple d'un grand nombre d'Eccléfiaftiques, qui ont compofé des Ouvrages & des Vers de Galanterie. Mais il abandonne cette excufe dans la fuite, & avoue que M. Baillet, qui ne l'avoit pas plus épargné que l'Abbé Cotin, avoit raifon de condamner ces fortes de Vers dans les Ecrits des Poëtes Chretiens. « Et je me répens férieu» fement, dit-il, d'en avoir fait. Et je prie Dieu » de me pardonner ceux que j'ai faits. Et je lui » promets de n'en plus faire. Et je convie les jeunes

gens de faire leur profit de ma faute ». M. Ménage avoit êté piqué au vif, & on voit bien qu'il y a un peu de chagrin dans fon fait. Je veux croire pourtant que fa converfion fut fincère; &, cela êtant, ce fut un grand facrifice qu'il fit à Dieu, car il êtoit fort amoureux de fes productions.

REMARQUES.

(12) l'un de fes Ouvrages, ] L'ANTIBAILLET, Tome II. p. 334x & puis 354.

III. Il y a dans la Normandie une petite Ville appellée, Vire, dont on dit;

Viria viripotens varia virtute virescit;

A magnifque viris Viria nomen habet.

La Rivière,qui arrofe cette Ville s'appelle La Vire, & le Païs voifin Vau de vire(Vallée de Vire).(13)OLI VIER Baffelin, qui êtoit un Foulon de Vire, inventa ces Chanfons, qu'on appelle Vaudevilles, qui furent d'abord appellées Vaudevires, parce qu'on commença à les chanter au Vau de Vire. (14) ANDRE' Du Chefne, après avoir parlé de ce Païs dans fes Antiquitez & Recherches des Villes de France, dit que "d'icelui ont pris leur origine ces anciennes Chansons qu'on appelle communément ,,Vaudevilles pour Vaudevires, defquelles, ajoute,, t-il fut Auteur un OLIVIER Baffelin, ainfi que l'a remarqué (15) Belleforest,au moyen de (16) Char

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REMARQUES.

(13) Olivier Baffelin, ] Voïés ci-après Rem. 19.

(14) André Du Chefne, ] Il êtoit de l'Ifle Bouchard en Toraine. Il naquit au mois de Mai 1584. Ce fut un des plus favans Hommes du XVII. fiècle, pour l'Hiftoire & la Géographie. Ses Ouvrages font en très-grand nombre; mais ils ne font pas tous également bons. Il n'êtoit pas riche, & fe trouvoit obligé de travailler à la hâte. Il eut un Fils nommé François Du Chefne, qui fuc Avocat au Confeil, & marcha fur les traces de fon Père, dont il publia les Ouvrages reftés en Manufcrit, & continua ceux qui n'êtoient pas achevés. André Du Chefne fut écrasé par une charette 30. Mai 1640, en allant à fa Maifon de Campagne à Verriere. On le nomme diverfement en Latin: Andreas à Quercu, Chefnaus Du-Chefnaus, Quercetanus. C'est ce dernier nom, qu'il a pris luimême dans quelques Ouvrages Latins.

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(15) Belleforeft,] FRANÇOIS de Belleforest naquit au mois de Septembre 130. près de Sancaton, petite Ville du Comté de Comminges. 11 mourut à Paris le 1. Janvier 1‹83. âgé de 53. ans, après avoir publié, fur différentes matières, plus de cinquante Ouvrages, dont plufieurs font in-folio. C'est un des plus féconds Ecrivains que la France ait eus; & ce n'eft pas lui faire tort que d'ajouter, qu'il eft en même tems un des plus méprifables. Il n'avoit que fa Plume pour tout bien, & ne fongeoit qu'à groffir & multiplier les Volumes.

(16) Charles de Bourgueville, ] Sieur de Bras, natif de Caen, eft

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