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CHAPITRE XXIX.

L'armée de Sambre et Meuse, favorisée par le passage de l'armée du Rhin à Kehl, reprend l'offensive, s'empare de Wurtzbourg, et s'avance jusqu'à Amberg.

que

L'ARMÉE de Sambre et Meuse qui s'était retirée en partie au-delà du Rhin, vers Cologne, et en partie dans le camp retranché de Dusseldorf (chap 27), n'attendait l'avis du passage de Moreau pour reprendre ses projets offensifs. Elle profita du départ des troupes que les succès de l'armée du Rhin avaient forcé l'Archiduc à détacher, et se disposa à repasser ce fleuve.

Nous avons vu que ce prince, à la nouvelle du passage de Kehl, menacé d'être coupé de la ligne importante du Danube, était parti le 25 juin avec un corps de 20 à 25 mille hommes pour se porter en toute hâte au secours du général Latour, laissant une forte garnison dans Mayence et une armée de 33 bataillons et 77 escadrons formant ensemble 38 mille hommes, pour couvrir le Meyn. Le comte de Wartensleben qui la commandait, avait ordre d'éviter tout

engagement sérieux avec les forces supérieures de Jourdan.

Après le départ de l'Archiduc, cette armée du Bas-Rhin resta, conformément à l'usage, disseminée dans les positions ci-après le corps de bataille, fort d'environ 14 mille hommes, était à Neukirch (1), derrière la Nister, sur le plateau où se réunissent les routes de Siegburg, Siegen, Limbourg et Wetzlar; l'avant-garde, aux ordres de Kray, occupait, par une brigade, la montagne de Kalten-Eiche; le reste de la division tenait Deken, Hausen, Hassel et Erpel; elle comptait 5 mille hommes d'infanterie et 3 mille chevaux. Le général Staader commandait un corps de 7 'mille hommes d'infanterie et 1500 chevaux, répartis depuis Lahnstein jusqu'à Erlich; le gros de ce corps se tenait campé vers Neuwied, aux ordres du général Finck. Enfin, la réserve de grenadiers et de grosse cavalerie faisant 4 mille hommes d'infanterie et 3,200 chevaux, était campée à Jdstein, aux ordres de Werneck. Cette position est si extraordinaire, qu'il suffira à tout militaire instruit de jeter un coup-d'œil sur la carte pour en sentir les inconvéniens.

(1) Il y a deux villages de ce nom, l'un est sur la Nister, l'autre sur l'Elz près de Weilbourg: c'est du premier dont il est question.

La distance qu'il y avait entre le corps de bataille et les avant-gardes, était si grande, que celles-ci n'en avaient aucun soutien; la réserve était à trois ou quatre marches du corps principal, ce qui, jusqu'alors, n'avait pas eu d'exemple dans les annales de la guerre ; enfin des divisions entières étaient morcelées en postes de hussards.

Le moyen d'empêcher le passage d'un fleuve est d'en surveiller le cours, seulement avec des patrouilles et des piquets : l'armée doit rester réunie dans la position strategique la plus convenable, pour , pour être prête à marcher sur-le-champ au point menacé.

Jourdan avait formé le projet de repasser le Rhin vers Neuwied; pour faciliter cette opération, son aile gauche, toujours aux ordres de Kléber, partit de Dusseldorf le 27 juin, et s'avança sur la Sieg, afin d'attirer de ce côté toute l'attention de l'ennemi. La division. Grenier, qui était campée à une lieue et demie de Cologne, vint passer le Rhin sur le pont volant de cette ville, et fut mise sous les ordres du général Kléber. Le 30, les trois divisions de l'aile gauche se portèrent sur la Sieg, et franchirent cette rivière avec facilité, le général Kray n'ayant laissé pour l'observer que quelques corps de cavalerie légère. Cette aile prit position le même jour en avant de la rivière, ayant la 14

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droite au village de Plées, et la gauche aux montagnes; elle séjourna les 1er. et 2 juillet pour attendre des vivres : la réserve du général Bonnard vint aussi s'y réunir à cette époque.

Cependant le général Jourdan qui se trouvait à Coblentz, avait fait rassembler sur deux points toutes les embarcations qu'on avait pu se procurer. Les divisions Poncet, Bernadotte et Championnet étaient à proximité. Dans la nuit du 2 juillet, toutes les troupes se rapprochèrent en silence des deux points indiqués pour le passage du fleuve. Le corps du général Finck, composé de six bataillons, était le seul dont on eût à craindre l'opposition pour le premier moment. Le général Staader seulement, avec quelques autres bataillons, était en mesure de le soutenir vers la fin de la journée. Néanmoins, comme leurs forces réunies paraissaient suffisantes pour s'opposer aux premiers débarquemens qui ne se raient pas très-considerables, le succès de l'opération semblait dépendre de la possibilité d'effectuer le premier transport sans être découvert.

A deux heures du matin, les embarquemens commencèrent. Les grenadiers de la division Bernadotte abordèrent sur la rive droite, au village de Bendorff; ceux de Championnet, conduits par le général Damas, abordèrent à la ville de Neuwied. Après un engagement assez vif, les postes ennemis furent repoussés; Damas

ayant reçu un renfort de 50 chevaux et 2 pièces de canon, sortit même de la ville, et s'avança en plaine pour attaquer Hettersdorf et les villages le long de la Wittbach, dont il parvint à s'emparer malgré la belle résistance de 2 bataillons de Hesse-Darmstadt.

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Le désordre est inséparable de toute surprise, surtout lorsqu'il s'agit d'un corps qui est abrité par un grand fleuve, et qui se croit ainsi hors de toute insulte. Les Autrichiens se trouvaient dans ce cas, et sans la crainte et l'irrésolution, compagnes ordinaires des attaques soudaines, ils auraient eu aisément les moyens de rejeter les premiers détachemens, puisqu'ils ne consistaient qu'en 4 bataillons de grenadiers divisés en deux colonnes. Cependant après être revenus de leur étonnement, ils firent partir leurs équipages par la route de Diersdorf, et rassemblèrent 2 bataillons pour se porter de suite sur les grenadiers du général Bernadotte. Le village de Bendorf fut assailli par eux avec intrépidité : on s'y défendit avec bravoure. Les grenadiers français en furent un instant repoussés; mais bientôt ils en chassèrent les Allemands à leur tour, et en reprirent possession. Pendant que ceci se passait, les troupes de Darmstadt, qui se retiraient de Neuwied et de Hettersdorf arrivaient sur les hauteurs en arrière de Ben

dorf, qu'elles trouvèrent occupées par les gre.

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