il ne peut l'avoir que dans une violente pafi fion , ou dans cette rêverie profonde qui approche des fonges du sommeil. Écoutez Arinide après le départ de Renaud. Ah ! je l'immole à ma ma fureur. Où t'emporte une aveugle erreur ? inanimés, ou pour croire en être entendu , pour le croire au moins confusément & au même degré qu'un bon Comédien croit être le personnage qu'il représente , il faut ; comme lui , s'oublier. Unus enim idemque omnium finis persuasio ; & l'on ne persuade les autres qu’autant qu'on est perfuadé soi-même. La regle constante & invariable, pour l'emploi de ce qu'on appelle l'hypotypose , & la prosopopée est donc l'apparence du délire : hors delà plus de vraisemblance ; & la preuve que celui qui emploie ces mouvemens du style est dans l'illusion, c'est Tomé I. G 1 le geste & le ton qu'il y met. Que l'inimitable Clairon déclame ees vers de Phedre : Que diras-tu, mon pere, à ce récit horrible ? Pacion de Phedre sera la même que fi Minos des maux qu'il ne sent pas ? Mais cependant , mon fils, tu meurs fi je n'arrête Le fer que le cruel tient levé sur ta tête. L'Aarice, en parlant à Pyrrhus , aura l’air & le ton du reproche , comme fi Pyrrhus l'écoutoit: en parlant à son fils, elle aura dans les yeux , & presque dans le geste , la même expression de tendresse & d'effroi que fi elle tenoit cet enfant dans ses bras. On conçoit aisément pourquoi ces mouvemens , fi familiers dans le style dramatique , fe rencontrent fi rarement dans le - récit de l'épopée. Celui qui raconte fë possede ; & tout ce qui ressemble à l'égarement ne peut lui convenir. Mais il y a dans le dramatique un délire tranquille comme un délire passionné ; & la profonde rêverie produit, avec moins de chaleur & de véhémence , la même illufion que le transport. Un berger rêvant à så bergere absente , à l'ombre du hêtre qui leur fervoit d'asyle ; au bord du ruisseau dont le crystal répéta cent fois leurs baisers , sur le même gazon que leurs pas légers fouloient à peine ; & qui après les avoir vus se disputer le prix de la course , les invitoit au doux repos , ce berger environné des témoins de fon amour , leur fait ses plaintes & croit les entendre partager ses regrets, comme il à cru les voir partager fes plaisirs. Tout cela est daris la nature. Voyez ces figures lemployées dans une Idile de Kleist , célebre Poête Allemand que je vais essayer de traduire. ز Ruisseaux , sur les pas de Thémire De lui retracer son image ? L'illusion va quelquefois plus loin : le berger se transporte en idée aux lieux où l'on retient fa bergere ; il lui reproche les plaisirs qu'elle goûte sans lui, fe plaint , l'accuse & lui pardonne s'il peut obtenir son retour. Tel est ce délire de l'ame l'un des plus grands charmes de la Poésie lorsqu'il est peint avec vérité. Il me reste à parler du coloris & de l'harmonie , qualités qui enchantent l'ame & l'oreille, & par lesquelles tout s'embellit. CH A P I T R E V. DU COLORIS OU DES IMAGES. , plus CES l'Est un artifice de la Poésie, de peindre une idée avec des couleurs étrangeres à fon objet , afin de rendre cet objet fenfible s'il ne l'est pas , ou plus sensible s'il ne l'est pas assez , ou sensible par des traits plus doux ou plus forts, plus riants ou plus nobles terribles, ou plus touchants , s'il n'a pas en luimême , ou s'il n'a pas assez. tel ou tel de ces caracteres. (a) Voyons comment & par quels degrés les images , d'abord introduites par le besoin font devenues depuis un ornement de luxe dans le langage. Nos idées primitives peuvent se diviser en deux classes : les unes nous rendent les apparences du dehors , les autres nous inftruisent de ce qui se passe au dedans de nous. Les impref le). Quelle cose che apena con l'intelleto possiamo Le Taffe. confiderare , le recoprirono con un gentilliflimo vello d'allegoriae |