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été rejetée dans l'Appenin et peut-être jusques sur le Var. Quoi qu'il en soit, les événemens ont prouvé que le Roi de Sardaigne, plus frappé encore du progrès des idées révolutionnaires qui menaçaient son Trône, que de la dureté des conditions qui lui étaient imposées, préféra faire le sacrifice de deux provinces, à courir le danger de laisser sa capitale en butte aux entreprises des mécontens, se flattant de sauver, par sa politique, un royaume que deux armées n'avaient pu maintenir dans son intégralité.

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CHAPITRE XXVI.

Bonaparte débarrassé des Sardes se jette avec toutes ses forces sur Beaulieu; passage du Pó à Plaisance; affaires de Fombio et de Lodi; entrée à Milan; révolte dans la Lombardie ; pas sagedu Mincio à Borghetto; Beaulieu est rejeté dans le Tirol.- Coup-d'oeil sur l'intérieur de l'Italie; expédition sur Rome; paix avec la Cour de Naples; prise de Bologne Urbin et Ferrare; armistice avec le Pape; entrée dans Livourne; révolte de Lugo; position des armées devant Mantoue; siége de cette place.

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PENDANT que le général français multipliait ses forces par la rapidité de ses mouvemens et par tous les avantages que donne l'initiative; Beaulieu, loin de rassembler tous ses moyens pour attaquer la division Laharpe et secourir ses alliés en se portant vivement sur S.-Benedetto, était demeuré, comme nous l'avons dit au chapitre précédent, vers Aqui, où il avait pris une position, la droite à Terzo, le front couvert par le Tanaro; sa gauche, aux ordres du général Roselmini, resta d'abord inutilement entre la Scrivia

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et l'Orba, vers Varragio et Campo-Freddo pour observer la Boccheta où les Français n'avaient pas un soldat; elle se replia ensuite sur Novi et Pozzolo.

Le général autrichien, après avoir perdu un temps précieux dans ces positions, se décida, trop tard, à tenter un mouvement pour se lier de nouveau à l'armée sarde. Il avait déjà mis en marche une partie de son armée sur Nizza de la Paglia, lorsqu'il apprit la défaite de ses alliés et les négociations qui en avaient été la suite : alors il se replia, le 27 avril, sur Alexandrie, dont on a prétendu qu'il chercha à s'emparer; et où le commandant piémontais refusa de recevoir ses troupes. Il ne s'arrêta qu'un instant sous cette ville, et le 2 mai l'armée autrichienne avait repassé le Pô sur le pont de Valence qu'elle coupa.

Bonaparte ne pouvant trouver de repos tant qu'il lui restait quelque chose à entreprendre, n'eut pas plutôt fait occuper les places qui devaient lui être remises, qu'il résolut de marcher aux Autrichiens, et de les expulser de la 1.ombardie. Son projet ne se bornait pas à une invasion momentanée, il jugea que le meilleur moyen de conserver l'Italie était d'appeler à de nouvelles destinées les peuples de cette belle coutrée, qui après avoir rempli pendant dix siècles le monde entier de leurs exploits, étaient cour

bés sous le joug des institutions les plus vicieuses et les plus propres à effacer jusqu'aux moindres traces des grandes vertus de leurs ancêtres.

Débarrassé des Sardes, et de toute inquiétude sur ses communications avec la France; assuré de trois bonnes bases comme celles de Coni, Alexandrie et Tortone, Bonaparte pouvait suivre sa marche victorieuse, afin de repousser Beaulieu jusqu'au delà de l'Adige, et de couvrir ses conquêtes en prenant l'excellente ligne qu'offre cette rivière, dont le front rétréci par le lac de Garda et les montagnes du Tyrol, n'embrasse que l'espace depuis Vérone jusques vers Legnago (1).

Le seul obstacle qui pût suspendre un moment cette marche était le Pô; on sait que ce fleuve prenant sa source aux montagnes de Viso, audessus de Saluces, coupe transversalement l'Italie septentrionale jusqu'à Rovigo et Ferrare, où il se jette dans la mer Adriatique, et qu'il semblait offrir à l'armée autrichienne une ligne de défense excellente.

Depuis Casal et Valence le fleuve grossit des eaux du Tanaro, de la Bormida, de l'Orba, de

(1) Le front ne s'étend réellement que depuis Vérone jusqu'à Legnago, parce qu'il n'est pas à craindre qu'une armée passe entre cette place et la mer, où elle s'exposerait à être jetée. Le terrain coupé de canaux offre d'ailleurs mille obstacles sur ce point.

la Scrivia venant du sud; il reçoit aussi celles de la Sésia, de la Cogna, du Tredopio et du Tésin venant du nord; au-dessous de Pavie il devient large, profond et assez difficile. En le

passant vers Valence, on aurait donné de front sur une foule de rivières torentueuses qui coulent transversalement à la direction des routes et surtout le Tésin, dont le passage offrait des obstacles majeurs, augmentés par toutes les ressources de l'art.

De tous les partis qu'on avait à choisir, un seul pouvait faire espérer de grands résultats, c'était celui de tourner la gauche de Beaulieu et de prendre sa ligne à revers, en venant passer le Pô, plus bas, vers Crémone, ou même du côté de Plaisance : ce fut aussi celui que le Général français préféra.

Aussitôt après la conclusion de l'armistice, l'armée était partie de sa position d'Alba. La division Masséna marcha sur Nizza, et Augereau sur St.-Stefano de Belbo. La division Laharpe rentra en ligne en venant prendre position à Aqui; la division Serrurier se dirigea sur Asti. Le jour suivant l'armée se porta sur Alexandrie; le général Masséna y arriva assez à temps pour s'emparer des magasins considérables que les Autrichiens y avaient amassés. La division du général Augereau se dirigea sur Tortone où elle fut jointe par celle du général Laharpe.

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