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ce qu'ils pourroient être, en leur perfuadant qu'ils étoient ce qu'ils ne font pas. C'eft, ainfi qu'un précepteur François forme son éleve pour brïller un moment dans fon enfance, et puis n'être jamais rien. L'Empire de Ruffie voudra fubjuguer l'Europe et fera fubjugué lui-même. Les Tartares fes fujets ou les voifins deviendront les maitres et les nôtres : cette révolution me paroit infaillible Tous les Rois de l'Europe travaillent de concert à l'accélérer.

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CHAPITRE IX

Suite.

Comme la nature a donné des termes

à la ftature d'un homme bien conformé, paffé lesquels elle ne fait plus que des géans ou des nains, il y a de même, eu égard à la meilleure conftitution d'un Etat, des bornes à l'étendue qu'il peut avoir, afin qu'il ne foit ni trop grand pour pouvoir être bien gouverné, ni trop petit pour pouvoir fe maintenir par lui-même. Il y a dans tout Corps politique un maximum de force qu'il ne fauroit paffer, et duquel souvent il s'éloigne à force de s'aggrandir. Plus le lien focial s'étend, plus il fe relâche, et en général un petit Etat eft proportionnellement plus fort qu'un grand.

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Mille raifons démontrent cette maxi

Premièrement. l'administration

devient plus pénible dans les grandes diftances, comme un poids devient plus lourd au bout d'un plus grand levier. Elle devient auffi plus onéréuse à mefure que les degrés fe multiplient; car chaque ville a d'abord la fienne que le peuple paye, chaque diftrict la fienne encore payée par le peuple, enfuite chaque province, puis les grands Gouvernemens, les Satrapies, les Viceroyautés qu'il faut toujours payer plus cher à mesure qu'on monte, et toujours aux dépens du malheureux peuple: enfin vient l'administration suprême qui écrafe tout. Tant de furcharges épui fent continuellement les fujets; loin d'être mieux gouvernés par tous ces différens ordres, ils le font moins bien s'il n'y en avoit qu'un feul au • que - deffus d'eux. Cependant à peine reste-t-il des reffources pour les cas extraordinaires, et quand il y faut recourir, l'E. tat est toujours à la veille de fa ruine.

Ce n'eft pas tout; non- -fenlement le

Gouvernement a moins de vigueur et de célérité pour faire obferver les lois, empêcher les vexations, corriger les abus, prévenir les entreprifes féditieufes qui peuvent fe faire dans des lieux éloignés, mais le peuple a moins d'affection pour les chefs qu'il ne voit ja mais, pour la patrie qui eft à ses yeux comme le monde, et pour les concitoyens dont la plupart lui font étrangers. Les mêmes lois ne peuvent convenir à tant de provinces diverses qui ont des moeurs différentes, qui vivent fous des climats oppofés et qui ne peuvent fouffrir la même forme de Gouvernement. Des lois différentes n'engendrent que trouble et confufion parmi des peuples qui, vivant fous les mêmes chefs et dans une communication continuelle, paffent ou fe marient les uns chez les autres, et foumis à d'autres coutumes, ne favent jamais fi leur patrimoine eft bien à eux. Les talens font

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enfuis, les vertus ignorées, les vices - impunis dans cette multitude d'hommes inconnus les uns aux autres, que lo fiege de l'administration fuprême raffemble dans un même lieu. Les chiefs accablés d'affaires ne voient rien par euxmêmes, des commis gouvernent l'Etat. Enfin les mesures qu'il faut prendre pour maintenir l'autorité générale, à laquelle tant d'officiers éloignés veulent fe fouftraire ou en impofer, abforde tous les foins publics, il n'en reste plus - pour le bonheur du peuple, à peine en refte-t-il pour fa défense ata befoin; et c'est ainsi qu'un corps trop grand pour fa donftitution, s'affaife et périt écrafé fous fon propre poids.

D'un autre côté, l'Etat doit fe donner une certaine bafe pour avoir de la lolidité, pour résister aux secousses qu'il ne manquera pas d'éprouver et aux efforts qu'il fera contraint de faire pour fe foutenir: car tous les Peuples ont une espèce de force centrifuge, par là

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