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IX. – A un médecin ( Claude Perrault.) ·

1674.

Oui, j'ai dit dans mes vers qu'un célèbre assassin,
Laissant de Galien la science infertile,
D'ignorant médecin devint maçon habile :
Mais de parler de vous je n'eus jamais dessein,

Perrault, ma muse est trop correcte;
Vous êtes, je l'avoue, ignorant médecin,

Mais non pas habile architecte.

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XI. Sur une salire très-mauvaise, que l'abbé Cotin avoit faite,

et qu'il faisoit courir sous mon nom.
En vain par mille et mille outrages

Mes ennemis, dans leurs ouvrages,
Ont cru me rendre affreux aux yeux de l'univers.

Cotin, pour décrier mon style,
A pris un chemin plus facile :
C'est de m'attribuer ses vers.

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quoi bon tant d'efforts, de larmes et de cris ,
Cotin, pour faire ôter ton nom de mes ouvrages ?
Si tu veux du public éviter les outrages,
Fais effacer ton nom de tes propres écrits.

XIII. Contre un athée.
Alidor, assis dans sa chaise',
Médisant du ciel à son aise,
Peut bien médire aussi de moi.
Je ris de ses discours frivoles :
On sait fort bien que ses paroles
Ne sont pas articles de foi.

1. Il étoit tellement goutteux qu'il ne pouvoit marcher. (B.)

XIV. - Vers en style de Chapelain, pour mettre à la fin de son poëme

de la Pucelle.
Maudit soit l'auteur dur, dont l'âpre et rude verve,
Son cerveau tenaillant, rima malgré Minerve;
Et, de son lourd marteau martelant le bon sens,
A fait de méchans vers douze fois douze cents!.

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XVI. — Parodie de cinq vers de Chapelle.
Tout grand ivrogne du Marais
Fait des vers que l'on ne lit guère.
Il les croit pourtant fort bien faits;
Et quand il cherche à les mieux faire,
Il les fait encor plus mauvais ?..

XVII.

A MM. Pradon et Bonnecorse, qui firent en même temps
paroître contre moi chacun un volume d'injures 3.

1685.

Venez, Pradon et Bonnecorse,
Grands écrivains de mème force,
De vos vers recevoir le prix;
Venez prendre dans mes écrits
La place que vos noms demandent :
Linière et Perrin vous attendent.

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1. La Pucelle a douze livres, chacun de douze cents vers. (B.)
2. Voici les cinq vers de Chapelle que Despréaux parodie :

Tout bon habitant du Marais
Fait des vers qui ne coulent guère.
Pour moi, c'est ainsi que j'en sais;
Et si je les voulois mieux faire,

Je les serois bien plus mauvais.
3, Pradon, les Nouvelles remarques sur tous les ouvrages de M. D***,
et Bonnecorse, le Lutrigol, parodie du Lutrin,

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BOILEAU 1

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XVIII. A la fontaine de Bourbon, où l'auteur étoit allé prendrè tes

eaux, et où il trouva un poëte médiocre qui lui montra des vers, de sa façon.

1687.
Oui, vous pouvez chasser l'humeur apoplectique,
Rendre le mouvement au corps paralytique,
Et guérir tous les maux les plus invétérés;
Mais quand je lis ces vers par votre onde inspirés,

Il me paroît, admirable fontaine,
Que vous n'eûtes jamais la vertu d'Hippocrène.

XIX. Sur la manière de réciter du poëte S*** (Santeul)'.

Quand j'aperçois sous ce portique
Ce moine, au regard fanatique,
Lisant ses vers audacieux
Faits pour les habitans des cieux?,
Ouvrir une bouche effroyable,
S'agiter, se tordre les mains;
Il me semble en lui voir le diable,
Que Dieu force à louer les saints.

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Paul, ce grand médecin, l'effroi de son quartier,
Qui causa plus de maux que la peste et la guerre,
Est curé inaintenant, et met les gens en terre :

Il n'a point changé de métier.

XXI. — A P.... (Charles Perrault.)
Ton oncle, dis-tu , l'assassin,

M'a guéri d'une maladie.
La preuve qu'il ne fut jamais mon médecin

C'est que je suis encore en vie.

XXII, - AM, P*** (Charles Perrault), sur les livres qu'il a faits

contre les anciens.
Pour quelque vain discours, sottement avancé
Contre Homère, Platon, Cicéron ou Virgile,
Caligula partout fut traité d'insensé,
Néron de furieux, Adrien d'imbécile.

Vous donc qui, dans la même erreur,

des

1. Jean Santeul, né à Paris en 1639, se fit victorin, composa hymnes el d'autres poésies latines, et mourut en 1697.

2. Il a fait des hymnes lalines à la louange des saints. (B.)

Avec plus d'ignorance, et non moins de fureur,
Attaquez ces héros de la Grèce et de Rome,

p**, fussiez-vous empereur,
Comment voulez-vous qu'on vous nomme?

XXIII. Sur le même sujet.
D'où vient que Cicéron, Platon, Virgile, Homère,
Et tous ces grands auteurs que l'univers révère,
Traduits dans vos écrits nous paroissent si sots?
Perrault, c'est qu'en prêtant à ces esprits sublimes
Vos façons de parler, vos bassesses, vos rimes,

Vous les faites tous des Perraults.

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XXIV. Sur ce qu'on avoit lu à l'Académie des vers contre Homère

et contre Virgile.

1687.
Clio vint, l'autre jour, se plaindre au dieu des vers

Qu'en certain lieu de l'univers
On traitoit d'auteurs froids, de poëtes stériles,

Les Homères et les Virgiles.
« Cela ne sauroit être, on s'est moqué de vous,

Reprit Apollon en courroux :
Où peut-on avoir dit une telle infamie?
Est-ce chez les Hurons, chez les Topinamboux ?
- C'est à Paris. C'est donc dans l'hôpital des fous ?

- Non, c'est au Louvre, en pleine Académie. »

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XXV. Sur le même sujet.
J'ai traité de Topinamboux

Tous ces beaux censeurs, je l'avoue,
Qui, de l'antiquité si follement jaloux,
Aiment tout ce qu'on hait, blâment tout ce qu'on loue ;

Et l'Académie entre nous,
Souffrant chez soi de si grands fous,
Me semble un peu Topinamboue.

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Le bruit court que Bacchus, Junon, Jupiter, Mars,

Apollon, le dieu des beaux-arts,
Les Ris mêmes, les Jeux, les Grâces et leur mère.,

Et tous les dieux, enfans d'Homère,

Résolus de venger leur père,
Jettent dėjà sur vous de dangereux regards,

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ܕ

Perrault, craignez enfin quelque triste aventure.
Comment soutiendrez-vous un choc si violent?

Il est vrai, Visé' vous assure
Que vous avez pour vous Mercure,
Mais c'est le Mercure galant.

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Ne blåmez pas Perrault de condamner Homère,

Virgile, Aristote, Platon,

Il a pour lui, monsieur son frère, G...., N...., Lavau, Caligula, Néron,

Et le gros Charpentier, dit-on.

XXVIII. Parodie de la première ode de Pindare, à la louange

de M. Perrault?.
Malgré son fatras obscur,
Souvent Brébeuf étincelle.
Un vers noble, quoique dur,
Peut s'offrir dans la Pucelle.
Mais, ô ma lyre fidèle !
Si du parfait ennuyeux
Tu veux trouver le modèle,
Ne cherche point dans les cieux,
D'astre au soleil préférable;
Ni, dans la foule innombrable
De tant d'écrivains divers
Chez Coignard rongé des vers,
Un poëte comparable
A l'auteur inimitable
De Peau d'Ane mis en vers 3

XXIX. Sur la réconciliation de l'auteur et de M. Perrault.

Tout le trouble poétique
A Paris s'en va cesser;
Perrault l’anti-pindarique
Et Despréaux l'homérique
Consentent de s'embrasser;

+. L'auteur du Mercure galant. (B.) – Jean Donneau de Visé a fait des pièces de théâtre, des nouvelles galantes, et commencé en 1672 le Mercure galant. 2. J'avois dessein de parodier l'ode (entière); mais dans ce temps-là

, nous nous raccordames, M. Perrault et moi; ainsi il n'y eut que ce couplet de fait. (B.)

3. Perrault, dans ce temps-là, avoit rimé le conte de Peau d'Ane. (B.)

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